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Reconstruction de l'industrie aéronautique française
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ggg



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MessagePosté le: Mar Avr 14, 2015 07:34    Sujet du message: Reconstruction de l'industrie aéronautique française Répondre en citant

Note de Loïc : titre complété.

Bonjour,

Frais arrivé sur FTL et passionné d’aviation, je me suis naturellement posé la question du devenir de l’industrie aéronautique française après le Grand Déménagement. L’hypothèse retenue est que la France juge plus efficace d’exiler ses cerveaux aux USA que de tout rebâtir. Il me semble qu’un État naturellement dirigiste comme le nôtre à toutes les époques, soucieux de son rang (nous sommes encore à l’époque de l’Empire) et de sa puissance économique dans un monde de 1940 encore hérissé de barrières protectionnistes, ne voudrait pas faire ce choix, pas plus qu’il ne sacrifierait sa sidérurgie ou son industrie automobile. Après tout, la Quatrième République de l’OTL a bien choisi d’y investir fortement malgré les urgentes priorités de la Reconstruction… et Charles de Gaulle, Président du Conseil, le ferait bien lui aussi en FTL.

Je propose donc une hypothèse de reconstruction sur la base d’une impasse à court terme, pour lancer le débat. Bonne lecture !

Vers octobre 1940, le Grand Déménagement achevé et l'inventaire des personnels et matériels survivants à peu près établi, les grands avionneurs et motoristes repliés en AFN commencent à envisager la reprise de la production. Les commandes à court terme (1941-42) sont d'ores et déjà perdues mais il est hors de question de laisser l'industrie nationale disparaître. Il s’agit à long terme d’éviter la domination anglo-américaine sur le prometteur marché de l’aviation civile une fois la paix revenue... L'État, soucieux de l’indépendance de la France, est du même avis et les analyses convergent : une fois l'industrie lourde remise sur pied, la reprise de la production aéronautique est possible fin 1943.

Il apparaît aussi qu'un regroupement des forces est inévitable. La SNCAN, plus exposée que les autres à l'avancée des Allemands, a perdu presque tout son matériel. Les SNCAO et SNCAC, mal nées de toute façon, ne paraissent guère plus viables. Le gouvernement fusionne donc immédiatement ce qui reste de ces trois sociétés avec les autres SNC, sur la base des liens d'avant la nationalisation de 1937. L'Arsenal, organisme d'État, n'est pas concerné.

Début novembre, le Service Technique Aéronautique (STAé) lance une réflexion sur deux fronts : 1) une série de programmes militaires à l'horizon 1943-44 extrapolés des technologies existantes, et 2) une série d'avants-projets pour 1944-45 sur la base de nouvelles technologies, et en particulier la propulsion à réaction. Les premiers sont déjà "dans les cartons" du ministère et feront l'objet d'une discussion séparée sur le forum. Pour les seconds, le STAé se donne deux mois pour faire la synthèse des travaux en cours et lancer les programmes. Dans le même temps, le minstre de l’Air approuve la construction d’un centre d’essais en vol dans le Sud saharien, hors de portée des reconnaissances ennemies. (Ce ne sera pas Hammaguir, approuvé lors de la fameuse réunion du 21 juin pour les essais de fusées Barré-Leduc et dont l'existence doit rester un secret absolu.)

Le 14 janvier 1941, le STAé dirigé par l'ingénieur général Georges Harlaut convoque donc une “grand-messe” des PDG des principaux constructeurs et motoristes ainsi que leurs ingénieurs en chef dans un coin discret de la base aérienne 201, dans des conditions de secret frisant le rocambolesque (pour ne pas attirer l'attention des espions ennemis, têtes pensantes et riches industriels arriveront déguisés qui en bidasse, qui en blanchisseur...). C'est la fameuse "conférence de Blida", entrée sous ce nom dans la légende de l'aviation française.

L'ingénieur général Camille Rougeron, penseur et stratège aussi brillant qu'iconoclaste, ouvre les débats par une magistrale déclaration liminaire sur "la hardiesse, mère du succès". En substance, dit-il, les objectifs à fixer doivent laisser de côté les conventions et les compromis. À l'heure où la technique avance à pas de géant, le succès exclut le juste milieu au profit des solutions extrêmes. Il faut d'emblée demander aux nouvelles formules le maximum de ce qu'elles peuvent donner, sous peine de voir un ennemi plus hardi - ou, demain, un concurrent commercial - prendre une avance décisive. Concis, éloquent, implacablement rigoureux, ce texte électrise littéralement l'assistance et est depuis passé à la postérité dans les écoles militaires, universités et entreprises du monde entier. (En OTL, le préambule de "L'Aviation nouvelle" du même auteur sur un thème très voisin, en 1957, est d'une intemporalité frappante.)

À l’issue d'une journée d'une intensité intellectuelle rare, huit programmes sont lancés :

“Chasseur 1” : Un chasseur à turboréacteurs britanniques ou américains (nombre au choix) de modèle en cours d'étude, cahier des charges proche de celui du Me 262 OTL, vitesse maximale 1000 km/h. (Le programme fait l'hypothèse implicite de l'aile droite. L'aile en flèche est pourtant connue dès les années 20 mais tous sauf les Allemands l'ont oubliée.)

“Chasseur 2” : Un chasseur équipé d’un propulseur à réaction français selon l’un des trois programmes de moteurs ci-dessous, avec option au choix de l’industriel de repli sur un “1 bis” à réacteur étranger. Mêmes spécifications que Chasseur 1.

“Bombardier” : Un bombardier léger équipé de turboréacteurs étrangers ou de moteurs à réaction français, au choix de l’industriel. Cahier des charges proche de celui de l’Arado 234 OTL. Ce programme prévoit trois dérivés : des versions d'attaque maritime et de reconnaissance en phase 2, une version civile (transport postal ou passagers) en phase 3.

“Turboréacteur 1” : développement d’un turboréacteur à compresseur centrifuge de conception nationale, indépendant de la technologie anglo-américaine, utilisable sur “Chasseur 2” et “Bombardier”.

“Turboréacteur 2” : développement d’un turboréacteur à flux axial (plus difficile à fabriquer mais supérieur à long terme, connu dans le principe dès les années 20 OTL), mêmes spécifications que “Turboréacteur 1” mais délais prolongés (cf. ci-dessous).

“Tuyère thermopropulsive ou statoréacteur” (TPS - le STAé refuse de trancher sur la féroce guerre des termes - et des personnalités - qui fait rage entre les deux experts français, René Leduc et Maurice Roy) : développement d’un propulseur de mêmes caractéristiques que les turboréacteurs ci-dessus. La tuyère n’étant pas autonome, l’industriel doit fournir une solution intégrant un propulseur d’appoint qui permet à l’avion de décoller par ses propres moyens. (Malgré ses activités parallèles, inconnues de presque toute l'assistance, René Leduc est invité et présent pour ne pas éveiller les soupçons d'un observateur averti.)

“Turbopompe” : une petite turbomachine de servitude que le STAé sait déjà nécessaire à la réalisation de certains des autres programmes.

“Fusée” : engin à ergols solides permettant l’aide au décollage des avions ci-dessus. Modalités d’application au choix de l’industriel. En réponse à l'exhortation de Rougeron à concevoir tout programme d’armement comme “système” et non comme simple composant, on prévoit aussi une variante bombe-fusée antichar d'une trentaine de kilos, lançable d'avion ou du sol.

Les objectifs sont:
Chasseur 1 : premier vol 1er juillet 1943, entrée en service 1er juillet 1944
Chasseur 2 : premier vol 1er janvier 1944, entrée en service 1er janvier 1945
Bombardier : mêmes dates que Chasseur 2.
Turboréacteur 1 : aligné sur programme Chasseur 2
Turboréacteur 2 : aligné sur Chasseur 2.
TPS: aligné sur Chasseur 2.
Turbopompe : 1er juillet 1942
Fusée : 1er janvier 1942

(On remarque que le STAé a omis le turbopropulseur et l’hélicoptère, délibérément ou non. L’hélicoptère peut s’expliquer : personne n’y croit encore vraiment. On reviendra sur le turbopropulseur.)

En corollaire, le STAé ordonne l’installation de moyens d’étude aérodynamique adaptés sur le futur site du centre d’essais en vol. L’ingénieur général Dumanois, non content d’avoir repris au pied levé la chaire de mécanique à Polytechnique-Oran, apportera une contribution capitale et trop longtemps ignorée en mettant en service, en un temps record, la première soufflerie supersonique française. (En OTL, Dumanois, professeur de mécanique à l’X, fera de même avec la soufflerie S-1 de Modane.)

Ivres de perspectives nouvelles, les industriels quittent Blida avec deux semaines pour s’engager sur ces appels d’offres. Le 28 janvier, les listes sont sur le bureau d’Harlaut :

Chasseur 1: Bloch, connu pour sa rapidité d’exécution et ses liens avec les Britanniques, s’engage comme maître d’oeuvre sur Chasseur 1 et observateur sur Chasseur 2, au cas où. (Dans le même temps, il souhaite continuer le développement du très prometteur MB.157, évolution du MB.151 à moteur Gnome-Rhône 14R valant un ME 109 F OTL et dont FTL n’a que très peu parlé, mais le ministère s’y opposera au profit de commandes américaines.) Il n’y a pas d’autre offre.

Chasseur 2: Quatre candidats se disputent ce marché, le plus convoité car le plus prestigieux : Bloch comme vu plus haut, la SNCASO (équipe Lucien Servanty, Turboréacteur 2 ou moteur Lockheed L-1000 en repli), Dewoitine (Turboréacteur 1 ou moteur anglais en repli) et l’Arsenal (statoréacteur Roy et propulseur d’appoint à définir). Le projet Dewoitine, mal ficelé, capotera très vite. L’entrée en lice de l’Arsenal, que tous savent concentré sur le bimoteur VG-10 pour 1943, a de quoi surprendre, mais l’ingénieur général Vernisse sait qu’il tient une botte secrète en la personne d’un brillant jeune homme frais émoulu de Sup Aéro, Claude Flamand (l’homme des Gerfaut et Griffon en OTL). Il a aussi trouvé le pilote qu’il lui faut pour cette machine de science-fiction, hors de portée d’un Vonner ou d’un Decroo : un ancien du CEMA diplômé de Centrale et Sup Aéro qui vient de se couvrir de gloire au GC II/4 avec sept victoires homologuées et trois probables dans le ciel de France, un baroudeur intrépide et organisateur hors pair, le tout récent commandant Kostia Rozanoff.

Bombardier : Bloch (moteurs anglais) et la SNCASO s’engagent au vu des économies d’échelle avec les études Chasseur. On retrouve aussi la SNCASE (Turboréacteur 1), forte de son héritage technologique en bombardiers (LeO-45) et le tandem Breguet-Leduc. Cette dernière candidature n’est qu’en partie un leurre, on y reviendra.

Turboréacteur 1 : Curieusement, on ne se bouscule pas au portillon, peut-être en raison de l’avance que l’on connaît déjà aux Anglais. Gnome-Rhône, courtisé par le STAé comme solution de repli mais refuse finalement, soucieux de privilégier le développement de son très prometteur 14R en étoile pour 1942-43 (et de son dérivé “double”, le colossal 28R, pour les quadrimoteurs lourds qui se profilent à l’horizon 1944). Le ministère prend les choses en main : quelques coups de fil conduisent Alsthom, encore avec “h” et fort de son expérience en turbomachines électriques (propulsion du paquebot Normandie), à détacher une équipe qui rejoint quelques exilés du STAé et de l’Université dans une petite structure créée sur mesure et baptisée SNECMA. (Gnome-Rhône, lui, franchira finalement le pas de la réaction mais se dirigera vers le turbopropulseur qu’il greffera sur l’étude Bombardier Breguet, ouvrant une voie qui débouchera sur l’un des plus célèbres moyens-courriers civils des années 50.)

Turboréacteur 2 : Hispano-Suiza a parfaitement compris l’intérêt du turboréacteur axial qui complète son plan stratégique : terminer le 12Z à pistons dans un premier temps (avec ses 37 litres de cylindrée, il promet mieux que le Merlin anglais de 27 litres et sera au meilleur niveau en 1943), puis passer à la réaction en offrant un saut technologique. Il rachète donc à Rateau et Anxionnaz (partis aux USA développer le Lockheed L-1000) le brevet du SRA-1 de 1939 et se lance dans l’aventure. L’Histoire prouvera le bien-fondé de ce choix : les moteurs Hispano sont encore au meilleur niveau mondial pour les chasseurs et les avions d’affaires en ce début de XXIème siècle. Par la suite, Gnome-Rhône récupérera bien le savoir-faire d’une équipe BMW et se lancera lui aussi dans le turboréacteur, mais il sera trop tard.

TPS: Leduc et l’Arsenal sont comme on l’a vu les deux candidats. Leduc prétextera des difficultés insolubles de mise au point pour faire capoter son projet en apparence, au profit de ses activités secrètes d’Hammaguir.

Turbopompe : La toute jeune société Turboméca, créée par Josef Szydlowski (le fameux “Jojo-la-turbine”) en 1938, est la première sur l’affaire. Elle sera rejointe un peu par accident par Leduc, dont le caractère entier et perfectionniste s’accommode mal des collaborations techniques et qui a développé sa propre turbopompe par exaspération pour ne pas ralentir le travail que l’on sait.

Fusée : Le STAé doit donner de la voix pour dénicher un candidat et se résoud finalement à ordonner à l’Arsenal de prendre l’étude en main, avec le concours de quelques spécialistes des poudres repliés du centre d’expériences de Bourges.

Voilà les conditions initiales… le débat est ouvert !
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ladc51



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MessagePosté le: Mar Avr 14, 2015 09:22    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour,

meri pour ce très long message, très détaillé et très riche ! Waow, que de matière, utilisable d'une façon ou d'une autre, bravo et merci !

Je n'ai que peu de peu ce matin et je ne pourrai pas répondre sur le fond (et je ne suis pas l'expert...), mais sur la forme je conseillerais de séparer 3 questions / sujets :
1- expliquer en détail sur quels éléments et arguments la FTL a fait le choix d'envoyer les ingénieurs aéronautiques français dans des bureaux d'étude anglo-saxons. Tu peux préciser les questions sur les éléments qui te troublent et dont tu voudrais connaitre les raisons des choix...
2- imaginer des alternatives
3- présenter des idées complémentaires qui peuvent enrichir la chrono et les résultats de la FTL en 41, 42 et 43 sans changer ses fondamentaux.

Ton post fait un peu les trois à la fois. Je t'invite à séparer les 3 thèmes (ça peut rester dans le même fil de discussion mais en distinguant les 3 aspects) pour faciliter et structurer la suite de la discussion. De plus, au-delà de l'intérêt intellectuel d'imaginer un autre scénario, ce sont le premier et le troisième sujets qui ont le plus d'intéêt pratique pour la FTL : en effet, développer le second conduirait à imaginer une autre uchronie ; ce ne sera plus la FTL, nous avons trop construit à partir de ces bases sur 40, 41 et 42 pour modifier en profondeur un choix de l'été/automne 40, modification qui aurait trop de conséquences...
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Laurent
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dado



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MessagePosté le: Mar Avr 14, 2015 13:21    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne m'y connais pas trop en aéronautique, donc je ne m'aventurerais pas à donner mon avis sur chaque détail. En tout cas, ces propositions ont l'air solidement construites.

Deux choses cependant:

_Ces projets "chasseur 1/ chasseur 2/ bombardier", vu les dates (qui sont peut être optimistes ou sujettes à retard, en tout cas pour la mise en production de masse, vu qu'il faut constituer un tissu industriel dense de petites entreprises dans le secteur aéronautique en plus des centres de recherche, c'est complexe), doivent être considérés comme des projets surtout d'après guerre. Même sans savoir combien de temps la guerre durera, en 40, ces projets à l'horizon 44-45 (si tout va bien) les hommes politiques doivent considérer que ce sera trop tard pour peser suffisamment tôt dans la guerre. Donc, il vaut mieux miser sur un matériel anglo-saxon acheté par prêt bail pour les forces françaises, pour la seule durée de la guerre évidemment. C'est peut être pour ça que la FTL était plutôt parti sur un choix plus de court terme -et encore, parce que les savoirs faire seront rapatriés en France métropolitaine après la guerre, voire même dès que la libération commence- pour accélérer la livraison et la conception de matériels américains (ou britanniques ou canadiens dans certains cas) spécifiquement voulus par et pour l'armée française. Et donc, l'envoi à l'étranger d'une bonne partie des plans, machines, ingénieurs et scientifiques français. Avec juste constitution d'une industrie en Afrique du nord dans ce qui n'est pas trop compliqué à mettre en place ex nihilo: entretiens divers, construction des matériels les plus simple, etc, pas seulement pour l'aéronautique d'ailleurs mais pour les armes individuelles ou les navires aussi. Rien que ça, couplé au développement du logement, des infrastructures et des transports en Afrique du nord, ça va déjà faire beaucoup pour réussir tout ça, donc si on y ajoute la (re)constitution de A à Z d'une filiale aéronautique française, il serait sans doute trop difficile de tout réaliser à temps. Surtout en considérant que la priorité consiste à libérer les français et à gagner la guerre.

_La libération va commencer à poindre sans doute dès mai 1942, avec les américains qui commencent à arriver massivement et l'entrée en guerre de l'URSS, ce qui laisse espérer qu'une bonne partie des forces allemandes seront occupées dans l'est de l'Europe. Deux espoirs confirmés fin 1942.
Donc dès cette période là, l'organisation du renouveau de l'industrie aéronautique en France peut commencer à être organisé FTL, avec un retour prévu des scientifiques et ingénieurs français dès fin 43.
Dès la libération du sud est de la France fin 43, ces industries aéronautiques pourraient renaître dans la région de Marseille par exemple, avec une production en France de certains avions déjà conçus ailleurs qui pourrait reprendre vers la fin de la guerre, voire même avant (peut être pas de A à Z, mais au moins l'assemblage final et certaines pièces). Et l'ouverture de centres de recherche pour l'avenir évidemment. Du coup la carte de l'industrie aéronautique française après guerre pourrait être modifiée, avec un centre de gravité non pas dans le sud ouest (Bordeaux et surtout Toulouse), mais dans le sud est (Marseille?) si ces industries restent dans la région.
On aurait ainsi peut être au XXIème siècle un rafale produit non pas à Mérignac, mais dans les environs de Marseille.
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ladc51



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MessagePosté le: Mar Avr 14, 2015 13:54    Sujet du message: Répondre en citant

Pour revenir sur le premier post et sur le premier thème de ggg, à savoir, expliquer pourquoi l'industrie aéronautique française n'est pas reconstruite en AFN, je peux commencer à donner les éléments déjà publiés :

"Avant d’engager la discussion sur ce sujet extrêmement important, il est nécessaire de faire le point sur différents projets et prototypes de l’industrie aéronautique française.
Les essais du prototype du Dewoitine D-551, qui a fait son premier vol à Bagnères de Bigorre le 26 juin, seront poursuivis jusqu’au 10 juillet, date à laquelle il sera démonté et envoyé en Afrique du Nord. Le deuxième prototype, qui a lui aussi volé, ainsi que trois autres cellules quasiment achevées et treize autres plus ou moins complètes, ont déjà été envoyés à Casablanca où leur arrivée est prévue le 4 juillet. Il en est de même des prototypes de l’hydravion de chasse D-780 et du chasseur embarqué D-790.
Le prototype n° 1 du bombardier moyen/lourd Bréguet 482 a été transféré en Afrique du Nord et le n° 2 le sera à bref délai. Nous espérons pouvoir procéder au premier vol d’au moins l’un d’entre eux d’ici mi-juillet. Le prototype du bombardier lourd CAO-700 a fait son premier vol à Istres le 26 juin. Il sera bientôt démonté pour être transféré en Afrique du Nord.
Je sais que beaucoup d’espoirs sont mis dans la construction de ces avions extrêmement modernes en Afrique du Nord, mais je dois immédiatement vous faire part de son impossibilité. Il n’est en aucun cas possible de rebâtir le réseau de sous-traitants indispensables pour la réalisation d’appareils aussi évolués. Il est important d’empêcher l’ennemi de capturer ces avions, qui font partie de nos projets les plus avancés, et il est tout aussi important de pouvoir mener tous les essais possibles afin d’acquérir le maximum d’informations et de connaissances techniques. Mais la production en Afrique du Nord est et restera un rêve.
Le général Pujo a été envoyé à Washington ce printemps pour étudier la possibilité de construire aux Etats-Unis la variante D-522 à moteur Allison de notre chasseur standard Dewoitine D-520. Cependant, sans l’assistance technique du bureau des méthodes et d’industrialisation de la SNCAM, ce projet devra être abandonné. Il serait en effet impossible de lancer une nouvelle ligne de production tout en adaptant la fabrication du D-520 aux modes opératoires américains actuels sans mettre en cause sérieusement des programmes de fabrication en cours. Aucun constructeur aéronautique américain n’a accepté de s’engager dans ce projet et nous aurions à embaucher et former une bonne partie des cadres nécessaires et l’ensemble du personnel de production. Ce qui est vrai pour le D-522 s’applique également aux autres projets de production d’avions de conception française aux Etats-Unis.
La situation de l’industrie aéronautique est très différente de celle des véhicules blindés, où il existe un certain nombre de chaînes de fabrication inactives chez les constructeurs automobiles, de locomotives, ou de matériel ferroviaire roulant.
Toutefois, l’assistance de nos ingénieurs, techniciens et dessinateurs sera extrêmement bénéfique à l’industrie aéronautique américaine aussi bien que britannique. En plus du très précieux savoir-faire qu’ils apporteront à nos Alliés dans le domaine de la conception de nouveaux appareils comme dans celui de leur industrialisation, ils resteront au fait de toutes les évolutions des technologies aéronautiques, ce qui leur permettra, une fois la victoire obtenue, de reconstruire rapidement notre propre industrie.
Le cas du chasseur Arsenal VG-33 est particulier. Plusieurs exemplaires de cet avion construit essentiellement en bois ont été transférés en Afrique du Nord. La construction de la variante VG-32 à moteur Allison est une possibilité qui mérite d’être étudiée. Cependant, aucune entreprise américaine ne semble avoir la compétence requise pour ce type de construction, et le fabricant britannique De Havilland, qui aurait les capacités nécessaires, semble être fortement engagé dans un projet extrêmement avancé de bombardier léger et d’avion de reconnaissance rapide, lui aussi en bois.
"

Extrait du rapport Cot, daté du 29 juin 1940, en appendice de la chrono de 1940, chapitre 6

C'est moi qui souligne ici les deux passages en gras.

L'idée de base est ainsi rappelée ici : pour reconstruire une industrie aéronautique, il faut reconstruire les usines des constructeurs, avec du personnel et du matériel, avec les infrastructures de transport (matières premières, pièces détachées, produits finis) et d'énergie adéquates ; au-delà des usines des constructeurs eux-mêmes, il faut les industries lourdes pour fabriquer acier, aluminium ou autres matériaux indispensables, il faut tout le tissu de sous-traitants pour fabriquer les multiples pièces détachées. L'ANF de 1940 (OTL comme FTL) n'a aucun de ces pré-requis.

Si on zoome sur les questions de personnels (on pourra détallier les autres sujets si nécessaire): le Grand déménagement permet d'évacuer certains personnels clés (ingénieurs et quelques ouvriers spécialisés) des constructeurs, bureaux d'études et autres centres d'essais de l'armée de l'air, mais ce ne sont que quelques individus (certes clés mais) isolés, et pas assez nombreux pour faire tourner les usines d'un ou plusieurs constructeurs. Il faut donc recruter et former de nombreux ouvriers, ouvriers spécialisés et contre-maîtres. Dans les populations rurales et peu éduquées d'AFN de 1940, c'est un processus impossible à brève échéance...
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MessagePosté le: Mar Avr 14, 2015 14:42    Sujet du message: Répondre en citant

ladc51 a écrit:
Bonjour,

meri pour ce très long message, très détaillé et très riche ! Waow, que de matière, utilisable d'une façon ou d'une autre, bravo et merci !

Je n'ai que peu de peu ce matin et je ne pourrai pas répondre sur le fond (et je ne suis pas l'expert...), mais sur la forme je conseillerais de séparer 3 questions / sujets :
1- expliquer en détail sur quels éléments et arguments la FTL a fait le choix d'envoyer les ingénieurs aéronautiques français dans des bureaux d'étude anglo-saxons. Tu peux préciser les questions sur les éléments qui te troublent et dont tu voudrais connaitre les raisons des choix...
2- imaginer des alternatives
3- présenter des idées complémentaires qui peuvent enrichir la chrono et les résultats de la FTL en 41, 42 et 43 sans changer ses fondamentaux.


Merci d'avoir lancé le débat sur une base courtoise et constructive ! À mon sens, le 1 est un coup parti et a déjà été plutôt bien documenté. Le 2 était mon postulat de base mais je comprends bien qu'on ne va pas changer rétroactivement le cours d'un ouvrage déjà édité. Reste le 3 qui me paraît une option viable sur laquelle je reviendrai plus en détail dans un post ultérieur.
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ggg



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MessagePosté le: Mar Avr 14, 2015 14:51    Sujet du message: Répondre en citant

ladc51 a écrit:
Pour revenir sur le premier post et sur le premier thème de ggg, à savoir, expliquer pourquoi l'industrie aéronautique française n'est pas reconstruite en AFN, je peux commencer à donner les éléments déjà publiés :

...

L'idée de base est ainsi rappelée ici : pour reconstruire une industrie aéronautique, il faut reconstruire les usines des constructeurs, avec du personnel et du matériel, avec les infrastructures de transport (matières premières, pièces détachées, produits finis) et d'énergie adéquates ; au-delà des usines des constructeurs eux-mêmes, il faut les industries lourdes pour fabriquer acier, aluminium ou autres matériaux indispensables, il faut tout le tissu de sous-traitants pour fabriquer les multiples pièces détachées. L'ANF de 1940 (OTL comme FTL) n'a aucun de ces pré-requis.

Si on zoome sur les questions de personnels (on pourra détallier les autres sujets si nécessaire): le Grand déménagement permet d'évacuer certains personnels clés (ingénieurs et quelques ouvriers spécialisés) des constructeurs, bureaux d'études et autres centres d'essais de l'armée de l'air, mais ce ne sont que quelques individus (certes clés mais) isolés, et pas assez nombreux pour faire tourner les usines d'un ou plusieurs constructeurs. Il faut donc recruter et former de nombreux ouvriers, ouvriers spécialisés et contre-maîtres. Dans les populations rurales et peu éduquées d'AFN de 1940, c'est un processus impossible à brève échéance...


J'avais bien lu le rapport Cot (en passant, je dois dévoiler ma piètre opinion sur le personnage OTL que je me souviens avoir vu, dans la célèbre "Histoire de l'aviation" de Daniel Costelle, charger généreusement la barque du pauvre général Vuillemin qui n'était plus de ce monde pour se défendre...) et j'en avais déduit que les industriels se fourniraient à l'étranger pour presque toute la sous-traitance. La valeur stratégique était dans les projets d'avions et les technologies de moteurs - avec peut-être une exception pour un collimateur gyroscopique sur lequel Anglais et Allemands planchaient déjà en 1940.

Quant au pré-requis de l'industrie, c'est lui qui justifie le délai de 1943. Il faut de toute façon construire une industrie lourde en AFN pour nombre d'autres raisons, donc on le fera. Staline a industrialisé l'URSS en cinq ans dans les années 30 à partir de rien ou presque, la France repliée avec sa nombreuse main-d'oeuvre instruite et compétente peut le faire en trois ans et sans goulag. Je reviendrai sur ce sujet dans une autre discussion à ouvrir.
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solarien



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MessagePosté le: Mar Avr 14, 2015 15:19    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne suis pas un expert en aéronautique, mais j'avoue que je pensais aussi un peu comme ggg.

Pas au point de faire naitre une industrie aéronautique, même si des bases solides pourrait être créer et seront surement créer FTL en Afrique du Nord.

Par contre, son idée d'une réunion des principaux industriel, ingénieurs, scientifiques, technicien, a la fin de l'année 40 pour organiser la futur politique aviation française pourrait être garder.
Ce "comité" pourrait aussi être le responsable pour l'envoie des ingénieurs et techniciens dans les différent pays alliées ou amis.
De plus, il pourrait aussi donner une base, une idée, des futurs appareils a construire lors de la libération puis après guerre.

Ce qui fait que fin 1943, début 44, alors que la France commence à être libérer, du personnel qualifié et compétent reviens en France pour commencer la reconstruction d'une filière aéronautique, et on peux imaginer la même chose pour les blindés.
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ggg



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MessagePosté le: Mer Avr 15, 2015 06:49    Sujet du message: Répondre en citant

Sous l’hypothèse de non-reprise de l’industrie aéronautique nationale en AFN, et puisque la chronologie “Avenir” est arrêtée jusqu’en février 1943, on peut envisager la modif suivante :

Le STAé commence à préparer la reprise de la production aéronautique vers la fin prévisible de la guerre à l’horizon 1945-46, dans le cadre du Plan Industrie (en cours de réalisation) décidé par le gouvernement en 1941 (on y reviendra dans un sujet séparé). Les applications civiles sont partie intégrante de la réflexion : l’avion, produit à forte valeur ajoutée, est une priorité pour une France d’après-guerre qui devra impérativement exporter pour se reconstruire.

La conférence de Blida a donc lieu le 2 mars 1943, après une phase de synthèse de deux mois (la narration commence le jour de la conférence).

Rougeron fait toujours dans le magistral et joint à son incitation à la hardiesse deux prophéties (tirées sans mérite de son analyse a posteriori OTL de 1957) qui ont guidé la synthèse préparatoire du STAé :
    La valeur de tout programme militaire des dix prochaines années se mesurera à l’aune du prochain grand obstacle : la vitesse du son… et son dépassement. (Silence respectueux dans l’assistance.)
    En aviation civile, l’avenir est très certainement à la réaction en long-courrier et peut-être en moyen-courrier où le turbopropulseur est une option viable. Une vitesse de 800 à 1000 km/h, selon les applications, semble optimale. La vraie question qui fera ou défera les fortunes est : à quel horizon ?


Pas moins de dix initiatives résultent des discussions :

    un chasseur-bombardier à réaction “haut subsonique” comparable au F-80 OTL (on ne pense pas encore à l’aile en flèche, mais c’est pour bientôt), entrée en service fin 1946
    un avion expérimental destiné à franchir le mur du son, mode de propulsion au choix, premier vol fin 1946
    un avant-projet de chasseur supersonique, entrée en service 1950, grande liberté d’adaptation selon les résultats de l’avion expérimental (il s’agit d’abord d’une étude de dimensionnement qui identifiera un par un les problèmes à résoudre)
    un moyen-courrier à réaction ou turbopropulseur pour les lignes continentales ou de l’Empire, vitesse 750-800 km/h, entrée en service en 1950
    un avant-projet de long-courrier à réaction capable de relier Paris à New York sans escale, vitesse 900 km/h, entrée en service en 1955
    un programme de recherche aérodynamique avec moyens associés (revoilà l’ingénieur Dumanois), aligné sur les délais de l’avion expérimental
    un programme de recherche sur les matériaux nouveaux, en particulier les alliages
    un Office National d’Études et Recherches Aéronautiques (ONERA) pour diriger ces recherches, en attendant d’autres. Maurice Roy en est le directeur (comme en OTL)
    un programme de turboréacteur à flux axial de conception nationale (la France veut maîtriser toute la filière technologique), variantes “performance” (militaire) et “coût/fiabilité” (civil) à prévoir, aligné sur le chasseur supersonique
    un programme de turbopropulseur (le STAé estime à raison que les moteurs à pistons ont atteint leurs limites), aligné sur le moyen-courrier
    un programme de statoréacteur avec propulseur d’appoint, aligné sur le chasseur supersonique, que l’ONERA prendra presque naturellement à sa charge


Les candidats en lice sont :
    Les avionneurs privés Bloch et Breguet, qui ont résisté à la nationalisation de 1937 et défendent encore farouchement leur indépendance
    L’Arsenal, organisme d’État
    Une Société Nationale d’Étude et Constructions Aéronautique (SNECA), entreprise nationale qui regroupe les vestiges de toutes les SNCA créées en 1937
    Les motoristes privés : Hispano, Gnome-Rhône, Turboméca


À suivre… si ces conditions initiales conviennent.
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Imberator



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MessagePosté le: Mer Avr 15, 2015 12:32    Sujet du message: Répondre en citant

Un programme alléchant et prometteur !

Cependant, FTL, avec le niveau des destructions atteint lors du Grand Déménagement puis ensuite avec une seconde campagne de France qui va s'étirer sur deux semestres, la France en aura t'elle les moyens ?
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ladc51



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MessagePosté le: Mer Avr 15, 2015 12:48    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour,

@ ggg : autant j'ai étudié la question de l'industrialisation de l'AFN de 1940, autant je suis néophyte sur les questions de recherche dans l'industrie aéronautique en 40-41... Quand je lis les propositions que tu mets dans la bouche de Rougeron, j'ai un peu l'impression d'entendre un devin, quelqu'un qui parle en 40 (ou 43) avec les informations dont il disposait OTL en 57, bref, une sorte de prescience ou autre lecture dans une boule de cristal... En même temps, je me dis que tu as sans doute plus de bases que moi et que ces éléments ne sont peut-etre pas de la science-fiction en 40-43. Peux-tu dans ce cas rappeler où en est en mai 40 (ante POD) la recherche sur ces sujets en France et dans les autres pays ?

PS : si j'étais dubitatif sur le positionnement d'une telle décision en 40, il n'est pas nécessairement obligé de la positionner en mars 43 (il nous arrive encore de livrer des rajouts sur 41 ou 42 quand ils viennent compléter la trame déjà écrite sans la remettre en cause).
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ggg



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MessagePosté le: Mer Avr 15, 2015 14:46    Sujet du message: Répondre en citant

Imberator a écrit:
Un programme alléchant et prometteur !

Cependant, FTL, avec le niveau des destructions atteint lors du Grand Déménagement puis ensuite avec une seconde campagne de France qui va s'étirer sur deux semestres, la France en aura t'elle les moyens ?


Sans doute, vu que les recherches sont étalées dans le temps et que les moyens à mettre en oeuvre au début de tous ces projets ne sont pas énormes. Les premières décisions d'investissements lourds sont à prévoir en 1944, quand les études préliminaires seront arrivées aux points de non-retour.

Par ordre de priorité, on peut imaginer :

    le chasseur-bombardier à réaction “haut subsonique”
    le programme de turboréacteur axial
    tous les autres programmes de moteurs
    tous les programmes de recherche (qui ne coûtent pas beaucoup)
    l'avion expérimental "mur du son" (noter à ce propos qu'en OTL, ni le programme X-1 américain ni le DH.108 Swallow anglais n'étaient très coûteux)
    le chasseur supersonique et le long-courrier (ce seront tout d'abord des études papier, puis des essais en soufflerie et de petits programmes peu coûteux sur les matériaux et les structures, avant les investissements lourds vers 1946-50, donc on peut les lancer quoi qu'il arrive ou presque. Ils ont l'avantage annexe d'attirer vers l'aviation les brillants cerveaux juste sortis des écoles.)
    le moyen-courrier (au pire, des dérivés civils des quadrimoteurs 1943-45 serviront de bouche-trous)

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ggg



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MessagePosté le: Mer Avr 15, 2015 16:53    Sujet du message: Répondre en citant

ladc51 a écrit:
Bonjour,

@ ggg : autant j'ai étudié la question de l'industrialisation de l'AFN de 1940, autant je suis néophyte sur les questions de recherche dans l'industrie aéronautique en 40-41... Quand je lis les propositions que tu mets dans la bouche de Rougeron, j'ai un peu l'impression d'entendre un devin, quelqu'un qui parle en 40 (ou 43) avec les informations dont il disposait OTL en 57, bref, une sorte de prescience ou autre lecture dans une boule de cristal... En même temps, je me dis que tu as sans doute plus de bases que moi et que ces éléments ne sont peut-etre pas de la science-fiction en 40-43. Peux-tu dans ce cas rappeler où en est en mai 40 (ante POD) la recherche sur ces sujets en France et dans les autres pays ?


Polytechnicien (X1911), ingénieur du Génie maritime puis directeur du service technique et des recherches scientifiques au ministère de l’Air de 1936 à 1938, Camille Rougeron (1893-1980 OTL) est effectivement un visionnaire qui n'a pas eu (mais faut-il s'en étonner ?) l'audience qu'il méritait dans son pays. (Le célèbre Adolf Galland, dans "Jusqu'au bout sur nos Messerschmitt", le cite en revanche comme l'un des plus grands.) Ses écrits sur l'aviation de bombardement dans les années 30 préfigurent assez exactement Tarente ou Pearl Harbor. (Voir http://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2004-5-page-761.htm)

Pour un cerveau de ce genre déjà acquis aux "solutions extrêmes" en 1940, la définition de cahiers des charges tels que cités plus haut n'a rien d'improbable vu l'état estimé des connaissances en 1940 FTL/OTL et en 1942 FTL :

L'existence du mur du son est connue depuis la célèbre Conférence Volta de Rome en 1935 (mise sur pied par le Duce dont c'est l'une des rares contributions au progrès de l'humanité...) et la théorie des ondes de choc est bien défrichée.

Les effets de compressibilité (en particulier l'augmentation de la traînée) sont connus en soufflerie et on en rencontre les premières manifestations en vol. Les rapports des pilotes d'essais des Spitfire et Typhoon côté allié et du FW 190 côté allemand ne laissent aucun doute à ce sujet. Le légendaire vol à 1004 km/h du Me 163 à fusée en décembre 1941 OTL, qui a failli très mal se terminer pour la même raison, est toutefois encore inconnu des Alliés. C'est le compromis vitesse-consommation dû à la compressibilité qui conduit Rougeron à fixer 900-1000 km/h comme solution extrême civile, faisable même en aile droite.

De même, les recherches sur l'aile en flèche (dont viendra comme l'on sait la solution) ne sont en cours qu'en Allemagne. On la connaît depuis les années 20 mais tous ou presque l'ont oubliée. L'expérience OTL montrera qu'on peut la greffer sur un programme à aile droite en cours en quelques mois ; les B-47 et F-86 américains en seront deux preuves éclatantes.

Le turboréacteur n'en est qu'à ses balbutiements mais son potentiel théorique très élevé est connu, de même que les limites physiques de l'hélice au-delà de 800 km/h environ. Le statoréacteur, encore mieux adapté aux très hautes vitesses, n'est cependant qu'une bête curieuse qui mérite tout de même examen. Les programmes laisseront le nombre de moteurs au choix de l'industriel pour pallier la faiblesse des poussées obtenues, tout comme en OTL (ainsi le B-52 à huit moteurs, sorti en 1952 et qui vole encore aujourd'hui...)

On connaît les déformations thermiques des revêtements aux hautes vitesses - et aussi le retard de la métallurgie pour y remédier.

En revanche, les problèmes d'aéro-élasticité, comme l'on dit alors ("flutter" ou "flottement" de nos jours), c.à.d. les vibrations induites par les charges aérodynamiques, sont mal connus. On sait qu'ils existent au vu de problèmes d'efficacité (et parfois de tenue mécanique) des ailerons sur certains chasseurs tels que le Spitfire, mais on est loin de s'imaginer la désintégration en vol de fuselages entiers, comme celui de l'Arsenal VG-90 en OTL.

Visionnaire, Rougeron n'est toutefois pas un devin. Je me garde en particulier de lui faire prédire les tailles des futurs avions à réaction civils et surtout leurs dates optimales d'entrée en service - les délais de 1950 et 1955 sont dictés par l'avancement escompté des recherches. C'est la question de l'"impasse au turbopropulseur" qui a donné des cheveux blancs à tous les avionneurs des années 40 et 50 et qui a fait la fortune des Américains (Douglas, Lockheed et surtout Boeing), qui avaient fait l'impasse, et la ruine des constructeurs britanniques (Bristol) qui avaient misé dessus en long-courrier. (Vickers, en revanche, fera un carton avec le Viscount moyen-courrier turbopropulsé car la vitesse maxi importe moins sur les courtes étapes où les attentes aux aéroports priment.)

Rougeron n'est pas non plus un chef de projet, comme sa carrière en témoigne. Un collègue averti tel que Georges Harlaut aura donc l'idée heureuse de le faire intervenir à Blida plutôt comme lanceur d'impulsions et "joueur de tennis intellectuel".

Voilà... bon pour discussion !
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MessagePosté le: Sam Avr 18, 2015 12:37    Sujet du message: Répondre en citant

Pour acquérir des éléments OTL sur la sujet, on peut utilement consulter le livre d'Emmanuel Chadeau, De Blériot à Dassault. Histoire de l'industrie aéronautique en France (1900-1950), élaboré à partir des archives de l'Armée de l'Air, du Trésor et de celles conservées par la DGAC; on peut trouver des articles sur le sujet dans les numéros 4-1987 et 2-1982 de la Revue historique des Armées.
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MessagePosté le: Sam Avr 18, 2015 15:41    Sujet du message: Répondre en citant

N'y a t'il pas un risque que les avancées respectables qui résulteraient de la mise en place de tout ou partie du programme proposé par ggg ne finissent par s'avérer contre productives à terme pour le développement de l'industrie aéronautique française ?


En effet, les succès estimables qui seraient obtenus jusque tard dans les années 50 pourraient inconsidérément pousser la France à surestimer ses capacités et à ne percevoir qu'un peu trop tard la nécessité de développer une structure disposant d'une taille critique que la nation seule, en terme de ressources et de "force de vente politique", ne pourra être en mesure de mettre sur pied.

De même la sympathie FTL franco-britannique ne risque-t'elle pas au final de limiter dangereusement la place accordée à l'Allemagne dans la construction d'un avionneur européen, sinon unique, disons pour le moins prépondérant de par son niveau d'intégration transnational ?


Bref, l'immense réussite que constitue AIRBUS OTL en tant que parfait d'exemple de coopération pan-européenne pourra-t'il être réitéré FTL si la France venait à rencontré isolément un peu trop de réussites initiales, réelles mais trompeuses, dans son coin, pour appréhender à temps l'impérieuse nécessité de procéder à une réelle intégration de l'industrie aéronautique européenne ?

Et si l'amitié franco-allemande n'est pas, loin s'en faut, comparable FTL à son pendant OTL, un équivalent d'AIRBUS aurait-il autant de chances de s'imposer au niveau mondial si les entreprises aéronautiques d'outre-Rhin et le pouvoir politique allemand n'y sont pas du tout ou très insuffisamment représentés et associés ?
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MessagePosté le: Sam Avr 18, 2015 19:38    Sujet du message: Répondre en citant

C'est tout à fait possible (et c'est précisément le propos d'un forum d'en discuter), quoique je penche personnellement pour le scenario suivant :

Surestimation des capacités nationales et retard à la formation d'une "taille critique" : La surestimation sera sans doute la même en FTL qu'en OTL. On a après tout ici affaire à une génération de dirigeants et hauts fonctionnaires formés à l'école de l'Empire et de la France deuxième puissance mondiale. Comme leurs homologues anglais (OTL ou FTL), nombre d'entre eux auront du mal à intégrer le nouvel ordre mondial et viseront au-delà de leurs capacités. En revanche, je pense qu'une taille critique émergera plus vite. Il a fallu à peu près 30 ans en OTL pour passer des cinq SNC de 1937 à l'unique SNIAS puis Aérospatiale. En FTL, le regroupement des entreprises nationales survient pendant la guerre par la force des choses. (Bloch et Breguet sont supposés survivre comme en OTL.) On a donc une masse critique 20 ans avant l'OTL... laquelle permet soit dit en passant à l'industrie FTL d'éviter les doublons OTL des années 50 et à des ingénieurs de grand talent tels que Servanty d'attaquer très tôt le long-courrier que la France OTL n'a pas fait faute de moyens.

Sympathie FTL franco-britannique : Elle aura a priori les mêmes conséquences qu'en OTL. N'oublions pas que c'est Concorde, projet purement franco-britannique, qui a rendu Airbus possible en faisant comprendre aux deux seuls maîtres d'oeuvre européens qu'ils pouvaient coopérer. En FTL aussi, Allemands et Italiens ne seront au mieux que des partenaires minoritaires parce que les vainqueurs auront soigneusement démantelé leurs industries aéronautiques. Rémanence de cultures d'Empire aidant, je ne pense d'ailleurs pas que Français et Anglais soient prêts à lancer ce genre de projet commun plus tôt en FTL qu'en OTL (1962).

Intégration des Allemands et construction européenne : La logique de guerre froide et de reconstruction européenne, l'attitude toujours équivoque de la Grande-Bretagne et la personnalité de Charles de Gaulle devraient conduire quoi qu'il arrive ou presque au rapprochement franco-allemand en FTL. Là aussi, la rémanence culturelle de la guerre devrait conduire à une date de formation d'Airbus très proche de celle de l'OTL (1967).

Il serait aussi très intéressant de discuter de la coopération franco-américaine après la guerre vu les liens très étroits qui se seront tissés en FTL. L'envoi de nos cerveaux est ciblé sur Republic, North American et Lockheed. Republic n'a historiquement pas su s'adapter au supersonique (son dernier succès OTL est le F-84) et ne devrait pas faire mieux même avec le soutien français. North American est le gros lot militaire et aérospatial jusqu'en 1970 au moins (F-86, F-100, B-1, X-15, moteurs-fusée Rocketdyne, module de commande Apollo). On peut prévoir un transfert de technologie riche et rapide vers l'industrie française... puis un refroidissement accéléré dans les années 50 quand les Frenchies commencent à prendre des parts de marché. Lockheed est bien placé dans le militaire (F-80/T-33, F-94, U-2, C-5) mais aussi dans le civil où il s'est partagé le marché mondial OTL du long-courrier avec Douglas (encore indépendant de McDonnell) jusqu'à la première commande de Boeing 707 fin 1955. Là aussi, l'effet De Gaulle et la réussite commerciale française devraient jouer en faveur d'un refroidissement rapide.
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