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1940 - La France continue la guerre
 
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Grand Déménagement Aérien
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Archibald



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MessagePosté le: Sam Sep 17, 2016 17:07    Sujet du message: Répondre en citant

En tant que fana d'aéronautique je dit: bravo. Très intéressant.
_________________
Sergueï Lavrov: "l'Ukraine subira le sort de l'Afghanistan" - Moi: ah ouais, comme en 1988.
...
"C'est un asile de fous; pas un asile de cons. Faudrait construire des asiles de cons mais - vous imaginez un peu la taille des bâtiments..."
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Sam Sep 17, 2016 19:06    Sujet du message: Répondre en citant

Tut-tut, au 16 juin, vous avez apparemment loupé une "amorce" qu'Etienne va sous peu prolonger.
En attendant, voici le 17 juin.


17 juin
Châteauroux-Déols
– Ironie du sort ou loi de Murphy ? Un convoi d’une vingtaine de camions arrive pour embarquer le maximum d’éléments de l’usine, mais sans croiser le prototype de MB-157. Les camions pourront néanmoins embarquer les gabarits et outillages spécifiques, les liasses de plans ayant accompagné les ingénieurs.
Le contenu des camions et le MB-157 seront finalement embarqués à Bordeaux, ainsi que les gabarits du SO.161 et 162 (arrivés de Suresnes et Courbevoie et entreposés depuis) et qu’un exemplaire des plans. Un autre partira par avion.

Bordeaux-Mérignac – Un grand oiseau sort d’un hangar, tracté par un engin semi-chenillé qui le mène le long de la voie accédant aux pistes, mais s’arrête rapidement dès que l’appareil est bien perpendiculaire aux hangars. Quelques mécanos s’affairent, détellent le tracteur, mettent des cales aux roues, branchent la batterie de parc, purgent les réservoirs et enlèvent les différentes protections de sol. Deux d’entre eux pénètrent dans l’appareil et quelques instants après, le moteur n°1 s’ébroue, toussote un peu puis démarre. Dans le cockpit, les deux mécanos surveillent les cadrans et lancent successivement les trois autres moteurs, tout en veillant aux paramètres. Au bout de quelques minutes, tout étant normal, les moteurs à température sont coupés.
Quelques minutes plus tard arrive René le Bail qui commence son inspection pré-vol, suivi du mécanicien Vaudequin qui l’assistera en l’air. Les deux hommes font le tour de l’appareil, vérifiant tout, inspectant les capots moteur à la recherche de trace d’huile ou autre, manœuvrant les gouvernes afin de voir si rien ne bloque, purgeant à nouveau les réservoirs à la recherche d’eau ou d’impuretés… Satisfaits, le Bail et son assistant grimpent dans le SO.161 et s’installent à l’avant. La séquence de démarrage reprend de la même manière, les cadrans surveillés tout aussi attentivement.
Par les fenêtres latérales du cockpit, les deux hommes font signes aux rampants que tout va bien et qu’ils peuvent ôter les cales. Le grand avion avance doucement et s’achemine vers le bord de la piste en service, face au vent. Arrivé au seuil, petit arrêt, les moteurs sont essayés séparément à différents régimes, vérification des magnétos, températures OK, ils peuvent y aller. Feu vert de la tour, Le Bail aligne l’appareil sur la piste, bloque les freins, met les gaz sur les quatre 14N, puis lâche les freins. L’appareil s’élance, d’abord doucement, puis prend de la vitesse, la queue se soulève, l’avion poursuit sa course, puis décolle lentement. Le train rentre, les volets aussi. L’oiseau est enfin dans son élément…
Qu’est-ce que l’Air ? C’est le milieu de vol des Avions !
Après un survol du port et de la Gironde pendant lequel les deux hommes vérifient le bon fonctionnement de l’avion et de ses équipements, retour au bercail. Prise de terrain classique, train sorti, verrouillé (ce ne fut pas toujours le cas !), volets sortis, et Le Bail pose comme une fleur les 20 tonnes de l’appareil. Retour au parc. Moteurs coupés, l’équipage descend, mécanos, contremaîtres et ingénieurs les entourent. « C’est tout bon, lance Le Bail, on vérifie les moulins, on fait les pleins et on peut charger le bac, décollage demain matin à l’aube. Par contre, il me faut un copilote, les commandes sont d’une dureté ! »
………
Alors que l’on s’affaire autour du quadrimoteur, un bruit de moteurs au nord-est et au loin, trois petits points qui grossissent, une patrouille simple, pas des Allemands, donc ! La patrouille haute de la DAT va à la rencontre des arrivants, qui s’avèrent être des Bloch 152 et 151. Les trois avions reconnus font leur prise de terrain à la fusée verte, se posent tranquillement et roulent vers les appareils similaires du GC II/8 qui sont là depuis peu, ayant desserré de Saint-Brieuc. Les pilotes descendent, accueillis par leurs collègues ; ce sont les Polonais de la DAT de Châteauroux-La Martinerie, les lieutenants Henneberg, Kudrewicz et Retinger. Sans ordres de la hiérarchie française qui les a un peu oubliés, ils ont évacué leurs appareils vers un terrain plus sûr. Ne sachant pas où aller, ils ont suivi les conseils des gens de Déols, qui chargeaient leur matériel sur des camions pour Bordeaux.
Un Caudron Simoun les suivra bientôt, précédant un camion réquisitionné par Henneberg pour le reste de son groupe, 5 pilotes et 19 hommes. Henneberg pensait aller en Angleterre, mais le commandant du GC II/8 le convainc d’épauler son groupe, à court d’appareils en état (mais pour ça, ils iront se servir en face !) et surtout de pilotes en forme.

Ambérieu – La note de la veille, commune à toutes les usines d’armement, a surpris bon nombre de personnes dans l’usine flambant neuve SNCASE ex-Lioré et Olivier et leur a causé bien du souci. On peut facilement charger sur des wagons-plateaux les différents sous-éléments des bimoteurs LeO 45 et 451 pour les amener à Marseille, mais comment faire pour les avions presque finis qui attendent un complément de pièces? Pour ceux qui ont juste besoin de leur armement, voire d’équipements comme la radio ou les viseurs de bombardement, cela peut encore aller, ils peuvent être convoyés tel quels, ils seront complétés en AFN… Mais les autres ? Ceux sans hélices, ou trains, roues, pneus, génératrices ? Dans l’urgence, pendant que les collègues s’occupent d’entasser et charger les wagons pour le port de Marseille ou pour Marignane, des mécaniciens, sous la houlette des chefs d’atelier, s’acharnent à cannibaliser les appareils en attente afin de compléter l’équipement de quelques-uns avec celui des autres. Cette opération permettra de sauver trois appareils, qui pourront rejoindre l’Algérie en vol.
………
Marignane – Les mêmes opérations de cannibalisation qu’à Ambérieu sont effectuées, mais ici, un seul avion sera capable de s’envoler. Par contre, la proximité du port permettra l’évacuation plus complète des stocks et chaînes de montage.
………
Nantes – Malgré le fait qu'ici, l’évacuation ait été décrétée plus tôt devant l’avance des panzers, le peu de places disponibles dans les navires qui évacuent fera préférer sauver les gabarits et les outillages légers, avec un peu des stocks de pièces finies.

Un peu partout en France encore non occupée – Pour certains équipementiers, c’est la surprise. N’ayant pas reçu la fameuse note du Ministère, où l’on doit considérer qu’un avion, c’est juste une cellule et un ou plusieurs moteurs, c’est par le biais de contacts avec leurs clients qu’ils apprennent la décision suprême. Pourtant ils avaient bien dû suivre la loi de délocalisation de 1936, qui les avait expédiés aux quatre coins de l’Hexagone (où sont donc les deux coins manquants ? Dans la mare aux canards ?…).
Chez Messier, par exemple, c’est grâce à une visite chez Dewoitine (à Bagnères-de-Bigorre) d’un ingénieur fort surpris par l’ambiance de déménagement que l’on a appris la nouvelle. Ledit ingénieur a en effet demandé aussitôt à téléphoner aux ateliers d’Arudy et Bidos !
………
Bagnères, bureaux d’études Dewoitine – Informé de la surprise de l’ingénieur de chez Messier, Paul Quoix a alerté lui-même ses autres fournisseurs proches, dont Ratier à Figeac. Pour ceux situés en Région Parisienne, les infos entendues à la radio depuis quelques jours ont suffi à lui faire comprendre que désormais, il lui faudra plutôt éplucher les catalogues américains, sauf à espérer que ses partenaires aient pu réussir à s’échapper et puissent les rejoindre ! Les échos recueillis, non sans mal, auprès de l’administration font état de routes encombrées, de trains bondés, même les ports sont engorgés. Il songe à ses amis de la SNCASE de Nantes et de la SNCASO à Saint-Nazaire, qui avaient dû aussi créer des ateliers où ils pouvaient et doivent être en ce moment à batailler pour embarquer leurs stocks et outils… Lui aura un peu plus de temps grâce à sa situation géographique, songe t-il, surtout qu’il semblerait que les armées en déroute aient repris de la vigueur suite aux déclarations martiales du 13 et du 14. Ce qui lui rappelle qu’il est sans nouvelles du fiston, enrôlé au Génie, à Orléans, dont il semblerait que les Allemands soient proches… Allons, du nerf, il a encore du boulot par dessus la tête, comme ces lettres à remettre aux volontaires pour l’Algérie afin qu’ils puissent embarquer sans problèmes. Les services du Ministère lui en ont envoyé quelques-unes, mais il va falloir les compléter puis sûrement en retaper d’autres, finalement il y a pas mal de volontaires.

Limoges, usine Gnome & Rhône – Tôt le matin, la petite loco de la veille arrive avec d’autres wagons, plus disparates, mais on fera avec ! Elle a été précédée d’une autre locomotive, plus puissante, qui est arrivée en marche arrière et est venue au contact des wagons qui ont été chargés la veille et dans la nuit.
Bientôt, alors que les wagons vides attendent sagement sur une voie de garage, le convoi s’ébranle dans un panache de fumée, les cris des roues mordant les rails et le sifflement de la chaudière. Peu après, les wagons vides sont à quai et le chargement reprend ; certaines voitures sont pour passagers, il s’agit aussi d’évacuer le personnel qualifié et volontaire, tout le monde ne pourra pas partir. De plus, il faudra bien surveiller le matériel embarqué dans un périple dont peu soupçonnent les difficultés, avant de se réinstaller « là-bas », dont on ignore à peu près tout…
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Wil the Coyote



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MessagePosté le: Sam Sep 17, 2016 19:49    Sujet du message: Répondre en citant

si je puis me permettre, le SNCASE SE.161 Languedoc, est une bien belle machine... chapeaux bas aux concepteurs
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Etienne



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MessagePosté le: Sam Sep 17, 2016 20:29    Sujet du message: Répondre en citant

Mais il ne s'est appelé SE.161 Languedoc qu'après guerre.

A l'origine MB 161, puis SNCASO, donc SO.161, il devait s'appeler "Bordeaux", puisque sa construction était prévue en Gironde, c'est le déplacement pendant la guerre à Toulouse, et la reprise par la SNCASE qui fit modifier le nom.

Si on arrive à le faire fabriquer au Maroc, il pourrait devenir "Atlas"?
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lebobouba



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MessagePosté le: Sam Sep 17, 2016 22:47    Sujet du message: Répondre en citant

Vivement la suite.. Very Happy

Sauf si c'est déjà prévu pour la suite,on peut donc considérer que certains constructeurs évacuent leurs moyens:

_Morane-Saulnier à Tarbes.
_Latécoère à Biscarosse.
_Ratier à Figeac. (qui dispose de succursales en Algérie et au Maroc)
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Wil the Coyote



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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 08:04    Sujet du message: Répondre en citant

Etienne a écrit:
Mais il ne s'est appelé SE.161 Languedoc qu'après guerre.

A l'origine MB 161, puis SNCASO, donc SO.161, il devait s'appeler "Bordeaux", puisque sa construction était prévue en Gironde, c'est le déplacement pendant la guerre à Toulouse, et la reprise par la SNCASE qui fit modifier le nom.

Si on arrive à le faire fabriquer au Maroc, il pourrait devenir "Atlas"?


Petite question d'un infame terrien, je l'avoue, est-ce qu'il serait possible de continuer la fabrication du MB161 en AFN?
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 08:37    Sujet du message: Répondre en citant

Wil the Coyote a écrit:
Petite question d'un infame terrien, je l'avoue, est-ce qu'il serait possible de continuer la fabrication du MB161 en AFN?

En résumé, Wil : NON. Pas dans les conditions de guerre et d'urgence.
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Casus Frankie

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Etienne



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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 08:41    Sujet du message: Répondre en citant

C'est plutôt "commencer", car il n'y a pas encore de chaîne de montage. Les gabarits et outils spécifiques existent, et sont en cours de transfert vers Casa via les cargos de Bordeaux.
Pour ma part, j'en suis persuadé, car il y a des commandes en cours


lebobouba a écrit:
Vivement la suite.. Very Happy

Sauf si c'est déjà prévu pour la suite,on peut donc considérer que certains constructeurs évacuent leurs moyens:

_Morane-Saulnier à Tarbes.
_Latécoère à Biscarosse.
_Ratier à Figeac. (qui dispose de succursales en Algérie et au Maroc)


Pour Ratier, c'est prévu.
Ensuite, il faudra aussi faire un choix. Priorité aux matériels les plus performants et utiles.
Or MS et Laté ne sont plus en position de force.
On peut surtout imaginer le transfert de pièces détachées pour les appareils déjà en AFN (les 406 ne peuvent y aller par leurs propres moyens), ainsi que du personnel compétent et volontaire. Outillages et gabarits ont moins d'intérêt.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 08:44    Sujet du message: Répondre en citant

La suite, toujours d'Etienne (sans oublier qu'il y a encore un petit récit à partir du 16 qui manque).

18 juin 1940
Bordeaux-Mérignac
– Le nouveau soleil rougit les rares nuages effilochés dans l’air frais du matin ; vers l’ouest, le ciel est encore bleu foncé… Le spectacle est d’une beauté grandiose, mais les hommes qui répètent les gestes de la veille et du lendemain y sont indifférents. Même s’il n’y a pas de garde-chiourme pour leur botter le train, chacun connaissant son rôle, il s’agit de respecter l’horaire décrété par les chefs, ou plutôt par le chef-pilote, car c’est lui qui a choisi l’heure matinale, plus propice à l’envol de son gros quadrimoteur, au grand dam de l’ingénieur en chef et de ses aides, passagers certes intéressés par le trajet, mais mal réveillés. Oh, ce n’est pas le fait d’avoir eu à boucler tardivement les valises, à peine défaites depuis l’arrivée en Gironde, mais les techniciens ont veillé tard pour vérifier les derniers détails, soit mécaniques, soit de l’embarquement et de l’arrimage du matériel transporté ; quant à l’ingénieur, il a passé la soirée en compagnie des instances de la firme qui sont encore sur place et n’ont pas vraiment pris conscience de l’heure quasi matinale à laquelle s’est achevée la réunion, heureusement ou malheureusement bien arrosée… Seul l’équipage est tout frais, ce qui n’est pas plus mal !
Tandis que les passagers s’installent tant bien que mal sur des sièges provisoires (l’aménagement du fuselage n’est pas terminé, et ne le sera qu’après certification), l’équipage, déjà en place, commence à mettre en route les moteurs (pilote, copilote et mécanicien) et vérifie une énième fois le trajet sur les cartes (navigateur), tandis que le radio tripatouille les boutons de ses appareils, en sortant d’un carnet les fréquences à utiliser sur la route. Vibrations dans toute la carlingue, au rythme des moteurs en étoile ou des malformations du terrain… On roule, et la même procédure que la veille est suivie scrupuleusement. Fracas des moteurs et des hélices, vibrations de plus en plus fortes, et soudain, plus rien, en dehors du grondement des 56 cylindres… On vole !
Majestueusement, le SO.161 (que beaucoup continuent d’appeler Bloch 161) s’incline et prend le cap que le navigateur a donné au pilote, tout en continuant de grimper. Copilote et mécanicien surveillent les multiples cadrans, prêts à intervenir à la moindre anomalie. Le radio communique à Bordeaux les infos d’usage, ainsi que les remerciements et saluts, tout aussi d’usage (le tout un peu tronqué, on est en guerre quand même). En route pour Oran, premier point sur Toulouse… Suivra Perpignan, virage au-dessus de la mer pour passer au large de Minorque sans provoquer les Franquistes, puis Alger et enfin Oran, dont le terrain de la Sénia est moins encombré et surtout doté d’une piste plus longue.
RAS au niveau de Toulouse, les moteurs ronronnent comme des chats, le temps est beau, de petits cumulus bien épars en dessous de l’appareil donnent juste la touche de blanc ouaté qu’il faut au bleu du ciel et au vert et ocre des paysages qui défilent sous les ailes, 3 000 m plus bas. Bien qu’ils aient été prévenus, les Dewoitine 520 de la DAT de Toulouse viennent renifler cet oiseau encore inconnu de la plupart, petit exercice d’interception toujours utile, puis volent quelque temps aux côtés du quadrimoteur étincelant afin de l’admirer sous toutes ses coutures. S’il n’y avait la guerre au loin, on aurait pu emmener les appareils photo…
Au-dessus de Perpignan, on aperçoit des avions décollant du terrain de la Salanque ; ils grimpent tranquillement vers le Bloch, ce sont des Curtiss H75 du GC II/4 qui partent vers Alger. Avertis du passage du quadrimoteur, le commandant Rozanoff (pilote d’essais au CEMA depuis 1935, il a convoyé quelques Bf 109 capturés, puis est passé à sa demande en opérations), qui a pris la suite du commandant Borne décédé le 16 en combat, a décidé d’escorter le transport. En fait, “Kostia” s’est dit que le navigateur de l’appareil serait plus efficace que certaines de ses ouailles, et cela fait du boulot en moins pour lui et ses hommes…
Bientôt, les Petits Poucets et les Diables Rouges se positionnent de part et d’autre du SO.161, tout aussi curieux que leurs collègues de Toulouse. Surpris, Le Bail demande la liaison radio avec les chasseurs et Rozanoff lui explique qu’il est chargé de sa protection (il ne précise pas la véritable raison, il est vrai qu’il a tout de même préparé son plan de vol, au cas où…). Vingt-deux chasseurs pour un transport ! Ce beau dispositif survole à près de 320 km/h les navires en train de faire la navette entre les deux bords de la Méditerranée (normalement, le Bloch peut donner 370 km/h, mais on a préféré garder une bonne marge de sécurité, vu la jeunesse de l’appareil, et ce régime convient aussi aux Curtiss).
………
Algérie – Aucun incident n’est venu troubler le trajet, et après deux heures 20 de vol, Alger est en vue. Les monomoteurs battent des ailes et rompent la formation pour entrer dans le circuit de Maison-Blanche. Le Bail, lui, met tranquillement le cap sur Oran, encore 350 km à faire. Jusque là, tout s’est bien passé, même si le radio a dû changer une lampe sur son appareil. Mais même en altitude, signe d’une latitude plus basse et des vents chauds venus du Sahara, la température extérieure a grimpé quelque peu, ce qui augmente forcément celle des moteurs. Oh ! Rien de bien grave, mais il faut surveiller, surtout que les deux pilotes ont maintenant affaire à des turbulences d’air chaud qui secouent l’avion de temps à autre, et les commandes sont plutôt dures.
Assis près du cockpit, l’Ingénieur, qui a bien sommeillé durant la traversée maritime (de mauvaises langues ont prétendu que l’on n’entendait plus les moteurs!), prend des notes sur les améliorations à prévoir. Soudain, le bon Vaudequin, l’œil toujours rivé sur ses manomètres, annonce tranquillement une hausse de température anormale sur le moteur n°2. Le Bail réagit en réduisant le régime et la pression d’admission du moteur en question, et compense les gouvernes des dérives. Plus que 150 km, ça tiendra bien jusque là !
Mais même réduit, le moteur continue de chauffer. Inutile de le cramer, d’autant plus qu’on ignore quand on pourra le remplacer. Le mécano coupe alors le n°2 et passe l’hélice en drapeau, afin de ne pas créer de traînée supplémentaire. Le Bail réajuste le compensateur de direction, bien pratique, et met l’avion en légère descente, cela soulagera les Gnome et puis, de toute façon, il faudra bien perdre cette altitude pour se poser, autant le faire en douceur. A présent, une certaine tension s’est installée, et chacun écoute attentivement les moteurs survivants. Mais ceux-ci tournent sans faille.
Oran est bientôt en vue, contact radio, puis entrée dans le circuit d’atterrissage, train et volets sortis. Finale, Le Bail et son adjoint alignent fermement le quadrimoteur, quand jaillit une fusée rouge du contrôle au sol : interdiction d’atterrir ! Les deux hommes remettent les gaz, rentrent les volets à 10° et s’apprêtent à refaire un tour de circuit ; la radio crachote : une jambe de train n’est pas en position de sortie complète, donc elle n’est pas verrouillée. Pendant que les pilotes entament leur tour supplémentaire, Vaudequin remonte le train complètement, puis le redescend. Cette fois, le Bail fait un passage au ras de la tour pour confirmation. Cela « semble » correct. Dans son calepin, Béziaud note de prévoir un témoin de positionnement ou de verrouillage du train…
Nouvelle approche, cette fois, c’est la bonne. Les deux pilotes tiennent fermement les commandes… Réduction des gaz… L’arrondi est parfait, joli trois-points, mais Le Bail sent que la roue droite s’enfonce. « Faut le tenir aux ailerons, il va basculer à droite ! » Le copilote a compris et s’arc-boute sur le volant. Impossible de freiner sous peine d’embarquer à gauche, et la piste défile… Tant que la portance est là, tout va bien, mais la vitesse diminuant, l’aile va retomber « Accrochez-vous, ça va être violent ! » Maintenu par les deux hommes en sueur, l’avion semble hésiter quelques instants, puis l’aile droite décroche et vient racler le sol. L’avion dérape, vire à droite et s’enfonce dans la terre sablonneuse du bord de piste pour enfin s’arrêter en cheval de bois – mais dans le genre, il y a bien pire !
– Rien de cassé, derrière ?
Non, ça va, quelques bosses, des échauffements dûs aux ceintures, plus de peur que de mal… Tranquillement, l’ingénieur Béziaud ressort son carnet et note qu’il faut revoir urgemment tout le système du train d’atterrissage. Il y a du pain sur la planche…
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Etienne



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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 08:49    Sujet du message: Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
La suite, toujours d'Etienne (sans oublier qu'il y a encore un petit récit à partir du 16 qui manque).



ça arrive, j'ai déjà 4 pages! Very Happy
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 08:52    Sujet du message: Répondre en citant

En pratique : pendant la guerre, ce qu'on pourra soustraire de main-d'œuvre locale à l'agriculture et aux divisions de tirailleurs ira à l'ARAL, et autres ateliers de maintenance et réparation - et il y aura du boulot !

En revanche, à partir de 44, il me semble qu'on peut imaginer que, plutôt que continuer à acheter des matériels US (alors qu'on n'a plus le sou) et plutôt que redéménager les outillages en Métropole (où on est en pleine reconstruction - ponts, voies ferrées, etc), on se dise qu'un SO.161 modernisé (et quelques autres types) pourrait être construit en AFN, ça donnerait du travail aux tirailleurs démobilisés.
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Etienne



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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 09:37    Sujet du message: Répondre en citant

De toute façon, je vois mal un redémarrage en 40.

Après, c'est à voir, mais ce sera obligatoirement plus rapide qu'OTL.
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patzekiller



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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 10:50    Sujet du message: Répondre en citant

j'avais cru comprendre que dans les relations particulières qui s'établissaient avec l'avionneur miles, ce redémarrage irait, grace justement aux équipements divers et variés, dans la direction de la prod d'avions légers en afn, en lien avec la future alat
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Etienne



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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 11:01    Sujet du message: Répondre en citant

ça n'est pas contradictoire, juste complémentaire Wink

C'est dès 40 qu'il faut penser à la reconstruction du pays, qui aura besoin de lignes de transport.
Et la nomination de Charles Tillon au ministère de l'air conforte ce scénario, il fut OTL le promoteur réel du Languedoc.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Dim Sep 18, 2016 12:57    Sujet du message: Répondre en citant

En effet, c'est complémentaire.
Les petits "Cigale" de Miles à partir du printemps 43 (avec des moteurs importés).
Les gros Languedoc à partir de début 45.
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