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Menon-Marec



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MessagePosté le: Mer Juin 25, 2008 13:34    Sujet du message: Que faire de? Répondre en citant

Désolé, loïc, d'avoir fait une fausse manœuvre. Si vous voulez supprimer "que faire de Léger" tout de suite, on repartira sur un bon pied.
Amts. M-M.
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loic
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MessagePosté le: Mer Juin 25, 2008 14:11    Sujet du message: Répondre en citant

C'est fait !
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Menon-Marec



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MessagePosté le: Mer Juin 25, 2008 15:36    Sujet du message: Que faire de Gamelin? Répondre en citant

Reprenons donc! Que faire de Gamelin avant, pendant et après le Grand Déménagement? Les paris sont ouverts et toutes les hypothèses seront examinées avant qu'une seule soit validée par Minos, Éaque et Rhadamante.
Amts, ainsi que l'on écrit à l'AFP.
M-M.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Jeu Juin 26, 2008 11:59    Sujet du message: Que faire de **** ? Répondre en citant

Il ne s'agit pas ici de Gamelin... Mais ce texte de Menon-Marec a bien sa place dans la rubrique "Que faire de... ?"
Il me vient cependant un doute : pour faire Mers-el-Kébir (Oran) --- Casa, ne vaudrait-il pas mieux un avion qu'un hydravion ?
Casus


17 septembre 1941
Mers-el-Kébir
Le lieutenant François Coulet, de l’Infanterie de l’Air, embarque à bord du Bréguet Bizerte qui effectue la liaison quotidienne avec Casablanca. Il y est attendu par l’un des huit Boeing Stratoliner des Lignes Aériennes Militaires, le Versailles, qui assure cette semaine le vol hebdomadaire Casa - Dakar - Natal - Cayenne - Pointe-à-Pitre - Key West - New York. Pendant ce temps, l’un des jumeaux du Versailles, le Chambord, décollera de New York pour rejoindre Casablanca via Terre-Neuve, Prestwick et Lisbonne. Par respect de la neutralité du Brésil, des États-Unis et du Portugal, les Stratoliner volent sous les couleurs d’Air France, fiction qui ne trompe personne, surtout pas les agents de l’Abwehr.
Premier secrétaire de la légation de France à Helsinki, Coulet a fini par rejoindre Alger en février 1941 au terme d’un périple proche de l’épopée. Il est passé par Leningrad, où le NKVD l’a retenu – dans une suite de l’hôtel Metropol, il est vrai – pendant plus de deux mois malgré son passeport diplomatique, avant de passer par Moscou. Là, il a attendu six semaines, sans pouvoir quitter un seul instant les locaux de l’ambassade de France, que Lavrenti Beria et Viatcheslav Molotov consentent à lui délivrer un visa. Du jour au lendemain, il a été sommé de quitter la capitale de l’URSS et on l’a enfourné, presque de force, sans cuir ni vêtement de protection, dans le siège passager d’un biplan Polikarpov Po-2 qui l’a conduit à Bakou par étapes de 500 kilomètres, en passant par Stalingrad et Tbilissi. Il ne lui a fallu que quatre jours de plus pour qu’une vedette des gardes-frontières soviétiques l’emmène à Rasht, en Iran, sur les eaux incertaines de la Caspienne, et une semaine encore pour arriver à Téhéran, à pied, en charrette, en camion ou à dos d’âne. Un Wellington de la RAF aménagé en transport l’a conduit à Bagdad (Irak), puis à Lydda (Palestine) et enfin au Caire (Egypte), où il n’a attendu que trois jours le Dewoitine 338 Le Caire - Alger.
Pas lassé des aventures, François Coulet a refusé avec hauteur de réintégrer le cadre du Quai d’Orsay (que l’on continue d’appeler ainsi même s’il s’est retrouvé transplanté rue Michelet) et, mettant en avant sa qualité d’officier de réserve, il a intrigué dans les bureaux pour qu’on l’affecte au 1er Rgt Aéroporté, où il a obtenu son brevet de parachutiste dans les formes réglementaires. Mais ses espoirs d’aller se battre ont été déçus. Le général de Gaulle, intéressé par ce cascadeur de la Carrière, à la fois non-conformiste et d’un calvinisme sans fantaisie, l’a réclamé pour son cabinet, avec l’idée de lui confier quelques missions un peu spéciales.
Coulet escorte deux sacs postaux : il est aujourd’hui chargé de la “valise” destinée à Rio de Janeiro (un messager de l’ambassade de France au Brésil viendra la prendre à Natal) et de celle destinée à Washington. Les Affaires Etrangères ont en effet profité de son voyage pour lui confier le courrier diplomatique, mais officiellement, il se rend aux États-Unis pour représenter la Défense Nationale à des pourparlers sur l’acquisition de matériel ferroviaire en vue de développer et moderniser les chemins de fer d’Afrique du Nord.
Officieusement cependant, dans la serviette cadenassée que des menottes assujettissent à son poignet, François Coulet a rangé une lettre personnelle de Paul Reynaud au président Roosevelt. Le président du Conseil l’a écrite à la main, pour éviter toute indiscrétion. Une seconde lettre, en anglais, tapée à la machine, accrédite Coulet auprès de la Maison Blanche et du Département d’État.
À part Lebrun, Mandel et de Gaulle, personne ne connaît le contenu de la missive de Reynaud.
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loic
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MessagePosté le: Jeu Juin 26, 2008 12:19    Sujet du message: Re: Que faire de **** ? Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
À part Lebrun, Mandel et de Gaulle, personne ne connaît le contenu de la missive de Reynaud.

La suite, la suite Dancing
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MessagePosté le: Jeu Juin 26, 2008 15:27    Sujet du message: Répondre en citant

Très bon mais quelques petites brindilles...

(a) Pour faire Oran-Casa on prend un Bloch 220, voir un DC-2 ou 3 (sans doute 2, racheté en surplus) ou peut-être un Lokheed Electra (encore que ces derniers soients réservés à la Nomenclature, soit, et c'est bien connu, les dirigeants de Oran....si, si, ma femme a trouvé cette perle dans une copie...).

(b) Si on se fait consigner à l'hôtel à Leningrad, ce n'est pas au Metropol, qui est à Moscou, mais à l'Evropeisky (l'Européen) ou au Continental.

(c) Si on vous fait voyager en avion (et pas en train, ce qui serait plus probable) ce n'est pas en Po-2 (strictement réservé aux liaisons militaires) mais en Li-2 (copie sous licence du DC-3). Au cas où Beria aurait eu de vilaines pensée, il aurait pu intriguer pour faire attribuer un Stal-5 (mais je pense qu'ils étaient en passe d'être retirés du service Aeroflot).

(d) La ligne régulière pour Bakou en 40/41 est Moscou-Rostov-Stavropol-Bakou si on utilise les Li-2 et si on prend les chemins détournés, Moscou-Gorki-Kazan-Stalingrad-Bakou (ce qui évite à avoir à survoler la chaîne du Caucase avec l'Elbrouz, tant qu'il est vrai que là où il y a de la chaîne, y a pas de plaisir).

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Casus Frankie
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MessagePosté le: Jeu Juin 26, 2008 16:29    Sujet du message: Répondre en citant

Ben, Menon-Marec, j'avais pas osé te le dire, mais j'étais sûr qu'en touchant à l'URSS, tu allais t'attirer des observations amicales et détaillées de Fantasque...
Tant mieux pour notre Tintin Coulet, qui a donc fait un voyage moins inconfortable que prévu "chez les Soviets".
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Casus Frankie

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Menon-Marec



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 12:17    Sujet du message: Ça Coulet de source Répondre en citant

Trêve de plaisanteries (au lait, aurait dit Escoffier qui s'y connaissait). Le sujet principal de ce feuilleton n'est pas Coulet (Je recommande à chacun la lecture de ses souvenirs, "Vertu des Temps difficiles") mais quelqu'un d'autre dont on se demande précisément que faire.
Toutefois, pour qu'on soit au clair, je propose à Fantasque, Casus Frankie et même à Frégaton (si ça lui var, samovar aussi) de reprendre l'odyssée de Coulet sur les bases suivantes:
- Il quitte Helsinki.
- Il ne passe qu'une semaine à Leningrad, à l'Europeiski, mais sous l'œil du NKVD qui ne manque pas de lui déléguer quelques éléments de la brigade de charme
- À Moscou, il est coincé pendant sept semaines à l'hôtel Lux, si c'est envisageable (Oh, Votre Soviétologie, exaucez-moi et faites que ce soit possible, rien que pour la poésie!), sinon à l'ambassade de France
- Il prend le train jusqu'à Bakou
- Il traverse la Caspienne en bateau
- Il finit par arriver à Téhéran.
Si ça vous var, samovar aussi.
Amts, ainsi que l'on écrit à l'AFP.
M-M.
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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 13:23    Sujet du message: Répondre en citant

Pourquoi pas le "Lux".
Je n'ai pas le souvenir qu'il ait été très plein de membres du Komintern.

Le NKVD va respecter le principe de ne pas mélanger les torchons et les serviettes et ne mettra pas un espion potentiel (Coulet) avec des traitres potentiels (les membres du Komintern...).

Quand Aragon écrit sur le Lux on est en 1932/33 et, à cette date, tous les hôtels sont réquisitionnés pour les "camarades étrangers". À défaut du "Lux" on a le Moskva, hélas détruit par ce (88##**$!£ - CENSURÉ) de Luzhkov. le bâtiment était sur le "rang des Chasseurs" (Okhotny Ryad) à quelques pas du métropole et la Place Rouge et en face de l'immeuble du GOSPLAN (devenu après 1993 celui du Parlement).

La Brigade féminine s'appelle les "hirondelles".

Si Coulet doit rester 7 semaines soit au Lux soit au Moskva, il sera quelque peu sollicité...

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Menon-Marec



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 13:51    Sujet du message: Répondre en citant

Je suggère aussi:
Une plaisanterie? Olé! comme disait Mérimée.
M-M.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 17:31    Sujet du message: Que faire de... Daladier ! Répondre en citant

A la demande générale de Menon-Marec, voici son texte, qu'il a dûment complété. Je vous signale que même la fin vaut d'être relue, car je l'ai passablement remaniée selon les indications de Fantasque et les idées jaillissantes de l'auteur, M-M, qui a fait de l'Aragon (et Castille) plus vrai que nature. Je me suis contenté d'ajouter un (très) discret hommage à Goscinny.

22 février 1941
Casablanca
Après le dîner privé, dans le fumoir, Churchill, un ballon de cognac en main et son havane à la bouche, lance à Paul Reynaud, en massacrant la langue de Molière avec cet entrain dans le barbarisme qui n’est pas le moindre de ses charmes :
– So, my dear Reynaud, tell me comment il va votre relationship with our former Premier’s… Mister Chamberlain, je disais… with Mr Chamberlain’s meilleur ami. You know! Monsieur Daladier. Who else? Asinus asinum fricat, they used to say at Rome.
Le Premier Ministre de Sa Majesté a apprécié le champagne en apéritif puis le Riesling 1935 “Vendanges tardives”, le Chambolle-Musigny 1931 et le Château-Margaux 1927 qui ont été servis pendant le repas. Son teint de brique en porte témoignage.
Mandel, amusé, pince les lèvres pour ne pas sourire largement. Au contraire, le Président du Conseil tente de transformer un rictus en sourire : « Avec M. Daladier… Mes relations… pourraient être meilleures. »
– More… plus cordiale, you mean?
– Nous savons, vous et moi, qu’une paix armée vaut mieux que la guerre. Disons que je souhaiterait de la part de Daladier une attitude plus franche, moins contrainte.
– With more frankness than boldness, intervient De Gaulle avec l’accent à tailler au pic à glace qui fait l’un de ses charmes à lui lorsqu’il use de la langue de Shakespeare (dans laquelle il a pourtant fait récemment de gros progrès).
Churchill éclate d’un gros rire. Il y a du Falstaff chez cet ancien élève d’Harrow et de Sandhurst aux raffinements d’esthète : « Well, do what I did with Lord Halifax, cher Reynaud. Envoyez-le à Washington. Je suis… hem… convinced… »
– Convaincu, propose de Gaulle. Ou persuadé.
– That’s right! Je suis absolutely persuadé que votre Daladier sera an outstanding… no, a jolly good ambassador de la République française chez our common friend, le président Roosevelt.
– Peut-être, répond Reynaud sans s’engager, mais tout à coup songeur, peut-être…
Churchill, tout à trac, se met à fredonner For he’s a jolly good fellow et, du geste, demande au maître d’hôtel de remplir à nouveau son verre.


21 juin 1941
Alger
Au Conseil des Ministres, un accrochage oppose de Gaulle et Daladier.
Le responsable de la Défense nationale se déchaîne contre un télégramme d’Alexis Léger, ex-secrétaire général du Quai d’Orsay devenu ambassadeur à Washington, concernant les modalités de paiement aux États-Unis des matériels acquis avant mars 1941 (instauration du Prêt-Bail). De Gaulle accuse Léger de justifier l’intransigeance américaine sur ce sujet et de ne plus défendre les intérêts de la France, ou de ne plus les distinguer de ceux des Etats-Unis d’Amérique : « Nous avons déjà un ambassadeur des États-Unis accrédité à Alger, lance-t-il. Nous n’avons pas besoin d’en avoir un second à Washington. »
Daladier prend toujours la défense des anciens munichois, même s’ils ont pu exprimer alors un point de vue plus nuancé que le sien : « Rien ne vous autorise à parler ainsi, Général, encore moins à sous-entendre que Léger trahit notre pays ! C’est un grand serviteur de l’État. Je réponds de son patriotisme ! »
– Peuh, laisse tomber de Gaulle, Léger se vendrait pour donner une conférence à Harvard ou pour une critique élogieuse dans le New York Times! Après tout, peut-être faut-il parler anglais pour apprécier le galimatias qu’il voudrait faire passer pour de la littérature.
– Messieurs, messieurs, je vous en prie ! intervient Albert Lebrun.
De Gaulle et Daladier consentent à se taire, non sans échanger des regards dénués de toute aménité.
– Toutefois, reprend le Président de la République, cette controverse n’est pas sans intérêt… Je me demande si… voyez-vous… enfin, à circonstances d’exception, mesures exceptionnelles. Entre nous… et en toute discrétion… je vous avais pleinement approuvé, mon cher Daladier, quand vous aviez nommé ambassadeur chez Franco le maréchal Pétain qui n’avait pas encore, n’est-ce pas… mal tourné. Je me demande si la conjoncture n’exigerait pas aujourd’hui d’envoyer de la même façon à Washington une personnalité de premier plan mais étrangère à la Carrière. Un Paul-Boncour, par exemple, ou un André Tardieu. On peut envisager d’autres noms, d’ailleurs.
Un ange passe. Georges Mandel hoche la tête, la mine approbatrice. L’intervention de Lebrun possède d’autant plus de poids qu’elle est rare. On connaît en effet au Président une tendance à interpréter de manière plutôt restrictive les pouvoirs que la tradition et les usages, plus que les lois constitutionnelles, accordent au chef de l’État.
– Monsieur le Président, dit enfin Paul Reynaud, c’est la sagesse qui vient de parler par votre bouche. Continuez d’y réfléchir, voulez-vous, et, dès que vous le désirerez, faites-nous part de vos réflexions. Mes collègues et moi-même, nous y penserons de notre côté.


9 septembre 1941
Alger
On pourrait se croire revenus aux plus beaux jours de l’avant-guerre.
À quatre jours de la rentrée parlementaire, toutes sortes de rumeurs, nées nul ne sait où, agitent les “milieux autorisés” de la capitale de l’Empire – non, de la capitale française ! On prête à une camarilla de radicaux proches de Daladier l’intention de torpiller le gouvernement Reynaud au moment de la discussion du budget ordinaire ou, sinon, lors du débat de renouvellement de la loi de pleins pouvoirs. L’opération, raconte-t-on, serait d’ores et déjà préparée par Léon Martinaud-Deplat, praticien chevronné des manœuvres de couloir et autres coups fourrés.
Le “petit algérois” de l’Agence Havas Libre, qui a pris la suite de son “petit parisien”, va donner une importance particulière à ce tintamarre en laissant entendre qu’au cabinet de Daladier, on n’a guère apporté de conviction à démentir que le “Taureau du Vaucluse” y soit mêlé. Les cancans deviennent une information, croit-on pouvoir penser, puisque ce papier d’éclairage politique diffusé à 18h30 chaque jour est relu, avant d’être mis sur les fils, par le patron d’AHL en personne, Pierre Brossolette, que l’on sait proche du triumvirat qui domine le gouvernement.


12 septembre 1941
Alger
Le tout-Alger assiste à la première du Médecin malgré lui monté par la Compagnie de l’Illustre Théâtre. Partageant l’Opéra de la Ville Blanche avec le corps de ballet, le chœur et les artistes lyriques, cette troupe que dirige Béatrice Bretty, la compagne de Georges Mandel, regroupe une douzaine d’actrices et acteurs de la Comédie-Française qui ont pu s’échapper de Métropole et que de jeunes (ou moins jeunes) passionnés Algérois ont renforcés.
Le public réserve un triomphe au spectacle. Il s’adresse à la fois au jeu des comédiens, qui unit le meilleur de la tradition de la Maison de Molière aux hardiesses du modernisme – la mise en scène est de Louis Jouvet, les décors de Christian Bérard et les costumes ont été dessinés par un inconnu, Christian Dior, à qui l’on prête de l’avenir.
Peu de gens notent que durant l’entracte, Albert Lebrun et Paul Reynaud ont eu un discret tête-à-tête de cinq minutes.


17 septembre 1941
Oran – La Sénia
Le lieutenant François Coulet, de l’Infanterie de l’Air, embarque à bord du DC-2 qui effectue la liaison quotidienne avec Casablanca. Il est attendu au Maroc par l’un des huit Boeing Stratoliner des Lignes Aériennes Militaires, le Versailles, qui assure cette semaine le vol hebdomadaire Casa - Dakar - Natal - Caracas - Miami - New York. Pendant ce temps, l’un des jumeaux du Versailles, le Chambord, décollera de New York pour rejoindre Casablanca via Terre-Neuve, Prestwick et Lisbonne. Par respect de la neutralité du Brésil, du Vénézuela, des États-Unis et du Portugal, les Stratoliner volent sous les couleurs d’Air France, fiction qui ne trompe personne, surtout pas les agents de l’Abwehr.
Premier secrétaire de la légation de France à Helsinki, Coulet a fini par rejoindre Alger en février 1941 au terme d’un périple proche de l’épopée. A Leningrad, le NKVD l’a retenu près d’un mois (dans une suite de l’hôtel Evropeisky, il est vrai) malgré son passeport diplomatique, avant de l’expédier à la gare en ZIS noire pour rejoindre Moscou dans un “coupé” de la Krasnaya Strelka (la Flèche Rouge, départ vers 23h00, arrivée vers 08h00). Le voyage a été agrémenté par la présence d’un cerbère du NKVD doté de remarquables capacités d’absorption d’alcool (le wagon-restaurant étant bien pourvu), mais ne parlant que le russe, langue à peu près ignorée de Coulet.
A Moscou, ce dernier a attendu sept semaines, sans pouvoir quitter un seul instant les locaux de l’Hôtel Lux, chanté par Aragon : « De la Révolution rien n'arrête le flux – Vont répétant les murs muets de l’hôtel Lux » (Hourra l’Oural). Enfin, Lavrenti Beria et Viatcheslav Molotov ont consenti à lui délivrer un visa. Pendant cette longue attente, le NKVD lui a dépêché d’autres représentants, du sexe dit faible, cette fois. Mais Coulet, parpaillot quelque peu rigide, a résisté aux charmes de celles que les initiés ont baptisées les Hirondelles du NKVD. Il a quand même fait quelques progrès en russe…
Du jour au lendemain, notre homme a été sommé de quitter la capitale de l’URSS et on l’a enfourné, presque de force, dans un Li-2 (copie conforme, sous licence, d’un DC-3) qui l’a conduit à Bakou par Gorki, Kazan et Stalingrad. Il ne lui a fallu que quatre jours de plus pour qu’une vedette des gardes-frontières soviétiques l’emmène à Rasht, en Iran, sur les eaux incertaines de la Caspienne, et une semaine encore pour arriver à Téhéran, à pied, en charrette, en camion ou à dos d’âne. Un Wellington de la RAF aménagé en transport l’a conduit à Bagdad (Irak, Empire Britannique ou peu s’en faut), puis à Lydda (Palestine, Empire Britannique aussi) et enfin au Caire (Egypte, Empire Britannique encore). Là, il n’a attendu que trois jours le Dewoitine 338 Le Caire - Alger.
Pas lassé des aventures, François Coulet a refusé avec hauteur de réintégrer le cadre du Quai d’Orsay (que l’on continue d’appeler ainsi même s’il s’est retrouvé transplanté rue Michelet) et, mettant en avant sa qualité d’officier de réserve, il a intrigué dans les bureaux pour qu’on l’affecte au 1er Rgt Aéroporté, où il a obtenu son brevet de parachutiste dans les formes réglementaires. Mais ses espoirs d’aller se battre ont été déçus. Le général de Gaulle, intéressé par ce cascadeur de la Carrière, à la fois non-conformiste et d’un calvinisme sans fantaisie, l’a réclamé pour son cabinet, avec l’idée de lui confier quelques missions un peu spéciales.
Coulet escorte deux sacs postaux : il est aujourd’hui chargé de la “valise” destinée à Rio de Janeiro (un messager de l’ambassade de France au Brésil viendra la prendre à Natal) et de celle destinée à Washington. Les Affaires Etrangères ont en effet profité de son voyage pour lui confier le courrier diplomatique, mais officiellement, il se rend aux États-Unis pour représenter la Défense Nationale à des pourparlers sur l’acquisition de matériel ferroviaire en vue de développer et moderniser les chemins de fer d’Afrique du Nord.
Officieusement cependant, dans la serviette cadenassée que des menottes assujettissent à son poignet, François Coulet a rangé une lettre personnelle de Paul Reynaud au président Roosevelt. Le Président du Conseil l’a écrite à la main, pour éviter toute indiscrétion. Une seconde lettre, en anglais, tapée à la machine, accrédite Coulet auprès de la Maison Blanche et du Département d’État.
À part Lebrun, Mandel et de Gaulle, personne ne connaît le contenu de la missive de Reynaud.
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Casus Frankie

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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 22:04    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Asinus asinum fricat, they used to say at Rome.


Mes collègues de langue maternelle anglaise diraient plus sûrement "... as they used to say in Rome."
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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 22:13    Sujet du message: et le tout en mot... Répondre en citant

Après bravo ... je manque de vocabulaire...aidez moi !

Vivement la suite

bon we à tous
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"Enfin le cardinal a terminé son sort.
Français, que dirons nous de ce grand personnage ?
Il a fait la paix, il est mort :
Il ne pouvait pour nous rien faire davantage. "
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 22:55    Sujet du message: Répondre en citant

Alias a écrit:
Citation:
Asinus asinum fricat, they used to say at Rome.


Mes collègues de langue maternelle anglaise diraient plus sûrement "... as they used to say in Rome."


Même dans l'état où se trouve Winston ? Ivrogne
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Casus Frankie

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Menon-Marec



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MessagePosté le: Ven Juin 27, 2008 23:24    Sujet du message: Romanités Répondre en citant

Winston, qui ne recule devant aucun barbarisme, a dit en fait: "they used to say à Rome".
Amts. M-M.
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