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L'infanterie en gros plan, par CRIXOS
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Hendryk



Inscrit le: 19 Fév 2012
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MessagePosté le: Mer Sep 26, 2012 19:19    Sujet du message: Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:

– Hé bien, il me manque du personnel, toute mon équipe chasse l’Allemand ou les victuailles. Alors, si vous insistez, mon colonel, vous pouvez m’éplucher ces pommes de terre, il y en a à peine 25 kilos, et vous n’êtes pas obligé de tout faire…
– Mais c’est parfait, les tâches manuelles ne sont pas sans grandeur.

Vu que c'est un leitmotiv du récit, la phrase ne devrait-elle pas être "les tâches ménagères ne sont pas sans noblesse"?
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crixos75



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MessagePosté le: Mer Sep 26, 2012 19:50    Sujet du message: divers Répondre en citant

Je suis pas contrariant

- descendons à division, mais je regarde avec Casus pour la décision finale, en fonction du texte qui va suivre et que j'ai presque finis de rédiger.

- désolé le président delafoy ne sera pas au 113ème, les tontons flingueurs c'est comme tout faut pas abuser.

- pour les citations, j'avoue l'avoir regardé pour la 27ème fois il y a plus de six mois, mea culpa.

- pour libellule et éventuellement crouton je les garde en réserve, j'ai une ou deux idées pour eux, mais pas dans cette phase. Je suis aussi un fan de Tillieux, enlevé trop tôt.

A plus
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crixos75



Inscrit le: 26 Mai 2011
Messages: 67

MessagePosté le: Mer Sep 26, 2012 19:54    Sujet du message: et puis aussi Répondre en citant

sauvin veut liquider le général commandant le secteur. pas juste lui piquer ses papiers.

vous me direz, on peut lui expédier quelques tueurs qui lui feront passer le goût des schnitzels, mais bon je trouvais que ça manquait de classe et je voulais de nouveau écrire de bonnes scènes de castagne Smile
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Fantasque



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Localisation: Paris

MessagePosté le: Mer Sep 26, 2012 23:31    Sujet du message: Répondre en citant

Stakhanov était mineur ( à central irmino) et point kolkhozien.

Point intéressant, stakhan en russe veut dire verre (à pied).
Il est mort, couvert d'honneurs et oubliés des jeunes générations (ah, l'ingratitude de la jeunesse....) dans les années soixante-dix.
D'une cirrhose, bien entendu....


F
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Fantasque
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Wil the Coyote



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Localisation: Tournai (Belgique)

MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 07:37    Sujet du message: Répondre en citant

Pour le nom du colon, ne pourrait-il pas etre descendant d'un noble ayant combattu avec les Américains....

Cela ferait un peu flamboyant et qui plus est, avec un nom pareil cela lui permettrait de rendre la vie impossible à ses supérieurs (et attiré la bienveillance du grand Charles Razz ) et mettre au pas tout les Texans Razz

Ce n'est qu'une humble suggestion Very Happy
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folc



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MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 13:54    Sujet du message: Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
Après l'action, l'organisation !

(Euh, Folc : Jussus imperatus ?...)


Vu un peu tard mais il n'est jamais trop tard pour bien faire :
jussus et imperatus sont deux synonymes.
Participes passés masculins singuliers des verbes jubere et imperare qui veulent dire "ordonner".
Jussus arma abicere : ayant reçu l'ordre de jeter les armes.

Donc une citation latine non canonique (pas dans les pages roses ou autres recueils!) insistant sur la force des ordres. Sans doute forgée dans l'instant par celui qui la prononce dans le texte de Crixos Smile
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Folc

"Si l'ost savait ce que fait l'ost, l'ost déferait l'ost"
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crixos75



Inscrit le: 26 Mai 2011
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MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 14:13    Sujet du message: nom du colon Répondre en citant

J'ai un nom en réserve pour le colon. Peut-être un deuxième. J'aviserai tout à
la fin ce sera plus drôle. Bon n'hésitez pas à faire des propositions que je jugerai impartialement et démocratiquement (tout se fera à l'unanimité de ma voix)

Bonne journée
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LaMineur



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Messages: 416

MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 15:40    Sujet du message: Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
Je veux que votre bataillon ait la puissance de feu d’une brigade à lui tout seul.

Vue l'ambiance générale, je me permets de plutôt suggérer "Je veux que chaque section ait la puissance de feu d'un croiseur". Moins précis, mais plus dans l'esprit.
Quant à y ajouter une mention des flingues de concours... Pas vraiment dans le vocabulaire militaire, mais c'est vous qui voyez.
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patzekiller



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MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 18:03    Sujet du message: Re: et puis aussi Répondre en citant

crixos75 a écrit:
sauvin veut liquider le général commandant le secteur. pas juste lui piquer ses papiers.

vous me direz, on peut lui expédier quelques tueurs qui lui feront passer le goût des schnitzels, mais bon je trouvais que ça manquait de classe et je voulais de nouveau écrire de bonnes scènes de castagne Smile


c'est comme pour valence... pour faire quoi ensuite?
decapiter une division ou un CA c'est bien, mais si on ne mets pas la ch'tite offensive dans le secteur qui va avec, ça ne sert pas à grand chose, d'autant que sauvin arrive avec cette idée parce qu'il connait d'autres éléments.

alors ton idée dans le secteur c'est quoi?

PS pour valence, connaissant un peu le secteur, j'ai fait passer à franck un schema montrant quelle pouvait etre la manoeuvre au niveau du CA qui necessitait de bloquer ton croisement precisement, mais ici, je nage un peu dans le brouillard.
j'invite les locaux aussi à nous faire part d'une idée de manoeuvre (div ou CA) qui necessiterait de decapiter une division (ou plus gros) dans ce secteur
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 18:10    Sujet du message: Re: et puis aussi Répondre en citant

patzekiller a écrit:
c'est comme pour valence... pour faire quoi ensuite?
decapiter une division ou un CA c'est bien, mais si on ne mets pas la ch'tite offensive dans le secteur qui va avec, ça ne sert pas à grand chose, d'autant que sauvin arrive avec cette idée parce qu'il connait d'autres éléments.


Ce n'est pas purement l'idée de Crixos.
En fait, on arrive fin octobre 44, faut être à la maison pour Noël, donc c'est carrément le Big Push qui va se déclencher. L'opération du 113e est l'une des interventions destinées à désorganiser la défense allemande sur tout le front, de la Suisse à la Mer du Nord.
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patzekiller



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MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 19:09    Sujet du message: Répondre en citant

ok, donc à ce moment là l'entrée en allemagne s'envisage par une poussée generalisée pour chercher la faille.
et on sait déjà où elle sera cette faille? Laughing Wink
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crixos75



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MessagePosté le: Jeu Sep 27, 2012 22:04    Sujet du message: divers Répondre en citant

Une de mes difficultés c'est que j'essaie d'aborder le combat tout à ras du sol. Alors je suis très en avance sur la chronologie de travail. c'est pour ça qu'il y a autant de blancs de noms et de lieux dans le texte. les évènements sont importants, localisation etc ensuite. j'essaie plus de rendre l'ambiance du combat et de la tactique que de faire de la stratégie. cette opération est un préalable à une offensive de plus grande envergure. sauvin le sait mais ne le dit pas au cas ou des hommes seraient capturés. on ne peut trahir ce qu'on ignore.
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De la Rochejacquelein



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MessagePosté le: Dim Sep 30, 2012 13:21    Sujet du message: Répondre en citant

Applause toujours de très beau textes
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mer Oct 03, 2012 00:10    Sujet du message: Répondre en citant

Je précise que quelques modifications ont été apportées aux textes précédents dans nos archives (nous tenons compte des remarques !).

Avant la tempête
Au PC du 113e, le colonel de *** discutait avec Sauvin devant une collation légère – du thé et une tarte Tatin, quand le radio vint les voir. Il portait un message d’une ligne.
– Bordel de merde, s’exclama De ***. C’est Guillotine. Ils transmettent : « Partons à la pêche au hareng » !
– Merde, ils attaquent, c’est encore tôt, j’espère que ça ne l’est pas trop. Bon, vous m’excuserez, j’ai des messages à envoyer, du genre « Feu ! » ou « Allez-y ! »
Il fila ventre à terre, en emportant la soucoupe de tarte. On ne s’attache jamais assez au ravitaillement.
………
Pendant ce temps, les hommes des compagnies du 2e bataillon se dirigeaient vers leurs positions de combat. Il fallait concilier rapidité et discrétion. La compagnie d’appui devait être la première en place. Elle serait suivie par la compagnie chargée de bloquer la voie de fuite ou de renforts. Les deux compagnies chargées de l’assaut seraient les dernières à se mettre en position. C’était aussi celles qui avaient le terrain le plus dangereux à traverser, particulièrement à cause des étendues de pâturages entre les haies. Quant au commandant ***, après avoir annoncé par radio que l’attaque commençait (deux fois), il avait suivi la compagnie d’appui.
Le signal avait été donné vers neuf heures. Les hommes du 113e réussirent le tour de force d’être en place pour le déjeuner.
L’appui était échelonné sur deux lignes. Les mortiers à l’arrière, couverts par deux sections qui portaient aussi les obus. En vue de l’objectif, les tireurs au fusil à lunette et les fusils Boys, tous soigneusement camouflés, accompagnés du commandant. Le Niçois était là aussi, avec une section de sapeurs d’assaut qui portaient tous une mitraillette, des grenades et un bangalore. Comme toujours en pareille situation, l’ordre était d’attendre le signal pour commencer le tir. Mais il y avait toujours une porte de sortie. Tous les éléments d’appui attendaient un tel ordre, ou le premier coup de feu.
La compagnie chargée de fermer la porte dans les deux sens installa une section en bouchon dans chaque direction. Une section restait en réserve et la dernière assurait le chemin de fuite. Les hommes préparèrent des arbres, entaille et plastic, prêts à barrer la route en cas de besoin. Ils creusèrent des trous individuels et les plus proches de la route furent recouverts d’une claie de camouflage. Chaque embuscade était installée en L, la petite barre concentrant des explosifs, des mines et des tubes antichar, la grande regroupant les armes individuelles et collectives. Pour garder la route libre aussi longtemps que possible, des corde attachées à une tellerminen furent tirées en travers de la route et camouflées avec de la terre. De l’autre côté, un fantassin dans son trou était chargé de tirer la corde pour mettre la mine en place en cas de besoin et après de bien se planquer.
Les deux compagnies d’assaut devaient traverser plus d’un km de terrain assez dégagé avant d’arriver sur ses bases de départ. Les deux capitaines avaient regroupé toutes les mitraillettes de leur compagnie en un élément d’assaut à forte puissance de feu. Le reste des hommes, équipés de MAS 40, et les FM formaient un élément d’appui qui avançait en tête, vu que leurs armes avaient une plus longue portée. Dans chaque compagnie, c’était au maximum une demi-section qui se déplaçait, pendant qu’un élément d’appui était prêt à ouvrir le feu. Cela ressemblait à un ballet compliqué d’hommes couverts de poussière et au casque orné de feuilles qui progressaient à quatre pattes dans les creux de terrain en évitant les gestes brusques.
Côté allemand, c’était l’heure de la soupe, ce qui explique peut-être que les éléments d’assaut furent repérés relativement tard. Mais si tard que ce fût, il leur restait pas loin de 500 m à parcourir.
Il semble que c’est une espèce de mouvement permanent dans le feuillage des haies qui attira l’attention. Un mouvement trop régulier et répétitif qui ne correspondait pas au vent. Soupçonneux ? Tatillon ? L’officier de garde envoya une patrouille de quatre hommes pendant que le reste de l’effectif vaquait à ses occupations, mangeait ou digérait. C’était bien le calme avant la tempête.
Coupant à travers champs, la patrouille mit au plus cinq minutes à arriver dans la zone où les éléments de tête des deux compagnies d’assaut ne faisaient plus un geste, espérant peut-être n’être pas repérés, ou capturer les patrouilleurs sans donner l’alerte. Espoir déçu, l’homme de pointe devait avoir l’œil perçant car au milieu du pré, encore éloigné de presque 30 mètres de la haie où se trouvaient tapis un FM et sept MAS 40, il s’arrêta. Lentement il descendit à genoux, son arme braquée vers l’avant. le chef de patrouille monta à sa hauteur pendant que les deux autres assuraient les flancs (visiblement la formation du fantassin allemand restait bonne). Les deux hommes eurent un conciliabule. Le chef de patrouille prit une paire de jumelles et les porta à ses yeux. Ce fut son dernier geste. Dans la haie, les huit armes ouvrirent le feu et les quatre hommes s’écroulèrent. À moins de 40 mètres, ils n’avaient pas une chance.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mer Oct 03, 2012 00:11    Sujet du message: Répondre en citant

Les chiens de la guerre
Le bruit des coups de feu parvenait à peine aux oreilles des hommes de garde que sous leurs yeux, toutes les haies paraissaient cracher des hommes. Des lignes de soldats fonçaient d’un couvert à un autre. À certains endroits, ce même couvert crachait des flammes. Si la surprise les laissa un instant ébahis, les Allemands réagirent vite et en soldats. Foin des gamelles, ils se ruèrent à leur poste. Les officiers supérieurs qui prenaient le café sur la terrasse se mirent à l’abri dans le bâtiment, laissant alcools et cigare sur place.
Quinze secondes après les premiers coups de feu, les premiers obus de mortier tombaient sur l’objectif. Au même moment, le soldat ***, chargé de cette tâche parce qu’il travaillait aux PTT dans le civil, coupa tranquillement les fils du téléphone.
La consigne pour les mortiers était de tirer tant qu’on ne leur demandait pas d’arrêter. Les tubes employaient principalement des percutants. Les communs et les écuries d’une part, le parc véhicules, juste à côté, d’autre part, étaient la première cible. Dès les premiers tirs de réglage, un Sdkfz Flak reçut un obus sur son… absence de toit (a posteriori, le principal coup de chance de la bataille), puis deux séries de six obus d’affilée frappèrent les bâtiments. Les tuiles jaillissaient sous les explosions. Un obus creva le toit des communs et explosa au rez-de-chaussée. Le souffle fit jaillir de leur châssis portes, volets et fenêtres. Les murs des communs, vieilles constructions en pierre de taille, résistaient bien aux coups, mais toute la charpente succomba. On devait relever plus de quarante cadavres sous les décombres, soldats au repos qui n’avaient pas pu fuir à temps.
L’effet de surprise avait permis aux compagnies d’assaut de gagner une bonne centaine de mètres et de se regrouper dans l’avant-dernière haie précédant le dispositif ennemi. Maintenant, elles devaient faire face à un tir nourri de leurs adversaires. Il y avait surtout plusieurs MG 42 sur affût lafette dont les tireurs pratiquaient un tir rasant redoutable en déplaçant leur feu de droite à gauche. Ce tir forçait les hommes à rechercher le couvert. Plusieurs et FM et fusiliers tentaient de le contrebattre, mais les pièces étaient à la fois camouflées et protégées par des sacs de sable et des rondins.
Les mortiers, ayant fini de démolir les communs et les écuries, se mirent alors à s’acharner sur les deux haies formant les lignes de défense du sud. Au début les percutants frappaient les arbres et explosaient contre les troncs, propulsant des éclats de bois meurtriers tout autour. Après un peu de déboisage, les charges se mirent à exploser au sol, avec un effet (encore) plus efficace. Malheureusement, tapis au fond de leur trou de fusilier ou dans leur tranchée, les soldats allemands restaient à l’abri d’un coup au but (parfois le règlement a du bon). Le père Boulle décida alors de faire tirer des obus avec retard par trois pièces, pendant que les trois autres lâcheraient dix obus fumigènes sur les lignes ennemies.
Les fusils Boys s’étaient concentrés au début sur les Sdkfz. Il fallait éviter que ces engins puissent être engagés trop vite. Les tireurs au fusil à lunette faisaient de même et les landsers comprirent vite que s’approcher desdits engins était dangereux. Mais l’élément d’appui avancé devait aussi engager la ligne de défense nord, qui comportait elle aussi des nids de mitrailleuses. Même sans l’appui des armes portées, la puissance de feu des Allemands restait élevée et le commandant commençait à craindre le pat. Il fallait trouver le moyen de faire basculer la situation.
À gauche du dispositif des compagnies d’assaut, il y avait un bout de haie transversale. Profitant du barrage fumigène, un slt, chef de section d’assaut, décida de profiter de ce couvert pour rejoindre la première ligne de défense allemande. Il en informa son supérieur, lui demandant de faire cesser le feu de ce côté aux premières explosions de grenades.
Sur la droite, la deuxième compagnie était clouée au sol. Le second Sdkfz Flak avait fait mouvement malgré les tireurs d’élite et les Boys et s’était mis en position. Il tirait de courtes rafales d’obus de 20 mm. Ceux qui étaient frappés tombaient coupés en deux, membres ou tête emportés. Heureusement le camouflage limitait les dégâts.
A gauche, la section d’assaut marcha rapidement par la transversale. Les écharpes de fumée des obus de mortier commençaient à se dissiper. Les hommes de tête arrivés à portée lancèrent leurs grenades. Dès l’explosion, ils foncèrent à travers la haie pour tomber du côté allemand sur la première ligne. Bien sûr, ils se retrouvèrent en vue de la deuxième ligne, mais celle-ci retint son tir, sans doute pour éviter d’atteindre leur camarades. Une fois dans la position allemande, une équipe partit vers la gauche, le reste se dirigea vers la droite. À la Thompson et à la grenade, les voltigeurs nettoyèrent le terrain sans scrupules. Ce qui ne levait pas les bras se voyait gratifié d’une rafale de 45 en plein corps. Les hommes marchaient en binômes, l’un en tête, l’autre le couvrant. Dès que le premier s’arrêtait, peu importe la raison, le suivant le dégageait ou prenait la tête. Pris de flanc, mitraillés et grenadés, les défenseurs de la première ligne commencèrent à fléchir. Dès qu’il eut nettoyé, au prix de pertes légères, une bonne centaine de mètres, le slt *** fit prévenir son commandant par radio. Celui-ci ordonna l’assaut au sifflet et toute sa compagnie avança vers la ligne allemande, s’y installa et commença à harceler la deuxième ligne.
Comme l’imbrication devenait étroite, les mortiers cessèrent le tir. Les tireurs d’élite et les Boys durent redoubler d’agressivité pour compenser.
La section du slt ***, ayant nettoyé tout son secteur, hésitait à poursuivre, car elle risquait de tomber à la fois dans le champ de tir des défenseurs de l’aile gauche allemande et dans celui du Sdkfz Flak. Deux équipes FM vinrent se mettre en position pour prendre en enfilade une partie de la position allemande. A ce moment, le Sdkfz Flak se mit en marche pour contrer l’assaut de la compagnie de gauche. Erreur de communication ou mauvaise initiative. D’un côté, le monstre cracheur de flammes était plutôt intimidant, mais de l’autre…
« Vas-y, rapproche toi mon chéri, plus près, encore plus près ! Vous êtes parés, les gars ? » la question du sgt-chef *** était un simple avertissement, bien sûr que les quatre porteurs de bazooka de l’embuscade étaient parés !
La première roquette passa sous le nez du véhicule pour aller exploser contre la guérite de l’entrée. Le conducteur eut le réflexe de braquer à fond. Malheureusement pour lui ce fut vers la droite et il présenta son arrière aux autres tireurs. Ce que voyant, deux d’entre eux s’empressèrent d’y envoyer un suppositoire. L’un ricocha contre le flanc et explosa en l’air, l’autre passa à travers la porte arrière et explosa à l’intérieur, dispersant dans l’engin une foule de fragments métalliques meurtriers. Ses passagers furent sûrement tués à ce moment, y compris le conducteur, mais le véhicule continua de rouler encore quelques instants avant de caler dans un creux de terrain. Dès ce moment, la compagnie de droite put avancer à son tour, pendant que le reste de la première ligne allemande refluait. Cette fois le pat s’éloignait, le 113e prenait l’avantage.
Au premier abord le changement pouvait sembler limité, d’autant plus que les mortiers, bien obligés, avaient cessé le tir. Mais la deuxième et dernière ligne de défense allemande était maintenant en vue directe des tireurs au fusil à lunette et des tireurs au fusil Boys. Les tireurs au fusil à lunette se concentraient comme d’habitude sur les cadres et tout ce qui portait une radio. Les tireurs au fusil lourd s’étaient acharnés sur les moteurs, les optiques et l’armement de tout ce qui roulait, histoire de s’assurer que le combat se jouerait entre gens de pied. Maintenant ils poursuivaient de leur vindicte les mitrailleuses, qui se trouvaient mal protégées sur l’arrière. Et même si les Allemands comprirent assez vite, quand une MG 42 sur affût est déplacée au pas de course par ses servants (deux devant et un derrière), au moins elle ne tire pas. L’une d’elle s’installa derrière le coin des écuries. Les quatre Boys cherchèrent les flammes de départ de coup, puis reportèrent leur point de visée dans le mur à la même hauteur et commencèrent à tirer (les murs des écuries n’étaient pas en pierre de taille !). À la troisième salve de 13,9 mm, ces foreuses d’un nouveau style avaient percé le mur et un de leur projectiles frappa la boîte de culasse de l’arme, laissant le tireur sonné.
Tapis dans les trous de la première ligne, certains ayant disposé des cadavres comme couverture, les fusiliers et les tireurs au FM des deux compagnies d’assaut engageaient eux aussi la seconde ligne. Pendant ce temps, les voltigeurs d’assaut équipés de mitraillette prenaient un temps pour se réorganiser. Ensuite ils chercheraient une nouvelle transversale pour aborder le domaine lui-même.
Aux deux extrémités de la ligne allemande, les soldats du 113e devaient faire face à une défense appuyée sur ce qui restait des dépendances. De chaque côté, l’effectif d’au moins une section s’y était retranché.
Les bâtiments étaient disposés en C inversé, les communs au sud-est et les écuries au nord-ouest ; entre eux, une vaste cour sur l’arrière du manoir. Devant celui-ci, à l’est, s’étendait un fort joli jardin bien dégagé. Une section de fusiliers épaulée par quatre FM en barrait la sortie et plusieurs cadavres et blessés garantissaient la difficulté d’une évacuation de ce côté.
À la compagnie de droite, le capitaine fit mettre ses armes en batterie et commanda un tir à tuer à ses fusiliers sur tout ce qui montrait son nez. À moins de deux cent mètres, ce n’était pas si difficile. Ses voltigeurs en profitèrent pour se rapprocher avec précautions. Comme ils avançaient carrément dans le champ de tir de leur camarade, ils rampaient très près du sol. Leurs copains visaient deux doigts au-dessus des fessiers et croisaient les huit autres pour ne pas leur plomber le cul.
Par contre la compagnie de gauche marquait le pas. La dispersion plus large de ses adversaires, qui usaient fort bien des couverts et camouflages naturels, limitait l’efficacité de ses armes. Tant qu’elle ne pourrait pas les accrocher au corps à corps, le combat resterait égal.
Au nord, le Niçois attendait une bonne opportunité. Le repli de la défense dans les écuries la lui offrit. Il prit les mêmes dispositions d’appui-feu que son camarade du sud et s’approcha du champ de mines, où il créa une brèche à cops de bangalores. Vu du ciel, on aurait pu croire qu’une cravache géante venait de frapper le sol, y créant un sillon profond. Il dut quand même ensuite laisser ses hommes reposer cinq minutes. Par sympathie, beaucoup de mines avait sauté avec les bangalores, dont au moins trois tellerminen. Les sapeurs en étaient encore un peu abrutis.
Ils finissaient leur petite pause que les hommes de l’aile droite abordaient les communs. Avec toute la finesse nécessaire ils lancèrent des grenades par paquets par-dessus le mur en tirant des rafales de Thompson par toutes les ouvertures, y compris les plus petites meurtrières. La vision d’un canon américain fut souvent la dernière de plusieurs landsers avant qu’une rafale de .45 leur fasse sauter le crâne. Ceux qui ne portaient pas de casque projetaient des morceaux partout. Ceux qui portaient leur sthalhelm étaient plus propres, mais l’impact des balles contre l’acier produisait un tintement révélateur.
Après avoir nettoyé du mieux qu’ils pouvaient de l’extérieur, les hommes du 113e plongèrent à l’intérieur par les fenêtres et les portes. Certains avaient basculé leur mitraillette dans le dos pour prendre en main leur Colt 1911 A1 (plus maniable). Dans les communs la lutte fut terrible. Les combattants se fusillaient et se grenadaient à cinq mètres de distance. Les ruines ne favorisaient pas la cohésion. Plusieurs Français ne durent la vie qu’au fait que leurs copains employaient des grenades offensives et non défensives, qui les auraient éparpillés contre les murs. Les hommes du 113e emportèrent la décision grâce à leur entraînement plus poussé et à leur armement plus efficace dans ce genre de combat, où certains en vinrent littéralement aux mains, comme le slt ***, qui finit par assommer un adversaire en lui cognant la tête sur un mur.
Le soldat *** abattit deux hommes d’affilée à coups de Thompson, vidant son chargeur. Au lieu de recharger, il lâcha sa mitraillette et sortit son Colt : bien lui en prit, car surgit un troisième Allemand. Il lui vida le chargeur dans le corps avant de filer. Il y avait des armes qui traînaient dans tous les coins, il récupèrerait sa mitraillette plus tard.
Les survivants allemands des communs s’enfuirent vers le manoir lui-même. Plusieurs passèrent en courant à travers les fenêtres plutôt que la porte. Ceux qui tenaient encore la ligne de haie face à la compagnie de gauche se retrouvèrent pris de flanc. Leur position devenait peu à peu intenable. Déjà les Français leur criaient de se rendre avant d’être tués. Les appels à la reddition et les insultes qui la refusaient se croisaient et côtoyaient les balles et les grenades qui continuaient de voler. Les Allemands hésitaient encore quand quatre roquettes de bazooka vinrent frapper différents points de leur position. Les cadres et les plus hargneux, une minorité, voyant le reste des survivants mettre bas les armes, piquèrent un sprint vers le manoir. Pas un n’y arriva. Ils furent tous fauchés dans leur course, blessés ou tués.
Pendant que les deux compagnies d’assaut réorganisaient leurs positions, portaient secours aux blessés et regroupaient les prisonniers, le Niçois s’occupait des écuries. C’était un esthète et un connaisseur. Confiant dans la solidité de la construction du bâtiment, il fit glisser deux bangalores par les rigoles d’évacuation d’urine qui conduisaient des écuries à la fosse à purin. Puis un des sapeurs attendit que le reste se mit à couvert avant d’allumer le dispositif retard et de filer. Le plus proche couvert étant la fosse, il plongea dedans. La charge d’explosifs provoqua une détonation terrifiante. Les dernières vitres intactes dans le coin y succombèrent. Le sapeur sortit de la fosse, gluant et puant mais à peu près indemne – il dut tout de même être ramené à l’arrière, il lui faudrait un moment pour recouvrer ses esprits. Les autres sapeurs pénétrèrent dans les écuries. De l’extérieur, les murs paraissaient encore plus ou moins intacts, mais à l’intérieur c’était une autre musique. Comme sous l’effet d’un gigantesque coup de balai, les cloisons des stalles, les poutres de soutènement des planchers du grenier, tout avait été soufflé. À l’intérieur, c’était un tas de bois, de fourrage et de cadavres. Plusieurs soldats, découvrant les défenseurs littéralement éparpillés, en vomirent leur repas. L’un d’eux, qui aimait les romans feuilletons, dit « C’est du Jack l’Eventreur à l’échelle industrielle ! » (il est végétarien depuis).
Mais cette fois, l’avantage était définitivement aux Français. Plus d’une heure de combats furieux les avait rendus maîtres des dépendances et amenés à distance d’assaut du manoir. Malheureusement, plusieurs dizaines de soldats allemands avaient réussi à s’y replier (où y étaient depuis le début) et le mettaient en défense.
Les deux capitaines des compagnies d’assaut et le Niçois remanièrent leur dispositif. La consigne devenait : « Ne tirez pas forcément sur tout ce qui bouge ». Il fallait tenter de prendre les officiers vivants. Pour le moment, la compagnie bouchon, au nord, ne signalait rien, tant mieux. Le commandant *** se joignit à ce conciliabule, accompagné de son radio et d’un homme d’escorte.
– Bon boulot les gars.
– Merci mon commandant, qu’est-ce qu’on fait maintenant ?
– On va leur proposer de se rendre, sinon on prendra le manoir d’assaut.
– Vous pensez qu’ils accepteront ?
– Je n’en sais rien et je m’en fous. Si oui tant mieux pour eux, sinon tant pis. Pendant que nous négocions, les sapeurs vont préparer une charge contre le mur nord-ouest, il y a peu de fenêtres par où on pourrait leur tirer dessus. Bourrez la charge avec ce que vous voudrez, mais je ne vais pas entrer là-dedans par la porte, il doit y avoir vingt fusils braqués dessus.
– Qui allons-nous envoyer pour négocier ?
– Personne, c’est eux qui sortent. Aucun d’entre nous ne se mettra dans leur ligne de tir, même avec un drapeau blanc. On va gueuler bien fort, ils entendront !
A force de hurlements, le slt *** qui tenait les communs réussit à prendre langue avec ceux d’en face. Il leur proposa d’envoyer un plénipotentiaire dans les 30 minutes pour négocier une reddition. D’ici là, les Français cesseraient le feu tant que les Allemands resteraient sagement dans le manoir.
La demi-heure de délai fut mise à profit par tout le monde pour prendre un peu de repos et boire un coup. Le soldat ***, complètement claqué, fit une petite sieste, car il avait trouvé un oreiller ni trop dur ni trop mou. Le fait que l’oreiller soit un cadavre ne l’empêcha pas de dormir.
L’ultimatum arrivait à expiration et le slt *** comptait les secondes quand un drapeau blanc apparut à la porte du manoir. Comme il n’y avait pas de réaction, le drapeau se mit à avancer et son porteur se montra. Il était suivit par deux autres hommes brandissant des mouchoirs blancs. Abrité au coin des communs (la confiance régnait), le capitaine *** leur fit signe d’approcher. Derrière, attendaient le commandant, le Niçois et le capitaine ***. Le soldat ***, étudiant en lettres en rupture d’université, devait tenir le procès-verbal. C’était un colonel qui menait la délégation. Il était accompagné d’un lieutenant-colonel et d’un aumônier. Les participants s’assirent sur des sièges improvisés, caisses, caisson de munition ou tonneau et la discussion commença – l’échange fut assez facile, car les Français, depuis le temps, avaient acquis quelques notions d’allemand et les Allemands, visiblement en poste en France depuis pas mal de temps, s’exprimaient à peu près en français.
– Que voulez-vous ? demanda l’Oberst.
– Votre reddition.
– À quelles conditions ?
– Prisonniers de guerre, affaires personnelles préservées, soins au blessés, le classique.
– Notre général refuse de se rendre, un général allemand ne se rend pas.
– Il y a des précédents, vous savez. Nous lui laissons une heure pour réfléchir.
– Nous avons appelé des renforts, vous devriez fuir avant d’être détruits par eux.
– Merci de l’information, au lieu d’une heure vous aurez trente minutes. Pendant ce temps, vous aurez la permission d’évacuer tout le personnel non-combattant, ainsi que tous les blessés qui en feront la demande. Bien sûr ils seront contrôlés à la sortie.
– En cas de reddition, vous nous laisserez nos armes personnelles ?
– Non.
– Nous sommes des soldats allemands et des hommes d’honneur.
– Il y a des poissons volants aussi. Ils ne sont pas la majorité de l’espèce.
– Et qui nous dit que nous pouvons avoir confiance en VOUS ?
– Peut-être le fait que NOUS ne tuons pas nos prisonniers.
– Aber.
– RUHE. C’est mon offre. La trêve est prolongée de 45 minutes à partir de maintenant. Les blessés peuvent sortir, ils seront considérés comme protégés par la Croix-Rouge. Vous pourrez même voir comment vont ceux que nous avons déjà entre nos mains. Les brancardiers pourront retourner au manoir s’ils le souhaitent. Vous pouvez disposer.
Livide, le colonel et le lieutenant-colonel se levèrent et repartirent vers le manoir. L’aumônier fit un petit détour pour voir la zone de regroupement des blessés, avant de repartir lui aussi.
– Vous n’y êtes pas allé avec le dos de la cuillère, commandant.
– Eh quoi, je devais prendre des gants ?
– Un peu de diplomatie n’aurait pas fait de mal.
– J’ai diplomaté autant que je pouvais. Qu’est-ce qu’ils croyaient, cette bande de galonnés. C’est dans leur camp que tout le monde les écoute au garde-à-vous et dit amen au moindre de leurs propos.
– Oui, mais..
– Vous étiez en Grèce, non ?
– Oui.
– Alors voilà.
La délégation était de retour dans son castel, un rien décati depuis peu. À peine un quart d’heure plus tard, une file de porteurs de brancards en sortit. Elle était accompagnée de l’aumônier et de l’Oberst. C’était apparemment des blessés graves. Ils étaient accompagnés par une douzaine de souris grises, dont quelques-unes pleuraient. Dès que les blessés arrivaient derrière le couvert des communs des hommes du 113e venaient relever les porteurs pour emporter les blessés. Les porteurs allemands attendirent qu’on leur rende leurs brancards – l’équipe médicale leur en fournit même de rab – avant de retourner chercher d’autres blessés. L’aumônier accompagnait les blessés et l’Oberst contrôlait le mouvement. Après le troisième voyage, les porteurs ne ressortirent pas. L’Oberst alla s’adresser au commandant ***.
– Alors ? demanda celui-ci.
– Nous ne nous rendrons pas. Nous nous battrons.
– Dommage.
– Pourquoi ?
– Parce que vous allez perdre et que nous allons gagner. Je veux dire, la guerre. Votre mort n’y changera rien.
Le colonel resta un instant silencieux, avant de répondre : « Depuis 1939, combien de combats perdus d’avance avez-vous livrés, commandant ? »
– Touché, colonel. La trêve expire dans 8 minutes. J’espère que vous en sortirez vivant.
Sans attendre les huit minutes, le commandant et ses officiers planifièrent la poursuite de l’assaut. Un élément d’assaut ferait diversion côté façade, avec de nombreux lanceurs de grenade ; l’essentiel était qu’ils occupent les défenseurs. Les sapeurs feraient sauter la façade nord (presque aveugle et couverte par les fusils à lunette) pour permettre à l’autre élément d’assaut d’y pénétrer. La moitié de ces attaquants seraient équipés d’une Thompson, les autres ne porteraient que leur Colt et une bonne matraque en caoutchouc plombé. À la place des grenades offensives habituelles, ils utiliseraient des Gammon chargées à 40 grammes de plastic. L’effet de souffle devait sonner les personnes retranchées dans les pièces.
Les préparatifs se terminaient quand le médecin de corps vint voir le commandant. Deux blessés allemands avaient tenté de filer au pas de course, leurs pansements c’était du chiqué. Ils avaient été rattrapés par des infirmiers originaires du Sud-Ouest qui les avaient plaqués assez rudement. C’était les numéros 2 et 7, le commandant fut ravi d’apprendre qu’ils étaient à peu près intacts.
Tous les cadres rejoignirent leur poste, la trêve expirait dans moins de deux minutes. Le bruit d’une explosion prit tout le monde par surprise. Le commandant *** craignit un instant que les sapeurs du Niçois aient fait une erreur, mais son radio l’informa que la compagnie bouchon venait d’engager un convoi léger ennemi (par léger, il entendait sans chars d’assaut). Il fallut envoyer de ce côté une cinquantaine d’hommes ; pour parer à toute éventualité, on y ajouta les six bazookas.
L’ultimatum ayant expiré, les cadres rejoignirent leurs hommes, prêts pour le dernier coup de collier, sans se soucier des bruits de combat qui s’amplifiaient du côté nord. Pendant que l’élément de diversion attaquait la façade, les sapeurs, couverts par les tirs de l’élément de couverture, installaient soigneusement leurs charges en deux endroits du mur nord. Ils avaient bourré de plastic tous les interstices sur une surface de 2 mètres carrés. Puis ils avaient empilés des sacs de sable, récupérés sur les fortifications de campagne allemandes, pour bourrer la charge. Planqués derrière les écuries, les voltigeurs d’assaut attendaient que tout saute.
Le Niçois fit signe au sapeur qui tenait l’exploseur. Celui-ci donna un tour de manette et il y eut un bruit terrifiant suivi d’un souffle puisant. Un nuage de sable s’éleva, dans la façade, il y avait deux gros trous. L’élément de couverture cessa le feu et les voltigeurs foncèrent dans les trous. Les charges avaient éventré deux pièces. Les Allemands qui s’y trouvaient étaient hors d’état de réagir. Ceux qui bougeaient encore furent promptement capturés et évacués.
Puis les voltigeurs sortirent dans le couloir et commencèrent à nettoyer le bâtiment. L’ai y était obscurci par une sorte de fumée de sable et de poussière. Le soleil y jetait des reflets jaunes et les hommes y apparaissaient comme des silhouettes noires. Le rez-de-chaussée fut pris pièce par pièce. Une fois la porte était ouverte (ou volatilisée) un soldat jetait une Gammon en visant le plafond. Dès qu’elle avait explosé, cinq ou six de ses camarades se ruaient dans la pièce, un ou deux portant une Thompson, les autres pistolet et à la matraque. Dès que les occupants étaient maîtrisés, ils étaient collés au mur, assis les mains sur la tête et un binôme restait pour les surveiller.
La plupart des meubles avaient été déplacés vers les fenêtres pour renforcer les couverts, mais le caporal *** se cogna les tibias dans une table basse et chuta lourdement. Un allemand braqua son arme vers lui, mais le binôme du caporal lui vida son colt dans le corps, ne s’arrêtant que quand son arme finit culasse en arrière – il avait tiré les sept coups du chargeur en moins de trois secondes. Il devait raconter : « J’ai juste vu une silhouette noire avec une arme et j’ai tiré jusqu’à ce qu’elle soit par terre pour qu’elle ne tue pas mon camarade. Ça a duré très longtemps, après j’ai dû reprendre mes esprits pour me forcer à lever le doigt de la détente et recharger ». La brutalité de son tir avait tellement choqué les deux autres Allemands de la pièce qu’ils déposèrent les armes sans mot dire.
En traversant le hall d’entrée vers l’aile sud-est, le soldat *** prit un coup de fusil venu du palier du premier étage. Touché à la jambe, il rampa pour se mettre à couvert. Le jet de sang qui sortait de sa cuisse gauche lui faisant craindre une hémorragie artérielle, il sortit sa cravate et se fit un garrot. Son binôme vint le ramasser, protégé par le tir d’une paire de Thompson qui réduisit la rampe d’escalier et du palier en petit bois. Il prit son camarade sur ses épaules et l’évacua au plus vite vers le poste de secours, lui sauvant la vie… et la jambe.
En cinq minutes de violence explosive, le rez-de-chaussée avait été pris. Mais une partie des Allemands s’étaient repliés au premier étage et à la cave.
Après une pause de quelques minutes, histoire de bien voir où on en était, on décida de commencer par l’étage. Une équipe de quatre hommes équipée de Thompson attaqua l’escalier, débouchant sur le palier en arrosant sur 360°. Bien lui en prit, un fusilier ennemi audacieux, embusqué à plat ventre, reçut trois balles de .45 (dont une dans le crâne) avant d’avoir pu tirer. Une fois maîtres du palier, les quatre furent rejoints par deux autres équipes. Deux porteurs de Thompson surveilleraient les corridors et les équipes prendraient une pièce après l’autre. Dans l’aile sud, le soldat *** fut tué lors de la prise de la salle de bain. Un Allemand caché dans la baignoire, qui l’avait protégé des effets de la Gammon, lui lâcha une rafale en plein corps juste avant d’être abattu à coups de colt par le binôme du soldat mort. Dans l’aile nord, ce fut plus facile, on y captura sans grande résistance plusieurs officiers généraux, reconnaissables à la bande rouge de leur pantalon.
L’étage liquidé, il restait la cave, ou plutôt les caves. Là, le problème, c’était l’absence de lumière. La cage d’escalier et les soupiraux (dont plusieurs avaient été barricadés) ne donnaient qu’un éclairage diffus. L’assaut avait commencé depuis plus de vingt minutes. Une lampe électrique faisait partie du paquetage des cadres. On fit passer toutes celles des deux compagnies des soldats commencèrent à descendre dans la pénombre, une lampe dans une main et le pistolet dans l’autre (après, tout de même, avoir expédié une Gammon en bas des marches, histoire de s’annoncer poliment). Pendant ce temps, deux germanophones lançaient des appels à la reddition des survivants.
C’est dans le cellier, parmi les futailles de vin, qu’eut lieu la dernière résistance allemande. Les Allemands visaient les lampes que les Français tenaient à bout de bras. Les Français vidaient leurs chargeurs au jugé en visant les flammes de départ des coups. Les flashs des détonations illuminaient brièvement les voutes. Après plusieurs échanges de coups de feu, le silence retomba, les Français ayant éteint leurs lampes-cibles. Deux d’entre eux avaient été assez grièvement blessés, l’un à la main et l’autre au bras. Le dernier descendu s’appuyait au chambranle d’une porte au bas de l’escalier, quand il s’avisa de la présence d’un commutateur électrique. Il pensa : « Ce serait trop simple, trop con ! C’est pas possible ! J’essaie ». Il tourna le commutateur et la lumière inonda les caves. Tous les présents clignèrent des yeux. Il n’y avait là que quatre Allemands, deux tués, un blessé et un indemne – les deux vivants se rendirent sans faire d’histoires comme s’ils n’avaient attendu que la lumière pour cela. Voyant du blanc ruisseler d’une futaille percée sur un cadavre allemand, le soldat ***, un fin gourmet, commenta : « De la tête de cochon et du vin blanc d’Alsace, quelle faute de goût ! »
Le décompte des Allemands morts ou vivants posait problème. Pour régler la chose, le commandant *** fit embarquer tout ce qui pouvait marcher, on ferait le tri plus tard. Une équipe se chargea de contrôler tous les cadavres du manoir pour vérifier si une partie de leur gibier n’y était pas resté. Le colonel négociateur y était resté. Tous les pantalons à bande rouge furent soigneusement regroupés. Il y avait deux cadavres porteurs de tels pantalons. Comme la tête manquait à l’un et que l’autre ne disait rien à personne on les dépouilla de leurs plaques d’identité et de leurs portefeuilles (de leurs armes personnelles également, bien sûr).
Pendant ce temps, le commandant *** s’inquiétait aussi de la compagnie-bouchon, comment s’en sortait-elle. Il prit le contact radio. Son subordonné l’informa fort calmement qu’une unité allemande estimée à un bataillon tentait traverser son secteur. La tentative avait échoué pour le moment. Ah, rectification au message précédent : il y avait des blindés chenillés (sinon des chars), mais on n’avait pas jugé utile de déranger le commandant en plein assaut pour ça, et puis on s’était débarrassé de deux canons d’assaut, des Sturmgeschutz III. Malheureusement, il n’y avait plus que deux tireurs au bazooka sur six et il semblait bien que deux autres Stg III soient sur le point de montrer leurs museaux. Cela dit, les Allemands étaient très prudents, eux ne savaient pas qu’il n’y avait plus que deux bazookas en face, donc on avait encore un peu de temps. Le bouchon décrocherait au signal du commandant de bataillon.
Fouetté, *** fit ramasser tous les documents qui pouvaient traîner dans le manoir (il en volait un peu dans toutes les pièces) et décida de laisser sur place les blessés allemands, même légers, en dessous du grade de major, ainsi que les souris grises et tout le personnel de santé de la Wehrmacht. On avait déjà commencé à brancarder les blessés français vers les Vosges. Les morts allemands restèrent où ils étaient. Les morts du 113e, 81 en tout, furent enveloppés dans leur toile de tente et alignés sur la terrasse du manoir. L’aumônier allemand promit de les faire enterrer décemment (ce qu’il fit en demandant à la population du village voisin de s’en charger).
Les deux compagnies d’assaut se replièrent en emmenant les prisonniers valides. La plupart des hommes portait au minimum deux armes. Le solde des armes de prise avait été jeté, démonté, dans la fosse à purin, les véhicules incendiés et les caisses de munitions éventrées et jetées dans un vieux puits.
La compagnie-bouchon réussit à tenir vingt à trente minutes de plus avant de décrocher (sur ordre, même si il aurait été difficile de faire mieux) et de tirer sa route au sud. Le vent, qui venait de ce côté, apportait des bruits de canonnade ou peut-être de bombardement (ou les deux), qui expliquaient en partie pourquoi la réaction allemande avaient été assez faible et l’arrivée des renforts tardive.
………
Au PC du 113e, bizarrement, De *** et Sauvin n’avaient plus faim. Ils étaient assis sans rien dire derrière le radio penché sur son instrument. Quand ce dernier brandit triomphalement un nouveau message, ils sautèrent sur leurs pieds. De *** se précipita : « Le hareng est dans la caque ! Bon Dieu, ils l’ont fait ! »
– Il y a une suite ? interrogea Sauvin, insatiable.
– Oui : « Dans l’ordre 1, 2, 4, 5, 7, 10, plus trois jokers ».
– Magnifique, je leur ferai tous avoir la Légion d’honneur, ils les ramènent quand ?
– Dès que possible je suppose.
– Mais enfin, dès que possible ce n’est pas un horaire !
– Faudra faire avec. Je pense que le commandant *** va essayer de nous les envoyer au plus tôt par courrier aérien.
– Je suis si impatient, il faut que je fasse quelque chose pour m’occuper.
– Allez voir Katz, il aura de la vaisselle pour vous, lâcha De *** avec un sourire.
– S’il paye en dessert, je serai homme de plonge ! énonça dignement Sauvin avant de sortir.
Les blessés graves partirent les premiers par voie aérienne. Les prisonniers de marque ensuite. Le tout venant, français comme allemand, dut marcher.


Dernière édition par Casus Frankie le Mer Oct 03, 2012 00:17; édité 1 fois
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