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Diplomatie-Economie, Janvier 1944
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Lun Juil 12, 2021 23:02    Sujet du message: Diplomatie-Economie, Janvier 1944 Répondre en citant

Janvier 44 est presque fini. Cette partie est la dernière. Elle a bénéficié de diverses plumes, Tyler, Demo Dan, moi-même et d'autres, sûrement.


1er janvier


2 janvier

L’orgueil d’un amiral
Mobilisation diplomatique tous azimuts
Palais Sándor (Budapest)
– Au gouvernement hongrois, chacun espère désormais que l’année 1944 sera meilleure que l’année 1943 – au vu de la succession de désastres qui a rythmé cette dernière, il semble qu’elle ne saurait être pire. Miklós Kállay a réuni tout le cabinet des Affaires étrangères pour définir une stratégie permettant de négocier une sortie du conflit pour le pays. Un tel rassemblement pourrait favoriser les indiscrétions, mais il ne présente pas grand risque à Budapest : la quasi-totalité du personnel diplomatique est partisan du “Saut dehors”, hormis le cas très particulier de Döme Sztójay, tenant déclaré du nazisme et ambassadeur à Berlin depuis 1935. Autant dire que le Magyarország külügyminisztere sera muet comme une tombe – non, à bien y réfléchir, le gouvernement hongrois redoute bien davantage les gaffes et réactions impulsives de l’amiral Horthy, qui pourraient porter tort à un ouvrage aussi délicat. D’autant plus qu’il est prévu que le Régent rencontre Hitler à la fin du mois !
Nonobstant ces inquiétudes, les diplomates hongrois, aiguillonné par Kállay comme par leur ministre Jenő Ghyczy de Ghicz, identifient plusieurs pistes permettant d’approcher discrètement les Alliés.
La première passe par la Turquie. Miklós Kállay est un ami personnel de l’ambassadeur turc en Hongrie, Ruşen Eşref Ünaydin – il est donc assuré a minima de la compréhension de son gouvernement et de son entremise intéressée dans cette démarche, laquelle permettra à coup sûr de toucher une Angleterre qui disposerait de nombreux agents dans la région. Nul doute, toutefois, que les Turcs sauront faire payer ultérieurement leur compréhension.
« Nous vivons vraiment une époque étonnante, songe le noble Magyar, qui aurait pu s’imaginer que les Ottomans reviendraient à notre demande mettre leur nez dans les affaires balkaniques ? » Mais évidemment, nécessité fait loi – c'est l’avis même du Régent. En effet, ce dernier connait très bien Istanbul – et pour cause, il y a été en garnison pendant trois ans, de 1906 à 1909 (1). Il commandait alors le vapeur Taurus, chargé d’assurer la protection de l’ambassade d’Autriche-Hongrie. Résidant dans une luxueuse villa et bénéficiant d’une vie sociale très active, il avait donc eu tout loisir de tisser des liens avec la bonne société internationale. Dommage que ses principaux contacts (le Belge Villebois, le Britannique Thomas Hohler et le prince italien Colonna) ne soient plus en poste – ils auraient été plus utiles aujourd’hui qu’autrefois lors de l’annexion de la Bosnie-Herzégovine. Quoi qu’il en soit, le gisement n’en reste pas moins prometteur.
La seconde piste passe par le Portugal. Non par les Portugais, mais par le baron Andor Wodianer. Celui-ci n’est plus ambassadeur de Hongrie à Lisbonne, mais il a néanmoins choisi de rester sur place. L’homme est très introduit dans le gouvernement polonais en exil – il parait même qu’il a plus ou moins réussi à s’y faire accréditer. Kállay privilégierait bien cette carte : les Polonais sont des chrétiens corporatistes et conservateurs, amis historiques, sinon de jure, de la Hongrie, depuis les Jagellon et la révolution de 1848 (2). Horthy lui-même n’avait-il pas tenté un rapprochement avec le président Joseph Beck contre le danger russe ou allemand ? Pour cela, les Polonais avaient sollicité l’ambassadeur Andras Hory, ce qui avait conduit à une visite d’Etat du Régent à Varsovie du 5 au 9 février 1938 – une visite très mal vue par le Reich (3). Hélas, cette rencontre n’avait pas abouti, les positions de Beck et de Kánya (ministre des Afffaires étrangères hongrois à l’époque) étant de toutes évidences irréconciliables.
Par ailleurs, le Portugal offre une seconde possibilité : la France. Celle-ci n’a eu de cesse de courtiser la Hongrie depuis 1918 pour ses divers plans concernant l’Europe centrale : l’Union économique du Danube sous Tardieu, puis la Petite Entente sous Herriot. Le comte Bethlen avait d’ailleurs été reçu en 1929 à Paris à ce sujet… Bon, l’affaire avait également capoté, Paris étant incapable de promettre une révision du Traité du Trianon – mais il n’en restait pas moins que la République avait porté à bout de bras le développement économique du pays par des prêts de plus en plus importants. Qui s’en était occupé avant André Tardieu ? Ah oui, Pierre Laval… A la réflexion, ce n’est peut-être pas une bonne idée de le rappeler. Toutefois, la France a des intérêts économiques sur le Danube, c’est une réalité à elle de les défendre.
Toutefois, prendre contact avec les Français pose un problème très hongrois, issu de la dualité typique du pays. Le Régent ne croit pas en l’intercession française : « Un pays trop latin, éloigné de nos conceptions traditionnelles et dirigé de surcroît par un gouvernement infiltré par les communistes ! » Son anglophilie navale le pousserait bien davantage vers Londres que vers Marseille. Impossible d’ignorer complètement l’avis de l’amiral. Labanc contre Kuruc, catholique contre calviniste, militaire contre politique… réalisme contre utopie ?
Passer par le canal d’un pays neutre est une dernière possibilité. Mais des neutres, il n’y en a plus guère ! La Suisse et la Suède, c’est à peu près tout. Jenő Ghyczy part rendre visite à l’ambassadeur en poste à Stockholm. Et Győrgy Barcza, l’ancien ambassadeur à Londres, ira quant à lui faire une visite de courtoisie à Berne… Avec toutes ces lignes, ce serait bien le diable si la Hongrie ne remontait pas un poisson !


3 au 7 janvier


8 janvier

Commonwealth
Réunion de famille
Londres
– Commencée un peu avant Noël, la conférence des Premiers ministres du Commonwealth s’achève ce jour dans la capitale britannique. Elle est intervenue à un moment crucial du conflit mondial, qui rendait une telle réunion nécessaire. En effet, la Charte de l’Atlantique tout d’abord, puis la Déclaration des Nations Unies et enfin la Déclaration de Moscou un peu moins d’un an auparavant ont confirmé le projet d’instauration d’une organisation internationale capable de rendre les services dont la SDN avait été incapable. Il sera d’ailleurs question de cette organisation au printemps prochain, lors d’une conférence sur la côte Est des États-Unis réunissant Américains, Soviétiques, Britanniques, Français et Chinois. Et dès la fin du mois, les trois grands alliés occidentaux se réuniront aux Bermudes pour parler notamment de l’Europe d’après-guerre, alors qu’un bon quart de la métropole française, deux tiers de la botte italienne, l’intégralité de la Grèce, la moitié de la Yougoslavie, la Roumanie et la Bulgarie échappent maintenant aux griffes du Reich.
Dans ce contexte, il était grand temps pour le Commonwealth d’accorder ses violons pour espérer peser dans le monde de l’après-guerre qui se dessine de plus en plus clairement. En effet, si c’est bien la voix du Royaume-Uni qui parlera lors des prochaines échéances, Londres avait besoin du soutien des autres membres importants de ce que Whitehall considère comme l’Empire britannique. Or, ce soutien était loin d’être acquis une petite vingtaine de jours plus tôt !
En septembre 1943, le Premier ministre du Canada, William Lyon Mackenzie King, avait déclaré à la Chambre des Communes être en faveur d’une organisation internationale telle qu’elle était décrite dans la Déclaration de Moscou, c’est à dire plurielle et totalement opposée à un Commonwealth centralisé à Londres, qui ferait office de superpuissance et, avec une poignée d’autres, dirigerait la destinée du monde. « La collaboration et les consultations : Oui. L’unification dans une sorte d’institution impériale : Non. » avait résumé le Canadien. King était ainsi le dirigeant du Commonwealth à se prononcer le plus clairement sur ses intentions.
En novembre, le Premier ministre d’Afrique du Sud, le maréchal Jan Smuts, s’est prononcé en faveur d’un statu quo absolu. Ni resserrement, ni relâchement des liens entre les membres du Commonwealth, que les choses restent en l’état ! D’un point de vue personnel, Smuts a l’oreille de Churchill, qui lui accorde une grande confiance et n’hésite pas à solliciter son avis pour certaines décisions. Néanmoins, un récent discours du Sud-Africain mettant en garde contre un déferlement soviétique sur l’Europe laisse à penser qu’il va devoir préciser un peu plus son opinion sur l’organisation du monde de demain.
Dans le Pacifique, le Premier ministre d’Australie, John Curtin, est toujours en faveur d’un Secrétariat impérial et d’une plus grande unité du Commonwealth, ce qui contraste fortement avec les velléités de ses prédécesseurs, qui tendaient vers plus d’autonomie. Le Premier ministre de Nouvelle-Zélande, Peter Fraser, est carrément en faveur de l’unité du Commonwealth, afin que celui-ci soit l’une des futures superpuissances du monde d’après-guerre.
Avec des participants aux vues aussi éloignées que celles de King et de Fraser, c’est donc au Royaume-Uni, qui accueille cette Conférence impériale, d’arbitrer pour dégager une forme de synthèse, autant que faire se peut. En effet, si la délégation britannique a été partie prenante de la Charte de l’Atlantique, de la Déclaration des Nations Unies et de la Déclaration de Moscou, Londres considère que toutes ont été énoncées en des termes assez généraux. Et que ce n’est que prochainement qu’il va falloir s’accorder sur leurs implications concrètes.
Pendant près de trois semaines, le cabinet du Prime minister a eu l’occasion d’échanger avec les délégations du Commonwealth. L’Australie est principalement représentée par John Curtin et le Haut-Commissaire Stanley Bruce. Le Canada, par Mackenzie King et le Haut-Commissaire Vincent Massey. La Nouvelle-Zélande, par Peter Fraser et le Haut-Commissaire Bill Jordan. L’Afrique du Sud, par Jan Smuts et le Haut-Commissaire Deneys Reitz, accompagnés du Premier ministre de Rhodésie du Sud, Godfrey Huggins. Il faut faire une place à part à l’Inde, représentée par Hari Singh, maharajah de Jammu et du Cachemire, et par Sir Feroz Khan Noon, délégué en charge de l’Inde au ministère de la Guerre. Si, en tant que telle, cette délégation pèsera peu dans la conférence de Londres, elle sera au centre de nombreux échanges semi-officiels qui déboucheront dès 1945 sur la transformation de l’Inde en Dominion. Cette mutation, permise par la solidité de la puissance impériale au sortir de la guerre, devait permettre plus tard une accession sereine à l’indépendance.
Comme souvent lors de conférences de ce type, une grande déclaration commune vient conclure les entretiens. Même si le Canada a fait preuve de sa volonté d’autonomie et de son désir de jouer un rôle diplomatique plus important dans le monde d’après-guerre. Même si l’Australie a montré que son positionnement résultait en fait de sa volonté de voir un Commonwealth réorganisé en zones d’influence, qui lui permettrait d’avoir la charge de la responsabilité de la politique commune de l’organisation concernant tout le Pacifique Sud. L’Afrique du Sud a semblé intéressée par ce projet, qui lui semble permettre de faire contrepoids aux influences grandissantes des États Unis et de l’Union Soviétique. La Nouvelle-Zélande, quant à elle, est très favorable à l’idée d’une organisation internationale viable (elle avait auparavant une bonne opinion de la SDN) qui puisse préserver la sécurité et la paix du monde d’après-guerre. Enfin, quoi qu’il en soit, le Royaume-Uni veut par-dessus tout donner l’impression d’avoir un bloc derrière lui, pour ne pas sembler en position d’infériorité dans les prochaines négociations avec les États-Unis et l’URSS.
C’est le sens de la déclaration commune : « Nous affirmons qu’après la guerre, une organisation mondiale maintenant la paix et la sécurité devra voir le jour et être dotée d’un pouvoir et de l’autorité nécessaire à prévenir les agressions et la violence. (…) Nous avons aussi examiné ensemble les principes qui détermineront nos politiques étrangères et leur efficacité à résoudre les problèmes. »
Cet accord de principe soutient la Déclaration de Moscou. Tout en concédant aux Dominions une certaine pluralité de voix, le Foreign Office a globalement obtenu ce qu’il désirait avant que Churchill et Eden se lancent dans une grande tournée diplomatique qui verra se dérouler dans les prochains mois les conférences des Bermudes, de Dumberton Oaks, de Bretton Woods et probablement, d’ici les élections présidentielles américaines, la fameuse grande conférence quadripartite incluant les Soviétiques.
Mackenzie King va rentrer au Canada après ce qui apparaît comme une grande victoire pour lui, ayant réussi à faire entendre la voix de son pays à l’échelle internationale. Curtin, en Australie, voudra donner une impression similaire, même si la presse de son pays sera moins enthousiaste. Fraser fera une escale en Grèce et en Yougoslavie, à la rencontre des troupes néo-zélandaises déployés sur place. Enfin Smuts, en tant que militaire de haut rang, aura le privilège de faire en compagnie du Prime minister Churchill une inspection générale des troupes présentes au Royaume-Uni avant le prochain débarquement sur les côtes françaises.


9 janvier
Opération Moïse
Un (petit) coup de main allié
Alger
– Lettre de Donald A. Lincoln à la direction du New York Herald.
« Comme vous le savez, je prends en ce moment quelques jours de repos à Alger avant de retourner sur le front. Un contact français m’a signalé un débat d’actualité intéressant à l’Assemblée Nationale, qui a décidé, au moins pour l’instant, d’attendre la Libération de Paris pour rentrer en Métropole. Il semble que les rumeurs insistantes sur la gravité des persécutions antijuives organisées par les Allemands dans toutes les zones sous leur contrôle soient fondées. On savait qu’ils déportaient des Juifs, hommes et femmes, enfants compris, vers des camps de concentration situés en Pologne. Cependant, il semble bien que ces camps ne soient pas des camps de travaux forcés, mais des lieux où ces malheureux seraient purement et simplement massacrés. Le gouvernement français a décidé d’utiliser son aviation (et sans doute la Résistance armée) pour perturber la circulation des trains de déportés.
Le débat d’actualité a mis en accusation, bien sûr, la barbarie nazie, mais a surtout mis en avant dans l’action décidée par le gouvernement le fait que les Allemands déportent des citoyens français, laissant de côté le fait qu’il s’agisse de Juifs (et souvent de Juifs étrangers réfugiés en France). Un député communiste a exigé que le gouvernement demande l’aide de la RAF et de l’USAAF « pour protéger des Français qui souffrent, alors que les civils anglais et américains sont à l’abri » et une requête en ce sens va être adressée à Londres et Washington.
Je me tiens à votre disposition pour un article complet sur cette histoire, avec interview de quelques responsables ; il serait intéressant de savoir ce qu’en pense notre gouvernement. »

La rédaction du New York Herald se contentera d’indiquer à Lincoln que l’affaire était suivie par le service Politique, mais aucun article ne sera publié.
………
« La RAF et l’USAAF devaient accepter de prêter la main aux Français, non sans réticence et seulement parce qu’il s’agissait de protéger des citoyens de leur allié. Chacune des deux forces aériennes organisa en février 1944 un unique raid de bombardement à haute altitude, ciblant ce qui était identifié comme « une gare de triage des trains de déportés ». Il n’y eut aucun raid en Pologne, considérée comme trop éloignée et devant être bientôt libérée par les Soviétiques. Des Lancaster bombardèrent Dachau de nuit le 5 et des B-17 bombardèrent Ravensbrück de jour le 12. Ironie : ce n’était pas des camps d’extermination, mais de concentration, avec un secteur “politique”. L’imprécision bien connue de ces bombardements se manifesta une fois de plus : le réseau ferré alimentant ces camps fut sévèrement touché, mais les baraquements des prisonniers et les logements des gardiens furent atteints. Les bombes firent de nombreux morts des deux côtés, justifiant le refus des états-majors anglo-saxons d’effectuer d’autres missions de ce genre.
Cependant, au printemps 1944, quand l’administration des camps envisagea, devant l’avance soviétique, de recréer en Allemagne des installations d’extermination supprimées en Pologne, elle y renonça dans ces deux cas en raison des dégâts subis en février. »

(D’après A. Wievorka, La Libération des Camps, in n° spécial de L’Histoire, juillet 1994, La Chute du IIIe Reich).


10 janvier
Principauté
Vive la guerre…
Monaco
– L’adjudant (nouvellement promu) Grimaldi Rainier, du 7e Régiment de Tirailleurs Algériens, aura attendu que son grand-père honni ait pris ses quartiers d’exil aux Baléares en compagnie de son « grand amour », l’intéressée Ghislaine Dommanget, pour se rendre dans “sa” Principauté, que bientôt il gouvernera. Durant ses trois jours de permission-visite officielle, il se concentrera surtout sur ses retrouvailles avec sa mère et sa sœur. Mais ce qui va marquer les interlocuteurs du Prince et les témoins de ses apparitions publiques, c’est sa prestance. Grâce, peut-on dire, à la guerre, Rainier a laissé derrière lui son image de prince nonchalant du gotha européen pour celle d’un jeune homme qui a mûri et que l’épreuve du feu a préparé aux responsabilités qui seront bientôt les siennes.
Pas de déclaration officielle pour le jeune prince, mais il a fait distribuer de nombreux tracts comportant notamment cette profession de foi :
« Durant les quatre dernières années de guerre, j’ai été témoin avec vous des méfaits de la politique hasardeuse des individus qui avaient réussi à obtenir la bienveillante confiance de SAS le prince souverain, mon grand-père. Cette politique nous a fait perdre le rang et le rôle que nous aurions dû tenir et nous a privés de notre neutralité et de notre indépendance. J’ai assisté impuissant à l’évolution des événements, sans jamais m’y associer mais sans jamais pouvoir les combattre.
Aujourd’hui, plus que jamais, il faut que notre pays soit considéré comme un État souverain indépendant et neutre. Pour cela, il faut aux Alliés une garantie. Je leur offre cette garantie. C’est pourquoi j’ai voulu m’engager dans les rangs d’une armée alliée : l’armée française. Je n’ai demandé à aucun de mes compatriotes de me suivre, je demande à tous de me comprendre. Je ne désire qu’une chose : conserver votre confiance et votre affection, qui m’ont si souvent donné courage. Que Dieu vous protège ! Que Dieu protège Monaco notre chère patrie ! »



11 janvier
Royaume-Uni/URSS
A l’est, rien de nouveau ?
King Charles St, Westminster (Londres)
– Pendant que les cieux déversent une nouvelle couche de neige sur les Balkans, le Foreign Office, en la personne du ministre Anthony Eden himself, prend langue avec l’ambassade soviétique afin d’évoquer les difficultés de… compréhension mutuelle que les armées alliées, Rouge et occidentales, rencontrent actuellement à la frontière yougoslave. Ne reculant devant aucune circonlocution diplomatique, les Britanniques évoquent longuement « l’intérêt tout particulier que le gouvernement de Sa Majesté voue à cette partie du monde », leur « désir d’une coopération sans arrière-pensées pour la victoire commune », l’importance « de s’accorder sans tarder sur des contingences techniques sans aucune implication politique » (il s’agit des réseaux ferrés balkaniques) et même « le souhait d’une rencontre au plus haut niveau pour évoquer l’avenir des nations concernées ». Une formulation vague, qui n’engage pas à grand-chose mais veut pourtant en dire beaucoup.
Sir Anthony, en conclusion, croit toutefois bon de préciser : « La rencontre que nous envisageons entre les représentants de nos deux grands peuples ne doit pas faire négliger le règlement rapide des difficultés techniques mentionnées auparavant. Dans ce but, nous apprécierions infiniment un arbitrage de votre part auprès des nations cobelligérantes concernées – arbitrage que nous espérons évidemment favorable et rendu dans des délais raisonnables. »
Pour Eden, « dans des délais raisonnables » veut dire : au plus vite. Mais à Moscou, Molotov trouve que si les alliés capitalistes de l’Union Soviétique veulent quelque chose, ils doivent comprendre que les communications ne sont pas encore pleinement rétablies entre Moscou, Bucarest et Sofia. La faute aux anciens régimes monarchiques et… capitalistes, n’est-ce pas ?


12 janvier
Royaume-Uni/URSS
A l’est, rien de nouveau ?
Kremlin (Moscou)
– Le maréchal Staline est amusé. Ce n’est pas forcément de bon augure pour ses interlocuteurs – présentement, le ministre des Affaires étrangères Molotov. Mais cette fois, le Petit Père des Peuples paraît sincèrement amusé par la proposition d’une entrevue directe avec le Premier Britannique émise la veille par Londres. « Alors comme ça, notre ami Churchill veut discuter avec moi ? Sans les Américains ni les Français ? Les habitudes ont la vie dure, on dirait, Viatcheslav Mikhaïlovitch ! »
– Evidemment, Camarade Secrétaire général. Mais cette circonstance est également porteuse d’opportunités. Elle révèle la faiblesse des Occidentaux, qui tentent désormais de marchander ce qu’ils ne peuvent arracher seuls eux-mêmes des mains d’Hitler. C’est aussi le premier signe de dissension dans le bloc réactionnaire. Nous devrions l’exploiter.
– En effet ! Hé bien, nous allons jouer le jeu. Dites à Churchill que je serai ravi de le recevoir à Moscou cet hiver ! Un homme qui sait boire comme lui, c’est toujours un plaisir !
– Avec joie, Camarade Secrétaire-général ! Avez-vous aussi vu que leurs généraux sollicitent maintenant nos moyens logistiques pour leur campagne ?
– Oui. Qu’en pensent les départements concernés ?
– Ils s’adapteront si on leur en donne l’ordre. Le Camarade Beria et le NKVD paraissent plus réservés. Mais nos services collaborent déjà avec les Occidentaux pour ce qui concerne les convois maritimes de Mourmansk et de mer Noire, les communications terrestres par l’Iran et les livraisons aériennes par la Sibérie… Leurs procédures sont au point – au besoin, les éléments indésirables seront évacués de la région.
– Parfait. Je vais donner l’ordre qu’on se prépare à tenir la main à nos amis britanniques et à leurs auxiliaires dans les Balkans. Mais attendons qu’ils nous relancent pour donner officiellement notre accord. Nous sommes déjà magnanimes – paraissons généreux.



13 janvier
L’orgueil d’un amiral
Premiers contacts, premiers doutes
Athènes
– Dans les bureaux du SOE situés en territoire britannique – c’est-à-dire dans les murs de l’ambassade – Basil Davidson, chef de la “Balkan Section”, reçoit les rapports de ses agents en terre magyare. Ces derniers corroborent globalement les intentions manifestées par les Hongrois lors de leur prise de contact via la Turquie : le gouvernement de Budapest est déterminé à arrêter les frais et à sortir du conflit, essentiellement avec l’aide de l’Angleterre. En effet, le Régent a bien conscience que la guerre contre l’URSS tourne au désastre – et il constate aussi que la présence inespérée des armées du général Montgomery à la frontière sud de son pays pourrait ouvrir une issue pour lui éviter un avenir collectiviste.
Jusqu’ici, rien d’étonnant pour le Britannique. Dans un geste de bonne volonté, Miklós Kállay a déjà suggéré qu’il était disposé à envisager l’évacuation vers la Yougoslavie des populations les plus exposées aux représailles nazies, c’est-à-dire les Juifs, dans l’attente de l’intervention directe des armées alliées. Et les militaires hongrois, tels les Italiens un an plus tôt, se proposent de garder ouverte au prix de leur sang la route de Budapest pour que les chars de Monty devancent la Heer. Des arguments habiles, auxquels les Nations-Unies ne peuvent évidemment qu’être sensibles.
Toutefois, les mots ne peuvent pas tout. Or, comme le précise plus loin le lieutenant-colonel Charles Telfer Howie, en pratique, le régime hongrois n’envisage pas de céder un pouce des territoires tchécoslovaques et roumains sur lesquels le Reich leur a accordé la souveraineté. Quant au annexions polonaises et yougoslaves, les Magyars n’envisageraient de les lâcher que dans le cadre d’une négociation globale renvoyée à l’après-guerre, selon une démarche que le sergent “Tom” Weinstein n’hésite pas à qualifier de « naïve ». Dans le fond, il semble bien qu’à Budapest, on estime que les arbitrages de Vienne sont désormais des gains de plein droit et des possessions inaliénables du peuple magyar. Pour les Hongrois, les Alliés ne sauraient décemment procéder à un nouveau « dépeçage » de la Hongrie.
Basil Davidson lève désormais les sourcils aussi haut que sa nationalité britannique le lui permet pour exprimer sa plus extrême réserve. De pareilles prétentions ne peuvent que causer de grosses difficultés politiques – sans même commencer à évoquer les aspects pratiques d’un éventuel basculement. Grâce à ses subordonnés, le correspondant du SOE a pu se familiariser avec les subtilités du pays, ainsi qu’avec ses préoccupations. Il sait bien que les Hongrois ne pensent pas à mal. Dans leur esprit, ils sont dans leur droit et accumulent les gestes de bonne volonté pour convaincre de la sincérité de leur retournement. Toutefois, ce qui est clair pour un agent du SOE ne l’est pas forcément pour un politique : vu de Londres ou de Marseille, on pourrait croire à un marchandage mené sur le dos des Alliés “mineurs” d’Europe centrale et des déportés. Voilà qui ne risque vraiment pas de faire plaisir à tout le monde, c’est le moins que l’on puisse dire.
Basil Davidson fait suivre les rapports à Londres, avec ses commentaires détaillés – aux responsables de prendre une décision. Dans l’attente, il ordonne à ses agents de poursuivre leurs observations sans s’exposer. Il n’est même pas sûr que les forces britanniques entrent un jour en Hongrie… Mais si ces dernières devaient le faire, il serait souhaitable qu’elles ne tardent pas trop : les forces du Reich s’agitent tandis que les Croix-Fléchées de Ferenc Szálasi resserrent chaque jour un peu plus leur emprise sur l’armée et le monde politique. « Est-il bien raisonnable de la part des gouvernants hongrois d’être aussi exigeants en de telles circonstances ? » conclut finalement le chef de la Balkan Section – une réflexion qui transparaît aussi dans son rapport.


Notes
1- Horthy, marin mais aussi cavalier émérite, en profitera pour gagner le Grand Prix d’équitation du Bosphore.
2- La dynastie des Jagellon, d’origine polonaise, régna sur la Hongrie jusqu’à l’invasion ottomane. Durant la révolution de 1848, de nombreux volontaires polonais vinrent aider les Hongrois à combattre la répression autrichienne. Et dans les années 1930-40, le principal parti politique d’opposition hongrois était le parti chrétien socialiste, infiniment plus chrétien que socialiste.
3- Goebbels notera avec rage dans son Journal : « Horthy a été reçu à Varsovie comme un empereur ! »
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MessagePosté le: Mar Juil 13, 2021 12:24    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Toutefois, la France a des intérêts économiques sur le Danube, c’est une réalité à elle de les défendre.

Ne manque-t-il pas un signe de ponctuation ?

Citation:
Et dès la fin du mois, les trois grands alliés occidentaux se réuniront aux Bermudes pour parler notamment de l’Europe d’après-guerre

Sans la France ?

Citation:
Si, en tant que telle, cette délégation pèsera peu dans la conférence de Londres, elle sera au centre de nombreux échanges semi-officiels qui déboucheront dès 1945 sur la transformation de l’Inde en Dominion

Toujours pareil, je pense qu'il ne faut pas être affirmatif. Plutôt quelque chose comme "de nombreux échanges semi-officiels qui pourraient déboucher sur la transformation de l’Inde en Dominion" (sans date)
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MessagePosté le: Mar Juil 13, 2021 12:50    Sujet du message: Répondre en citant

1) Oui bien sûr.

2) les trois grands alliés occidentaux… avec la France, donc…

3) Là, ça se discute… Evidemment, il faudrait dire "à suivre, ne manquez pas nos tomes sur 1945, 46, 47 et 48…"
Une voie moyenne c'est de le "reléguer" en NDE…
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MessagePosté le: Mar Juil 13, 2021 23:33    Sujet du message: Répondre en citant

14 janvier
Les Balkans compliqués…
Le discours d’un presque roi
Athènes
– Loin des conspirations et autres manœuvres obscures menées en terres païennes ou catholiques, les pays orthodoxes de la région fêtent (à leur tour) la Nouvelle Année. A la radio nationale grecque, les auditeurs ont la surprise d’entendre le régent Paul – pour beaucoup, c’est la première fois qu’ils ont l’occasion de l’écouter s’exprimer en public.
Paul connait très bien l’état de sa Nation. Et il a également compris que le geste – inattendu et spectaculaire – de son frère, le 28 octobre dernier, ne suffira évidemment pas à rassembler son pays si divisé. Encore aujourd’hui, la Grèce ne semble rester unie que par les exigences de la guerre et dans la perspective de la victoire prochaine. Aussi, choisissant avec soin ses mots, le souverain (car c’est bien son rôle) se garde bien de toute envolée lyrique ou de triomphalisme. Au contraire, il prononce un discours bien davantage centré sur le Royaume, insistant sur les sacrifices consentis, rendant hommage aux combattants, sans oublier de remercier « nos valeureux alliés pour leur soutien constant, par le sang comme par le fer. Grâce à leur générosité, les militaires grecs des trois armes découvrent en ce moment même les nouveaux moyens qui leur sont offerts pour vaincre l’ennemi ! » Puis il conclut : « La fin du conflit permettra, dans la paix, la régénération de notre système politique et le retour de notre Royaume dans le concert des plus grandes Nations – en somme : le renouveau de la Grèce éternelle. »
Continuité mais renouveau – ne dit-on pas que le Christ lui-même descendit au Shéol pour briser les liens de la Mort et libérer ses prisonniers, dont les rois David et Salomon ? Sur ces saintes pensées, le régent se prépare pour aller à la messe – en compagnie de ses enfants mais toujours sans sa femme, Frederika de Hanovre, qui restera cachée dans une loge.

Le discours d’un roi débutant
Belgrade
– Pierre II Karađorđević prend lui aussi la parole sur Radio Belgrade pour célébrer le Nouvel An orthodoxe, mais dans un esprit bien différent de celui du régent grec. En effet, bien moins soucieux de soigner les plaies purulentes de son pays que de venger les morts (et de consolider son pouvoir personnel), le roi de Yougoslavie se livre à un vibrant appel « au patriotisme de tous les Yougoslaves et à leur mobilisation totale, jusqu’à ce que la Bête soit débusquée de sa tanière, saignée et achevée ! »
Jusqu’ici, rien qui surprenne vraiment les Occidentaux – dans la culture pour le moins martiale du pays, c’est, disons, de bonne guerre. Toutefois, la suite paraît plus aventurée : « Les martyrs de Belgrade ne seront pas oubliés. Ainsi, la Pozorišni Trg [la place du Théâtre], où se trouvait la statue du roi Michel, détruite par les mains impies des envahisseurs, deviendra un lieu de recueillement et de dévotion. Car j’ordonne que les dépouilles de nos immortels héros soient enterrées en ce lieu, pour qu’il devienne le cœur sacré de la Nation. »
Voilà qui n’est pas vraiment raisonnable. Canoniser ainsi d’authentiques bandits de grand chemin, Résistants de la onzième heure, sinon de la vingt-cinquième, et dont les mains étaient couvertes de sang non-serbe (et parfois serbe, d’ailleurs…), enverra à coup sûr un très mauvais signal aux autres ethnies du pays (1).
Le roi conclut : « Je l’ai déjà dit l’année passée – et je le redis, car ma détermination n’a pas davantage faibli que la vôtre. Nous reprendrons chaque arpent de terre yougoslave, de Trieste jusqu’à Maribor en passant évidemment par Zagreb. Les traîtres à la Nation et les assassins de notre Peuple n’auront nulle part où se cacher. Qu’ils craignent le glaive de la Justice ! »
Tout le monde se hâtera d’oublier pour l’instant la revendication portant sur une ville italienne, c’est-à-dire cobelligérante… En revanche, les Croates sont une fois de plus prévenus. Pierre ne leur fera aucun cadeau.

Tentative de conciliation
Alger
– Mais il n’est pas encore temps de contrarier le jeune roi… pas encore du moins. De son bureau de la Rue Michelet (où il passe encore une grande partie de son temps pour des raisons pratiques), le ministre des Affaires étrangères Léon Blum prend contact avec son homologue yougoslave, Momčilo Ninčić, afin de tenter de rapprocher l’AVNOJ du gouvernement royal. L’amorce paraît modeste – Blum propose simplement de servir de médiateur pour concilier les points de vue de chacun et former un gouvernement « représentatif des opinions de la totalité des citoyens de Yougoslavie, toujours, cela va sans dire, sous l’autorité de Sa Majesté Pierre II. »
Hélas, le Yougoslave peine à dissimuler son manque d’intérêt pour la suggestion : « Pourquoi devrions-nous, Monsieur le ministre, négocier avec des bandits de montagne qui rejettent notre autorité et ne sont même pas soutenus officiellement par Moscou ? Nous sommes l’autorité légale en Yougoslavie, ces gens-là sont dirigés par un repris de justice qui a fait cinq ans de détention dans nos geôles. Il n’y aucune raison que nous nous abaissions à négocier avec lui, alors que notre pays fait partie des Nations-Unies… et que notre gouvernement a les meilleures relations avec les Alliés et en particulier avec la République Française, n’est-ce pas ? »
Léon Blum ne peut que battre en retraite, du moins pour l’instant. A l’évidence, l’approche directe ne fonctionnera pas – mais si l’AVNOJ venait à la rencontre de Pierre II, que se passerait-il ? Le ministre français décide de consulter qui de droit à ce sujet dans les prochains jours. Qui de droit, c’est-à-dire Moscou, bien sûr…


15 janvier
Diplomatie française
Passage de relais Daladier/Darlan
Ambassade de France aux États-Unis (Kalorama Road, Washington DC)
– C’est une des soirées les plus courues de la semaine : le départ de l’ambassadeur de France, Edouard “Bull” Daladier (2), qui retourne sur ses terres natales dorénavant libérées et qui est remplacé en grande pompe par l’amiral Darlan, le chef d’orchestre de Dragon – sous la supervision de Dwight Eisenhower, bien entendu (l’Américain est presque aussi cocardier que le Français). Ainsi, après avoir été en quatre ans Amiral de la Flotte, ministre de la Marine, Chef des Opérations Combinées, François Darlan est maintenant Ambassadeur auprès du « plus vieil allié de la France ». On comprend qu’il rayonne de satisfaction…
Il y a aussi de quoi rayonner pour Daladier, qui aura dignement représenté la France auprès d’États-Unis entrés en guerre peu de temps après son arrivée à Washington. Un retour dans son Vaucluse natal est une perspective réjouissante… Tout comme est réjouissante celle de remettre la main sur son Parti radical alors que des élections devraient être organisées dès la Libération du territoire national. Le “Taureau du Vaucluse” va pouvoir retrouver l’arène parlementaire de la Troisième République !
Mais derrière les sourires de façade, les toasts à rallonge et les flashs des photographes, Daladier et Darlan ont bien du mal à sourire franchement.
Le premier n’est pas sans savoir que d’ici quelques mois, à Washington, se tiendra une grande conférence diplomatique entre les Cinq Grands, censés organiser les futures institutions mondiales devant supplanter la Société des Nations. Le genre d’événement qui marque l’Histoire mondiale. Et qui aurait pu lui faire oublier une certaine conférence bavaroise… Le second, qui a déjà dû partager la gloire de la réussite de l’opération Dragon avec Eisenhower, voit celle qu’il prévoit pour l’opération Overlord lui échapper totalement au profit de son ancien second, l’amiral Ramsay. Et lui, ce n’est pas cette conférence de diplomates qui le consolera, pas plus que la conférence économique prévue dans quelques semaines !
Ce soir, pour des raisons différentes, le nouvel ambassadeur de France aux États-Unis partage avec le sortant l’impression qu’ils vont encore rater le train express de l’Histoire et devoir se contenter d’un tortillard…

Les Balkans compliqués…
A l’est, rien de nouveau ?
Kremlin (Moscou)
– Le bureau du maréchal Staline reçoit une nouvelle dépêche en provenance de Londres – sensiblement moins aimable que la précédente. En effet, Sir Anthony y exprime « au nom du gouvernement de Sa Majesté, sa plus vive préoccupation quant aux événements survenus hier vendredi 14 janvier 1944 aux environs de Mihajlovac (Yougoslavie). Ces agissements, qui constituent une douloureux faux-pas dans les relations que nos deux Nations entretiennent et dans la lutte qu’elles mènent conjointement contre le Reich, réclament de votre part une réaction rapide et salutaire. Nous restons bien sûr pleinement convaincus du caractère purement accidentel de ce désagréable incident, qui ne saurait nullement à lui seul entacher la chaleur de nos relations. Toutefois, nous estimons que cet épisode rend d’autant plus nécessaire la rencontre bilatérale que nous vous proposons d’organiser sous peu. Dans cette attente, nous ne doutons pas que vos services sauront faire les gestes appropriés pour rapprocher le jour de notre Victoire commune. »
Face au Premier Secrétaire siègent Molotov bien sûr, mais aussi Beria. Le NKVD relève de sa responsabilité – et même s’il ne sent pas vraiment en danger, « l’incident regrettable » évoqué par les Britanniques appelle une réponse de la part de ses services. Staline ne se prive d’ailleurs pas de le lui rappeler avec une feinte douceur : « Enfin, Camarade chef du NKVD, que s’est-il passé ? Nos vaillants soldats se sont-ils sentis menacés par quelques sapeurs de l’Angleterre capitaliste ? »
Béria n’oublie pas le sort qu’il a lui-même infligé à son prédécesseur Nikolai Iejov. Il sait que son pouvoir est de plus en plus encombrant pour le Petit Père des Peuples, qu’il gêne autant qu’il le sert. S’il lui reste utile pour tenir le pays en temps de guerre, qui sait ce qui pourrait arriver une fois les Fascistes vaincus. La bêtise de certains de ses subordonnés fragilise donc son assise et donne à son patron une accusation qu’il n’a même pas à inventer ! C’est pourquoi, en bon communiste, il doit faire son autocritique et proclamer sa culpabilité dans l’exécution des ordres donnés par l’infaillible Staline… Quitte, évidemment, à rejeter immédiatement la faute sur plus petit que lui.
– Un détachement de garde-frontières de la 140e Division d’Infanterie (3) commandé par le lieutenant Iolkov était effectivement déployé sur la frontière ouest de la Roumanie pour interdire toute intrusion de saboteurs ou d’espions fascistes – après plus de deux ans d’occupation allemande, ils pullulent en Yougoslavie. Les directives données ne visaient nullement nos partenaires britanniques – j’ai bien entendu lancé une enquête interne pour identifier d’où vient la défaillance. L’unité des garde-frontières n’est pas en cause dans son ensemble – elle était là pour empêcher l’infiltration des Réactionnaires, elle a fait du zèle de façon sans doute bien intentionnée, mais inopportune.
On notera le subtil glissement du discours qui passe des Fascistes aux Réactionnaires, terme dont la définition est bien plus large.
– Allons, Lavrenti Pavlovitch ! Les soldats du NKVD ne sont pas mis en accusation ! Pas plus que vous, en vérité : vous ne pouvez tout de même pas surveiller tout le monde et être en personne derrière chaque citoyen soviétique !
Une boutade à laquelle chacun rit de bon cœur… comme il se doit. Puis Staline se tourne vers Molotov : « Camarade ministre, nous pouvons bien sûr réparer cette bêtise ? »
– Certainement, Camarade Premier Secrétaire ! J’ai déjà pris la liberté de faire rédiger une lettre de réponse que voici.
(A ces mots, il présente à Staline un parapheur contenant un unique document, que le Premier Secrétaire entreprend de consulter avec une bonhomie de propagande.) Nous expliquons aux Britanniques que nous regrettons évidemment toute cette affaire, qu’il s’agit d’une initiative isolée d’un responsable local déjà sanctionné, et que nous tenons au moins autant qu’eux à l’union de nos Nations jusqu’à la chute du Reich. Nous leur précisons aussi que les responsables de leur logistique sont les bienvenus, et que nous allions justement leur signifier notre accord pour les petits travaux et les transports ferroviaires dont ils ont besoin. Toutes les facilités raisonnables seront à notre charge évidemment.
Attentif à ce discours, Staline hoche la tête pour approuver, mais paraît aussi se renfrogner – il manque quelque chose. Mais Molotov sait bien de quoi il s’agit…
– Toutefois, Camarade Maréchal, je précise aussi à nos alliés que leurs hommes ont fait preuve d’une imprudence certaine en traversant le Danube comme cela – nos soldats n’étaient pas informés, ils auraient pu les prendre pour des Fascistes en fuite et les abattre. Toutes les prochaines… excursions des Capitalistes devront être déclarées à mes services, pour le bien de tous.
– Parfait, Viatcheslav Mikhaïlovitch ! C’est ce qu’il faut.

Staline se saisit d’un stylo délicatement doré et signe le document d’un rapide trait bleu.
– Vous voudrez bien envoyer quelqu’un porter ceci à l’ambassadeur britannique dans les meilleurs délais. Et relancez chaleureusement ce dernier pour qu’il nous indique à quelle date ce cher Winston désire nous rendre visite. De notre côté, nous allons faire comprendre à ce cher Pierre Karađorđević, deuxième du nom, qu’il doit se soucier de l’avis de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques, qui a les meilleures relations avec ses protecteurs occidentaux.
– Bien, Camarade Maréchal.

Les deux hommes sourient – à l’instant où ils se parlent, leur ambassadeur à Alger prépare une déclaration qui devrait changer deux ou trois choses dans les Balkans.
– Bien. Alors c’est réglé. Ou presque… Lavrenti Pavlovich, que fait-on de votre lieutenant… Iolkov, c’est ça ?
– Il est déjà en route vers Vorkouta, Camarade Maréchal.


Nobles ambitions et basses cuisines
Belgrade
– De son côté, le roi de Yougoslavie Pierre II n’a pas de temps pour les manigances diplomatiques : il prépare son pays à la guerre. Enfin, il essaie – et cela n’a rien d’évident au vu de l’état de son industrie, déjà loin d’être l’une des plus développées d’Europe avant l’Occupation – laquelle n’a bien sûr rien arrangé, au contraire.
Pourtant, il faut offrir au plus vite aux valeureux soldats du Roi, anciens exilés ou tchetniks, les moyens de se battre – et pas uniquement par la fourniture d’armes étrangères. Les finances du Royaume ne sont guère extensibles, et même si la loi Prêt-Bail semble lever cet obstacle, les fournisseurs (en général, les Américains, directement ou par l’intermédiaire des Français) en profitent bien trop pour mettre le nez dans les affaires internes du Royaume. Par ailleurs, il ne faut pas négliger, non plus, les considérations liées à la pauvreté qui ravage le pays et favorise le collectivisme. Bref, Pierre II souhaite que tout le monde soit au plus tôt à son poste – au front ou à l’usine.
Mais par où commencer ? La tâche est immense et les moyens dérisoires ! Sans trop prendre la peine de consulter son ministre de l’économie Juraj Šutej (un Croate…), le roi rend ses premiers arbitrages. La réouverture des manufactures Krušik à Valjevo et des fonderies Zastava à Kragujevac sont des priorités, celle des mines du Kosovo devra suivre immédiatement après – la reprise en main rapide et vigoureuse de cette province n’en est que plus nécessaire. C’est pourquoi, en complément des forces alliées, Pierre II prévoit de solliciter les milices loyalistes locales, qui devraient certainement être plus… énergiques que les Occidentaux pour pacifier le pays. Si elles se montrent efficaces, on pourra ensuite les redéployer ailleurs…
L’usine de munitions FOMU d’Užice est encore sous le joug de l’ennemi – il faudra faire sans elle. Pour les camions et autres engins motorisés… rien à faire, la Yougoslavie n’en produisait pour ainsi dire pas avant 1939, cela n’a pas changé depuis ! Pourtant, il est nécessaire, voire vital pour l’unité du Royaume, que la Victoire vienne – au moins en partie – de mains yougoslaves équipées de matériels locaux, et ce même à dose homéopathique. Il faudrait donc quelque chose de visible, identifiable par tous… Pourquoi pas des avions ? « Et si nous rouvrions l’usine Rogozarski de Palilula, au nord de Belgrade ? Elle a produit des appareils tout à fait convenables (4) – et elle a même servi de couverture à un trafic de moteurs très utiles aux Français en 40 ! » Le roi note de demander le soutien de Léon Blum à ce sujet. Qu’il oublie sa futile suggestion sur le devenir de l’AVNOJ et qu’il se préoccupe plutôt de soutenir un vrai projet utile !


16 janvier
Les Balkans compliqués…
Enthousiasme sincèrement intéressé
Moscou
– L’ambassadeur d’URSS en Yougoslavie Viktor Plotnikov, bien qu’officiellement sans affectation depuis 1941, annonce par télégramme au ministre des Affaires étrangères Momčilo Ninčić son « retour dans les plus brefs délais sur le territoire yougoslave, afin de rétablir des relations bilatérales et égalitaires entre nos deux Nations et de favoriser la réconciliation nationale entre le gouvernement de Sa Majesté Pierre II et l’AVNOJ de Monsieur Ibar. » Cette formulation fait évidemment bondir le responsable yougoslave, sans que ce dernier ose toutefois aller jusqu’à annuler les lettres de créance du Soviétique. En effet, l’URSS vient de signifier à Belgrade, de la plus explicite des manières, qu’elle considérait équivalentes les légitimités de Tito et Pierre II à diriger le pays !
Il semble donc bien que la démarche de Léon Blum – fort heureusement inconnue du Roi et de son gouvernement – ait eu l’effet inverse de celui escompté. Loin de pousser les communistes à la négociation, le Français a ragaillardi Moscou en montrant que les Occidentaux se méfiaient du roi de Yougoslavie. La France a donc fait entrer l’Ours Rouge dans la bergerie, et le pesant animal s’efforce désormais avec sa proverbiale subtilité de parvenir à ses propres objectifs. Dans les couloirs du Quai de la Joliette comme de la Rue Michelet, on ironisera beaucoup (mais à mots couverts) sur cette curieuse maladresse d’un ministre réputé proche des communistes. Mais, polémique ou pas, une chose est certaine : le gouvernement royal a désormais des raisons de douter de son avenir… et de ses alliés.


17 janvier
Les Balkans compliqués…
Enthousiasme sincèrement intéressé
Moscou
– L’ambassadeur Viktor Plotnikov continue de mettre avec entrain les pieds dans le plat de la… macédoine yougoslave. Balayant d’un revers de main des mois de négociations menées par Momčilo Ninčić, il indique au royaume de Yougoslavie que l’URSS « ne saurait en l’état signer le traité d’amitié et de partenariat proposé par le gouvernement royal de Belgrade, tant que les relations de ce dernier avec l’AVNOJ de Monsieur Ivan Ribar [citer le président de l’AVNOJ évite bien sûr de parler de Tito] n’auront pas été clarifiées. De même, il est bien évident que le pacte de non-agression signé le 5 avril 1941 par le Maréchal Staline [qui n’était pas maréchal à ce moment, mais qu’importe] ne saurait s’appliquer qu’après un règlement pacifique de la situation politique yougoslave, intégrant pleinement les revendications légitimes de l’ensemble de sa population afin de démontrer la complète représentativité du gouvernement yougoslave. »
A l’évidence, l’ours soviétique se fait de moins en moins subtil, allant presque jusqu’à menacer de reconnaitre l’équipe de Josip Broz à la place du gouvernement de Pierre II. Par cette pression virile, il espère assurément amener le jeune roi à la table des négociations, dans une configuration très favorable au partenaire local de Moscou. Le tout sans que les capitales occidentales protestent vraiment – pour ces dernières, le mal étant déjà fait, il paraît préférable que ce soit Moscou qui joue le rôle du “méchant flic” pour ramener Belgrade à la raison.
Tout cela, l’ambassadeur yougoslave à Moscou, Stanoje Simić, va passer de longues heures au téléphone pour tenter de l’expliquer à son gouvernement – sans forcément convaincre. A Alger, puis à Belgrade, les royalistes ont depuis longtemps jugé qu’il était désormais bien plus proche des communistes que de son ministère. Ce qui est exact, mais n’enlève vraiment rien à la pertinence de son argumentation…


18 janvier
L’orgueil d’un amiral
L’oncle d’Amérique
Washington DC
– Britanniques et Français ne sont pas les seuls à avoir été sollicités par les services de Jenő Ghyczy de Ghicz. Celui-ci place beaucoup d’espoir dans une intercession des Américains, qui semblent fort compréhensifs. Ainsi, Tibor Eckhart, l’ancien ambassadeur de Hongrie à Washington, est désormais de nouveau accrédité au Département d’Etat ! Le député et ancien président de la Ligue Révisionniste doit représenter les intérêts de son pays dans les difficiles négociations qui s’annoncent. Une reprise de contact spectaculaire, dont Cordell Hull n’a pas daigné informer ses alliés européens !
Le retour d’Eckhart ne doit toutefois pas tout aux efforts du gouvernement Kállay. Otto de Habsbourg, le prince autrichien en exil, a sollicité directement – et obtenu – une entrevue auprès du président Roosevelt pour sensibiliser ce dernier à la situation délicate de son ancien royaume. Et il a même dépêché de sa propre initiative son frère cadet Louis-Charles à Lisbonne, afin d’assister le baron Andor Wodianer. Il semble bien que les aristocrates hongrois, moins anglophiles que le régent mais tout aussi antisocialistes, envisagent désormais de jouer les Etats-Unis contre l’Angleterre, si d’aventure cette dernière s’avérait trop dure en affaires.
Après tout, les Etats-Unis n’ont pas de réels reproches à faire à Budapest – comme le leur a précisé autrefois le Régent, leurs pays ne sont même pas vraiment en guerre ! Et puis, le pays du capitalisme et de la liberté d’entreprendre ne risque pas de s’entendre durablement avec le totalitarisme collectiviste de Moscou, n’est-ce pas ? Quant aux Hongrois, ils n’ont aucune envie de s’en prendre aux Américains !
………
« L’entrée en guerre du Royaume de Hongrie contre les Alliés fut la conséquence logique de l’alignement du pays sur l’Axe, mais ne fut pas pour autant appréciée par l’opinion publique magyare. Cette dernière, désireuse avant tout de voir le traité du Trianon révisé aux dépens des voisins de la Hongrie, ne parvint jamais à imaginer quel gain le pays pouvait tirer d’un conflit avec les lointains Etats-Unis. On la comprend – et la molle propagande du régime sur ce sujet n’y put jamais grand-chose. En témoigne cette plaisanterie féroce, qui courait à Budapest durant l’année 1942 et prétendait décrire l’échange entre l’ambassadeur hongrois à Washington, venu annoncer le conflit, et le Secrétaire d’Etat chargé de le recevoir. Ce dernier, peu familier de l’Europe Centrale, interroge son visiteur : « La Hongrie est-elle une République ? »
– Non Monsieur, c’est un Royaume.
– Vous avez donc un roi ?
– Non, mais nous avons un amiral.
– Vous avez donc une flotte ?
– Non, car nous n’avons pas d’accès à la mer.
– Ah… Mais avez-vous des revendications ?
– Oui.
– Envers les Etats-Unis ?
– Non.
– Envers l’Angleterre alors, ou envers la France ?
– Ni l’une ni l’autre.
– La Russie peut-être ?
– Encore moins.
– Alors envers qui avez-vous des griefs ?
– La Roumanie.
– Donc vous allez entrer en guerre contre elle ?
– Non Monsieur, nous sommes alliés avec elle contre tous les pays que vous avez cités !

L’histoire serait plus drôle si elle n’était pas rigoureusement exacte. Hélas, elle mena tout droit la Hongrie dans l’impasse de 1944, où le pays n’eut plus guère le cœur à rire. »

(Robert Stan Pratsky, Hongrie, Croatie et Slovaquie : les armées effacées, Perrin, 2008)


19 janvier
Les Balkans compliqués…
Nobles ambitions et basse cuisine
Marseille
– De ses locaux “intérimaires” du quai de la Joliette, Léon Blum, ministre des Affaires Etrangères de la République française, répond officiellement à la proposition de Pierre II Karađorđević afférente à « un éventuel soutien financier permettant la réouverture rapide des arsenaux royaux et de l’usine d’aviation Rogozarski ». Derrière un impeccable vernis diplomatique, Blum convient d’abord fort courtoisement de « l’intérêt certain de l’opération pour le royaume de Yougoslavie » (quoique moins certain pour la victoire contre le Reich). Mais c’est pour signifier aussitôt après, « à regret, que les conditions actuelles du conflit et l’étendue des ravages subis par nos deux Nations ne permettent pas d’investir conjointement des sommes aussi importantes, un rapide retour sur investissement en termes industriels comme en termes financiers ne semblant pas envisageable. Ce triste état de fait, que nous déplorons autant que Sa Majesté, sera toutefois amené à évoluer aussitôt que l’Allemagne… »
Bref : ce projet ne parait pas assez utile pour être urgent. Avec dépit, Pierre II ne peut que maudire ces Français qui, décidément, semblent bien moins désireux qu’autrefois de saisir les perches qu’on leur tend. Au train où vont les choses, les relations entre les deux pays risquent donc de s’altérer dans les mois qui viennent. Non qu’il faille prévoir une vraie tension – mais plutôt un net refroidissement. Et il ne faudra donc pas que la France se montre curieuse en plus d’être mesquine.


20-21 janvier


Notes
1- La place du Théâtre deviendra brièvement le “Cimetière des Défenseurs de Belgrade”, avant que l’intégralité des restes humains soient transférés en 1954 au Nouveau cimetière de Belgrade, à l’est de la ville, non loin du Jardin botanique. Ils y ont retrouvé des mânes moins polémiques, dont celles des victimes des bombardements de 1941 et 1943, des vétérans des guerres balkaniques et de la Première Guerre et même de certains soldats des conflits contre les Ottomans et les Bulgares ! Il faut noter par ailleurs que les soldats alliés sont bien représentés. Un mémorial conçu par Branko Bon couronne l’ensemble, le “Mémorial des Défenseurs de la Yougoslavie”. On peut s’étonner que de si importants travaux aient été menés en période de reconstruction, où l’argent manquait tant – mais le symbole était d’importance et la situation politique avait bien changé…
2- Le surnom – très officieux – donné par les Américains à Daladier vient évidemment de celui qui lui avait été attribué par la presse française : le Taureau du Vaucluse.
3- Dite Division de Sibérie, formée à Novossibirsk à l’été 1942 à partir de sections du NKVD.
4- Dont le Rogozarski IK.3, curieux chasseur monoplan à l’allure d’un croisement de Hawker Hurricane et de Morane-Saulnier 406 (les ingénieurs responsables avaient travaillé dans les deux firmes !), équipé d’un moteur de Dewoitine 520 et aux performances effectivement plus que correctes pour un appareil “local”. La vingtaine d’exemplaires construits ne put toutefois rien face à la masse de la Luftwaffe, malgré le courage indéniable de ses pilotes.
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solarien



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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 03:09    Sujet du message: Répondre en citant

Je veux pas être méchant mais je trouve la réponse de Blum envers Pierre II un peu rapide et "légère", et "personnel", je sais pas, le texte donne l'impression que Blum répond de son propre chef, sans même en parler en conseil des ministres ou de demander l'avis du président du conseil.

Surtout qu'il doit être au courant que certains site industriel d'AFN ne sont absolument pas rentable financièrement mais utile politiquement mais aussi diplomatiquement et pour la propagande interne.

C'est qu'une proposition mais il pourrait tourner la phrase de manière à donner de l'espérance à Pierre II sans pour autant s'engager totalement :
Citation:
à regret, que les conditions actuelles du conflit et l’étendue des ravages subis par nos deux Nations ne permettent pas d’investir conjointement des sommes aussi importantes, un rapide retour sur investissement en termes industriels comme en termes financiers ne semblant pas envisageable, cependant votre proposition est actuellement étudiée par le Mr X ,ministre des finances, qui verra se qui peux être fait. Ce triste état de fait, que nous déplorons autant que Sa Majesté, sera toutefois amené à évoluer aussitôt que l’Allemagne…
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Hendryk



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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 08:29    Sujet du message: Répondre en citant

C'est vrai qu'un accord, même de pure forme, de soutien à la relance de la production aéronautique yougoslave serait pour la France un moyen de maintenir une présence économique dans une région convoitée par les autres puissances, tout en se montrant généreuse à peu de frais envers le gouvernement royal--une générosité qu'elle pourra faire valoir quand viendra le moment d'imposer à Pierre II la "cohabitation" avec Tito.

Et puis il est indéniable que l'entreprise Rogozarski a été secourable envers l'aviation française dans les jours sombres de l'été 40. Un renvoi d'ascenseur serait dans l'ordre des choses.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 09:38    Sujet du message: Répondre en citant

Attention; là, c'est peut-être une erreur de Blum, mais…
1) les erreurs arrivent.
2) Blum, vieux routier de la politique, vice-président du conseil, lui-même ancien président du Conseil, peut se considérer à bon droit comme un "PdC civil" - d'ailleurs, une réponse de De Gaulle risquerait fort d'être plus sèche !
3) En effet, Pierre II commence à sérieusement casser les pieds des Franco-Anglais. Pour qu'il puisse fêter Noël à Belgrade, les forces alliées ont couru le risque d'une sérieuse défaite – certes, c'est surtout des Yougoslaves qui ont payé les pots cassés, mais quand même… Il est temps d'apprendre à ce jeune homme le respect qui est dû aux "grands Allliés".
Et puis, plus encore sans doute s'agissant de Blum… il faut éviter de se couper des Titistes en étant trop gentil avec Pierre II. Le fait même que les communistes français n'aient pas l'air d'être fans de Tito doit faire penser à Blum qu'on a de bonnes chances de décrocher l'AVNOJ de Moscou. A quoi bon aider le petit roi si c'est pour voir, sitôt les Allemands partis, la Yougoslavie devenir satellite de l'URSS ?
Tout ça milite pour attendre que le gouvernement yougoslave soit d'union nationale pour lui dérouler le tapis rouge !
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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 10:25    Sujet du message: Répondre en citant

Allons allons Messieurs - vous savez comment ca marche dans la diplomatie internationale. La réponse de Blum n'est que l'expression formelle d'une décision prise depuis une semaine, suite à des contacts à l'échelon inférieur. Il est bien connu que, dans les discussions de haut niveau, les décisionnaires sont paradoxalement coincés par les arbitrages gouvernementaux et que les vraies négociations ont lieu à l'échelon inférieur.
Ceci étant, on peut toujours un peu adoucir mais ... La vérité est que la tentative yougoslave est parfaitement transparente : s'aligner de leur plein gré sur le vieil ami francais comme les grecs l'ont fait avec les amis britanniques, en espérant que Marseille calmera Londres pour que Belgrade puisse avoir les coudées franches dans ce qui s'annonce. Un peu de cynisme ... un peu de naiveté politique aussi (à titre de comparaison OTL, il n'est qu'à voir ce qui s'est passé en 99 au Kosovo). Cependant, De Gaulle n'a pas les moyens - et puis il ne va pas non plus mettre en danger (même très marginalement) l'alliance franco-britannique pour Pierre. Cet état de fait le conduira à se diriger vers les américains, avec le résultat que l'on sait déjà et - surtout - celui qui est dans mon brouillon.
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solarien



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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 12:14    Sujet du message: Répondre en citant

Justement, ma proposition était d'utiliser l'administration française, connut pour son extrême rapidité à traiter un dossier, pour gagner un peu de temps.

En plus, on peux utiliser cela comme "indicateur" des désirs français accomplie par le roi et le gouvernement yougoslave, ils font un truc bien, on délivre une partie des fonds, ils font un truc mal, " on a besoin d'un papier pour vérifier tel chose", ou alors "on a trop dépenser pour cette période" etc etc.

Mais après, si "Dieu" veux que Pierre II se jette dans les bras de l'oncle Sam, qui somme nous pour aller contre sa décision divine.
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patzekiller



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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 12:52    Sujet du message: Répondre en citant

le 14 leon blum (son ministere) est à alger et le 19 à marseille, n'y a t'il pas un bug (ou j'ai loupé qq chose? Embarassed )
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 13:19    Sujet du message: Répondre en citant

Les deux sont bons. Blum passe encore une grande partie de son temps à Alger (voir le 14), mais ses services ont été en partie déplacés quai de la Joliette et lui-même doit faire la navette de temps en temps.
D'où peut-être un agacement qui retombe sur Pierre II… Wink
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MessagePosté le: Mer Juil 14, 2021 21:56    Sujet du message: Répondre en citant

Au final, quand la Hongrie a-t-elle déclaré la guerre aux USA (et vice-versa) ?
Cf. cette discussion tenue l'an dernier.
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En principe (moi) ...
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MessagePosté le: Jeu Juil 15, 2021 00:43    Sujet du message: Répondre en citant

22 janvier
Una, grande, libre
Don Juan pousse ses pions
Estoril (Portugal)
– Ce soir, le comte de Barcelone a le cœur léger. Depuis son arrivée dans sa nouvelle résidence, il y a un mois, tout lui sourit. Contrairement à ses craintes de l’automne passée, les tensions commerciales entre l’Espagne et les Alliés au sujet du wolfram ont repris. Les Américains, qui avaient réglé à coups de dollars le problème des ressortissants étrangers internés en Espagne, ont réinstauré au début du mois un embargo sur les produits pétroliers. Et d’après ce qu’on a pu rapporter à Don Juan, la grogne de ceux qui désirent un changement de régime a repris.
Par ailleurs, les Français ont ces dernières semaines décoré plusieurs officiers espagnols engagés dans la Légion Etrangère (et de ce fait déjà naturalisés français). Ils ont même promu général un des partisans de l’ancien régime ! Au sein du Conseil restreint de Juan III, les avis divergent. Certains interprètent ce geste comme le signe que la France, liant encore un peu plus son sort à celui des Républicains espagnols qui l’aident, a décidé d’en finir avec Franco une fois que l’Allemagne se sera rendue. Cela tombe bien : Juan ne cache pas qu’il compte beaucoup sur une pression voire sur une invasion alliée qui destituerait le Caudillo et lui permettrait de récupérer son bien, rien de moins que le trône d’Espagne. Mais d’autres conseillers considèrent que la République française vient simplement d’accueillir officiellement en son sein des exilés républicains qui combattent pour elle (et contre le fascisme), et qu’il s’agit pour les exilés en question d’une récompense qui doit les dissuader de relancer la guerre civile en Espagne.
Dans les deux cas, cela démontre bien l’isolement de l’Espagne au sein d’une Europe de l’Ouest qui bascule du côté des Alliés. Et comme le mois dernier, les Allemands ont échoué dans leur grande contre-attaque qui devait rejeter les Alliés à la mer… L’étau se resserre, pense avec ravissement Juan III, qui irait presque jusqu’à voir la couronne royale à portée de sa main… Il est donc temps de montrer à ce Caudillo de quel bois se chauffe le comte de Barcelone ! Néanmoins, il ne peut compter ni sur un soutien franc et massif de l’Armée pour effectuer un coup d’état, ni sur celui des Alliés, qui ne sont pas prêts à aller destituer par la force le chef d’un régime qui est malgré tout resté à peu près neutre tout au long de la guerre… Et il ne doit pas négliger la Phalange, qui pèse lourd dans l’Espagne de Franco. Don Juan va donc devoir se contenter de sa plume pour mettre la pression sur le Caudillo, en lui envoyant un message personnel.
« Les informations que je reçois de nombreuses et patriotes sources confirment les graves divergences entre nos visions respectives de la situation internationale et des répercussions que les événements mondiaux pourraient avoir sur notre politique nationale.
Votre Excellence est un des derniers Espagnols à continuer de croire en la stabilité du régime national-syndicaliste (1) et dans la reconnaissance du peuple pour ce dernier. Le peuple ne croit pas que ce régime puisse administrer notre nation qui n’est toujours pas apaisée et qu’il saurait la protéger des attaques extrémistes qui surviendront inévitablement à la fin de la guerre mondiale.
Votre façon de percevoir la situation actuelle et à venir est totalement opposée à la mienne, et en conséquence, nos positions ne peuvent être conciliées.
Je suis convaincu que Votre Excellence et le régime qu’Elle incarne ne sauront survivre à la fin de la guerre. Si la Monarchie n’est pas restaurée d’ici là, vous serez anéantis par les vaincus de la Guerre Civile, qui sauront profiter de la nouvelle situation internationale. Chaque jour qui passe, le totalitarisme dans lequel Votre Excellence a installé son régime s’affaiblit. »

Le comte de Barcelone, poussé par son nouvel entourage “portugais”, vient-il de brûler ses vaisseaux ?
Depuis son arrivée à Estoril, Don Juan a vu se renforcer son équipe de conseillers. Là ou auparavant, monarchistes “suisses” et “portugais” pouvaient parfois s’opposer sur la conduite à tenir, voire ne pas communiquer du tout, l’installation du comte de Barcelone sur la côte portugaise a permis à ces deux groupes de s’unir. L’opposition monarchique commence ainsi à se structurer et à se renforcer.
Eugenio Vegas Latapié est Secrétaire politique de Don Juan. Monarchiste viscéral, fondateur d’Accion Española, il a été violemment opposé à la République dès avant le début de la Guerre Civile. Secrétaire général à la Presse et à la Propagande, proche de la Phalange, il a été assez vite considéré par le Caudillo comme un gêneur et démis de ses fonctions. Critique de plus en plus virulent de Franco et de son régime, il a été expulsé d’Espagne au Portugal en 1942 après que son implication dans une tentative de recrutement d’officiers pour organiser un coup d’état ait été révélée. Latapié a fini par rejoindre Don Juan en Suisse.
José Maria Gil Roblès, qui avait dirigé jusqu’en 1936 la CEDA (Confederacion Española de Derechas Autonomas) aux Cortes, est en exil au Portugal depuis 1937, où il est devenu la principale figure de la droite dite démocratique. Celui qui faillit gouverner la République en 1933, à la tête d’une coalition de droite, s’est rapidement converti au monarchisme et conseille Don Juan depuis quelques temps maintenant. Récemment nommé par Juan III son représentant hors d’Espagne (en quelque sorte son ministre des Affaires Étrangères), il a fait parler de lui avec son édito publié en août 1943, qui prédisait qu’avec la victoire à venir des Alliés, le régime de Franco allait devoir rendre des comptes. Il échange fréquemment avec l’ambassadeur britannique en Espagne, Sir Hoare. De son point de vue, le remplacement de Franco doit se faire grâce à un programme commun et une coalition regroupant le plus de monde possible, des monarchistes aux républicains modérés.
Enfin, dans le nouveau cercle qui se forme à Estoril auprès du comte de Barcelone, on trouve aussi Pedro Sainz Rodriguez, académicien et premier ministre de l’Éducation du Caudillo. A l’instar de Latapié, il a lui aussi été débarqué par Franco au bout d’une petite année. Il est vrai qu’il avait qualifié ce dernier « d’apprenti Bonaparte » ! Membre d’Accion Española avec Latapié et partie prenante de la même conjuration, il a lui aussi fui l’Espagne à l’été 42 pour s’installer au Portugal et commencer à constituer un groupe d’influence monarchiste. Sainz Rodriguez partage avec Latapié l’idée que la destitution du Caudillo ne pourra se faire qu’avec le soutien de l’Armée et ses efforts s’exercent en ce sens.


23 janvier
L’avis de l’Oncle Sam
En URSS, une visite Potemkine
Magadan, URSS
– Accompagné d’Owen Lattimore, le vice-président américain Henry A. Wallace entame une tournée asiatique. Et pour commencer, quoi de mieux que l’URSS ? Après tout, le courant était bien passé entre Wallace et Molotov lors de leur première rencontre, à Washington. Et Wallace a parfaitement réussi sa tournée sud-américaine en 1942 – une demi-douzaine de pays ont rejoint les Nations Unies dans leur lutte contre l’Allemagne et le Japon. Tout devrait donc bien se passer avec l’allié soviétique.
C’est pourquoi le président Roosevelt a chargé Wallace d’une mission supplémentaire : élucider le problème qui oppose l’URSS et la Chine à propos de cet obscur gouverneur chinois du nom de Sheng Shicai. Il semble en effet que ce Shicai – pardon ? Shicai, c’est son prénom, son nom, c’est Sheng ? Désolé… Donc, ce Sheng causerait des problèmes à Moscou et empêcherait les Nations-Unies de l’être vraiment ? C’est assurément une exagération de diplomates.
Pour aujourd’hui, le vice-président Wallace visite le camp de travail de Magadan, avec pour guide nul autre que le général Nikishov. Quel drôle d’appellation, « camp de travail » ! Tout a l’air d’aller pour le mieux ici. Bien que l’on se trouve au fin fond de la Sibérie, tout est propre et harmonieux, peut-être même mieux que dans certains camps militaires aux Etats-Unis, pense le vice-président, favorablement impressionné. Comme il le dira si bien à son retour : « Ce village sibérien est un véritable forum d’opinions diverses, où l’on peut débattre comme dans n’importe assemblée de Nouvelle-Angleterre. »
A Moscou, le camarade Molotov, informé au fur et à mesure, pense lui aussi que cette visite commence très bien. Mais peut-être pas pour les mêmes raisons que Mr Wallace.

Manœuvres roumaines (et soviétiques)
Un mois et dix jours
Bucarest
– Un mois de souveraineté retrouvée s’est à peine écoulé que le roi Michel de Roumanie doit déjà consentir à un premier remaniement ministériel, sous la pression d’un PCR aimablement soutenu par le gentil grand frère soviétique et son Armée Rouge – laquelle collabore cordialement avec l’armée roumaine, désormais pleinement intégrée dans son dispositif.
Le remaniement ne concerne que deux ministères. Mais il s’agit (quand même !) du portefeuille de l’Intérieur – le général Aurel Aldea est remplacé par Nicolae Penescu, du Parti national paysan – et surtout du portefeuille de la Guerre – le général Ioan Mihail Racovita cède la place à… Constantin Sănătescu lui-même. Ce n’est pas l’idéal, mais c’est la seule solution que le Premier ministre ait trouvée pour empêcher que le Parti communiste revendique ce poste afin d’évincer les « militaires compromis » !
La fiction absolue d’un gouvernement d’union nationale indépendant aura donc tenu en tout et pour tout 41 jours. Pour Moscou, les manœuvres de mise sous tutelle de la Roumanie sont déjà bien engagées – mais en coulisses, évidemment.

L’orgueil d’un amiral
La piste turque
Budapest
– Le ministre des Affaires étrangères hongrois Jenő Ghyczy de Ghicz remet au Régent son premier rapport relatif aux négociations en cours à Ankara avec les Alliés. Elles ne sont hélas pas aussi encourageantes qu’attendues. En effet, les Anglais refusent la quasi-totalité des propositions, cependant bien raisonnables, formulées par Budapest.
Pourtant, depuis les premiers contacts, les Hongrois ont déjà mis beaucoup d’eau dans leur Egri Bikaver ; ils ne demandent plus vraiment qu’une chose : la garantie que l’Armée Rouge n’entrera pas sur leur territoire – territoire dont les frontières exactes restent d’ailleurs à définir. Hélas, à Londres, on refuse de s’engager sur ce point. Et pourtant, les armées du roi George VI campent aux portes de la Hongrie ! Vraiment, la courtoisie des Britanniques, tant vantée par Horthy, semble bien passée de mode. Car leur contre-proposition fort simple : la Hongrie doit rompre immédiatement avec l’Axe, ouvrir son territoire à toutes les armées alliées et attendre la fin du conflit pour négocier une paix avec la totalité des Nations-Unies, qui détermineront en commun le sort du régime actuel et de ses dirigeants. Ce n’est pas une capitulation sans conditions – mais cela y ressemble fort !
Miklós Horthy repose le document sur son bureau d’un air agacé. Evidemment, l’amiral-régent espérait un peu mieux. Et il ne comprend absolument pas pourquoi les Alliés font tant d’histoires au sujet de son avenir personnel. La stabilité du régime actuel est pourtant un atout pour l’après-guerre – nul doute que Győrgy Barcza saura le leur expliquer à Berne.
Car si chose paraît claire dans l’esprit d’Horthy, c’est que, dans cette affaire, le ver n’est pas dans le fruit. Il est dans celui qui le cueille. Qu’est-ce qui a pris aux services diplomatiques de s’appuyer pour les négociations d’Ankara sur ce George Paloczi-Horwath, un exilé vraisemblablement circonvenu par Tito et ses communistes ! Et qui nous dit qu’il ne joue pas également un double jeu avec les Britanniques ?
Une colère amirale plus tard, Ghyczy de Ghicz ressort du bureau du Régent avec l’ordre de remplacer Paloczi-Horwath par un personnage plus sûr : ce sera Lázló Veres, un responsable du service de presse gouvernemental magyar qui partira pour la Turquie afin de préparer la foire internationale d’Izmir (laquelle n’aura pourtant lieu qu’en septembre). Sitôt Veres arrivé à Ankara, il sera possible de relancer les négociations par ce canal – dans l’attente, les autres actions doivent bien évidemment se poursuivre.
L’amiral Horthy replonge dans ses dossiers, sans réaliser que si cette piste turque est une impasse, ce n’est pas totalement du fait du négociateur. Certes, il sera bien prouvé après la guerre que Paloczi-Horwath était un militant communiste… mais les exigences hongroises sont inaudibles pour les Alliés, peu importe qui les expose. Les autres plénipotentiaires magyars vont très vite en faire l’expérience. Et puis, la filière turque a un autre grave défaut, qui engage encore plus l’avenir : elle comporte bien trop d’intermédiaires, pas tous forcément bien disposés envers la Hongrie. Car Budapest s’est fait de très nombreux ennemis ces dernières années – et pas uniquement les communistes et autres titistes …


24 janvier
Timeo Danaos…
Les Grecs font les difficiles
Athènes (Palais royal)
– Faisant suite à la réunion discrète (mais non totalement secrète) du 22 janvier, le gouvernement de Georgios Papandreou répond une nouvelle fois à l’état-major du 18e GAA qu’il oppose « à regret mais avec une fermeté absolue une fin de non-recevoir quant à la mise à disposition hors des frontières grecques de la 5e Division d’Infanterie, actuellement à Xanthi, ainsi que du 1er Corps d’Armée, déployé en Attique, tant que les considérations de sécurité sur la frontière bulgare ne seront pas résolues et que les risques de déstabilisation de notre Nation par des agents de l’Etranger ne seront pas éliminés."
La suite est un peu moins sèche.
"Le Royaume de Grèce, qui n’ignore rien des efforts considérables fournis par ses valeureux alliés pour sa libération, ne saurait évidemment reprendre sa parole et réaffirme sa pleine implication dans la lutte commune. Mais ces mêmes alliés doivent également considérer le fait que leurs efforts risqueraient de s’avérer vains et leurs sacrifices inutiles si d’aventure, attisée par quelque influence malfaisante, la guerre civile devait engloutir le pays.
Toutefois, le gouvernement ne doute pas que le Premier ministre Winston Churchill, qui a déjà fourni au Royaume un soutien aussi généreux que désintéressé
[sic !], saura fournir les assurances à même de permettre un accord mutuellement profitable entre les deux parties. »
……
Londres – Le câble est transmis au Foreign Office aux environs de 14 heures ; il est sur le bureau de Churchill pour l’heure du thé (même si le Premier n’en boit guère). Prenant connaissance de ce texte sous le regard d’un calme étudié de Sir Anthony, l’épicurien politique s’exclame : « Des garanties ! Ils veulent des garanties face à Staline ! Alors que je suis bien en peine d’en obtenir moi-même au nom du Commonwealth tout entier ! »
Anthony Eden ne peut qu’approuver, avec une réserve toutefois : « Prime Minister, je conçois votre agacement, que je partage évidemment. Toutefois, il n’est point ici question de garantie écrite – je pense que la parole de l’Angleterre, qui n’a jamais manqué à ses alliés, devrait… »
– Oui, oui ! Une fois encore, nous allons devoir porter nos amis à bout de bras. Comme en 1940 ! Je vous le dis, Anthony, heureusement que la Grèce est un beau pays !

Puis, Churchill sort un havane particulièrement onéreux d’un élégant coffret et entreprend de l’allumer. Quelques bouffées plus tard, il reprend, le regard perdu vers les boiseries du plafond : « Hmmm… Vous avez raison, évidemment. Parler à ce régent Paul, s’accommoder Pierre II et même discuter avec le Diable et ses démons mineurs : Staline et Tito. Où en est le voyage prévu en février ? »
– Les discussions avec les services soviétiques avancent bien, Prime Minister. La date du 16 février est évoquée pour une entrevue avec le maréchal Staline.
– Parfait. Sur la route de Moscou, arrangez-moi, je vous prie, quelques rendez-vous à Athènes. Avec le régent grec, mais aussi avec le jeune roi Pierre et avec ce Mister Tito. Eux feront bien le voyage d’Athènes pour venir me voir, hmm ? Et tant qu’à faire, vous mettrez en temps utile la presse au courant de ces entretiens – avec le monde entier à témoin, nul n’osera me dire non.
– Comme vous le souhaitez, Prime Minister.


L’orgueil d’un amiral
Doutes allemands et dénonciation
6e Division du RSHA (Palais Prinz-Albrecht, 102 Wilhelmstraße, Berlin)
– Le bureau du SS-Brigadeführer Walter Schellenberg voit se succéder entrevues officieuses, réunions officielles et remise de rapports d’informateurs. C’est que, après la chute inévitable (et méritée !) de cette incompétente d’Abwehr, l’Ausland-SD (2) assume désormais seule la lourde responsabilité de renseigner l’Allemagne sur les menées de ses nombreux ennemis. Etats-Unis, Angleterre, France (même ici, on commence à perdre l’habitude de dire “Afrique”), Moyen-Orient, Amérique latine (dont l’Argentine !)… Tant à faire et si peu de moyens !
Aujourd’hui, c’est la Section E qui demande l’attention de l’efficace et redoutable administrateur SS (3). L’unité chargée de l’espionnage en Europe de l’Est. Elle n’a pas brillé ces derniers temps, c’est le moins que l’on puisse dire ! Qu’a-t-elle à annoncer de si important ? Le jeune officier – il n’a que 33 ans ! – parcourt rapidement le rapport dactylographié et frappé du tampon « Streng geheim » en gothiques. Hum… Apparemment, un “informateur Z” (donc considéré comme fiable) informe le Grand Reich avec force détails et documents de négociations secrètes en cours entre la Hongrie et les puissances ennemies du dit Reich. L’éventualité d’un basculement, ou du moins d’une tentative de basculement du pays, selon le modèle inauguré par l’Italie et reproduit (avec plus ou moins de succès) par la Roumanie et la Bulgarie, parait « grave et imminente ».
Schellenberg repousse le document avec gravité. L’homme est évidemment un nazi fanatique, mais cela ne l’empêche pas de réfléchir – il a le bagage nécessaire. Diplômé de droit, méprisé par les gros bras de la Schutzstaffel (qui lui ont toujours reproché ses manières d’intellectuel), le SS-Brigadeführer est arrivé à son poste à force de travail, et ce dans tous les domaines. Outre ses responsabilités dans le renseignement, il est également en charge de la coordination entre la Heer et les Einsatzgruppen, et a l’oreille du Reichsführer SS en personne (4) ! Feu Reinhard Heydrich l’appréciait d’ailleurs au moins autant…
Alors que la SS resserre enfin le lacet sur le cou des civils et militaires incompétents ou insuffisamment fanatisés, une place est clairement à prendre dans la nouvelle Allemagne pour le chef de la 6e Division du RSHA. Prédire avec exactitude un événement important pourrait bien assurer une fois pour toutes la suprématie de son service ! Et puis, dans le fond, ce rapport ne contient rien de vraiment surprenant : les Hongrois ont prouvé depuis longtemps leur duplicité et leur ingratitude, d’autres agents, dûment sollicités, devraient sans doute pouvoir recouper très vite ces informations.
Le document part donc vers la Chancellerie et le bureau d’Himmler avec la mention « Urgence Absolue ». Voilà qui devrait faire plaisir au Führer, lequel va sous peu rencontrer le Régent ! « Décidément, ce vieux croulant n’est plus bon à rien ! » se dit Schellenberg avec un sourire mauvais. Cependant, il s’interroge : « Mais qui a bien pu le dénoncer ? »


25 janvier
L’orgueil d’un amiral
Vieilles rancunes de Mittel Europa
3-8 Porchester Gate (Londres), 19h00
– Dans ces discrets bureaux de la capitale britannique, František Moravec, chef des services secrets du gouvernement tchécoslovaque en exil, reçoit son ministre de la Défense, le général Jan Sergej Ingr. Les deux hommes confèrent en tête-à-tête – ce qui n’a rien d’un hasard : tous deux trouvent que le ministre des Affaires étrangères, Jan Garrigue Masaryk, est trop turbulent… trop impulsif… trop honnête en vérité. Et de fait, personne d’autre qu’eux n’est vraiment au courant du sujet de leurs discussions – alors même que le général dîne pourtant ce soir avec le Premier ministre Jan Šrámek et le président Edvard Beneš.
C’est lui qui s’exprime, sur un ton lassé par l’âge : « Tout de même, Moravec, j’aurais préféré affronter ces Hongrois à la loyale. Comme autrefois, en 1919, avec mes légionnaires ! Et les Polonais pareillement, j’en suis certain. »
– Les Polonais ne nous auraient pas aidés là-dessus, général… Par contre, les Yougoslaves seraient vraisemblablement d’accord avec nous si nous leur demandions leur avis ! J’ai combattu, moi aussi, mais dans la légion serbe. Mieux vaut les avoir comme amis, croyez-moi. Mais cela nous éloigne du sujet. Et même si je comprends votre… réserve, vous savez bien que notre pauvre pays doit porter les coups que ses moyens lui permettent.
– Vos agents ont été d’une grande efficacité, c’est vrai.

František Moravec se carre lourdement dans son fauteuil, les deux mains croisées devant lui, et assène : « Enfin, général, ne me dites pas que vous avez des regrets ! Nous n’allions quand même pas laisser cet amiral de pacotille négocier notre pays ! »
– Vous croyez toujours que les Anglais auraient traité avec lui ?
– Les Anglais ont bien signé les accords de Munich en 1938 – et ils lui donnaient tout le sud de la Slovaquie jusqu’à Presbourg ! Ce n’est que plus au nord que nos terres allaient au Reich. Bon, ce qui a été pris par l’Allemagne nous reviendra, c’est évident, mais…
– Mais le reste ?
– Oui, le reste… Mieux vaut ne pas prendre de risques – en 1942, Eden parlait encore d’un
« succès diplomatique » à propos de Munich. Alors… Horthy est malin, ne le sous-estimez pas. Il a manœuvré l’Italie pour forcer la main au Reich en 1938 (5). D’ailleurs, c’est à Ciano que sont allés ses premiers remerciements, pas à Hitler ! Ce protestant prétend être arrivé au pouvoir contre sa propre volonté…
Moravec a un petit rire aigre et poursuit : « Pourtant il s’y maintient depuis un quart de siècle ! Vous rappelez-vous son triomphe en 1938 lorsqu’il est entré en vainqueur à Kassa, une ville qui nous avait été arrachée ? »
Le général Ingr s’assombrit. « Oui… Sur son cheval blanc, comme lorsqu’il libérait Budapest des communistes ! Et un 11 Novembre ! »
– Le tout sous les caméras de la propagande hongroise, qui en ont fait leurs choux gras (6) !
– Un spectacle écœurant…
– Et pourtant salué par bien des Britanniques. Lord Rothermere, le principal soutien des Blackshirts, a écrit un article saluant
« le bonheur rayonnant d’une nation jusque-là désespérée et injustement traitée. » Et nous, dans quelle amertume nous trouvions-nous !
Un long silence, puis le chef des services secrets se penche en avant et achève : « Dans celle, atroce, de voir nos propres concitoyens, Hongrois mais que nous avions accepté comme nos frères, dresser des colonnes de fleurs et des arcs de triomphe à Horthy… »
Puis il retombe de nouveau lourdement dans son fauteuil : « Ah ! “Isten Hozott” disaient-ils ! Dieu t’a amené ici ! Eh bien, que le Diable les emporte désormais ! »
– Nous y veillerons,
répond le général. Le président Beneš a déjà demandé aux Alliés de considérer l’éventualité d’une “konečné řešení německé otázky” [solution finale – sic – du problème allemand]. La minorité sudète nous empoisonne la vie depuis trop longtemps.
Sur ce, il enfile son manteau tout en poursuivant : « Je compte proposer ce soir au Premier ministre d’étendre ce dispositif aux Hongrois de souche. Vous avez ranimé de vieux souvenirs, Moravec… »
Les deux hommes se serrent la main et le général ministre prend congé : « Je vous ferai connaitre les résultats de mes démarches au plus tôt. Continuez, je vous prie, de défendre la Tchécoslovaquie face aux menées des autres nations… quelles qu’elles soient ! A plus tard mon ami ! »
– A bientôt, général !

Et Jan Sergej Ingr disparaît dans la nuit vers sa voiture qui va le conduire au 26 Gwendolen Avenue, pour une soirée très constructive…


26 janvier
Les Balkans compliqués…
Manœuvres croates
Quai de la Joliette (Marseille)
– Léon Blum a entre les mains le rapport du SOE (aimablement transmis par Sir Anthony) annonçant le souhait de l’Etat Indépendant de Croatie d’ouvrir à son tour des négociations de paix. Une information évidemment réjouissante, fiable et de surcroît confirmée par les services diplomatiques helvétiques. Ce devrait donc être une excellente nouvelle – une de plus dans cette région – qu’il conviendrait de diffuser à tous les responsables militaires concernés, et le plus vite possible. Hélas, il y a deux petites difficultés, qui rendent la situation plus complexe qu’il n’y paraît.
En premier lieu, cette proposition de cessez-le-feu semble ne provenir que d’une partie du gouvernement croate, et même d’une partie seulement du paysage politique du NDH – en l’espèce, le Parti paysan croate. Il n’est donc absolument pas certain que les gens qui sollicitent actuellement les Alliés représentent qui que ce soit d’autre qu’eux-mêmes – ce qui incite à la plus extrême prudence.
Le second point est encore plus gênant : l’Etat Indépendant de Croatie n’existe pas. Du moins du point de vue de la Yougoslavie, et plus généralement de celui des Nations-Unies. Il n’y a guère que les membres de l’Axe, leurs marionnettes (dont le NEF, bien sûr !) et certaines nations non engagées mais fort mal avisées, comme l’Espagne, qui aient daigné le reconnaître. Sans doute, d’autres pays réputés neutres (Suède, Portugal, Argentine, Suisse) ont conservé des représentations diplomatiques à Zagreb après l’invasion de 1941, mais sans jamais clarifier la situation – travaillent-elles avec l’état de Pierre II ou avec celui de Pavelic ? Impossible à dire.
Tout cela est donc fort compliqué – et même explosif, dans les circonstances troubles que traverse actuellement le Royaume de Yougoslavie. Blum comprend parfaitement pourquoi Eden l’a sollicité à ce sujet, au titre de “nation partenaire privilégiée des Yougoslaves”. Il lui a refilé la patate chaude !
Que faire ? L’imbroglio diplomatique et juridique est réel. Parlementer avec ce Mladen Lorković – puisque que c’est apparemment lui qui tire les ficelles – c’est, potentiellement, économiser du temps et des vies en cas de succès. Mais c’est aussi prendre un risque considérable si cet interlocuteur s’avérait être un simple bonimenteur, voire un provocateur. Car négocier, c’est quelque part donner une légitimité au NDH ! D’ailleurs… Négocier quoi au juste ? Ce pseudo-état revendique quand même une part non négligeable d’un état souverain membre des Nations-Unies – sans parler des nombreux crimes dont ses gouvernants doivent répondre.
Après un entretien téléphonique avec le président du Conseil, Léon Blum comprend qu’il lui faut avant tout informer son homologue yougoslave, Momčilo Ninčić, par correction bien sûr (l’affaire le concerne !), mais aussi pour solliciter son avis. Une démarche de pure forme – car Blum a déjà une petite idée de la réponse du gouvernement royal… Enfin, comme l’a dit De Gaulle : « Allez vers les Balkans compliqués avec des idées simples, Monsieur le ministre ! » Blum demande donc une liaison téléphonique avec Belgrade – en espérant que son appel n’arrivera pas au pire moment…


Notes
1- Cette appellation bizarre se justifie par l’unification décidée par Franco et Serano Súñer, en 1937, de la Phalange et des Juntes d’Offensive Nationale-Syndicaliste (JONS) – unification politiquement dominée par la Phalange, qui profite ainsi fort opportunément de l’exécution en 1936 du fondateur des JONS, Ramiro Ledesma Ramos, par des miliciens du Frente Popular.
2- Le service de renseignements extérieurs de la SS, ou « Département VI du Bureau de Sécurité principal du Reich ».
3- Le service de Schellenberg est divisé en six sections : A (Organisation, administration), B (Europe de l’Ouest), C (Union Soviétique et Japon), D (sphère américaine), E (Europe de l’Est) et F (section technique).
4- Notamment parce qu’en 1938, en Autriche, Schellenberg a sauvé la vie d’Himmler en lui évitant un accident de voiture.
5- Suite au désastreux voyage d’Etat effectué par Horthy à Kiel en 1938, le Reich allemand était plus que réticent à l’idée de faire bénéficier la Hongrie des accords de Munich. L’intervention de l’Italie fasciste fut décisive. On peut préciser – mais évidemment, Moravec s’en abstient – que les accords de Munich permettaient à la Hongrie d’avoir une frontière commune avec la Pologne pour former un « glacis catholique » – situation alors favorisée par les services du compte Ciano.
6- Voir le film de propagande au titre évocateur Eszak felé ! – Vers le Nord !
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MessagePosté le: Jeu Juil 15, 2021 06:39    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
les tensions commerciales entre l’Espagne et les Alliés au sujet du wolfram

Le terme français est tungstène. On trouve les deux dans nos fichiers, faut-il harmoniser ?
Sinon, encore de beaux imbroglios en perspective...
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MessagePosté le: Jeu Juil 15, 2021 07:04    Sujet du message: Répondre en citant

ça ne me choque pas on peut parler du métal ou du minerai, ça peut faire toutefois l'objet d'une note en bas de page pour préciser les choses pour les néophytes
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