Fantasque Time Line

[Casus Frankie]

Capu Rossu nous offre ce court texte en hommage à une aviatrice d'élite, à qui la FTL a réservé une fin plus digne d'elle qu'OTL (où elle est décédée en 1941 dans un accident d'avion, comme passagère).


18 juin 1940
Déménagement aérien
Aérodrome de Saint-Jean des Landes (1) (Rennes), 18h00 – Deux Potez 585 triplaces arrivent au-dessus de l’aérodrome. Ils viennent de Landes-de-Bussac (2), en Gironde, où s’est installée la Division de Liaison de l’Administration Centrale (DALAC) après son repli de la Région Parisienne par Amboise. Lors de la promulgation du décret du 27 mai autorisant à incorporer des femmes pilotes, le commandant Leuleu, chef de la DALAC, qui connaissait Claire Roman (750 heures de vol à ce moment), n’hésita pas, passant outre les questions de stage probatoire et d’uniforme, à engager la jeune femme avec le grade de sous-lieutenant pour lui confier des missions de convoyage des pilotes chargés d’évacuer les appareils disséminés sur des terrains menacés d’être pris par les avant-gardes ennemies.
Ce soir, elle pilote un des deux Potez qui se présentent au-dessus de l‘aérodrome rennais. A bord de chacun d’eux se trouvent deux passagers, des pilotes en mission de récupération. Par précaution, les deux avions effectuent quelques tours de terrain. Celui-ci semble désert et les portes des hangars et des autres bâtiments sont fermées. Claire Roman et son équipier aux commandes de l’autre Po-585 décident alors de se poser et de faire taxi jusqu’aux hangars où doivent se trouver les appareils à récupérer.
Les moteurs arrêtés, les six pilotes français ont la désagréable surprise de voir s’ouvrir les portes des hangars, d’où jaillissent deux groupes de Landsers qui entourent les Potez, armes pointées. Un officier allemand les déclare prisonniers de guerre (tous sont en tenue de vol mais avec calots de l’Armée de l’Air et insignes de grade apparents) et les fait embarquer sous bonne garde dans un camion. S’ensuit un long périple automobile dans Rennes au terme duquel l’escorte, ne sachant pas où enfermer les six Français, les ramène à l’aérodrome et réquisitionne la maison du gardien comme lieu d’internement. Malgré l’avis contraire de ses compagnons, Claire Roman, qui a remarqué que les Allemands n’ont laissé qu’une sentinelle qui tourne autour de la prison improvisée, décide de s’évader.
Elle parvient à s’enfuir mais, jouant de malchance, elle tombe sur une patrouille ennemie. Ne se démontant pas, elle explique, dans un allemand parfait, qu’elle est à la recherche de quoi manger et de bouteilles d’eau minérale pour ses compagnons, car le logement où ils sont enfermés ne contient aucune provision et que l’alimentation en eau est coupée. Compréhensif, le sous-officier chef de patrouille donne l’ordre à l’un de ses soldats de l’accompagner à la boulangerie et à la pharmacie (3) du village avant de la reconduire à sa prison improvisée. C’est lors de ce trajet que la jeune femme remarque un magasin de cycles.


20 juin
Déménagement aérien
Rennes – Dans l’après-midi, Claire Roman parvient à tromper une nouvelle fois la vigilance (modérée) de la sentinelle allemande. Toujours en tenue de vol, elle se rend au magasin de cycles repéré l’avant-veille et y achète une bicyclette… et de quoi se sustenter.
Vers 17h30, elle se met en route vers le sud en direction de Blain, estimant que les Allemands, désireux de marcher sur Lorient, feront route plus à l’ouest, vers Redon. Mais ce détour fait qu’elle a 145 km à faire avant de rejoindre son objectif : le terrain d’Escoublac, près de La Baule. Si un cycliste entraîné peut le faire en un peu plus de sept heures, Claire Roman n’est pas habituée à rouler sur une telle distance ! Elle devra faire quelques pauses et son équipée durera quinze heures.


21 juin
Déménagement aérien
La Baule Escoublac, 08h30 – Fourbue, Claire Roman se présente à l’entrée du terrain d’aviation. Sur celui-ci, on procède au montage des biplaces d’entrainement NAA-64 livrés par North American à l’Armée de l’Air.
Avisant le chef mécano, un sous-officier, elle exige de disposer d’un des appareils achevés. Une discussion animée s’ensuit. Après plusieurs minutes, sans doute impressionné par le galon de sous-lieutenant de la jeune femme (et par son aplomb !), le chef mécanicien lui délivre un appareil (contre un reçu, tout de même !) et en fait faire les pleins. Claire Roman s’installe dans le siège du pilote et sa parfaite connaissance de l’anglais lui permet de comprendre les indications du tableau de bord. Elle lance le moteur, prend le vent et décolle.
………
Landes-de-Bussac, 11h00 – Après une heure et trente-cinq minutes de vol, l’aviatrice se présente au-dessus du terrain et se pose. Les pilotes de la DALAC se demandent ce que vient faire chez eux cet avion américain non immatriculé et à peine orné des cocardes françaises.
Lorsque Claire Roman, qu’on croyait perdue, descend de la carlingue, tout le monde est stupéfait. Le commandant Leleu, après avoir écouté son rapport, lui remet séance tenante une Croix de Guerre qui sera régularisée par la citation n° 3725 du ministère de l’Air :
« Est citée à l’Ordre de l’Armée de l’Air avec attribution de la Croix de Guerre :
Claire Roman, pilote auxiliaire féminin.
Pilote plein d’allant qui, étant prisonnier, a fait preuve le 18 juin 1940 de hardiesse réfléchie et de belles qualités d’initiative et de sang-froid, en s’évadant à bicyclette puis en avion de guerre bien que n’en connaissant pas le fonctionnement.
Signé : Le ministre de l’Air, Laurent Eynac. »
………
Claire Roman continuera ensuite à faire du convoyage, cette fois en Afrique du Nord, pour apporter aux groupes de chasse les appareils américains réceptionnés à Cazes. Elle rejoindra le Centre d’Instruction de la Chasse de Meknès en mai 1943, avant de devenir pilote de chasse au début de 1944… et d’être tuée en mission au mois d’avril. Son nom sera donné à la deuxième promotion de femmes pilotes de combat.

Notes
1- Cet aérodrome situé sur la commune du même nom, au sud de Rennes, sera transformé par la Luftwaffe en une importante base aérienne et de détection radar. Pour ce faire, les Occupants devront raser une partie du village. De nos jours, le site est devenu l’aéroport de Rennes Bretagne.
2- Commune de Gironde aujourd’hui rebaptisée Bussac-Forêt. L’aérodrome, au départ civil mais utilisé successivement par l’Armée de l’Air, la Luftwaffe et le 445th BG (Heavy), est situé à 2,5 km au SSE du village, le long de la D-145.
3- Pour l’eau d’Évian !

[demolitiondan]

Toujours bien, de sortir des noms de l'âbime.
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Quand la vérité n’ose pas aller toute nue, la robe qui l’habille le mieux est encore l’humour &
C’est en trichant pour le beau que l’on est artiste

[Etienne]

Bien!

Petit détail: Les avions américains livrés aux Français avaient des tableaux de bord et instruments en Français, pas en Anglais, selon les directives des commandes.

Les tableaux de bord (et manettes inversées), c'est en 43 OTL

Ce qui n'enlève rien au mérite de partir sans connaître l'avion!
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"Arrêtez-les: Ils sont devenus fous!"

[John92]

Rien à signaler
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Ne pas confondre facilité et simplicité

[Archibald]

"Sacré caractère la framboise !" (comme disait Michoko, de la Pie qui chante).
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Sergueï Lavrov: "l'Ukraine subira le sort de l'Afghanistan" - Moi: ah ouais, comme en 1988.
...
"C'est un asile de fous; pas un asile de cons. Faudrait construire des asiles de cons mais - vous imaginez un peu la taille des bâtiments."

[ChtiJef]

"Claude Roman" ou "Claire Roman" ?
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Vous aimerez la paix comme le temps qui sépare deux guerres. (F. Nietzsche)

[Capu Rossu]

Bonjour,

Dans "Pionniers - Revue Aéronautique Trimestrielle des Vieilles Tiges - n° 65 du 15 juillet 1980" dispo sur Gallica, le prénom de cette aviatrice est "Claire".

@+
Capu
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Aux Postes de Propreté - Mouillé, c'est lavé ! Lavé, c'est propre ! - Rompre des Postes de Propreté

[ChtiJef]

Donc, la 1ère mention, "Claude", dans le récit du 18 juin, est à corriger...
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Vous aimerez la paix comme le temps qui sépare deux guerres. (F. Nietzsche)

[Capu Rossu]

Bonjour;

@ Etienne :

Dans l'article cité ci-dessus, il est bien écrit que c'est sa parfaite maitrise de la langue anglaise qui lui permet de comprendre les diverses indications du tableau de bord.
Ma méconnaissance de l'aéronautique ne m'a pas permis de savoir si le tableau de bord était "français" ou "américain".

@+
Capu
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Aux Postes de Propreté - Mouillé, c'est lavé ! Lavé, c'est propre ! - Rompre des Postes de Propreté

[Etienne]

Bonjour Alain,

Les Vieilles Tiges se certainement sont basés sur les avions américains reçus en 43. Il ne devait plus y avoir beaucoup de pilotes ayant fréquenté les NAA-57 et 64 de l'AdA de 40...

Mais tous les avions livrés aux Français par les Américains en 40 étaient aux normes françaises, tableau de bord et manette de gaz compris. D'ailleurs, les Anglais ont été bien emm.... quand ils ont récupéré les livraisons françaises...
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"Arrêtez-les: Ils sont devenus fous!"

[Guimar]

Le nom de l’aérodrome de Rennes n’est-il pas plutôt « Saint-Jacques de la lande » ?

[Finen]

[Finen]

Pour la petite histoire, mon père nous y a posé avec un Cessna tricycle par vent violent de sud ouest, ben c'est très chaud.

[Anaxagore]

[Capu Rossu]

Bonsoir,

Guimar a écrit :