Fantasque Time Line

[Casus Frankie]

Ce qui suit a été rédigé par Capu Rossu (5 juin et 2 juillet), à la demande de Loïc, et j'ai écrit l'épisode du 23 juin sur les indications du même Loïc

5 juin
Les Unterseebootsflottillen de l’Atlantique
QG de la Kriegsmarine (Berlin) – Le Gross-Admiral Doenitz, lors d’une réunion de suivi de l’activité des U-boots avec le Konteradmiral Godt, chef du BdU (1), envisage le devenir des Unterseebootsflottillen des ports de l’Atlantique. Si les Alliés n’ont entrepris aucune action offensive contre les Festungen de La Pallice et Saint-Nazaire, les rapports reçus de Brest et Lorient montrent que ces deux ports sont la cible d’un assaut en règle. Ne se faisant aucune illusion, les deux amiraux sont bien conscients que leur chute est inéluctable, d’ici un mois ou deux sans doute.
Profitant du fait que le Führer se désintéresse de l’organisation de la Kriegsmarine, Doenitz, contrairement aux généraux de l’OKW et de l’OKH, a toute latitude pour dissoudre les formations dont le maintien ne s’impose pas. Il ne va pas s’en priver.
Les ordres, transmis par radio aux officiers des 1ère et 9e Flottilles de Brest et aux 2e et 10e Flottilles de Lorient, sont un vrai couperet. Les 1ère, 2e et 9e Flottilles sont dissoutes, tandis que la 10e Flottille doit se redéployer en Norvège. Les officiers des états-majors des quatre formations et quelques spécialistes hautement qualifiés des ouvriers des contingents des constructions navales dans ces deux ports seront évacués à bord des U-boots disponibles, qui devront quitter Brest et Lorient les jours suivants. Le restant du personnel aura, quant à lui, le (douteux) privilège d’être enrôlé dans des compagnies de marche qui iront renforcer les moyens de la défense des deux Festungen. Sont exemptés de ce “volontariat” les ouvriers travaillant aux réparations de l’U-256 à Brest et de l’U-466 à Lorient (2).


23 juin 1944
Mortel rendez-vous
850 milles à l’ouest des îles du Cap-Vert – Au milieu de l’Atlantique : drôle d’endroit pour une rencontre ! Les deux sous-marins qui se retrouvent ici en fin de journée concrétisent le dernier lien existant entre le Japon et l’Allemagne. L’U-530, un Type IXC, arrive des environs de Trinidad, où il patrouillait – il avait quitté le 22 mai son port d’attache, Lorient. L’I-52, un sous-marin de transport de type C3, devait se rendre dans ce même port, mais l’évolution de la bataille de France a fait penser aux marines de l’Axe qu’il ferait mieux de se rendre en Norvège. Son chargement se compose d’or (2,2 tonnes, pour payer diverses fournitures allemandes), de molybdène, de tungstène, d’étain, de caoutchouc brut, d’opium, de caféine… et de soieries (3). Plus 14 ingénieurs et techniciens qui doivent aller étudier divers équipements militaires made in Germany : viseurs pour canons AA, directeurs de tir, moteurs de vedette… Une fois arrivé à destination, l’I-52 doit être équipé d’un schnorchel. Il est prévu qu’il embarque pour son voyage de retour plusieurs tonnes de matériels allemands de pointe (des torpilles acoustiques T-5, un moteur d’avion Jumo 213-A, des éléments de radars), de nombreux composants électroniques, une grande quantité de documents et croquis techniques… Et même 800 kg d’oxyde d’uranium (4) !
Le changement de destination de l’I-52 a conduit à mettre en place ce rendez-vous. L’U-530 doit fournir au sous-marin de transport un détecteur de radar Naxos (et l’opérateur chargé de sa mise en œuvre), une machine Enigma (et son radio) ainsi qu’un officier allemand qui facilitera la navigation sur la dernière étape du voyage. L’affaire se présente bien, quand le détecteur de radar tombe à l’eau ! Il est récupéré in extremis par un Japonais qui plonge… Sans s’attarder à d’inutiles effusions, l’U-530 rentre sans encombre, non à Lorient bien sûr, mais en Allemagne.
Mais le rendez-vous a été espionné… Les messages d’Enigma ont été déchiffrés et les Alliés, au courant de la rencontre prévue, ont envoyé sur place le porte-avions d’escorte USS Bogue et son escorte de cinq destroyers. La flottille, au tableau de chasse déjà bien fourni, arrive en retard, mais malgré la nuit, deux des Avenger du Bogue réussissent à repérer au radar l’énorme I-52 (2 600 tonnes en surface). Une première attaque ne le coule pas, mais les Américains larguent des bouées dotées d’hydrophones (sonobuoys) pour pister leur cible. Finalement, le Japonais est achevé par des torpilles acoustiques Fido.
Le lendemain matin, deux des destroyers américains repèrent une large nappe de pétrole et plusieurs ballots de caoutchouc, entre autres débris. De nombreux requins rôdent dans les environs… Quelques semaines plus tard, sans nouvelle de l’I-52, la Kriegsmarine le déclarera officiellement disparu. C’est la fin des missions Yanagi ; la Marine Impériale n’essayera plus d’envoyer de sous-marins vers l’Europe.
Les 2,2 tonnes d’or du sous-marin nippon attisent encore aujourd’hui la convoitise des chasseurs de trésors engloutis, qui l’ont surnommé le Golden Submarine…


2 juillet
Les Unterseebootsflottillen de l’Atlantique
QG de la Kriegsmarine (Berlin) – Avant de tenir sa réunion quotidienne avec le contre-amiral Godt, l’amiral Doenitz signe un ordre portant dissolution de la 7. Vorpostenflottille. L’amiral Kähler, lui a rendu compte par radio de la destruction de ses derniers bâtiments.
Cette pénible formalité accomplie, les deux amiraux débattent du maintien ou non des 3e, 6e et 7e Flottilles, encore basées à La Pallice et de Saint Nazaire. L’activité de ces bases s’est maintenue comme avant le début du siège, avec des entrées et sorties de sous-marins, certes moins nombreuses qu’avant le mois de mai, mais toujours présentes. Cependant, les comptes-rendus d’opération des commandants sont unanimes : la présence des moyens aériens et navals ennemis dans le secteur s’est accrue. Après la perte de Bordeaux, les Alliés ont concentré dans les atterrages de ces deux ports les groupes de chasse et les avions ASM initialement déployés dans le sud du golfe de Gascogne. Ces moyens alliés opèrent sans craindre la Luftwaffe, désormais absente des côtes atlantiques. Les départs et arrivées des U-boots sont toujours possibles, mais plus risqués.
Après réflexion et échange d’arguments et contre-arguments, les deux amiraux en arrivent à la conclusion qu’il faut procéder aux mêmes dissolutions et redéploiements qu’à Brest et à Lorient. Avec une différence, due à la relative passivité des forces terrestres alliées : dans chaque port, des officiers et marins seront mis aux ordres du HafenKommand (5) pour assurer la logistique des sous-marins arrivant à ces bases et en repartant, ainsi que par une équipe d’ouvriers chargés d’effectuer d’éventuelles réparations. A Saint-Nazaire, dans un premier temps, ces ouvriers devront poursuivre les réparations de l’U-255 pour lui permettre de reprendre la mer.
Ce dernier détail réglé, l’amiral Doenitz dissout les 3e et 6e Flottilles, respectivement de La Pallice et de Saint-Nazaire, et donne l’ordre de redéployer la 7e Flottille de Saint-Nazaire en Norvège. Les états-majors des trois flottilles et quelques spécialistes chanceux évacueront à bord des sous-marins appareillant des deux ports.
Jusqu’à la capitulation du Reich et à la reddition des deux Festugen, plusieurs U-boots, à court de gasoil ou de torpilles, viendront s’y ravitailler – non sans que certains le paient très cher…


Notes
1- Befehlshaber der Unterseeboote (BdU) est l’appellation du commandement suprême de la force sous-marine (Ubootwaffe) de la Kriegsmarine durant la Seconde Guerre mondiale.
2- Voir le sort de ces sous-marins dans cette rubrique, au 18 juin pour l’U-466 et au 1er juillet pour l’U-256.
3- Il était prévu qu’il emporte aussi quelques dizaines de kilos de quinine, mais l’évolution de la guerre en Europe a fait penser aux Japonais que ce médicament serait plus utile à leurs soldats, à Singapour par exemple…
4- Bien sûr, en l’état de la recherche japonaise en physique, ce matériau permettrait tout au plus de fabriquer une “bombe sale” plutôt qu’une bombe atomique.
5- Dans tous les ports civils, la Kriegsmarine a doublé la capitainerie de port par son propre service. Le capitaine de port allemand est appelé HafenKommand pour les grands ports et HafenKapitän pour les petits.

[Capu Rossu]

Bonsoir,

Cette pénible formalité accomplie, les deux amiraux débattent du maintien ou non des 3e, 6e et 7e Flottilles, encore basées à La Pallice et de (le mot "de" est en trop) Saint Nazaire.

@+
Capu
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Aux Postes de Propreté - Mouillé, c'est lavé ! Lavé, c'est propre ! - Rompre des Postes de Propreté

[ChtiJef]

Si l'on doit utiliser plutôt que grand amiral le titre allemand, qui s'écrit pas Gross-Admiral (toujours cette allergie à l'allemand... ) il faudrait alors peut-être donner à Karl Dönitz son titre complet qui est Großadmiral und Oberbefehlshaber der deutschen Kriegsmarine.
(Ah, la redondance et l'empilement de titres plus ronflants les uns que les autres ! Une grande spécialité de la langue nazie... A croire que "grand amiral", c'est pas encore suffisant pour assurer l'autorité du détenteur de ce titre...
Quant à Konteradmiral (ouf ! bien orthographié) Godt, il est Chef des BdU.
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Vous aimerez la paix comme le temps qui sépare deux guerres. (F. Nietzsche)

[DMZ]

[Casus Frankie]

Il s'agit de messages Enigma entre Berlin et le U-530.

"Le Japonais" est une personnalisation du navire, ce que les Anglais connaissent très bien. On dit donc "le Japonais" pour un navire, comme pour un homme.
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Casus Frankie

"Si l'on n'était pas frivole, la plupart des gens se pendraient" (Voltaire)

[loic]

[Le Chat]

[Finen]

[Casus Frankie]

Autres épisodes sous-marins peu connus… Merci Loïc.

30 mars 1944
Allemagne-Japon
Un bien beau cadeau
Kiel – Le sous-marin Ro-501, cédé par l’Allemagne au Japon, appareille. C’est l’ex U-1224 (un Type-IXC/40), et après l’U-511, c’est le second U-boot transféré à la marine impériale japonaise (mais cette fois au départ du Reich), et l’opération a été baptisée “Marco Polo 2”. Son équipage est arrivé à Brest à bord de l’I-8 en août dernier et, après avoir profité de quelques temps de visites touristiques en France, il a été formé à la manœuvre de son nouveau bâtiment.
Le Ro-501 embarque une certaine quantité de matériaux stratégiques (mercure, plomb, acier, verres pour optiques, aluminium), des plans et maquettes pour permettre aux Japonais de construire le même modèle de sous-marin et une documentation complète sur le chasseur-fusée Me 163 Komet. Quatre ingénieurs militaires japonais (précédemment arrivés en Allemagne par un autre sous-marin) ont également embarqué, ainsi que deux opérateurs allemands. Après un ravitaillement en Norvège, le sous-marin doit prendre la direction de l’océan Indien ; il est attendu mi-juillet à Batavia.

1er mai 1944
Allemagne-Japon
Cadeaux amputés
Bordeaux – Alors que les troupes américaines approchent de la ville, l’U-219 (Type-XD) quitte discrètement la base de la 12. Unterseeboot-Flottille, au nord de la ville. C’est le dernier à partir : il va rejoindre les U-180 et U-195 (Type-IXD1), qui l’attendent dans l’anse du Verdon pour gagner Batavia, puis le Japon. A eux trois, ils convoient une cargaison particulièrement sensible : de l’oxyde d’uranium et des fusées V2 démantelées, en plus d’équipements de pointe ainsi que de torpilles et de pièces détachées pour la base de Batavia. Et puis, il y a des passagers, comme c’est devenu l’habitude : officiers japonais rentrant au pays ou techniciens allemands chargés de transmettre leur savoir.
Après seulement quatre jours en mer, l’U-180 ne donnera plus signe de vie. Les deux autres commandants allemands se perdront en conjectures sur ce qui a pu lui arriver : mine ennemie ou défaillance du schnorkel.

3 mai 1944
Guerre sous-marine
Un planeur sur un U-boot
Bandar Beyla, sur la côte somalienne – Les pêcheurs locaux assistent de loin à un spectacle très inhabituel : l’échouage d’un sous-marin. C’est l’Allemand U-852 (Type-IXD2), dont le commandant n’a pas eu d’autre choix que de jeter son bâtiment sur un récit corallien, car il a été littéralement matraqué la veille par une véritable meute de Wellington basés à Aden. Les rescapés seront capturés par la milice locale et remis à un détachement du Somaliland Camel Corps. Bien qu’en partie sabordé, le sous-marin sera fouillé par les Britanniques, qui vont faire deux découvertes intéressantes.
La première est le journal de bord du Kptlt Heinz-Wilhelm Eck, qui va révéler la décision infâme qu’il a prise quelques jours plus tôt après avoir coulé un cargo allié. Il a en effet ordonné de mitrailler les survivants pour effacer ses traces. Après la guerre, Eck sera le seul commandant d’U-boot inculpé pour crimes de guerre, ce qui lui vaudra la peine capitale, ainsi qu’à deux de ses subordonnés.
La seconde trouvaille est celle d’un planeur autogire Focke-Achgelis Fa 330 Bachstelze. Les Alliés avaient déjà connaissance de cet équipement révolutionnaire, permettant à un sous-marin de disposer d’un plate-forme d’observation tractée pour repérer de loin ses cibles ou les avions ennemis et les signaler à la passerelle par téléphone. Le Fa 330 peut atteindre l’altitude maximale de 120 mètres et voir jusqu’à presque 50 kilomètres à la ronde. Développé en 1941 et mis au point à la soufflerie de Chalais-Meudon, il équipe plusieurs sous-marins allemands. L’appareil va être dûment évalué : il se révélera facile à stocker et à assembler, mais beaucoup moins à utiliser ! En effet, en cas de nécessité, la récupération de l’autogire prend énormément de temps. Très souvent, le pilote est contraint de larguer le rotor et de finir sa course en parachute avec le reste de l’engin – qui est ensuite inutilisable.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Focke-Achgelis_Fa_330_Bachstelze

https://fr.wikipedia.org/wiki/Focke-Achgelis_Fa_330_Bachstelze#/media/Fichier:FA-330_Bachstelze2.jpg


13 mai 1944
Allemagne-Japon
Cadeaux coulés
500 milles à l’ouest des îles du Cap Vert - Poursuivi depuis deux jours par le groupe de chasse de l’USS Bogue, qui a repéré une émission radio grâce à la détection Huff-Duff, le Japonais Ro-501 (ex U-1224) est coulé par le destroyer d’escorte Francis M. Robinson. Sa cargaison et ses passagers, partis le 30 mars de Kiel, n’arriveront jamais au Japon. Il n’y aura pas de Me 163 nippon…


5 juin 1944 (ajout)
Berlin – [...] le B.d.U. décide de créer une nouvelle unité, dénommée 33. Unterseeboot-Flottille. Celle-ci a pour vocation de reprendre le rôle de la 12. Flottille, dissoute à Bordeaux le mois dernier. La majorité des sous-marins qui lui seront rattachés sont ceux qui opèrent actuellement contre le trafic allié dans l’océan Indien (groupe “Mousson”) ou qui maintiennent un lien capital avec le Japon, en transportant matériaux stratégiques, équipements militaires ou personnalités importantes entre les deux lointains alliés. La nouvelle flottille sera basée formellement à Flensburg, mais en pratique son activité sera organisée à partir de la base navale de Batavia, avec des antennes à Singapour, Penang, Sœrabaya et Kobe.
La mission de la 33. Unterseeboot-Flottille ne s’annonce pas facile, car l’océan Indien est devenu aussi dangereux pour les sous-marins que l’Atlantique. La Kriegsmarine a vu ses derniers ravitailleurs éliminés il y a quelques mois ; les sous-marins doivent donc passer plus de temps au port ou se ravitailler entre eux et la pénurie de torpilles menace, malgré l’arrivée en avril de l’U-1062 (Type-VIIF, transportant 39 torpilles). La plupart d’entre eux ne sont d’ailleurs pas équipés de schnorkel, de radar ou de détecteur de radar, ni d’un armement AA adéquat. Plus grave encore, la qualité médiocre du carburant diesel fabriqué en Asie rend les moteurs plus bruyants. Enfin, le climat chaud et humide affecte les batteries des torpilles, entraînant des dysfonctionnements fréquents. Les missions de transport vont donc irrémédiablement prendre peu à peu le pas sur les missions de combat.

[John92]

Rien à signaler
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Ne pas confondre facilité et simplicité

[Hendryk]

Une question: est-ce que le taux de pertes parmi les sous-marins qui assurent ce type de liaison entre l'Allemagne et le Japon est sensiblement supérieur FTL par rapport à OTL?
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[loic]

Le taux de perte OTL était déjà élevé !
Les Japonais ont jeté l'éponge assez rapidement, la mission de l'I-52 est la dernière.
En effet, FTL, ça sera sans doute pire, avec Madagascar du côté allié dès le départ (ça se voit sur les activités des raiders allemands).
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On ne trébuche pas deux fois sur la même pierre (proverbe oriental)
En principe (moi) ...