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De l'Agence HAVAS à l'A.F.P. (by Menon-Marec)
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 15:48    Sujet du message: De l'Agence HAVAS à l'A.F.P. (by Menon-Marec) Répondre en citant

Comment, encore du Menon-Marec ? Ben oui, et j'en profite pour lui demander s'il peut nous redonner ses meeeeerveilleux vers chantant l'hôtel Lux...

Annexe 45-X-Y

Autorité et Liberté : l’histoire cachée de l’Agence Havas Libre

La création de l’Agence France-Presse (AFP), succédant à l’AHL dans la foulée de la libération de Paris, est encore dans toutes les mémoires.
Mais on sait peu, par contre, comment, en pleine guerre, le gouvernement Reynaud prit le contrôle de la branche Information d’Havas et parvint très tôt à la transformer en outil fondamental de la guerre psychologique.
Les historiens s’accordent aujourd’hui pour dire que les procédés employés furent proches de l’illégalité – pour la bonne cause, bien sûr. De fait, le Conseil d’État, dans son célèbre arrêt Demoiselle Dauvrier – du nom de l’héritière d’un petit actionnaire d’Havas – a reconnu en 1957 que le cabinet Reynaud avait commis un excès de pouvoir manifeste en procédant à une nationalisation, sans le dire et au mépris des textes, lorsqu’il s’était emparé de la partie information de l’Agence. Pire, il avait méconnu tant l’esprit que la lettre de la loi de 1936 en refusant l’indemnisation des anciens propriétaires. Pour autant, la haute juridiction, si elle donnait raison à la demoiselle Dauvrier, reconnaissait que des circonstances exceptionnelles justifiaient le fait du prince autant qu’elles l’expliquaient. Cet arrêt est l’un de ceux qui fondent la théorie des principes généraux du Droit.
Quoi qu’il en soit, les principaux acteurs de l’affaire se sont, peut-on croire, ingéniés à brouiller les pistes et, de nos jours encore, il demeure difficile de démêler le vrai de la légende et les faits de leur mise en scène. La reconstitution la plus vraisemblable a été tentée, dès 1968, par Robert Brunissard, ancien rédacteur en chef de l’AHL, dans son livre de souvenirs Comme une Plume au Vent (Le Seuil, Paris, 701 p.). On ne manquera pas ici de s’y référer.

7 juin 1940
Paris – Ministère des Affaires étrangères
Peu avant 20 heures, une rapide séance de travail à huis clos réunit au Quai d’Orsay Dominique Leca, directeur de cabinet de Paul Reynaud, Georges Mandel, ministre de l’Intérieur, et le général de Gaulle, véritable ministre de la Défense nationale malgré son titre de sous-secrétaire d’État à la Guerre. C’est Mandel qui a demandé à Leca d’organiser cette réunion. Il se souvient, lui a-t-il expliqué, d’avoir exercé la tutelle de l’Information au ministère des PTT. Le président du Conseil n’est pas là – il a convoqué au même moment Yves Bouthillier, ministre des Finances, pour lui donner de nouvelles directives sur la liquidation de certains avoirs français aux États-Unis en vue de régler les achats d’armes et d’avions.
Il n’existe aucun procès-verbal de cette réunion, qui n’est même pas mentionnée dans les agendas tenus par les participants. Interrogé par Brunissard en 1965, Dominique Leca dira, candide, qu’il en a conservé le souvenir sans s’en rappeler l’objet. Elle prend fin, en tout cas, avant 20 h 30, heure à laquelle Georges Mandel dîne avec Léon Blum chez Jules Jeanneney, le président du Sénat, tandis que le général de Gaulle reçoit au ministère de la Guerre pour une brève collation le général Delestraint et le général Buisson. Ceux-ci ont été amenés à Paris par des autogires de liaison Lioré et Olivier, qui se sont posés sur l’esplanade des Invalides. Ils regagneront leurs PC dans la nuit, en voiture.

9 juin 1940
Paris
Quelque désespérée que puisse paraître la situation depuis la rupture de la ligne de la Somme par les Panzer, les institutions de la République continuent leur train-train – ce qui ne manque pas d’une certaine grandeur. Le Journal Officiel continue de paraître tous les jours. Il est imprimé entre 23 h 30 et 2 h 15, remis aux Messageries à 2 h 30 et distribué aux abonnés à partir de 5 h 15, comme d’habitude.
Le travail de Leca, Mandel et de Gaulle se résume aux trois articles d’un décret simple, signé le 8 par Reynaud :
« Vu la délégation de pouvoirs du 22 mars 1940 (…)
Art. 1 - L’Agence d’information Havas est réquisitionnée à dater du 9 juin 1940 à minuit pour les besoins de la Défense nationale.
Art. 2 - Les journalistes, les personnels techniques et les personnels administratifs de l’agence d’information Havas non encore présents aux Armées sont mobilisés sur place à dater du 9 juin 1940 à minuit. Cette mesure est étendue à tous les personnels des bureaux de l’agence en province, Corse comprise, et dans l’Empire, ainsi qu’aux personnels de nationalité française des bureaux à l’étranger.
Art. 3 - Le ministre des Affaires étrangères, le ministre de l’Intérieur et le ministre de la Guerre sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’application du présent décret. »
Il n’est nulle part question du ministère de l’Information, ni de son titulaire, Jean Prouvost. Et, fait exceptionnel, le ministère des Finances est tenu à l’écart. Admirable concision de la langue administrative qui, comme l’écrira un jour le doyen Vedel, « met en valeur, comme un maillot de bain, ce qu’elle dissimule. » Rien ne saurait mieux révéler que l’information devient désormais la chose des trois hommes forts du gouvernement. Elle va contribuer, elle aussi, au Sursaut.
D’ailleurs, un arrêté paru au Bulletin Officiel du ministère de la Guerre met les points sur les i – au moins à l’attention des initiés : « Le capitaine Brossolette (Pierre), du 5e Régiment d’Infanterie, est placé à dater du 9 juin 1940 en position de détachement et mis à la disposition de la Présidence du Conseil. » Bien entendu, ni le décret ni l’arrêté n’indiquent que Pierre Brossolette sera reçu dans la matinée par Reynaud, en début d’après-midi par Mandel et à 18 heures par le général de Gaulle.

10 juin 1940
Paris
L’aube serait radieuse si le ciel n’était pas obscurci par les fumées grasses que le vent d’ouest chasse le long de la vallée de la Seine. On sent jusque dans la capitale l’odeur de l’incendie des réservoirs de pétrole du Havre.
06h30 – Pierre Brossolette, encore vêtu de son uniforme, pénètre, place de la Bourse, dans l’immeuble décati de l’agence Havas. Il tient à la main un exemplaire du Journal Officiel sorti des presses quelques heures plus tôt : « Le capitaine d’infanterie Brossolette (Pierre) est nommé directeur général de l’agence d’information Havas à dater du 10 juin. »
08h15 – La nouvelle de la nomination de Brossolette a déjà fait le tour des “milieux autorisés”. Elle est accueillie avec soulagement, souvent même avec enthousiasme, par ceux qui veulent poursuivre le combat. Les plus politiques y lisent les prodromes d’une alliance en train de se nouer entre Paul Reynaud et Léon Blum, dont l’ancien journaliste du Populaire et de Marianne est proche – à moins que cette alliance n’ait déjà pris corps. Mais chez les défaitistes (qui ne s’étiquettent bien sûr pas ainsi), elle sème la consternation et le nouveau directeur d’Havas est aussitôt qualifié de va-t-en-guerre. Maurras sourit du billet qu’il vient de dicter pour la une de l’Action française du lendemain : « Les antimilitaristes aiment à clouer au pilori les traîneurs de sabre. Que faut-il donc faire de ce traîneur de plume ? D’ailleurs, traîneur de plume, c’est encore à voir. Ce Brossolette imitera plutôt ses amis bolcheviks du Front popu en ayant la plume entre les dents. »
Nul n’est plus consterné, sans piper mot, qu’Édouard Daladier. En février 1939, il a fait chasser Brossolette de la radio nationale, où il tenait la rubrique de politique internationale, pour sa critique constante des accords de Munich.
09h00 – Pierre Brossolette, comme s’il exerçait ses fonctions depuis des mois, préside la conférence de rédaction du matin. Les journalistes assis autour de la grande table de chêne, dans la fumée des cigarettes et des pipes, observent avec curiosité sa silhouette juvénile – il n’a que 37 ans – et sa fameuse mèche blanche. Il prononce à peine quatre phrases d’ouverture : « Messieurs, la guerre va mal mais l’agence Havas, comme l’Armée, comme le gouvernement, doit continuer à se battre. Nos ennemis à nous ne sont pas les Panzer ni la Luftwaffe. Ils s’appellent le DNB, le Völkischer Beobachter, l’institut Luce et Il Popolo d’Italia, voire Arriba. Si certains parmi vous, ou parmi vos rédacteurs, préfèreraient que notre pays consente à un armistice ou à la capitulation, je suis disposé, jusqu’à ce soir, à recevoir leur démission. Dites-le bien autour de vous. Monsieur le rédacteur en chef, passons à l’ordre du jour. Nous vous écoutons. »
Fernand Pommard s’en tient au rite qu’il a fixé depuis septembre 1939 : « La censure, commence-t-il, est intervenue vingt-sept fois sur la copie au cours des dernières vingt-quatre heures… »
11h30 – Brossolette a fait le tour des services rédactionnels au pas de charge. Il a reçu brièvement le directeur technique et le directeur administratif. Il tient une nouvelle réunion de ses principaux subordonnés. Ce qu’il leur annonce les stupéfie : « Je n’ai pas seulement pour mission, messieurs, de diriger cette maison comme si de rien n’était et de veiller à ce qu’elle ne cesse pas de produire des dépêches. J’ai reçu consigne de conduire son évacuation. D’organiser une bataille en retraite. Les militaires parleraient d’une manœuvre en tiroir.
Demain soir, les deux tiers du personnel et l’essentiel de notre matériel quitteront Paris à bord de deux trains spéciaux constitués à la gare d’Orsay. Direction Marseille. À partir d’après-demain… disons à 18 heures… le siège de l’agence sera transféré là-bas, dans l’hôtel que les Messageries Maritimes ont fait bâtir sur la Corniche à l’intention des touristes et des passagers en attente. Il a été inauguré le 14 juillet dernier. Il est vide. Les PTT locaux sont déjà en train de nous y installer les lignes de transmission et des antennes provisoires. J’entend que les services rédactionnels et techniques comment à fonctionner aussitôt. Paris, avec ce qui lui restera, assurera la continuité.
Dès que Marseille aura pris le relais, sous l’autorité du plus ancien des rédacteurs en chef adjoints, nous quitterons Paris. Il va de soi, messieurs, que je m’en irai le dernier pour fermer la maison. Nous ne laisserons aux Boches, s’ils entrent à Paris… non : quand ils entreront à Paris, hélas… ne nourrissons plus aucune illusion… Nous le leur laisserons ni un télescripteur, ni un émetteur radio, et pas plus de machines à écrire que de papier carbone. Qu’ils trouvent une coquille vide !
En attendant, la rédaction en chef aura soin de renforcer l’effectif des correspondants auprès du Grand Quartier Général et des armées elles-mêmes. Qu’ils partent demain matin au plus tard. »
Le directeur administratif, Henri Moublé, présent à la conférence, toussote (ou s’étrangle ?).
– Et qu’on ne m’objecte jamais les problèmes de coût, jette Brossolette. La mort de la liberté, c’est bien plus cher. Je vous rappelle que je recevrai les démissions jusqu’à ce soir. Au travail, messieurs.
18h00 – Comme chaque jour, Havas diffuse un commentaire politique général à partir de nouvelles recueillies en principe aux meilleures sources : le “petit parisien” en argot de rédaction. Son ton a changé. La dominante de résignation ou d’abattement des journées précédentes laisse place, non à l’optimisme, mais à la résolution. La révocation de Weygand et son remplacement par Huntziger ne sont pas encore connus (les censeurs, sur une directive de Reynaud, bloqueront la nouvelle jusqu’au lendemain), mais tous ceux qui savent lire notent une phrase qui figure dans le premier paragraphe : « Selon une rumeur insistante qui circule dans les couloirs de la Présidence du Conseil, M. Paul Reynaud a l’intention de se débarrasser de ministres et de chefs militaires qui lui ont paru insuffisants, trop mous, ou prêts à entrer en discussion avec l’ennemi. » Pour la première fois, le public découvre les mots saharage et gouliminer, remplaçant limogeage et limoger et forgés sans doute, selon Brunissard, par Brossolette lui-même, ou au moins à son instigation.
Cette dépêche est considérée par les historiens comme l’annonce du Sursaut au monde entier. Les ambassadeurs la commentent à l’envi. A Londres et à Washington, elle confirme le raidissement de la France. Connue moins d’une heure plus tard à Berlin, puisqu’elle a été traduite en allemand par l’Agence Télégraphique Suisse de Berne et reproduite en urgence par les correspondants du DNB dans la capitale de la Confédération, elle agace Goebbels au point qu’il prend sur lui de la cacher au Führer jusqu’au lendemain. Mais l’Abwehr, cum commento, und mit Schlag und Schmalz, sourit l’amiral Canaris, en fait part dans la soirée à l’OKH.

11 juin 1940
Paris
11h00 – L’agence Havas diffuse un Bulletin sur tous ses fils : « Paris, 11 juin (Havas). Le général Huntziger a été nommé généralissime des Armées et chef de l’État-Major Général de la Défense Nationale, annonce un communiqué de M. Paul Reynaud. Il remplace le général Weygand. » Suit, selon la bonne règle, une biographie du nouveau grand patron des Armées françaises.
Une demi-heure plus tard, Havas reproduit un communiqué tombé deux minutes plus tôt, sans commentaire mais en Urgent : « Paris, 11 juin (Havas). Voici la nouvelle organisation du commandement définie par un communiqué du ministère de la Guerre signé par M. Paul Reynaud, ministre, et par son sous-secrétaire d’État, le général Charles de Gaulle.
– Généralissime et chef de l’État-Major Général de la Défense Nationale : général d’armée Huntziger.
– État-Major Général de la Défense Nationale : général d’Armée Doumenc, amiral d’escadre Castex, général d’armée aérienne Mouchard.
– Commandant en chef des forces terrestres en Europe et chef du Grand Quartier Général : général d’armée Georges.
– Commandant en chef des Forces navales : amiral de la Flotte Darlan.
– Commandant en chef des Forces aériennes : général d’armée aérienne Houdemon.
– Commandant en chef interarmes en Afrique du Nord : général d’armée Noguès. »
Pierre Brossolette reçoit peu après un coup de téléphone de la présidence du Conseil et appelle aussitôt Fernand Pommard : « Pour éviter les couacs que produisait l’organisation mise en place par Gamelin, il a été décidé que le généralissime, l’État-Major Général et le Grand Quartier Général seront désormais rassemblés au même endroit. Choisissez d’ici ce soir un nouvel accrédité auprès du généralissime et trouvez lui un second un peu démerdard pour prendre en charge l’État-Major Général et le GQG. »


Dernière édition par Casus Frankie le Ven Juin 27, 2008 15:53; édité 1 fois
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 15:52    Sujet du message: Répondre en citant

Bon, maintenant, appel aux germanistes : qu'est-ce que c'est que cette histoire de saindoux ?
und mit Schlag und Schmalz


Et appel à tous pour décider du destin de Martial Vallin, ci-devant chef d'EM de l'Armée de l'Air...
Que faire de lui ?
(rien, peut-être, d'ailleurs. OTL, il a demandé sa mise en disponibilité en novembre 40)
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Casus Frankie

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Menon-Marec



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 16:48    Sujet du message: Pas d'inconnues sans équation Répondre en citant

1)
"De la Révolution rien n'arrête le flux
Vont répétant les murs muets de l'hôtel Lux".
C'est apocryphe, bien sûr, entièrement sorti de la plume de votre serviteur. Mais on peut le placer dans "Hourra l'Oural" où Aragon adapte à sa poésie le réalisme socialiste.
2)
Mit Schlag und Schmalz: littéralement avec de la crème fouettée et du saindoux. C'est une expression employée par les Allemands protestants pour stigmatiser le côté doucereux des Autrichiens qui sont, eux, papistes et K und K. Canaris, en l'occurrence, indique qu'il annonce les mauvaises nouvelles avec ménagement et quelques circonlocutions.
3)
Et Daladier, alors?
Amts, ainsi que l'on écrit à l'AFP.
M-M.
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FREGATON



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 16:55    Sujet du message: Re: De l'Agence HAVAS à l'A.F.P. (by Menon-Marec) Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
[ amiral d’escadre Castex, ... amiral de la Flotte Darlan.

Si je puis me permettre, dans le bulletin officiel on écrira plutôt:
Vice Amiral d'escadre Castex et Amiral Darlan, mais pour faire plus vrai (les journalistes ayant traditionnellement du mal à ne pas écorcher la hiérarchie Wink) cela peut se traduire dans la dépêche par:
Grand Amiral d'escadre Castex et Contre Amiral de la flotte Darlan... Think
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 17:32    Sujet du message: Répondre en citant

Merci Fregaton, je corrige (chez Havas, comme à l'AFP, on ne fait PAS ce genre d'erreur en recopiant un communiqué !!! pas vrai, M-M ?)
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Casus Frankie

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Cornelis



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 17:54    Sujet du message: Répondre en citant

Bonsoir.

Il me semble que Darlan a bien été élevé à l'appellation d’ "amiral de la flotte" à la déclaration de guerre, tout au restant au rang d'amiral et au grade de vice-amiral. Ce sont les subtilités de la hiérarchie militaire française ; il n'y a en effet que deux grades d'officier général : général de brigade/contre-amiral et général de division/vice-amiral. Au-dessus ce sont des "rang et appellation" de général de corps d'armée/vice-amiral d'escadre et général d'armée/amiral. Mais il semble qu'au moment de la seconde guerre, l'armée soit plus souples avec ces rangs et appellation : on peut recevoir un rang sans appellation (rang de commandant de force navale indépendante pour certains contre-amiraux) mais aussi des appellations sans rang (amiral de la flotte donc pour Darlan). Je pense donc que le bulletin officiel parlera d'un "amiral de la flotte Darlan". J'avais ouï dire que cette appellation était due au mimétisme avec l'anglais (admiral of the Fleet), mais je n'ai pas confirmation de cette origine.
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Menon-Marec



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 18:17    Sujet du message: Spécial Frégaton Répondre en citant

Humblement prosterné aux pieds de Votre Marinade, je me repens de mes erreurs, je les abjure, je jure de ne point les recommencer et je bats ma coulpe (de plus en plus pleine). La faute commise par le Service Politique, puis par le Desk France, d'Havas est d'autant plus inexcusable que le meilleur ami du rédacteur, depuis 1948, est un vrai contre-amiral (2ème section). Je connais un M-M. qui vérifiera sous peu qu'il y a du pied dans la chaussette, et qu'il ne faut point confondre échouage et échouement.
Amts, ainsi que l'on écrivait à Havas.
M-M.
Question subsidiaire: sur une galiote à bombes, du temps du Grand Roi, canonnait-on? Les bombardiers canonnaient-ils? À moins que les canonniers ne bombardassent? Furetière lui-même ne cite que bombardement - sauf à supposer que les crocheteurs du Port-au-Foin n'aient concocté à l'usage des ruelles de la Préciosité quelque canonnement de belle tenue qui se serait égaré au fil des siècles, ou dans un gros bouchon de brume à l'instar des proies du Grand Coureur. Que Votre Marinade daigne, par grâce, apaiser mes angoisses!
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Cornelis



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 18:40    Sujet du message: Répondre en citant

Le point-de-vue des structures sociales : les capitaines de galiote faisaient partie du "petit corps" de la Royale, officiers issus de la roture ou de la robe, par opposition au "grand corps" des officiers des vaisseaux, tous de noblesse d'épée. Il est donc séant qu'un capitaine de frégate, du Grand Corps, ne bombarde point mais canonne.

Pour les lecteurs perdus : la "bombe" à l'époque moderne c'est le projectile explosif, donc une galiote à bombe c'est un monitor (c'est d'ailleurs le terme anglais de l'époque).

Autre grade de l'époque : le capitaine de brûlot, que l'on pourrait assimiler à un Italien de la Xa MAS, en moins subtil.

Trêve de canonneries, comme disait Rabelais...
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FREGATON



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 20:23    Sujet du message: Répondre en citant

Bien, bien,
Darlan (plus connu sous le sobriquet, déjà évoqué dans ces pages, de "slow zob") doit être en effet le dernier a avoir été élevé à l'appellation d'amiral de la flotte (peut-on avancer le POD pour éviter cela en FTL?).
Par ailleurs, le manuel du canonnier prend bien en compte l'artillerie d'un bâtiment sous ses formes diverses, regroupant les bouches à feu du canon au mortier et les affuts en réduits, en tourelles ouvertes ou fermées, en casemates ou gaillards.
Le directeur de tir, muni de son rateau, préfère généralement canonner un navire ennemi en chasse plutôt que bombarder un caillou à terre à la plus grande satisfaction de son pacha, un capitaine (de vaisseau) qui est un colonel que l'on appelle commandant.
Pour reprendre les termes rabelaisiens de Cornelis en version navale: fin de la passe (de tir). Wink
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Finen



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MessagePosté le: Sam Juin 28, 2008 08:53    Sujet du message: Répondre en citant

Il est aussi correct de dire que l'artilleur et le canonnier canonnent ou bombardent en fonction de l'arme qu'ils servent.

Ils savent qu'un mortier ne saurait canonner mais qu'un canon canonne ou bombarde selon qu'il roule ou qu'il flotte. (mais si il roule il ne peut tanguer que si il flotte) En tous cas, mortier, obusier ou canon, ils tirent, tout comme l'artilleur de Metz quant il ne forme pas ses canonniers comme dirait la chanson.

Mais alors que dire du bigor qui tire comme l'artilleur (de Metz) au canon roulant et côtoie le canonnier qui roule (sous la table) un soir de sainte barbe au rade de la rade de Toulon d'où l'on sort en tanguant, mistral ou pas, artilleur ou canonnier, c'est bien connu.

Tous cela pour dire que les servants de l'arme aiment l'ordre et la précision dans le geste comme dans la parole, c'est un gage d'efficacité comme disait le lieutenant de tir pour clouer l'ennemi.

Mes plus plates excuses pour cet essai de prose qui ne fera pas avancer le sujet.
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Menon-Marec



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MessagePosté le: Sam Juin 28, 2008 08:55    Sujet du message: Refrégaton Répondre en citant

Vu que je ne suis qu'un civil qui se mêle de guerre virtuelle - haro sur le plumitif! -, j'avoue que j'ignore totalement ce qu'est le PoD ou le POD. Je connais l'OR (aussi Oscar Romeo), l'OSB et le SOAB. Mais le PoD ou le POD, nib comme l'eût dit Platon. Que Votre Marinade daigne, par grâce, m'éclairer.
Amts, ainsi que l'on écrit à l'AFP.
M-M.
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marc le bayon



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MessagePosté le: Sam Juin 28, 2008 10:05    Sujet du message: Répondre en citant

POD : Point Officiel de Divergence
Date a laquelle la version historique differre vers la version uchonique.
Voila
Marc
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FREGATON



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MessagePosté le: Sam Juin 28, 2008 11:49    Sujet du message: Répondre en citant

Eh oui, l'efficacité se révèle fédératrice des divers servants pour éviter bien sur les affouillements de l'obturateur qui pourraient être cause de longs feux par raté d'étoupille. Mais je laisse ce sujet au rade de Chigago dans lequel bigors et canonniers trouveront un point d'accord autour d'une mauresque salvatrice Ivrogne
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Sam Déc 27, 2008 11:26    Sujet du message: Suite des aventures de l'Agence Havas Répondre en citant

Pour Noël, Menon-Marec nous gâte, avec cette petite Chrono de l'émigration de la Voix de la France...

14 juin 1940
Paris - Place de la Bourse
17h15 – La 2. Sonder-Propagandakompanie de la Wehrmacht, formée pour l’essentiel de fonctionnaires détachés par le Propagandaministerium de Joseph Goebbels, vient prendre possession des locaux de l’Agence Havas.
Conformément à l’ordre de Brossolette, on a évacué l’immeuble de tout ce qu’il pouvait contenir. Les Allemands n’y découvrent que huit receveurs du modèle Baudot 1907 [On dirait aujourd’hui un terminal. D’aspect frêle, mais inusable quand il était bien entretenu, le receveur Baudot 1907 ressemblait, dans son coffret de verre, à une mécanique d’horlogerie. Les ultimes exemplaires, qu’on voyait encore dans le hall de quelques succursales de banque et deux ou trois bureaux de PMU, au début des années 60, ont été mis à la réforme avant mai 1968.] à réparer. Ils ne servaient plus, d’ailleurs, en raison de leur grand âge, qu’à la transmission aux bureaux de PMU des résultats des courses et, une fois par jour, des cours de bourse à des succursales de banque. Le détachement nazi trouve aussi douze chaises au cannage défoncé, deux machines à écrire Japy du type 1912, une table de travail sur laquelle Charles Havas lui-même a, peut-être, vers 1830, corrigé des dépêches, et un stock de papier carbone qui a survécu à la crise de 1929.
La direction technique, outre qu’elle a déménagé le standard de transmission-réception télex (qui a été embarqué à Sète le 12 sur un cargo à destination d’Alger), a veillé aussi à faire démonter les lignes qui reliaient l’Agence au central télégraphique et téléphonique voisin, au coin de la place de la Bourse et de la rue de la Banque. Tous les équipements radio – antennes Cassegrain, émetteurs et récepteurs, concentrateurs, manipulateurs Morse – ont été également emportés, avec les quartz, les lampes et les condensateurs. Il n’y a plus qu’une coquille vide, comme Brossolette l’avait voulu dès sa prise de fonction.
– S’gebt dodrin nix fruns za moch’n! s’écrie, avec dépit, le Hauptmann Karl Lühtens, qui grasseye le dialecte berlinois avec l’accent du Pays de Bade.[« Y a rien à foutre ici ! » En Hochdeutsch, Lühtens aurait dit « Darin gibt es für uns nichts zu machen! »]
Dans le civil, pour ainsi dire, Lühtens appartient à l’Orientierungsdienst du ministère de la Propagande. Comme son nom l’indique, ce service est chargé d’orienter – dans le sens de l’idéologie nazie, et à l’avantage du régime – tous les organes d’information du Reich par des Dienstnotizen [Des notes de service.] transmises deux fois par jour au moins, et bien davantage si l’actualité l’exige.
La 2. SPK repart peu avant 19h15. Lühtens se contente de laisser en faction devant la porte deux sentinelles qui s’ennuieront vite.


16 juin 1940
Lyon
La rédaction du grand quotidien “de qualité” Le Temps (lequel est en sous-main la propriété du Comité des Forges) s’installe dans la capitale des Gaules, dans des bureaux exigus prêtés par Marius Berliet. La parution reprendra dès le lendemain après-midi. Le journal sera tiré sur huit pages seulement, à cause de la pénurie (toute relative cependant) de papier et de plomb, par l’imprimerie du Nouvelliste, le quotidien bien-pensant de la ville.
Seuls les lecteurs à l’œil particulièrement acéré sauront remarquer le changement de tonalité de la colonne de politique étrangère qui tient par tradition la gauche de la une. Depuis plus de soixante ans, elle était fournie tous les jours au Temps par le Quai d’Orsay [Georges Clemenceau prétendait – avant 1914, s’entend – que le monde reposait sur quatre piliers : le Vatican, le Grand État-Major allemand, l’Amirauté britannique, et la colonne de politique étrangère du Temps.]. Elle est désormais rédigée par l’un des rédacteurs spécialisés et elle reflète avec discrétion – on redoute la censure – des vues, sinon déjà ouvertement défaitistes, du moins proches d’un état d’esprit munichois. La première phrase donnera le ton : « Les combats en cours font regretter, une fois de plus, que la France et l’Allemagne n’aient pas su trouver, depuis la fin de la Grande Guerre, les voies d’une authentique réconciliation. »


17 juin 1940
Marseille
Le desk central de l’Agence Havas a été installé dans la salle de restaurant de l’hôtel des Messageries Maritimes, sur la Corniche. Il tourne à plein régime.
Havas, comme en temps de paix, sert en continu ses abonnés de France, de l’Empire et de l’Étranger, soit par câble, soit par radio (radio-téléscripteur ou émissions en Morse), et reçoit des informations de tous ses bureaux – y compris ceux des capitales des vassaux ou amis de l’Axe Berlin-Rome : de Budapest ou Bucarest, de Bratislava ou de Sofia, et même de Changchun (Mandchoukouo). Si Rome a été fermé, des envois ponctuels arrivent encore de la salle de presse du Vatican.
Grâce à la bonne volonté de Reuters et à la coopération de la compagnie britannique Exchange Telegraph, une ligne a été maintenue avec l’URSS (Agence TASS) via la Suède (Agence TT) et la Finlande (Agence STT), en dépit des séquelles de la récente guerre russo-finlandaise. Une autre ligne, via Beyrouth, Téhéran, Karachi, Calcutta et Saïgon, dessert la Chine (divers journaux), y compris Macao et Hong Kong, et le Japon (Agence Jiji Press et Asahi Shimbun). Des discussions sont en cours avec l’Agence Télégraphique Suisse (ATS - SPA) pour passer à une transmission radio dans les deux sens avec Berne quand la Wehrmacht coupera les circuits.
Les rédacteurs du service des écoutes n’ont jamais cessé de suivre les émissions du DNB allemand et de l’ANSA italienne, sans parler de l’EFE espagnole. Une synthèse de ces écoutes est envoyée quatre fois par jour au gouvernement et au GQG, outre leur traitement ponctuel dans le service général [Avant la guerre, le “service général” d’Havas, destiné à la France et à l’AFN, se compose d’un fil France et d’un fil Étranger. La diffusion en français par ligne télégraphique comprend le fil Europe, le Morse (appellation de tradition) destiné au Levant, et le fil Afnord pour le Canada et les Antilles. Les territoires de l’Empire sont en général servis par radio, sur ondes courtes. Il existe une émission d’une heure environ, bi-quotidienne, destinée aux navires en mer. L’Amérique latine - fil Amsud - est servie en espagnol à la fois par ligne et par radio. Les ambassades et les consulats reçoivent par radiotélescripteur une version abrégée du service général.] et les services régionaux. Le service suit aussi, à toutes fins utiles, les bulletins d’information des radios néerlandaises, belges, polonaise et tchèques sous contrôle allemand.
Pour les clients d’Havas, où qu’ils soient dans le monde, ce serait business as usual, ou presque, si certaines dépêches ne portaient, sous le titre, la mention « Revue par la censure ».


22 juin 1940
Allouis (Cher)
Depuis deux jours, une section du 6e Génie envoyée par le GQG, commandée par le lieutenant de La Planche (centralien sorti d’école en juin 1939) et son adjoint, le maréchal des logis Pierreau (chef porion, à 33 ans à peine, aux Charbonnages d’Anzin) stationne près de la station ondes longues. Devant la progression des troupes allemandes au sud de la Loire, ils reçoivent l’ordre de faire sauter les quatre mâts et l’émetteur 500 KW, ordre exécuté à 18h00. Le relais est pris par l’émetteur de Romoules, dans les Alpes Maritimes – qui manque cependant de puissance – et, en Algérie, par celui de Tipasa.
Pour l’essentiel, les programmes de la Radiodiffusion Nationale ne sont plus diffusés que par le réseau des émetteurs régionaux ondes moyennes, y compris les postes d’Afrique du Nord – à l’exception de l’émetteur ondes courtes que les PTT, à la demande de Mandel, ont installé près de Marseille, sur le Pilon du Roi (à côté de l’émetteur ondes moyennes de forte puissance), à la fin du mois de mai. Il faut assurer quoi qu’il arrive, a dit Mandel, la continuité du service radiophonique et de la communication du gouvernement vers l’Empire.


25 juin 1940
Alger
Envoyés en mission exploratoire par Brossolette avec un mandat de pleins pouvoirs, le directeur technique d’Havas, Bernard Roilleaume, et le directeur administratif, Henri Moublé, signent avec le préfet d’Alger le bail de location, pour trois ans, d’un immeuble moderne situé rue d’Isly, à moins de cent mètres de la Grande Poste de la Ville blanche.
Le bâtiment, achevé en janvier 1940 dans le style de l’EUR [Esposizione Universale di Roma. Sans le second conflit mondial, Rome aurait dû accueillir une exposition universelle en 1942. Il en reste un quartier de Rome, précisément appelé l’EUR (prononcer éhour), où les immeubles évoquent les toiles de Chirico.], mais encore en cours de finition, était destiné à accueillir les représentations de diverses sociétés italiennes. Il a été mis sous séquestre le lendemain de la déclaration de guerre de l’Italie. Sous réserve de quelques aménagements, il pourra loger tous les services d’Havas et, avec un peu d’imagination et beaucoup de bonne volonté, les rédactions repliées de deux voire trois quotidiens, si nécessaire.
Henri Moublé regagne Marseille le soir même. Pendant ce temps, avec une vingtaine de ses techniciens, Bernard Roilleaume entreprend de faire venir du port le central d’émission-réception télex qui est arrivé de Sète et de tirer plus de cent vingt lignes entre l’immeuble et la Grande Poste, qui fera office de centre de diffusion vers les abonnés. De plus, toutes dispositions sont prises pour que l’émetteur radio ondes courtes d’Havas puisse être branché et fonctionner moins de douze heures après son débarquement sur les quais. Il n’y aura pas de solution de continuité dans le service [L’ensemble des dépêches envoyées par une agence de presse s’appelle le service. Le fil renvoie à la transmission vers une destination donnée.] par radio grâce à l’emploi de l’émetteur de secours, en cours d’acheminement, qui permettra, dès que les premiers personnels seront sur place, d’entamer la transmission de dépêches.


18 juillet 1940
Nantes
Les rédactions du Figaro, d’Excelsior, du Populaire, de l’Écho de Paris, de l’Aube et du Petit Parisien quittent la Loire Inférieure en compagnie de l’équipe de Marianne [Hebdomadaire politique, littéraire et artistique lancé par Gaston Gallimard en 1932 sur une ligne résolument opposée aux totalitarismes et, à partir de 1937, favorable à la république espagnole. Ses rédacteurs en chef furent successivement Emmanuel Berl et Pierre Bost. André Malraux avait pris part à la mise au point de la maquette et Antoine de Saint-Exupéry fut, avec Julien Benda, Marlène Dietrich, George H. Wells ou Marie Bonaparte, entre autres, l’un de ses collaborateurs réguliers.] et entament un long voyage vers Alger, voyage aussi pénible que pittoresque en train, en autocar et en bateau – un pinardier de Sète, réquisitionné pour évacuer sur Oran les excédents d’essence d’avion des bases méridionales de l’Armée de l’Air.
Les directions de ces journaux (tous quotidiens, sauf Marianne) ont craint de tomber aux mains de la Wehrmacht. Elles ont décidé de suivre le gouvernement de l’autre côté de la Méditerranée – « de l’autre côté du Sahara, s’il le faut, et, au besoin, de l’autre côté de l’Atlantique » a déclaré Pierre Brisson, qui vient de prendre la tête du Figaro en remplacement de Lucien Romier. Chacun souhaite défendre, selon sa sensibilité, une ligne de résistance face à l’Allemagne et de fidélité à l’alliance franco-britannique.


25 août 1940
Alger
Pour la première fois, les auditeurs entendent le speaker prononcer une nouvelle annonce : « Radiodiffusion française, Programme national du studio d’Alger, voici le bulletin d’informations ». Elle sera répétée à chaque bulletin pendant plus de quarante mois.


8 septembre 1940
Paris
Parution au “Journal Officiel de l’État Français” d’un décret de Pierre Laval portant création d’une entité placée sous l’autorité du chef du gouvernement et la tutelle du ministre de l’Information, entité dénommée “Havas - Office Français d’Information”. Cet organisme, dépourvu de budget propre, aura pour mission de « fournir des informations de toutes natures à la presse française et à la radio nationale ». Le texte ne précise pas comment, ni par qui, elles seront produites et mises en forme.
Le même jour, l’ambassadeur du Reich, Otto Abetz, annonce à Pierre Laval que, « par décision spéciale du Führer, sur le conseil du Dr Goebbels », l’immeuble d’Havas, place de la Bourse, sera remis à partir du surlendemain à Havas-OFI.
– Le Grand Reich, explique Abetz, attache le plus grand prix à la renaissance d’une agence d’information aussi française que possible dans le cadre de la réconciliation franco-allemande.
Mais il n’ajoute pas qu’Havas-OFI, soumis, par nature en quelque sorte, à la double censure de l’État français et des organismes d’occupation, dépendra exclusivement ou presque de sources d’informations allemandes ou italiennes. Prétextant (non sans vraies raisons d’ailleurs) de problèmes techniques dus aux destructions de la guerre, l’Oberbefehlshaber Frankreich entend jusqu’à nouvel ordre priver Havas-OFI de toutes relations avec les agences américaines et les médias d’autres pays neutres.


10 septembre 1940
Paris
Un décret de Pierre Laval nomme Simon Arbellot directeur général d’Havas-OFI et fixe la composition du conseil d’administration.
Journaliste au Temps, naguère chroniqueur régulier de la revue Documents de Georges Bataille, Arbellot [Doué d’une plume remarquable, attiré par l’occultisme et l’ésotérisme, Arbellot deviendra un écrivain apprécié des connaisseurs sous le pseudonyme de Raymond Abellio.] n’est membre d’aucun parti. Mais on le sait royaliste d’opinions, et proche intellectuellement de Charles Maurras et de l’équipe de l’Action française.
Parmi les administrateurs choisis par le pouvoir figurent notamment Jean Luchaire, Pierre Gaxotte, Maurice Pujo et Philippe Henriot. Le GPEF, en tant que tel, est représenté par le préfet de Police Langeron et par un ancien du cabinet de Raoul Dautry, Jean Jardin.
À 18 heures, deux camions de la Wehrmacht livrent place de la Bourse des caisses contenant cent téléscripteurs neufs de marque Siemens et près de deux cent machines à écrire d’occasion de types divers et aux claviers parfois exotiques : elles ont été pillées par la Gestapo ou par les Sonder-Propagandakompanien dans les pays tombés dans l’orbite du Reich depuis 1939, en particulier la soi-disant Bohême-Moravie et la Pologne. Réquisitionnée sans nul ménagement, une équipe de techniciens des PTT s’emploie sans zèle à rétablir les lignes avec le central téléphonique et télégraphique.


12 septembre 1940
Alger
Un conseil de Cabinet restreint approuve un projet de “Statut provisoire de la Presse” préparé par Jean Zay et les services de son ministère de l’Information, malgré les réserves de Vincent Auriol, le ministre des Finances. Résumé dans une circulaire qui ne sera jamais publiée, mais communiquée seulement de manière verbale aux patrons des entreprises concernées, ce statut provisoire tend à permettre la survie des journaux dans une conjoncture dont on peut déjà pressentir les difficultés : absence presque totale des recettes de publicité et faiblesse des petites annonces, manque de papier, pénurie d’encre et de plomb, surcharge de travail des imprimeries, rédactions bouleversées par le transfert outre-Méditerranée comme par les morts au combat et la captivité.
Les journaux quotidiens ou hebdomadaires d’Afrique du Nord, qui acquièrent soudain une importance nationale – L’Écho d’Alger, L’Écho d’Oran, La Dépêche de Constantine, La Vigie Marocaine, La Presse (Tunis), pour ne citer que quelques exemples – recevront tous une subvention proportionnelle à leur tirage au 1er septembre 1939 pour compenser les pertes de publicité. Ils ne devront pas tirer sur plus de douze pages, dont huit de nouvelles locales, sauf autorisation annoncée par le gouvernement en cas d’évènement exceptionnel. Le tirage ne peut dépasser la moyenne constatée en juin 1939.
Avec discrétion, sans que rien n’ait été écrit, Jean Zay a aussi fait savoir aux intéressés qu’il est prêt à autoriser Alger Républicain, interdit depuis septembre 1939 pour sa proximité avec le Parti communiste, à reparaître dans les semaines qui viennent. Transmise à qui de droit par des voies très officieuses, sa proposition sera acceptée après mûre réflexion. Les responsables du journal formuleront une demande en règle (quoique discrète), qui sera acceptée (tout aussi discrètement) et Alger Républicain reparaîtra à partir de décembre, avec un contenu soigneusement contrôlé par un représentant de “qui de droit”.
Par ailleurs, le gouvernement prend à sa charge le budget des journaux, magazines et publications de Métropole repliés en AFN. La pagination des quotidiens sera limitée à huit pages en semaine et à douze pages le samedi. Leur tirage est fixé, temporairement en principe, à 5 000 exemplaires, ce qui correspond plus ou moins à leur diffusion d’avant-guerre en AFN.


15 septembre 1940
Alger
Pierre Brossolette, après avoir consulté Jean Zay, décide que l’agence Havas deviendra Havas Libre à dater du 16 à zéro heure, afin de bien marquer la différence avec Havas-OFI.
Le dateline des dépêches prendra la forme « Alger 15 septembre 1940 (Havas Libre) », par exemple. Le sigle sera répété ne varietur à la fin de chaque texte. Il a fallu passer outre aux objections des techniciens qui s’inquiétaient d’avoir à transmettre systématiquement douze signes supplémentaires –un intervalle et cinq caractères multipliés par deux – par envoi.
Dans une “Note aux Abonnés”, Brossolette indique : « Notre Agence reprendra son nom de tradition le jour où le territoire métropolitain sera libéré ».
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dak69



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MessagePosté le: Lun Déc 29, 2008 11:42    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour

C'est superbe !

Personnellement, j'enlèverais la phrase suivante :

Citation:
Le relais est pris par l’émetteur de Romoules, dans les Alpes Maritimes – qui manque cependant de puissance – et, en Algérie, par celui de Tipasa


En effet, l'émetteur de Roumoules (Basses-Alpes) n'a été construit que vers 1972, pour Radio Monte-Carlo, station créee en 1943. Pour Tipasa ondes longues, sa construction est postérieure à 1962 (auparavant, il n'y avait que des émetteurs en ondes moyennes et en ondes courtes de puissance assez modeste en Algérie)

Par contre, construire un émetteur puissant en Algérie,doublé par plusieurs émetteurs ondes courtes, et rayonnant vers la France devra être une priorité du gouvernement dans la FTL. Tipasa est un excellent site pour cela.

Bien amicalement
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