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Les Carnets de Jean Martin, par Tyler
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gaullien



Inscrit le: 13 Avr 2010
Messages: 920
Localisation: l'Arbresle

MessagePosté le: Jeu Mai 20, 2010 13:03    Sujet du message: Répondre en citant

loic a écrit:
Le pillage de l'ambassade US, c'est véridique ?


Les américains ont il réagit a l'invasion de leurs embassade?
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LaMineur



Inscrit le: 12 Oct 2009
Messages: 414

MessagePosté le: Jeu Mai 20, 2010 13:31    Sujet du message: Répondre en citant

Oui ; ils ont envahi l'Allemagne. Wink
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Finen



Inscrit le: 17 Oct 2006
Messages: 1923

MessagePosté le: Jeu Mai 20, 2010 15:29    Sujet du message: Répondre en citant

C'était les prémices de la politique de la riposte gradué mais ils n'étaient pas encore au point pour les graduations…

Pour le pillage de l'ambassade, ils ont partagé l'Allemagne avec les russes et pour l'attaque à la torpille des japonais, ils les ont finis à la bombe atomique! Shocked
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raven 03



Inscrit le: 20 Mar 2009
Messages: 1164
Localisation: loire (42)

MessagePosté le: Jeu Mai 20, 2010 18:46    Sujet du message: Répondre en citant

Quels poètes ces americains,ils n'ont pas vraiment changé
Pour les tapis de bombes ,maintenant ils y a moins d'avions,mais le resultat au sol est le mème.
je m'egare mais un vic de B 52 est vraiment impressionant (de loin de preference )
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Casus Frankie
Administrateur - Site Admin


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 13715
Localisation: Paris

MessagePosté le: Lun Mai 31, 2010 11:28    Sujet du message: Carnets de Jean Martin - fin décembre 42 Répondre en citant

Suite des carnets de Jean Martin... Bon, c'est pas très très gai (et je crains que ça ne s'arrange pas), mais c'est réaliste.
Tyler nous prie de préciser que les noms ont été changés. Wink


28 décembre 1942
Les carnets de Jean Martin
Dans le train
– A nouveau, je traverse en train notre beau pays. Et à nouveau j’ai droit à des attentes interminables… Encore une fois, les lignes ont été sabotées – enfin, c’est ce que je pense, on n’a pas de vraies explications, on explique un arrêt de deux heures par « des problèmes sur la voie » – parfois, on murmure (tout bas) que les Cocos ont encore fait sauter les rails, parfois (encore plus bas), qu’il faut laisser passer des convois de troupes allemands qui vont remettre Benito sur son trône, apparemment, ça chauffe dur en Italie, mais je vais pas pleurer pour eux.
Avant de partir de Grenoble, il y a deux jours (ou trois ? j’en perds le compte), j’ai réussi, en montrant mes papiers du SONEF, à envoyer un télégramme à Alphonse, lui expliquant que je quittais Grenoble pour Paris mais que j’aller passer par Vierzon pour voir Abel, l’ancien garçon de ferme de mes parents.
Pourquoi Vierzon ? Il n’y a plus personne qui m’y attende, mais il m’a semblé qu’à ce moment de ma vie, je devais repasser chez moi et parler de vive voix à Abel, pour Maman. Il travaillait déjà pour Papa quand ils se sont mariés. Il disait toujours qu’elle venait de la ville, enfin de Bourges quoi. Pour nous c’était la ville avant. Maintenant que je suis parisien depuis plus de deux ans et que j’ai pas mal bougé (moins que Guy c’est vrai), Bourges n’est plus qu’une petite ville de province parmi tant d’autres…
Vierzon – Je suis arrivé en début d’après-midi à la gare. J’ai été me renseigner à la mairie pour savoir où logeait maintenant Abel – s’il vivait toujours ici. Une employée de mairie, une vieille peau avec des grosses lunettes, m’a dévisagé pendant une bonne minute. Puis elle m’a lancé : « T’es pas un des fils Martin? Le fils de Jules et d’Yvonne ? » Ça m’a fait quelque chose, d’entendre les prénoms de mes parents. Comme une envie de chialer. Que bien sûr j’ai ravalée.
J’ai répondu que oui. Elle a esquissé un sourire et a répondu qu’Abel le Rouge (c’est son surnom, rapport au fait qu’il était communiste avant la guerre), je le trouverais à un endroit que je connaissais bien : la ferme familiale ! Je lui ai dit que la ferme avait été saccagée en 40, elle m’a répondu qu’il l’avait réparée et qu’il y vivait avec une bande de types pas nets, même que… Et là elle s’est mise à raconter les ragots, les rumeurs, les racontars des propriétaires des fermes voisines… On disait que c’était devenu un lupanar, un repaire de brigands et autres folies du même acabit – et à chaque fois elle marquait un temps d’arrêt, elle semblait se délecter de l’état dans lequel ça me mettait…
J’ai bafouillé des remerciements et je me suis précipité vers chez moi. Pas de taxi bien sûr, pas de bus non plus, j’ai dû me faire le chemin à pied ! Je suis arrivé alors qu’il commençait à faire nuit. Les environs semblaient déserts, mais il y avait de la lumière dans la maison. Je me suis mis à courir, parce qu’il faisait si froid que j’en avais les larmes aux yeux – le froid et l’émotion de revenir au bout de deux ans et demi. C’est pour ça, et à cause de l’obscurité qui tombait, que je l’ai pas vu, une espèce d’empaffé qui m’a foutu un coup de bâton dans les jambes. Je me suis vautré. Il a gueulé « Intrus ! » en continuant de me menacer de son bâton et en quelques secondes, sept ou huit bonshommes sont sortis avec des torches et des armes. Parmi eux, il y avait Abel, je l’ai reconnu. Vieilli et amaigri (comme la plupart des habitants de Vierzon que j’avais croisé plus tôt dans la journée). Les autres, je les reconnaissais pas.
Le type qui m’avait fait tomber s’apprêtait à me remettre un coup de bâton quand Abel l’a arrêté. Il est venu vers moi et s’est confondu en excuses, en m’appelant « M’sieur Jeannot, M’sieur Jeannot ! » J’étais épuisé et encore un peu étourdi par ma chute, il m’a fait monter dans une chambre, ma chambre, enfin mon ancienne chambre, il a dû en déloger un type.
Il m’a dit qu’il m’expliquerait demain ce qui se passe ici. J’aimerais bien le savoir…

29 décembre 1942
Les carnets de Jean Martin
Vierzon
– Je me suis réveillé très tard. Sûrement le fait de dormir dans ce qui fut mon lit pendant tant d’années… Quand je suis descendu, il n’y avait que trois personnes dans la ferme. Abel, un mec hautain qui m’a lancé un regard méprisant et un gamin qui devait avoir 15 ans, même pas, et qu’on surnomme le Crabe, j’ai pas trop compris pourquoi. Pain, jambon, lait : pendant que je me restaurais (j’avais pas dîné, la veille), Abel m’a expliqué qu’il avait réparé la ferme après mon départ en 40 avec l’aide d’un ami à lui, un copain de régiment de l’Autre Guerre, qui avait « quelques sous de côté ». Quand je lui ai demandé de quoi ils vivaient, ce qu’ils pouvaient bien cultiver, il est resté évasif. Il a fini par m’avouer que qu’il se débrouillait avec des gens des villes qui étaient prêts à payer cher pour le moindre radis. Du marché noir, quoi ! J’ai été un peu déçu d’entendre ça, mais bon, en voyant l’état de la maison et même l’état dans lequel est Abel, je me dis que c’est plus par nécessité que par désir de truander l’Etat.
Si seulement les Africains avaient compris ! Si on avait arrêté les frais en 40, tout serait redevenu comme avant ! Les Anglais auraient fait comme nous. Les Boches se seraient débrouillés avec les Russes et les Amerloques avec les Japonais. Quelle bande d’abrutis. Mais je n’ai rien dit de tout ça. Surtout que, comme ça commence à devenir une habitude, une fois passé un petit moment de gêne, les langues se sont déliées et là encore, les critiques ont fusé sur le Président Laval. N’empêche que Laval, s’il était pas là, je me demande bien comment on aurait fait ! C’est pas les responsables de la défaite qui nous auraient aidés de l’autre côté de la Méditerranée ! Ils sont partis comme ça, sans même réfléchir à ce que le pays deviendrait, sous prétexte de continuer à se battre ! Mais bon, je n’ai rien dit.
Je me suis proposé pour aider. On m’a chargé d’aller acheter des outils et divers autres trucs à Vierzon. Evidemment, pas de voiture. C’est vrai qu’on a quand même la belle vie à Paris, je m’en étais jamais rendu compte comme ça. L’entêtement de Ceux d’Alger provoque vraiment beaucoup de dégâts. Alors j’ai pris un vieux vélo qui trainait.
J’ai fait les courses demandées à Vierzon. Tout le monde me regardait avec des grands yeux : je payais avec des gros billets (et encore si ils voyaient ceux qu’on allonge quand on part avec Alphonse…). Heureusement que j’avais de quoi, tout était hors de prix, je me suis demandé si les commençants me faisaient un prix spécial pour Parisien. En passant devant l’église où on allait tous les dimanches avec Maman, j’ai remarqué un vieillard, un plus ou moins clodo à qui Maman donnait la pièce. Il m’a interpellé : « T’es pas le gamin Martin par hasard ? » J’ai fait oui – « Ben dame ! Ça alors t’as bien changé! Comment que va ta mère ? » J’ai rien dit, j’ai fouillé dans ma poche pour lui donner le premier billet que j’ai trouvé, il m’a remercié, il a eu l’air de vouloir reparler de Maman puis il s’est ravisé, il avait peut-être compris.
Il s’est mis à me raconter toute la vie du coin. Qui faisait de marché noir avec qui, quelle nénette couchait avec les Allemands, qui faisait des affaires avec eux, comment le maire avait juré fidélité au Nouvel Etat mais fricotait en douce avec les gens d’Alger… Bref, je suis sûr qu’il doit en savoir plus que les mecs du SONEF local ou la Gestapo sur ce qui se passe dans ma ville ! En longeant les bords du Cher, j’ai remarqué une bonne demi-douzaine de maisons très abîmées, avec le toit effondré, et l’état des rues était lamentable. Je lui ai demandé ce qui s’était passé, s’il y avait eu un bombardement ou un truc de ce genre. « Peuh ! Un bombardement à Vierzon ? Et pour quoi faire ? Non ça ce que tu vois, c’est la conséquence de ce que les politicailleux nous ont fait depuis deux ans ! »
Je commençai à piger, j’ai dit « Laval ? » et j’ai pas été déçu ! « Laval ? Si y’avait que lui ! Non j’te parle de TOUS les politicailleux, le Reynaud en tête, avec ses Mandel, Blum, De Gaulle, mais aussi les Doriot, Déat, tout ça c’est pas ben de l’affaire ! Les meilleurs y valent pas chers tiens ! (Il cracha un gros glaviot par terre pour appuyer sa critique). T’as vu comment qu’on vit ! Si ces baraques sont effondrées, c’est qu’on a pas pu les réparer ! En ce moment, c’est à peine si on arrive à se chauffer, enfin moi tu sais ça fait vingt ans que je trainasse dans le coin, donc je m’y suis fait, mais tu verrais la tronche des mômes, tous pâlots, tous malades ! J’ai parlé comme je te parle avec un Docteur, çui de la Rue de la République, même si c’est plus comme ça qu’on l’appelle, ben y m’a dit qu’au niveau santé, hygiène, tout ça, on était revenu au siècle derniers ! »
Je l’avais lancé, il n’allait pas s’arrêter !
« Tu sais, ils sont bien mignons les Africains, avec leurs grandes phrases sur la Liberté, la Lutte contre le Mal, des trucs comme ça… Me regarde pas comme ça ! J’ai pas la radio, mais c’est comme si que j’écoutais la BBC ou Pierre Dac en direct, tellement y’a de gens qui les écoutent et qui m’en parlent, y savent que je vais pas aller cafter. Faut dire que les Schleus et les jean-foutre à Laval et compagnie c’est pas ça qui court dans le coin… Oh, bien sûr y’en a ! Mais bon… Je disais quoi ? Ah oui ! Les Africains ! Ils se sont bien barrés en 40, mais sans nous ! Juste les hommes en âge de se battre, qu’y disaient. Mais si j’avais pu j’y serai allé moi casser du Boche ! Mais j’ai dégusté pendant l’Autre guerre, de la mitraille pleins les guiboles, t’as pas idée de ce que c’est toi, encore heureux qu’y m’en aient coupé qu’une. Enfin, où j’en étais… Ah oui ! Ils se sont carapatés en nous laissant dans les pattes des Boches ! Des Boches à Vierzon non mais tu te rends compte ! Reynaud, il a voulu continuer sa guerre, grand bien lui fasse, mais nous ? D’un côté, je suis bien content qu’on se soye pas déculottés devant les casques à pointe et je serai encore plus content si, avec les Amerloques, on réussit à lui foutre bien profond là ou je pense à leur moustachu en chef, on l’a bien fait aux Spaghettis ! »
Il a rigolé franchement pour la première fois, avant de redémarrer
« Mais d’un autre côté, ça sert à quoi de se battre pour la France chez les Bédouins, chez les Grecs ou chez les Romains ! Ouarzazate c’est pas la France, la France c’est ici ! Et regarde ce qui se passe ! Les maisons elles tiennent plus debout ! Quant à ceux qu’ont pris la place… Une bande d’arcandiers oui ! Ces politicards, ils pensent pas à nous, cette guerre c’est des affaires entre des gens qu’on connaît pas, Hitler, Staline, Roosevelt, Churchill… Et pendant ce temps là qui c’est qui souffre ? C’est nous ! Quand la guerre sera finie, ils se taperont dans le dos, et à qui on dira de tout reconstruire ? A nous ! Moi je dis la politique, ça n’amène que le malheur aux hommes… Retiens bien ce que te dit le vieux Jambe de laine, gamin ! »
Il s’est assis sur une souche d’arbre (abattu pour faire du feu ?), il a retiré sa jambe et a commencé à se gratter le moignon. J’en ai profité pour marmonner un au revoir et déguerpir.
Avec tout ce que j’avais acheté, c’est à peine si j’arrivai à rouler sur le vélo. J’ai pas voulu prendre de risques et je me suis tapé la route à pied en poussant le vélo. A mi-chemin, une voiture m’a rattrapé et s’est arrêtée à côté de moi. Il y avait cinq mecs dedans et j’ai reconnu l’uniforme des Croisés de la Reconstruction ! Ils m’ont demandé leur chemin… et leur chemin, c’était chez moi ! Evidemment, j’ai fait l’idiot, je leur ai donné une mauvaise indication et j’ai hâté le pas pour prévenir Abel et ses amis – et pour savoir ce que les Doriotistes pouvaient leur vouloir.
Au bout d’une demi-heure, je suis arrivé. Mais j’avais à peine posé le vélo contre le mur de la grange que la voiture des Doriotistes est arrivée en trombe dans la cour de la ferme, où elle s’est arrêtée en faisant un grand dérapage, quels frimeurs ! Les cinq mecs sont descendus, trois vêtus du bel uniforme couleur crotte des Reconstructeurs, deux en civil, les chefs bien sûr. Ils étaient armés jusqu’aux dents, mais leur arsenal était hétéroclite, pas deux armes pareilles et je crois bien que j’ai vu un flingue italien ! Abel et les deux autres sont sortis et je les ai rejoints.
« Vous êtes qui, vous ? » a demandé Abel, comme s’il le savait pas ! Il avait son fusil de chasse, mais ils avaient pas l’air de s’attendre à une visite de ce genre, moi j’ai commencé à faire glisser lentement ma main vers de ma ceinture – je quitte plus guère le Mauser de Papa, j’ai un holster très commode, je me voyais dégainer comme John Wayne dans un des films que Monsieur Brasillach m’a fait voir.
Après quelques instants à s’observer, le chef des Doriotistes s’est avancé en brandissant un papier : « Vous êtes bien Monsieur Abel Léonard , occupant de fait de la ferme Martin, nous allons perquisitionner votre domicile en vertu de… ». Abel lui a pas laissé le temps de finir et il a lancé, l’air menaçant : « Rien à fiche, de votre papier ! » On allait droit au massacre ! J’ai toussé très fort et j’ai fait (en essayant de ne pas trembloter) : « Du calme, Abel ! Dites-moi, Messieurs des Sections de Lutte contre les Activités Anti-Nationales, vous connaissez les règles de collaboration entre les Forces de Sécurité du Nouvel Etat Français ? » Ils m’ont regardé, l’air consterné. J’ai tenté le coup en m’adressant directement au chef : « En un mot, c’est quoi votre grade ? » Il était tellement ahuri qu’il m’a répondu automatiquement : « Brigadier ! » Comme ils n’étaient que cinq, je m’en doutais. Alors, j’ai sorti ma carte avec un sourire supérieur, façon Dick Tracy : « Brigadier-chef Jean Martin, du SONEF. Messieurs, la situation ici est sous contrôle, je vous prie d’aller lutter ailleurs contre les Activités Anti-Nationales », que je lui ai fait. La mine qu’ils tiraient, les Doriotistes ! Abel et ses compagnons, ils étaient carrément sidérés.
Au bout de dix bonnes secondes à se regarder dans le blanc des yeux, un des Croisés en uniforme a armé son flingue en gueulant qu’il en avait rien à faire du SONEF. J’étais mal ! Mon coup de culot n’avait pas payé et finalement, ça allait quand même être un massacre et les fusils de chasse n’allaient pas faire le poids.
Juste à ce moment, un coup de feu a retenti à l’entrée de la cour. Dans le nuage de fumée sortant d’une pétoire improbable, le lieutenant Fernandez est apparu, le flingue levé, accompagné de son comparse de toujours, Léonetti : les Dupond et Dupont du SONEF, à pied et sortant de nulle part ! Ils avaient bien calculé leur entrée (j’ai appris ensuite qu’ils surveillaient le coin depuis un bon moment). Avec des trémolos dans la voix, Fernandez s’est lancé dans un de ses invraisemblables monologues, sûrement plus dangereux que son vieux Colt, tout en envolée lyrique avec mimiques et jeu de scène assortis : « Ah ! Messieurs ! Une dispute ! Une dissension ! Une rixe peut-être ! Que n’eussiez vous fait là ! Je vous le demande ! » Là, le chef des Doriotistes a agité son bout de papier en bafouillant quelque chose, le pauvre, comme si ça avait pu arrêter Fernandez, qui a eu l’air de le prendre comme des applaudissements : « Que je voudrais bien tenir un de ces puissants de quatre jours, si légers sur le mal qu’ils ordonnent, quand une bonne disgrâce a cuvé son orgueil ! Je lui dirais… que les sottises imprimées n’ont d’importance qu’aux lieux où l’on en gêne le cours, que sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur et qu’il n’y a que les petits hommes qui redoutent les petits écrits… »
Pendant quelques instants, l’air inspiré, il a balayé du regard le cercle d’ébahis qui l’écoutaient, tout penauds, dans la cour de la ferme.
« Que n’eussiez vous fait ? Et moi qu’eussé-je fait? Je vous le demande ! Il ne me restait plus qu’à voler, je me fais banquier de pharaon : alors, bonnes gens ! je soupe en ville, et les personnes dites comme il faut m’ouvrent poliment leur maison, en retenant pour elles les trois quarts du profit. Mais comme chacun pillait autour de moi en exigeant que je fusse honnête (il foudroyait du regard les Doriotistes), il fallut bien périr encore… Qu’est-ce que c’est que tous ceux-là (il englobait tout le monde dans un grand geste), vous êtes mille ? Ah ! Je vous reconnais, tous mes vieux ennemis ! »
Il s’est mis à désigner un à un du bout de sa pétoire les Doriotistes et le groupe d’Abel : « Le Mensonge ? Ha ! Ha ! Les Compromis, les Préjugés, les Lâchetés ! Tiens, tiens ! Que je pactise ? Jamais, jamais ! Ah! te voilà, toi, la Sottise ! » (ça, c’était pour le chef Doriotiste, qui s’était mis à rouspéter).
« Je sais bien qu’à la fin vous me mettrez à bas, n’importe : je me bats ! Je me bats ! Je me bats ! »
Il s’est figé, magnifique, dans une attitude théâtrale et Léonetti a tiré une rafale en l’air tout en prenant la pose du gangster de la Canebière (qu’il a dû être avant que tout se mette à tourner carré dans le monde). Obéissant au signal, un camion découvert est apparu sur le chemin menant à la ferme, avec une dizaine d’uniformes de la Milice à bord. Léonetti a conclu avec sa finesse habituelle : « Oh putaing ! Les corbeaux ! Vous comprenez vite mais faut vous esspliquer longtemps à vous ! Déguerpissez-moi le plancher ! Raus, Schnell ! »
« Comme disent nos nouveaux amis d’Outre-Rhin ! » a ajouté finement Fernandez en agitant sa pétoire. Les Doriotistes ont fini par rembarquer en râlant qu’ils se plaindraient en haut lieu et par filer en trombe. Léonetti m’a tapé dans le dos : « Salut minot ! »
J’étais drôlement content de les voir les Dupondt ! Tout joyeux, j’ai fait un grand sourire à Abel, mais lui m’a regardé d’un air froid, tout raide, serrant son fusil de chasse. « Je crois qu’il vaudrait mieux que tu repartes avec tes… tes amis (Il avait l’air de cracher en disant ça – zut, ils venaient quand même de nous sauver la mise !). Quand cette guerre sera finie, nous parlerons de tout ça avec ton frère et ta mère. Mais d’ici là, je sais bien que c’est chez toi ici, mais tu n’y es plus le bienvenu. Va-t-en. » Comme je restais muet et immobile, il a ajouté, après quelques instants : « S’il te plaît… » L’émotion n’était pas feinte dans sa voix – je me suis rendu compte que je ne lui avais pas dit, pour Maman. Mais c’était plus possible.
Je tournai les talons, retenant mes larmes (comme lui, j’en suis sûr) et j’ai fait quelques pas vers Fernandez. Lui m’a pris par l’épaule et m’a glissé : « C’est peut-être mieux ainsi, mon cher Jean. Notre chef à tous, couramment dénommé Alphonse, bien qu’on le désigne sous un sobriquet, ma foi, fort exotique dans des endroits de Paris qui ne le sont pas moins, tel le One… (Je lui ai lancé un regard qui lui fit comprendre qu’il fallait qu’il aille à l’essentiel, pour une fois) – Bref, nous étions à Bourges pour une inspection de routine et Alphonse nous a téléphoné pour nous dire de passer te chercher. Il savait que cet endroit n’était pas très clair et que ces Messieurs en brun ont décidé d’y faire une démonstration de zèle. Il est plus prudent pour toi de rentrer à Paris. »
J’ai acquiescé. Pourtant, cet endroit pas clair, c’était chez moi… Avant.


31 décembre 1942
Les carnets de Jean Martin
Paris
– Je suis arrivé à la Brigade de bon matin (les Dupondt m’avaient déposé chez moi la veille). J’ai découvert Alphonse dans la même situation que lors de notre première rencontre, sortant de la “salle de bains” après s’être occupé d’un traître à la Nation… En me voyant, il eut un grand sourire. Célina, l’air toujours aussi faux cul, sortit derrière lui de la salle de bains et demanda : « Je peux l’emmener ? »
Alphonse eut l’air surpris par la question, puis il a compris : « Ah ? Oui, vas-y, vas-y ! Maintenant que tu lui as fait les poches, tu peux apporter le corps au bon Docteur Petiot et t’arranger avec lui, quoique je me demande ce qu’il peut bien l’intéresser. Mais te gêne pas, va te payer ton voyage pour l’Argentine ou ailleurs ! »
Célina resta bouche bée, Alphonse avait touché juste ! Et il ne l’a pas laissé souffler : « Quoi, tu crois que je le sais pas, moi ? » Il a éclaté de rire. « Je suis au courant de ton petit manège depuis le début ! Rassure-toi, ça me pose pas de problème, tant que tu vas pas t’engager chez les Bédouins pour revenir nous foutre sur la tronche ! » Quelques fanatiques de la brigade – c’est des nouveaux et on les reconnaît parce que c’est les seuls à porter jour et nuit l’uniforme noir réglementaire que nous a imposé Touvier – ont fait des commentaires insultants concernant les qualités combatives et les habitudes sexuelles des Africains. Ça n’a pas intimidé Alphonse : « Oh, vous, ça va ! Bercez-vous de ce que raconte Henriot à la radio et arrêtez de jouer les pucelles outragées ! »
Puis il s’est retourné vers nous (les anciens de l’équipe) : « Je disais donc. Oui, vos magouilles, ça me dérange pas ! Je ne me fais pas d’illusions : Célina fait du trafic de cadavres et de bijoux pour se payer son billet pour Buenos-Aires ; le Zazou est là uniquement pour emmerder ses vieux, que je présume riches et même encore plus riches depuis deux ans (le Zazou a hoché la tête) et malgré tout plutôt du Front Popu’, non ? » – « Oh ça oui ! » a fait le Zazou.
« Bon, nos deux Marseillais sont là parce qu’ils se sont fait lourder de chez eux et moi je suis ici parce que je me suis évadé et que j’ai fait ce que j’ai pu pour éviter la guillotine. Reste notre gamin ! Mon gamin ! (Il m’a souri.) Alors ? Pourquoi t’es là gamin ? Au lieu de batifoler avec ta Suzanne ? »
J’ai pas trop su quoi répondre, j’aurai voulu dire à Alphonse que c’était parce qu’il était la seule personne qui avait de l’affection pour moi – avec Suzanne, mais elle, c’est pas la même chose. Alors, je me suis redressé, j’ai pris l’air le plus sérieux possible et j’ai répondu : « Pour servir mon pays ! » Alphonse m’a regardé, j’ai bien vu une pointe de tristesse dans le regard – puis il a fait une grimace de pitre comme à son habitude et m’a tapé sur l’épaule en disant « Mais qu’il est bête ! » Tous les autres ont rigolé avec lui, mais lui, il avait toujours ces yeux tristes en me regardant.
Finalement, on a tous ri ensemble. C’est peut-être bête, mais j’avais retrouvé quelque chose que j’avais perdu il y a plus de deux ans : une famille…
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gaullien



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MessagePosté le: Lun Mai 31, 2010 12:40    Sujet du message: Répondre en citant

Alphonse ets parfaitement conscient que les allemands sont en train de perdre la guerre et il semble regretter que notre jean martin ne soit pas rester avec sa Suzanne !

quand a "zazou" il veut payer son billet pour echapper a la sentance ou pour retourner sa veste?

quand au vieillard de l'église il faut qui soit conscient que le gouvernement n'a pas oublier le peuple, ne l'a abandonner que parce que c'était la seul solution pour poursuivre la lutte!

pour revenir a jean martin qu'elle serat son destin : tuer par la résistance anvant ou après la libération, juger par un procé durant l'épuration légale?
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Lun Mai 31, 2010 12:50    Sujet du message: Répondre en citant

gaullien a écrit:
pour revenir à Jean Martin quel sera son destin : tué par la résistance avant ou après la Libération, jugé par un procès durant l'épuration légale?


Les paris sont ouverts... Wink
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Casus Frankie

"Si l'on n'était pas frivole, la plupart des gens se pendraient" (Voltaire)
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gaullien



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MessagePosté le: Lun Mai 31, 2010 14:59    Sujet du message: Répondre en citant

moi je préfére au mieux qu'il soit juger par un tribunale!

au fait si Alphonse percoit le défait, quand est t-il pour notre personnage principale?

vut que alphonse sait que le défait de l'axe devient devient de plsu en plus possible voir inéluctable poruqoi n'insiste 'il pas pour que jean martin quitte la SONEF?
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Joukov6



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MessagePosté le: Lun Mai 31, 2010 15:48    Sujet du message: Répondre en citant

gaullien a écrit:
vut que alphonse sait que le défait de l'axe devient devient de plsu en plus possible voir inéluctable poruqoi n'insiste 'il pas pour que jean martin quitte la SONEF?

Parce que dans une administration où les idées comme "la délation est un devoir du citoyen" prédomient il vaut mieux éviter de dire trop fort ce qui pourrait être perçus comme une "non croyance en la victoire". Surtout qu'Alphonse doit bien se douter de ce qui arrive aux gens pas assez zêlés.
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Le Lion de l'Orgueil ne connait ni rivaux ni égaux. Il trône seul au sommet de l'Univers.
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Capitaine caverne



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MessagePosté le: Lun Mai 31, 2010 17:31    Sujet du message: Répondre en citant

D'ici à ce que notre Jean Martin ne finisse par avoir une illumination et ne décide de changer de camp après une rencontre avec son frêre au coin d'un sombre maquis.
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"La véritable obscénité ne réside pas dans les mots crus et la pornographie, mais dans la façon dont la société, les institutions, la bonne moralité masquent leur violence coercitive sous des dehors de fausse vertu" .Lenny Bruce.
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Tyler



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MessagePosté le: Mar Juin 01, 2010 17:19    Sujet du message: Répondre en citant

gaullien a écrit:


quand a "zazou" il veut payer son billet pour echapper a la sentance ou pour retourner sa veste?

pour revenir a jean martin qu'elle serat son destin : tuer par la résistance anvant ou après la libération, juger par un procé durant l'épuration légale?


Célina peut etre qualifié de lache (une des premières missions de Jean fut de venir secourir l'équipe d'Alphonse alors que Célina s'était enfui suite à une arrestation ayant mal tourné). Donc je crois qu'on peut dire que Célina est entrain de magouiller pour payer son billet pour échapper à la sentance, manque de chance pour lui il a pas choisi le bon "passeur"...

Quand au destin de Jean Martin, rien n'est ecrit. Ce sera a priori pas très joyeux, mais rien n'est exclu...
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gaullien



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MessagePosté le: Mer Juin 02, 2010 10:17    Sujet du message: Re: Jean et la chute du Duce Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
[b]Le personnage de Tyler suit attentivement l'actualité...



[b]3 novembre 1942
Une fois l’effet de surprise passé, Suzanne m’a pris par la main et m’a emmené dans un café retrouver la personne qui devait nous emmener dans le village de sa famille. Elle m’a dit que c’était « un ami » à elle, « un copain d’école qui va bientôt aller faire ses études à Paris » et je serais « adorable » si je pouvais m’occuper de lui à son arrivée dans la capitale… Au bout de cinq minutes, je commençai à me sentir jaloux. C’était pas si désagréable, jusqu’à ce que je voie le copain en question : un grand blond musclé avec une mâchoire en forme de boîte à chaussure, la raie au milieu comme les jeunes premiers. Bref rien pour plaire ce guignolo. Et aimable en plus ! Suzanne a rigolé et m’a fait un bisou sur la joue quand elle m’a vu faire la tronche.
« T’es adorable », qu’elle m’a fait ! C’est ça…


il arriverat biento a Paris cet "amit" a Suzanne?
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mer Juin 02, 2010 10:45    Sujet du message: Re: Jean et la chute du Duce Répondre en citant

gaullien a écrit:
il arrivera bientot a Paris cet "ami" de Suzanne?


Là sincèrement, vu l'évolution des événements généraux, je crois que ce n'est plus vraiment un souci...
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gaullien



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MessagePosté le: Mer Juin 09, 2010 14:40    Sujet du message: Répondre en citant

la résistance, elle en est ou fin 42?
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gaullien



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MessagePosté le: Ven Juin 25, 2010 13:47    Sujet du message: Répondre en citant

les études de Suzanne sont vrai ou c'est une couverture?
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