Le Front Russe, Juillet 1944
Aller à la page Précédente 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 Suivante
|
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
demolitiondan
Inscrit le: 19 Sep 2016 Messages: 10899 Localisation: Salon-de-Provence - Grenoble - Paris
|
Posté le: Mar Jan 07, 2025 22:51 Sujet du message: |
|
|
Un point avancement : le front de l'est est bouclé jusqu'au 10. L'autorité souhaite mâtiner la publication avec les Balkans (de peur que vous vous ennuyez !). Ca sera donc 2 jours Ostfront, 2 jours Balkans au moins jusqu'au 10. _________________ Quand la vérité n’ose pas aller toute nue, la robe qui l’habille le mieux est encore l’humour &
C’est en trichant pour le beau que l’on est artiste |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Casus Frankie Administrateur - Site Admin
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 14422 Localisation: Paris
|
Posté le: Sam Jan 11, 2025 19:27 Sujet du message: |
|
|
3 juillet
Baltique et Prusse orientale
Avant Hannibal – Opération Tamerlan
Swinemünde (avant-port de Stettin) – Sous un ciel matinal chargé mais volable, le convoi destiné à l’évacuation de Memel se rassemble. Composé des vapeurs Celia, Karlsruhe, Karsik et Santander et des diesels Eberhart Essberger et Thalia, il partira dans l’après-midi et devrait atteindre Memel dans la nuit du 4 au 5 en navigant à 12 nœuds – en suivant la côte pour éviter les frappes des Loups rouges ou des vedettes lance-torpilles. L’escorte sera assurée par la 4e Flottille de Zerstörer (Kapitän z. See S. Johannesson – Z-23, Z-30, Z-36 et Z-43), renforcée de la 3e Flottille de torpilleurs (T-2, T-4, T-14) et de plusieurs S-Boots… ce qui parait bien léger en pareilles circonstances.
Il faudra donc compter avant tout sur la vitesse d’exécution : venir vite, charger vite et de nuit, repartir aussi vite et décharger à Königsberg avant que le Rouge se réveille. Heureusement pour les Allemands, c’est la nouvelle lune ces jours-ci.
Opération Hannibal – Petit déménagement entre sous-mariniers
Siège de la Kriegsmarine, Berlin – Sur instruction personnelle de Dönitz, le vice-amiral Hans-Georg von Friedeburg, qui dirige les structures de formation de l’U-Bootwaffe, ordonne l’évacuation vers l’ouest de l’Ecole sous-marine (2. U-Bootlehrdivision) et des flottilles d’entraînement qui sont basées autour de la baie de Dantzig, dans la ville du même nom [Gdansk], ainsi qu’à Gotenhafen [Gdynia], Pillau [Baltiysk] et Königsberg. Cette opération, préparée depuis près d’une semaine, n’est en fait qu’un élément de la Rettungsaktion OstPrußen “Hannibal”. C’est l’une des conséquences de la dégradation continue de la situation allemande en Baltique orientale.
La région de Dantzig rassemble les centres de formation et d’entraînement des sous-mariniers et deux chantiers navals majeurs ayant produit pratiquement un quart des unités du Type-VII (grâce notamment à la main d’œuvre forcée du camp de concentration du Stutthof). Elle a ainsi grandement contribué à la rapide expansion de l’U-Bootwaffe. Jusqu’au début de l’année 1943, elle était à peu près à l’abri des incursions ennemies et notamment des raids de l’aviation anglaise.
Mais cette période faste est à présent terminée. Depuis de longs mois déjà, sous-marins et avions soviétiques effectuent en Baltique des incursions qui, sans faire beaucoup de victimes parmi les U-Boots, perturbent grandement leur entraînement. En outre, bon nombre d’escorteurs ont été coulés tandis que le trafic marchand avec la Suède et la logistique de la Wehrmacht passant par la Baltique ont été mis à mal. La situation s’est compliquée avec la perte de Libau [Liepaja] et celle prévisible de Memel [Klaipeda], car la Flotte Rouge ne manquera pas d’y déployer des vedettes qui, elles, sont un vrai danger pour les U-boots. Plus récemment, des mines aériennes anglaises ont été repérées dans la baie de Dantzig, ce qui signifie que le Bomber Command a reçu pour ordre de s’en prendre à ce sanctuaire.
Mais à présent, c’est évidemment la progression menaçante de l’Armée Rouge qui motive la translation des formations d’entraînement de l’U-Bootwaffe.
Les futurs essais des nouveaux Elektro-Boote devront être menés en baie de Lübeck, certes quasiment à l’abri – pour l’instant – des Soviétiques, mais désormais à portée du Coastal Command, lequel a une grande expérience de la chasse aux U-Boots. L’entraînement, qui se déroule désormais à marche forcée, n’en sera certainement pas favorisé. Le manque d’installations navales disponibles à l’ouest (compte tenu des flottilles existantes) et la situation générale de plus en plus chaotique vont en fait conduire à dissoudre une partie des flottilles.
L’évacuation de Dantzig des marins (et de leurs familles) va demander une à deux semaines et ne passera évidemment pas inaperçue. Elle va accentuer l’exode des civils allemands de Prusse Orientale et du Corridor de Dantzig, qu’ont déjà déclenché rumeurs et nouvelles sur l’avance de l’Armée Rouge.
Opération Oder
Siegfried
Prusse orientale – Front de la Baltique – Le 12e Corps Blindé (Vasily Butkov) reprend sa progression vers Taplacken, en avant de la 4e Armée (Nikolai Gusev) – laquelle a franchi le Niémen assez complètement pour retrouver une bonne valeur combative. Progressant par temps couvert en terrain dégagé, les intentions des Rouges sont parfaitement évidentes : transpercer la 217. ID (Friedrich Bayer), qui garde la trouée de Dzerzhinskoe, entre les forêts de Desantnoe et Prudovka. Avant le crépuscule, les combats ont repris – cependant, Bayer bénéficiait de l’aide de ses voisines moins sollicitées, les 61. ID et 206. ID, au moins pour raccourcir ses lignes. Pour l’heure, donc, l’engagement reste indécis.
Dans le secteur d’Insterburg, la 7e Armée (Alexey Krutikov) continue de redescendre l’Instruch pour venir appuyer la 42e Armée (Ivan Morozov) – laquelle n’est certes pas vraiment en difficulté, mais doit faire face à la 21. ID (Gerhard Matzky), arrivée la veille et qui contribue à entraver sa progression. Malheureusement pour Krutikov, outre les grenadiers du peuple épuisés de la 226. VGD de Franz Sensfuß, son infanterie doit faire avec les volontaires de la 19. Waffen-Grenadier-Brigade der SS (lettische) (Oberführer SS Nikolaus Heilman), arrivés cette nuit. Toujours très motivés, les Baltes parviennent à bloquer la progression adverse à l’orée des bois de Petrozavodskoye, où l’Instruch et l’Angrapa se rapprochent pour confluer, ce qui contraint très fortement les axes d’assaut. Et comme, du côté de Morozov, on n’avance pas beaucoup non plus à Kalgen – toujours cette artillerie, et l’on voit même des Fw 190 F du II/SG.1 tenter quelques sorties ! – les deux armées s’embourbent.
Reste le cas de Volodarovka et de la route de Nordenbork. Ici, l’arrivée de la 11. ID (Siegfried Thomaschki) venant du nord a achevé de renverser la dynamique d’une bataille où l’Armée Rouge se retrouve en infériorité numérique – occurrence assez rare pour être soulignée. Il est vrai qu’en face, les fascistes ont peu de blindés – seulement les survivants du 184. StuG Abt (major Ernst Schmidt). Cependant, en dépit de toute leur bravoure, les parachutistes du 2e Corps Aéroporté (M. Tikhonov) sont peu à peu repoussés vers l’est, sans que le 15e Corps Blindé (Fiodor Rudkine) puisse rien faire d’utile, d’autant que les premiers Tiger du 505. schw. Pz. Abt (Hauptmann Werner Freiherr von Beschwitz) sont arrivés en renfort et que Rudkine semble bien incapable de les contrer.
Encouragé par cette évolution, et même si la 59. Volksgrenadier (Rudolf Sperl) reste atone et si la 1. Luftwaffen-Feld-Division (Rudolf Petrauschke) se trouve carrément exsangue, Georg Lindemann, dans son QG de Königsberg, commence à caresser l’idée d’une contre-attaque jusqu’à Angerap. Celle-ci permettrait de dégager définitivement les Soviets qui coupent sa liaison avec le sud. C’est risqué, certes – mais le Saxon est un officier de la vieille école de la cavalerie. Et de toute façon, il n’a pas le choix. D’autant plus qu’en bas, Perlswalde, Kruklanki et Widminnen tiennent globalement toujours !
Prusse orientale et Pologne – 1er Front Biélorusse – Avec l’arrivée de la 3e Armée de la Garde (Ivan Zakharkine) et la reprise des frappes de la 2e Armée aérienne du camarade Naumenko – laquelle use généreusement des charges creuses et des bombes à fragmentation, encore plus dangereuses en milieu forestier (16) – la situation devient vraiment pénible pour le XLI. PanzerKorps (Hellmuth Weidling) et le XXIV. PanzerKorps (Martin Wandel). Ceux-ci peuvent sans doute tenir encore quelque temps au nord d’Osterode in Ostpreußen… Mais quel est l’intérêt de livrer bataille ici ?
De fait, à présent que les Rouges sont sur la Vistule et menaceraient Marienwerder, il n’est pas certain que cette position allemande ne puisse pas être tournée demain par Marienburg et Elbing. Sans parler, bien sûr, de défendre ces deux villes, Dantzig et le reste du Vaterland. C’est donc avec une certaine acidité qu’Herman Balck – qui sait bien et depuis longtemps que tout ceci ne va nulle part, sinon lui faire sacrifier sa précieuse 3. PanzerArmee en pure perte – sollicite de Königsberg l’autorisation de se retirer sur une ligne Małdyty-Elbing. Puisque personne ne vient à son secours de Dantzig et que la Baltique est menacée ! En fait, il s’agit simplement d’acter ce qu’Hitler a prévu depuis déjà plusieurs jours : la liaison entre la Poméranie et la Prusse orientale est condamnée. Balck obtient donc son autorisation sans difficulté… mais tout ceci aura décidément des conséquences, au vu de l’étendue du désastre.
Plus au sud, plus rien ne bouge ou presque entre la 1ère Armée de la Garde (Ivan Chistiakov) et le LII. ArmeeKorps (Hans-Karl von Scheele). Ce dernier, soutenu sur sa gauche par le XXVIII. ArmeeKorps (Herbert Loch), de la 16. Armee, parait avoir réussi à épuiser le Bolchevique dans les bois. A moins que la horde ne soit tout simplement trop étirée, et von Scheele pas exactement sur sa route. Ce relatif répit n’en demeure pas moins bienvenu ! Derrière, la 208. ID (Hans Piekenbrock) – ravagée, exténuée, mais toujours vivante – court en direction d’Allenstein pour rallier son corps d’origine, celui de Wandel, depuis sur sa droite.
Enfin, sur la Vistule justement, le 10e Corps Blindé (Alexei Popov) commence à descendre vers Marienwerder. Il n’est certes pas en mesure de s’en emparer seul (avec les Polonais peut-être, et encore…). Mais sa simple menace, une fois signalée à Rakowiec, contraint le XLVII. PanzerKorps (Hans von Funck) – qui aurait pourtant pu chercher à s’opposer à Popov – à se retirer définitivement vers Marienburg, afin de défendre la Nogat. C’est que le PanzerKorps est lui-même particulièrement usé et craint désormais l’encerclement. Ce qui implique qu’il faut abandonner Graudenz à Rokossovski et Marienwerder aux Polonais de la 1ère Armée (J. “Radoslaw” Mazurkiewicz), qui accourent très vite…
Vers la Poméranie – 2e Front Biélorusse – En dépit de ses immenses succès de ses derniers jours, le maréchal Rokossovski n’est absolument pas satisfait. En effet, loin d’avoir la gloire de foncer droit vers Stettin et Posen comme il l’espérait, son 2e Front Biélorusse vient de recevoir l’ordre de se décaler vers le nord, sitôt Łódź sécurisée, afin de faire de la place à Joukov tout en renforçant l’imminent encerclement de la Prusse orientale. Ensuite, une longue période de sièges pénibles sur la Baltique s’annoncera vraisemblablement…
On le comprend, le “Polonais” est dépité. A l’heure présente, le Reich n’a – de son point de vue – rien de sérieux sur sa route et en forçant à peine, il pourrait sans doute atteindre l’Oder avant tout le monde. Cette offensive s’appelle bien Oder, non ? Alors quoi ?
En attendant, et bien qu’il multiplie les appels à destination de la Stavka, voire carrément de Staline, Konstantin Rokossovski ne peut qu’exécuter l’ordre reçu – lequel répond globalement au plan initial, il est vrai.
La 15e Armée (Georgiy Zakharov) achève de nettoyer Toruń. Le 13e Corps Blindé (Boris Bakharov), qui ne va tout de même pas prendre Dantzig tout seul, se contente de tâter Graudenz, qu’il ne peut enlever immédiatement, faute d’infanterie. Ce sera donc l’affaire de la 3e Armée de Choc (Mikhaïl Purkayev) – laquelle arrive dans le secteur en début d’après-midi et commence tout de suite à bombarder puis à engager les rares unités de Volksturm et autres bataillons de marche s’y trouvant. Assurément, ça ne durera pas… même si l’ennemi s’acharne. Tout ceci laisse au 14e Corps Blindé (Ivan Kirichenko) la possibilité de longer à son tour la Vistule jusqu’à Gardeja – sur les traces d’Alexei Popov et suivi par Bakharov.
Plus au sud, la 63e Armée (Vasiliy Kuznetsov) s’empare de Włocławek – achevant ainsi de sécuriser l’amont de la Vistule. De Brześć Kujawski, elle commence à remonter vers Gniewkowo, face à Toruń, en négligeant pour l’heure Posen, au grand désespoir de son chef.
Plus à l’ouest, de l’autre côté de la Warta, le LXXII. ArmeeKorps (Anton Grasser) passe Konin et tente de se décaler vers le nord, sur une trajectoire mettant à profit le lac Gopło pour sa défense. Logique !
Au même moment, les anciens défenseurs de Litzmannstadt – toujours en cours de nettoyage par la 54e Armée (Sergei Roginski) – continuent de passer la Warta à Uniejów. La masse d’infanterie défaite du LXIII. ArmeeKorps (Ernst Dehner) et de la 92. ID (Max Reinwald) a mis toute la nuit pour traverser. Malheureusement pour le XLVI. PanzerKorps (Franz Westhoven) et (surtout) pour le XL. PanzerKorps (Eberhard Rodt), qui forment tous deux l’arrière-garde à Balin et Biernacice, les Sturmovik reviennent en début de matinée. Et à gauche, le 1er Corps Mécanisé de la Garde (Mitrofan Zinkovich), la 29e Armée (Alexander Gorbatov) et la 2e Armée de Choc (Kuzma Galitsky) frappent fort et de façon concentrique – mais aussi un peu dispersée, voire carrémernt en se gênant quelque peu. Néanmoins, la situation se présente bien – si bien que la 2e Armée de la Garde (Leonid Govorov) reçoit l’ordre de ne pas se joindre à la poursuite pour plutôt se porter au nord, vers Łęczyca, à la suite de Kuznetsov.
En dépit de cette défection, la disproportion des forces sur la Warta demeure écrasante. En vérité, seule l’intervention de l’infanterie de Rodt évite un sort fatal à l’ensemble allemand. Cela et les rares Panzers IV encore opérationnels de la 22. Panzer (Hermann von Oppeln-Bronikowski), que son chef manœuvre désormais dans un évident état d’ivresse – une ivresse lucide, certes, mais au point où en sont les choses… Finalement, après une matinée de cauchemar et alors que les cieux se sont fort heureusement remis à dégouliner en début d’après-midi, les derniers débris passent la Warta à la nage. Franz Westhoven (XLVI. PzK) a sauvé une demi-division Panzer – mais du côté de Rodt (XL. PzK), seule la 253. ID (Hans Junck) survit encore, vaguement. La 22. Panzer n’existe plus. A son chef, qui tente de tirer trois mots de ce général puant le cigare et à l’haleine fétide, von Oppeln-Bronikowski ne donne qu’une seule réponse : « Catastrophe ! ».
Mais il n’y aura pas de sanction. Tout le monde sait qu’avant de disparaître, la 22. Panzer a sauvé bien de monde aujourd’hui. Du monde qui file désormais au mieux de ses possibilités vers Konin, pour improviser une ligne de défense allant d’Inowrocław à Sieradz. Ce qui fait beaucoup pour ce qui reste de la 4. PanzerArmee de von der Chevallerie – mais ce dernier n’a pas vraiment le choix. Heureusement, derrière, les Soviétiques semblent devoir faire une pause. Tous, sauf le 7e Corps Blindé (Alexei Panfilov), qui continue de passer la Warta à Zamoście et commence justement à s’approcher de Sieradz, sans que personne sur la rive ouest n’ait vraiment constaté sa présence.
Au-delà de la Vistule – 3e Front Biélorusse – Désormais seules face à l’Est, sur les rives de la Warta, les hommes et engins de la 108. Panzerbrigade (Oberst Friedrich-Heinrich Musculus) ne s’attardent pas à Osjaków. Sans égard pour les traînards et les survivants de feu la 18. Panzer, ils filent immédiatement vers l’Ouest – les Tiger du 501. schw. Pz Abt (Major Erich Löwe) forment une fois encore le cœur de la phalange, non pas en arrière-garde, mais en s’arrêtant sur une série de positions favorables qui leur permettent de tirer l’adversaire d’assez loin avant de se retirer… Et les localités s’enchaînent : Małyszyn (au nord de Wieluń), Biała Rządowa, Walichnowy. Roulant toute la nuit et tout le jour, sous les orages d’acier puis les ondées, les forces de la Heer comptent atteindre la Prosna à Wieruszow en début de soirée. Ensuite, ce sera la ligne de recueil formée par la 10. Panzergrenadier (August Schmidt), laquelle défend la Silésie, Breslau et… la frontière de 1939. Un hasard de la manœuvre, assurément.
Derrière Musculus et Löwe, la 3e Armée de Chars continue de déferler. Pavel Rybalko pousse ses subordonnés avec des ordres agressifs et à coups de sarcasmes, selon sa marque de fabrique. Toutefois, le Soviétique ne court pas sus à l’ennemi. Sitôt la Warta passé, il donne l’ordre au 2e Corps Mécanisé (Vasily Volsky) – qui ouvre pourtant la voie – de se placer sur l’arrière du 18e Corps Blindé (Alexei Burdeiny) pour remonter vers Ostrów Wielkopolski puis Posen. Le 2e Corps Blindé de la Garde (Ivan Vovchenko) suivra… C’est que Rybalko s’est fait taper sur les doigts par son chef, Georgui Joukov ! Lequel ne voit absolument aucun intérêt à faire descendre ses précieuses formations blindées vers le sud pour rendre service à Koniev en menaçant Breslau. Surtout avec l’avancée imprévue du 3e Front Ukrainien vers Oppeln, qui le gêne autant qu’elle rend l’évacuation de Częstochowa inévitable pour le fasciste. Posen est la cible prioritaire. Katukov se débrouillera bien pour saisir cette cité tout seul !
De même, la 64e Armée (Mikhail Sharokine) et le 1er Corps Blindé (Porfiry Chanchibadze) suffiront largement pour sécuriser le flanc à Wieluń. La 10e Armée de la Garde (Vasily Chuikov) reçoit même l’ordre de passer la Warta plus au nord, vers Konopnica, pour remonter immédiatement vers Złoczew puis (à terme) Kalisz, afin de border Rokossovski (à Sieradz). Bien sûr, ces deux villes tombent dans la journée.
Ce crochet vers le nord permet cependant à la 107. Panzerbrigade (Major Fritz von Maltzahn) et au 905. StuG Abt (Major Jobst Veit Braun) d’échapper définitivement aux griffes de l’ours rouge. Certes, la 4e Armée de la Garde (Ivan Muzychenko) les poursuit toujours, mais elle est fatiguée, embourbée et s’arrête finalement à Działoszyn pour commencer à obliquer vers Osjaków. Les blindés à croix noires parviennent donc à Kreuzburg, au contact des lignes de la 336. Volksgrenadier (Walther Lucht). Un répit… Mais pas forcément le salut, en raison des manœuvres en cours du côté de Koniev.
De son côté, le PanzerKorps GrossDeutschland (Walter Hornlein) a passé la nuit à glisser vers Krzepice et Lubliniec et marche désormais vers Kreuzburg. Derrière, la Fallschirm-Panzer Hermann-Göring (Paul Konrath) n’a pas attendu la nouvelle de l’offensive bolchevique sur Oppeln pour commencer à se retirer… Cependant, manœuvrant avec une certaine adresse, la division blindée de la Luftwaffe abandonne Częstochowa à l’ennemi dès l’aube, sans subir trop de nouvelles pertes. Sans le savoir, elle profite du fait que les ordres de Mikhail Katukov sont de « sauver Częstochowa », en raison de son importance pour l’extraction de matières premières nécessaires à l’industrie métallurgique polonaise et de son rôle de nœud logistique.
Les hommes du 21e Corps Blindé (Kukushkine) sont donc les premiers à entrer dans les faubourgs de la ville – de leur côté, le 1er Corps Blindé de la Garde (Trofim Tanachichine) et le 1er Corps Mécanisé (Mikhail Solomatin) chassent le traînard à Kamyk et Blachownia et achèvent d’encercler Częstochowa, dont on a craint un instant qu’elle ne devienne Festung. Affaire réglée, fort heureusement ! Il faut cependant attendre la 8e Armée de la Garde (Sergei Trofimenko), qui arrivera en fin d’après-midi avec le 11e Corps Mécanisé (Viktor Obukhov), pour lui passer le relais du nettoyage et reprendre la progression vers l’ouest.
On murmure aussi que les Polonais, dans le centre, ont déjà lancé des actions improvisées que l’Armée Rouge ne prévoit pas forcément de soutenir… Pendant ce temps, Konrath et sa Fallschirm-Panzer se trouveraient déjà vers Krzepice et progresseraient vers Rudniki, subissant un certain nombre de pertes du fait des pannes comme des frappes de l’aviation (les Sdkfz 7/1 Flakvierling deviennent rares et sont d’autant plus précieux…).
La 1ère Armée de Chars peut donc souffler. Quant à Mikhail Katukov en personne, toujours un peu nauséeux – ce qu’il cache de toute son autorité – il… récupère lui aussi, notamment à son retour à son QG avancé. Le général s’assoit, penche la tête sur son épaule et s’endort instantanément ! Tanachichine dira à ce sujet : « J’étais toujours ébahi par son heureuse capacité. Je n’ai jamais réussi à dormir assis comme ça ! ».
Ainsi donc, le 3e Front Biélorusse et le 3e Front Ukrainien semblent bien avoir laissé filer le cœur de la 1. SS-Panzer-Armee (Paul Hausser), alors qu’avec un peu de bonne volonté, un encerclement par le nord aurait été envisageable. L’Armée Rouge, qui a appris dans la douleur la guerre moderne, oublie ses leçons dans la victoire… tout comme ses maréchaux, si individualistes. A présent, Joukov et Koniev sont bel et bien les concurrents d’une course, prêts à tout pour arriver le premier en Allemagne, quitte à se tirer dans les pattes. En attendant Berlin ?… Le tout sous l’œil bienveillant de Staline, lequel n’ignore rien des pertes humaines ou matérielles liées à cette rivalité, mais ne souhaite en tirer aucune conséquence.
Entre les Carpates, la Vistule et la Dunajec – 3e Front d’Ukraine – L’offensive de la 4e Armée de Chars en direction d’Oppeln démarre tôt le matin – Dimitri Lelioushenko n’a certes pas encore toutes ses unités complètement en place, mais il tient à aller vite.
Depuis Pyskowice, le 3e Corps Blindé (Vassily Badanov) ouvre la voie vers Strzelce Opolskie, suivi par le 5e Corps Blindé de la Garde Jitomir (Vladimir Zhdanov) puis par le 5e Corps Mécanisé (Ivan Sukhov). Badanov se heurte rapidement aux positions avancées de la 23. Panzer (Nikolaus von Vormann) – très insuffisante pour l’arrêter, celle-ci réclame assez vite le soutien de la 5. SS-Panzer Wiking (Herbert-Otto Gille), en garde plus au sud vers Kędzierzyn-Koźle. Fin tacticien, Paul Hausser ne donne pas suite à ce niveau, mais ordonne plutôt au PanzerKorps GrossDeutschland de détacher la 103. Panzerbrigade (Oberst Treuhaupt) et le 232. StuG Abt (Hauptmann Paul Franke), qui se trouvent à Zawadzkie, la 3. SS-Panzer Totenkopf (Hermann Priess) prenant le relais à partir de Lubliniec. Pour l’heure, le combat est des plus violents, mais semble égal, en raison du manque de soutien aérien côté soviétique, de l’impétuosité de Lelioushenko et de la prise de flanc exécutée par Treuhaupt, qui retarde le 5e Corps Blindé de la Garde Jitomir supposé soutenir Badanov. Mais les premières lignes sont déjà contestées – en dépit des pertes, l’ours soviétique fait peser sa grosse patte sur un des plateaux de la balance, et celle-ci penche de plus en plus vers l’est.
Et puis, l’infanterie n’est pas loin : la 5e Armée (M.I. Potapov), le 3e Corps Aéroporté (V.A. Glazunov) et la 9e Armée de la Garde (N.P. Pukhov) arrivent à hauteur de Koszęcin et semblent près d’assaillir le flanc de la Totenkopf – quel que soit le fanatisme de la division SS, celle-ci va donc devoir, à terme, reculer vers Guttentag et Rosenberg, ce qui fragilisera Vormann et Treuhaupt… Et même si, dans Katowice, la 4e Armée de Choc (Ivan Maslennikov) continue de perdre du temps, l’Armée Rouge dispose de bien assez de moyens pour la tâche qui s’annonce.
Surtout que derrière, autour de Rudziniec, la 1ère Armée de Chars de la Garde (Serguei Bogdanov) se reconcentre avec un savoir-faire et une (relative) maîtrise durement acquis, mais bien réels ! Son chef se déplace de poste d’observation en centre de ravitaillement, électrisant les hommes, haranguant les chefs de peloton, testant les responsables avec énergie – il est bien connu que l’homme a peu de tolérance pour ceux qu’il estime « lents ». Puis, en rentrant vers son QG avancé, il fait le point avec son adjoint, le général Aleksei Ivanovich Radzievski – lequel n’est évidemment pas « lent », mais lui présente plutôt un double scolaire de lui-même. Radzievski écrira d’ailleurs à ce sujet : « Le commandant doit croire en son chef d’état-major comme il le ferait en lui-même. Il est impossible de travailler autrement. Le chef d’état-major n’est pas un simple agent exécutif. C’est l’un des assistants les plus proches du commandant et il doit avoir un esprit et un caractère créatifs. Le chef d’état-major, sur la base des conceptions générales du commandant, examine tous les détails de la situation avec son état-major et prépare des propositions motivées. C’est par son intermédiaire que l’exécution des ordres est surveillée et que le commandement et le contrôle sont assurés. »
Tout le monde a donc travaillé la nuit durant afin d’offrir des propositions convaincantes au chef. Un officier d’état-major de la 1ère Armée de Chars raconte : « Bogdanov et Radzievski se sont penchés sur une carte de la zone, envisageant l’imminente opération. Ils ont choisi la direction de la percée principale. Après avoir pesé tous les facteurs, Bogdanov a décidé de faire avancer la 1ère Armée de Chars dans une percée en deux échelons. « Cela permettra à l’armée, a-t-il annoncé, d’opérer de manière compacte dans un couloir de 12 kilomètres. » Conformément à ce concept, l’état-major de Bogdanov sous Radzievski a déployé un énorme effort de planification pour les attaques des corps de chars, en élaborant leur coordination et leurs actions avec les corps puis les armées de fusiliers. L’expérience de Radzievski en matière de cavalerie est devenue évidente dans la planification de la pénétration ultime, une percée nette prévue dans la zone tactique de l’ennemi avec les unités de fusiliers motorisés, de sorte que l’armée de chars passe ensuite au travers sans déploiement ni combat ultérieur, jusque sur l’arrière de l’ennemi. Le tout avec un puissant soutien de canon automoteurs. » (17)
Demain, donc, la 1ère Armée de Chars partira au combat. Et il est bien possible que cela fasse mal en face, très mal…
………
Tankiste (Evgueni Bessonov)
Sur la Vistule
« La Vistule ! Ainsi donc, notre n° 33 “Stalingradskiy traktornyy zavod” se trouvait, comme tout le peloton, à la limite ou presque des terres fascistes, et remontait vers le nord pour atteindre la Baltique. A la manœuvre, avec toute sa science, notre chauffeur Fiodor continuait d’éviter les pièges de la route, les mines et autre pantserfaustyn. Quant à Andrei, notre pointeur, il faisait sécher ses chaussettes sur le radiateur, fumant sa cigarette dans la tourelle, au grand déplaisir des autres : Nikita, Sasha et moi. Mais pour l’heure, je n’osais pas trop aller déranger ce gars musclé grisonnant à la barbe rêche, qui passait des heures assis en sous-vêtements sur sa culasse.
Ambiance de triomphe, odeur de victoire. Et pourtant, de rudes combats nous attendaient encore sur la route de Berlin. »
(Tankiste ! – Jusqu’au cœur du Reich avec l’Armée Rouge, Evgueni Bessonov, Skyhorse 2017)
Notes
16- En explosant parmi les arbres, ces bombes arrachent des milliers d’aiguilles et de débris de bois impossibles à éviter et qui provoquent des blessures généralement légères mais toujours douloureuses et très souvent infectées, ce qui provoque la panique car rien ne permet de s’en protéger.
17- Radzievskii : « Notre attention la plus grande a été consacrée à garantir l’engagement de l’armée de chars dans le combat, nous avons donc organisé une couverture d’artillerie agressive et fiable, avec un grand souci du détail. Ce soutien devait être accompli par une série de concentrations de tirs jusqu’à une profondeur de 15 kilomètres. Pour cela, sur 1,5 à 2 kilomètres de large, des lignes de feu ont été prévues, huit au total, sur lesquelles tous les points forts potentiels et les centres de résistance ennemis étaient marqués pour des tirs concentrés. La disponibilité d’un plan de tir pour les artilleurs et les tanks a permis d’appeler facilement des tirs d’artillerie le long de n’importe quel secteur. »
(2e partie demain) |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Archibald
Inscrit le: 04 Aoû 2007 Messages: 10401
|
Posté le: Sam Jan 11, 2025 21:36 Sujet du message: |
|
|
Citation: | Opération Hannibal |
Ils vont se faire bouffer tout crus par les Soviétiques... ça sent le foie et les fèves au beurre ! _________________ Sergueï Lavrov: "l'Ukraine subira le sort de l'Afghanistan" - Moi: ah ouais, comme en 1988.
...
"C'est un asile de fous; pas un asile de cons. Faudrait construire des asiles de cons mais - vous imaginez un peu la taille des bâtiments..." |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Wings
Inscrit le: 11 Mar 2022 Messages: 659 Localisation: U.S.A
|
Posté le: Sam Jan 11, 2025 22:58 Sujet du message: |
|
|
Dzerzhinskoe = Gowarten
Desantnoe = N'éxistait pas, Schillkojen est la ville la plus proche
Prudovka = Bruchfelde
Petrozavodskoye = Eichwald
Angrapa = Angerapp
Volodarovka = Schwalbental
Kruklanki = Kruglanken
Małdyty = Maldeuten
Gardeja = Garnsee
Kędzierzyn-Koźle = Kandrzin-Cosel
Zawadzkie = Andreashütte _________________ "It takes the Navy three years to build a ship. It will take three hundred years to build a new tradition. The evacuation will continue." Sir Andrew Cunningham, Mai 1941
"Let me soar! [...] I need no great host, just [Tyene]" - Nymeria Sand, AFFC II |
|
Revenir en haut de page |
|
|
John92
Inscrit le: 27 Nov 2021 Messages: 1254 Localisation: Ile de France
|
Posté le: Dim Jan 12, 2025 09:59 Sujet du message: |
|
|
…
3 juillet
…
Prusse orientale et Pologne – 1er Front Biélorusse –
…
… – sollicite de Königsberg l’autorisation de se retirer sur une ligne Małdyty-Elbing. Puisque personne ne vient à son secours de Dantzig et que la Baltique est menacée ! En fait, il s’agit simplement d’acter ce qu’Hitler a prévu depuis déjà plusieurs jours : la liaison entre la Poméranie et la Prusse orientale est condamnée. Balck obtient donc son autorisation (accord ?) sans difficulté…
…
Vers la Poméranie – 2e Front Biélorusse –
…
Plus à l’ouest, de l’autre côté de la Warta, le LXXII. ArmeeKorps (Anton Grasser) passe Konin et tente de se décaler vers le nord, sur une trajectoire mettant à profit le lac Gopło pour sa défense . Logique !
Au même moment, les anciens défenseurs de Litzmannstadt – toujours en cours de nettoyage par la 54e Armée (Sergei Roginski) – continuent de passer la Warta à Uniejów.
…
Au-delà de la Vistule – 3e Front Biélorusse –
…
Sitôt la Warta passé (passée ?), il donne l’ordre au 2e Corps Mécanisé (Vasily Volsky) – …
… _________________ Ne pas confondre facilité et simplicité |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Casus Frankie Administrateur - Site Admin
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 14422 Localisation: Paris
|
Posté le: Dim Jan 12, 2025 19:20 Sujet du message: |
|
|
3 juillet, suite
La Hongrie, coûte que coûte
Après Schwabenwall et Doppelkopf – La course au Danube
Nord de la Slovaquie – La tête de la 61e Armée (Pavel Belov) reprend son avance en parallèle à celle de la 1ère Armée de Choc (Andrei Vlassov). Depuis Východná, elle longe la Váh vers Ružomberok, sur la piste d’une 389. ID (Walter Hahm) ayant depuis longtemps disparu vers le secteur de Kra’ovany – dans les gorges défendues avec tant d’acharnement deux mois plus tôt par les Français du bataillon Foch. Comme quoi la guerre, comme la vie, est un éternel recommencement.
Les frontovikis progressent ici relativement vite, en dépit des contraintes, car ils n’ont aucune crainte pour leurs flancs. Au nord, la région de Námestovo et du lac Orava est depuis longtemps sous le contrôle du 2e Corps de Cavalerie (Andrei Selivanov), dont l’aile droite assez étirée opère en bonne intelligence avec les survivants du 5e Groupement tactique Ďumbier (général Emil Perko) et des défenseurs de Žilina et Vrútky (major J. Dobrovodský). Et au sud, la 1ère Armée de Choc (Andrei Vlassov) commence à se répandre franchement dans la vallée du Hron, traversant les lignes slovaques pour atteindre Brezno, l’aérodrome de Rohozná et demain, sans doute, Banská Bystrica, où la petite 1ère Armée tchécoslovaque du général Golian fanfaronne joyeusement après son exploit des jours précédents.
Front de la 8. Armee, Hongrie et Slovaquie – Le 20e Corps Blindé (Pavel Poluboiarov) entre en contact avec la ligne de défense de Füzesabony. Laquelle s’avère, selon les standards soviétiques, moins que redoutable – il est vrai qu’elle est tenue pour l’essentiel par la SS-Panzergrenadier Brigade Horst-Wessel (Oberführer August Trabandt) et par les débris de la 1ère DI hongroise (Gusztáv Deseö), avec la 178. PzGr Tatra (Friedrich-Wilhelm von Loeper) sur sa gauche. En insistant, Poluboiarov pourrait sans doute passer. Seulement voilà – avec 130 kilomètres de chevauchée dans les pattes et plus encore après les pertes consécutives à Dukla-Carpates, son unité n’a pas l’énergie pour cavaler seule jusqu’au Danube, quand bien même ce n’est pas l’envie qui lui manque ! Il préfère donc, pour l’heure, se contenter de reconnaissances en force. Toutes se révèlent favorables : la Horst-Wessel ne dispose que d’engins déclassés et il est bien connu que la Honvèd manque gravement d’équipements antichars, malgré la poignée de Zrínyi II (pourtant théoriquement des canons d’assaut !) qu’elle engage au fur et à mesure qu’ils sortent des ateliers. Les T-34 attendent donc tranquillement la 26e Armée (Lev Skvirsky), laquelle arrive à hauteur de Mezőkövesd en fin d’après-midi. Demain, ce sera l’assaut – sans doute franc, massif, décisif, avec la 3e Armée (Mikhail Shumilov) en second échelon à Nyékládháza, et si les chefs le veulent.
En face, c’est autant de temps gagné pour la 8. Armee de Walter Weiß, qui parvient en ce moment – ou peu s’en faut – sur ses futures positions à Šahy, sans chercher à passer en force par Brezno et le Hron. La Heer n’aura qu’à remonter ensuite vers Martin par Levice et Žiar nad Hronom, on a déjà perdu assez de monde et de temps pour rien dans ces montagnes, de toute manière impropre à l’offensive !
Pendant ce temps, sur l’aile gauche du 1er Front Ukrainien, la 5e Armée de la Garde (Vyacheslav Tsvetaev) et la 10e Armée (Vasily Popov) achèvent de sécuriser Nyíregyháza… avant de céder la place au 2e Front Ukrainien, dont la droite – 59e Armée (Ivan Korovnikov) et 5e Corps de Cavalerie (V.D. Kriuchenkine – passe devant pour progresser en direction de Tiszavasvári. Indésirables ici, ces unités pourraient bientôt repasser la Tisza… ou changer d’affectation.
Mais le plus important du côté d’Ivan Bagramian reste sans aucun doute la prise de Debrecen par la 38e Armée (Kyrill Moskalenko) – laquelle ne tarde pas à voir passer au nord, sur sa droite, la tête de la 5e Armée de Chars (Andrei Kravchenko) – le 4e Corps Blindé (Mikhail Fomichkov) suivi du 9e Corps Mécanisé (M.I. Savelyev). Celle-ci fonce vers Püspökladány, pour rejoindre le 2e Corps Blindé (Ivan Lazarev) et le 8e Corps Mécanisé (Vladimir Baskakov), lesquels précèdent la 47e Armée (Filipp Zhmachenko) à Berettyóújfalu.
Debrecen tombée sans trop de combats (il reste bien sûr des fanatiques et des imbéciles, mais leur nombre va en diminuant inexorablement…), l’URSS met la main sur un centre industriel majeur, qui se trouve être, de surcroît, la deuxième ville du pays (18). C’est prometteur, vu de Moscou. Mais du point de vue de Bagramian, la vérité est encore plus simple : Cluj-Debrecen est terminée ! La barrière des Carpates est franchie, la Roumanie libérée, le HG B balayé, tous les objectifs atteints.
Dans ce contexte, les ordres du 2e Front Ukrainien ne sont pas de marcher vers Budapest. Cet honneur revient au 4e Front de Tolboukhine, le vainqueur de la Roumanie, qui est supposé remonter du sud en un élégant mouvement de revers vers le lac Balaton – un mouvement d’autant plus urgent que ces irritants capitalistes venant de Yougoslavie avancent dans le secteur. Bagramian, lui, doit seulement progresser selon les opportunités (il y en a !) jusqu’à la Tisza sans dépasser Szolnok, franchir le fleuve, se reconcentrer vers Hatvan et préparer une progression vers Prague – un autre précieux trophée pour enrichir ses épaulettes de maréchal.
Front de la 11. Armee, à l’ouest des monts Apuseni, dans la grande plaine – Arrivant de l’est avec la pluie – laquelle a au moins fait cesser les frappes de Sturmovik – le XLII. AK franchit comme prévu la Tisza à Szolnok, passant donc les lignes hongroises dans une ambiance de défaite pas moins prégnante que celle qui règne dans la Honvèd. Il reste théoriquement à Frank Mattenklott deux divisions : la 72. ID (Hermann Hohn) et la 330. ID (Georg Zwade). Dans les faits, leurs effectifs cumulés ne sont guère supérieurs à celui d’un régiment, et elles n’ont plus ni cohésion ni organisation. Il faudra un bon bout de temps avant que le HG B puisse en tirer quelque chose.
Derrière, le XXX. AK (Philipp Kleffel) n’est pas encore aussi près du salut. S’étant hier répandu dans la plaine de Szeghalom à Dévaványa, le corps d’armée allemand – ou ce qu’il en reste – tente désormais de se rallier autour de Kisújszállás, tant que le Rouge le lui permet. Pour le moment, il n’a pas encore été rattrapé. Pour le moment …
De fait, sur le flanc droit soviétique, le 2e Corps Blindé (Ivan Lazarev) continue de frapper depuis Földe, avec le soutien du 8e Corps Mécanisé (Vladimir Baskakov) sur sa gauche à Berettyóújfalu. Mais une fois encore, vu son épuisement et ses difficultés logistiques (ses lignes sont pis qu’étirées !), ces efforts sont contrés par la 13. Panzer (Helmutt von der Chevallerie) et le 560. schw. PzJ. Abt (Major Rudolf Markowz), qui lui opposent un rempart entre Püspökladány et Sárrétudvari, avec l’aide d’un terrain agricole humide et contraint.
Sur le flanc gauche, vers Bucsa, la 19. Panzer (Hans Källner) contient toujours le 6e Corps Blindé de la Garde (Alexander Shamshin) – et ce, assez facilement, car elle a reçu le renfort de la 17. Panzer (Karl-Friedrich von der Meden), de la 11. Panzer (Wend von Wietersheim) et du 560. schw. PzJ. Abt (Major Rudolf Markowz), tous trois guère sollicités par la 18e Armée (Andrei Gretchko). Et comme le 3e Corps Blindé de la Garde (Mikhaïl Panov) n’est toujours pas en état de peser, et qu’au sud, l’infanterie venue de Köröstarcsa se divise, se marche dessus, voire se disperse en plaine – la 6e Armée de la Garde (Pavel Batov) et le 12e Corps Mécanisé (Dimitri Ryabyshev) sont à Ecsegfalva et la 62e Armée (Vladimir Kolpakchi) approche de Mezőtúr, les trois ayant bien dû passer la Körös – il semble bien que l’Axe pourra ici, pour le moment au moins, refluer en ordre vers l’ouest et la sécurité.
Sécurité toutefois provisoire, à l’évidence : à Méhkerék, la 9e Armée (Vasily Glagolev), la 3e Armée roumaine (Petre Dumitrescu) et la 4e Armée roumaine (Gheorghe Avramescu) entrent en Hongrie. Cette répétition de l’Histoire achève de semer la panique dans les rangs des civils n’ayant pas pu ou pas voulu fuir. Enfin, pour l’anecdote, la 14e Armée (Valerian Frolov) atteint la Tisza aux environs de Hódmezővásárhely. Face à la 12. Armee donc, et à Szeged, dans un secteur marécageux considéré comme impropre à toute avancée rapide.
Des Roumains chez les Soviets
Le bal des maudits – « La division Tudor Vladimirescu entre en terre hongroise, drapeau roumain au vent et en fanfare. Enfin, pour être précis, en chantant “Dac-am plecat, Ardealule, din tine”, et surtout son refrain et son deuxième couplet, qui volent dans les airs :
« Aveam o țară scumpă și mândră,
Aveam și iarăși vom avea.
Dușmanul, care astăzi râde,
Va tremura privind la ea.
Noi te iubim, că tu ai fost al nostru,
Și viața pentru tine ne-am fi dat,
Dar prin dictatul rușinos și monstru
Hortiștii-au reușit de te-au furat. (19) »
Pour sûr, nos aînés ont eu grand tort de laisser l’hydre magyare se rétablir après 1921. Mais puisqu’elle n’a pas su voir le vainqueur quand il en était encore temps, c’est l’heure pour ses nobles ennemis de régler leurs comptes. Tous ses ennemis – Roumanie comprise. »
(Adieu mon pays… encore une fois, Vasil Gravil, Gallimard 1957)
Pologne désolée
Mauvaise ambiance
Environs de Łódź – La libération de la ville par le 2e Front Biélorusse a une conséquence très logique : ce qui reste de l’Armia Krajowa passe sous la tutelle soviétique. Il s’agit des 25e et 26e DI (Lt-Col. Wincenty Mischke “Henryk” et colonel Michał Stempkowski “Barbara”) et du reste de la Force de Secours “Czeslaw” du colonel Gwido Kawiński “Czesla”, qui comprend toujours environ 150 parachutistes survivants de l’opération Comet.
La plupart de ces soldats – qui ont tous tombé le battledress depuis le mois de mars – iront donc rejoindre les rangs de la 1ère Armée polonaise opérant sous l’Etoile rouge. Précisément ce qu’ils espéraient éviter ! Ils y retrouveront quelques figures connues : le lieutenant Adolf Pilch “Góra” – qui a réussi à faire oublier ses petits arrangements passés avec les Allemands (20) – le major Bronisław Lewkowicz “Kurs” – tombé plus tard en combattant sur le sol allemand – ou le major Julian Słupik “Boruta” – condamné à mort en 1949, torturé et libéré en 1955 avec la moitié d’un pied amputée… pour ne citer qu’eux. Mais le sort des principaux chefs sera souvent pire. Le colonel Michał Stempkowski “Barbara” fera dix ans de prison et finira ouvrier agricole. Le colonel Gwido Kawiński “Czeslaw” serait mort dans la misère en 1964 à Rzeszów. Seul le Lt-Col. Wincenty Mischke “Henryk” aura plus de chance : après une longue période de chômage (étrange, dans la Pologne socialiste !), il sera nommé directeur de la base de transport PCH à Łódź. Invalide du fait des blessures subies en 1919, 1939 et 1944 (!), il n’était sans doute plus dangereux pour personne.
Dans les ruines
Varsovie – Vassily Grossman continue d’errer parmi les ruines…
« Le ghetto de Varsovie. Un mur fait de brique rouge haut d’une fois et demie la taille d’un homme sur deux briques d’épaisseur, avec au sommet, cimentés dans le mur, des morceaux de verre. Chaque brique est soigneusement jointoyée à sa voisine. Quelles sont les mains qui ont édifié ce mur ?
Le ghetto : des vagues de pierre, de la brique pilée, une mer de brique. Pas un seul mur entier, rarement une brique entière. Le déchainement de colère de la bête a été effroyable.
Les gens du Bunker, [rue] Jeliaznaïa 95. Des hommes transformés en rats et en singes.
Récit de la rencontre de deux Juifs dans l’obscurité de la chaufferie d’une maison détruite de Varsovie, où les rats et les Juifs venaient la nuit pour boire. Klinker, en entendant du bruit, a crié « Je suis Juif, si vous êtes des insurgés ou des ralliés (21), prenez-moi avec vous ! ». Une voix est sortie de l’ombre pour répondre « Moi aussi, je suis Juif. ». Il s’avéra que tous deux étaient de Lodz. Dans le noir, ils se sont retrouvés et se sont étreints en sanglotant. Leur bunker était entre la gendarmerie et la Gestapo, au troisième étage d’une maison à demi détruite. Une jeune Polonaise avec des boucles et des accroche-cœurs les avait pris sous son aile. Le père de leur ange gardien exigeait un zloty pour leur permettre d’aller boire, « Sinon je vais vous dénoncer ! ».
L’incinérateur loqueteux Abram Klinker, qui voulait me faire cadeau de son unique objet précieux, un stylo. »
Grossman tient absolument à visiter ce fameux bunker, sentant là qu’il tient une belle et terrible histoire pour la Krasnaïa Zvezda.
Notes
18- Les 12 000 Juifs du pays ont malheureusement déjà été “évacués” vers Theresienstadt.
19- « Nous avions un pays cher et fier, Nous l'avions et nous l’aurons encore. L’ennemi, qui rit aujourd’hui, Tremblera en le regardant. Nous t’aimons comme tu as été à nous, Et nous aurions donné notre vie pour toi, Mais par le Diktat honteux et monstrueux, Les Horthistes ont réussi à te voler. »
20- Dans les dernières semaines de la guerre, profitant du chaos, il réussira à déserter pour traverser la Tchécoslovaquie et finalement atteindre les lignes du 18th AAG. Il épousera à Londres sa fiancée d’avant-guerre, puis présidera la branche anglaise de l’AK en exil.
21- Nom parfois donné aux membres de l’armée Berling, à l’époque de l’insurrection. |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Hendryk
Inscrit le: 19 Fév 2012 Messages: 3551 Localisation: Paris
|
Posté le: Dim Jan 12, 2025 20:34 Sujet du message: |
|
|
Casus Frankie a écrit: | Sécurité toutefois provisoire, à l’évidence : à Méhkerék, la 9e Armée (Vasily Glagolev), la 3e Armée roumaine (Petre Dumitrescu) et la 4e Armée roumaine (Gheorghe Avramescu) entrent en Hongrie. Cette répétition de l’Histoire achève de semer la panique dans les rangs des civils n’ayant pas pu ou pas voulu fuir. |
On se demande, des Soviétiques ou des Roumains, de qui les Hongrois ont le plus peur. Les premiers sont des ennemis idéologiques, mais avec les seconds, c'est personnel. _________________ With Iron and Fire disponible en livre! |
|
Revenir en haut de page |
|
|
demolitiondan
Inscrit le: 19 Sep 2016 Messages: 10899 Localisation: Salon-de-Provence - Grenoble - Paris
|
Posté le: Dim Jan 12, 2025 20:37 Sujet du message: |
|
|
Oh, tu sais, dans les deux cas ... _________________ Quand la vérité n’ose pas aller toute nue, la robe qui l’habille le mieux est encore l’humour &
C’est en trichant pour le beau que l’on est artiste |
|
Revenir en haut de page |
|
|
loic Administrateur - Site Admin
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 9759 Localisation: Toulouse (à peu près)
|
Posté le: Lun Jan 13, 2025 10:09 Sujet du message: |
|
|
Dans le passage "Mauvaise ambiance", je trouve toujours délicat d'évoquer le sort futur des personnages, on a généralement évité de le faire (du moins pas sur plusieurs années en avant).
Dans les lignes qui suivent, le 560. schw. PzJ. Abt est mentionné deux fois :
Citation: | De fait, sur le flanc droit soviétique, le 2e Corps Blindé (Ivan Lazarev) continue de frapper depuis Földe, avec le soutien du 8e Corps Mécanisé (Vladimir Baskakov) sur sa gauche à Berettyóújfalu. Mais une fois encore, vu son épuisement et ses difficultés logistiques (ses lignes sont pis qu’étirées !), ces efforts sont contrés par la 13. Panzer (Helmutt von der Chevallerie) et le 560. schw. PzJ. Abt (Major Rudolf Markowz), qui lui opposent un rempart entre Püspökladány et Sárrétudvari, avec l’aide d’un terrain agricole humide et contraint.
Sur le flanc gauche, vers Bucsa, la 19. Panzer (Hans Källner) contient toujours le 6e Corps Blindé de la Garde (Alexander Shamshin) – et ce, assez facilement, car elle a reçu le renfort de la 17. Panzer (Karl-Friedrich von der Meden), de la 11. Panzer (Wend von Wietersheim) et du 560. schw. PzJ. Abt (Major Rudolf Markowz), tous trois guère sollicités par la 18e Armée (Andrei Gretchko). Et comme le 3e Corps Blindé de la Garde (Mikhaïl Panov) n’est toujours pas en état de peser, et qu’au sud, l’infanterie venue de Köröstarcsa se divise, se marche dessus, voire se disperse en plaine – la 6e Armée de la Garde (Pavel Batov) et le 12e Corps Mécanisé (Dimitri Ryabyshev) sont à Ecsegfalva et la 62e Armée (Vladimir Kolpakchi) approche de Mezőtúr, les trois ayant bien dû passer la Körös – il semble bien que l’Axe pourra ici, pour le moment au moins, refluer en ordre vers l’ouest et la sécurité. |
_________________ On ne trébuche pas deux fois sur la même pierre (proverbe oriental)
En principe (moi) ... |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Anaxagore
Inscrit le: 02 Aoû 2010 Messages: 10870
|
Posté le: Lun Jan 13, 2025 10:17 Sujet du message: |
|
|
Palpatine a donné des cylindres spaarti à Hitler pour qu'il clone ses panzer-divisions? _________________ Ecoutez mon conseil : mariez-vous.
Si vous épousez une femme belle et douce, vous serez heureux... sinon, vous deviendrez un excellent philosophe. |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Casus Frankie Administrateur - Site Admin
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 14422 Localisation: Paris
|
Posté le: Lun Jan 13, 2025 10:21 Sujet du message: |
|
|
1) Je comprends, mais le destin du pauvre colonel polonais est fort proche (et quasi prévisible !)… on peut seulement enlever "devant Dantzig".
2) L'Abteilung en question est juste entre les deux. Il est préférable d'enlever sa deuxième citation. _________________ Casus Frankie
"Si l'on n'était pas frivole, la plupart des gens se pendraient" (Voltaire) |
|
Revenir en haut de page |
|
|
John92
Inscrit le: 27 Nov 2021 Messages: 1254 Localisation: Ile de France
|
Posté le: Lun Jan 13, 2025 11:52 Sujet du message: |
|
|
…
3 juillet, suite –
...
Front de la 8. Armee, Hongrie et Slovaquie –
...
… avant de céder la place au 2e Front Ukrainien, dont la droite – 59e Armée (Ivan Korovnikov) et 5e Corps de Cavalerie (V.D. Kriuchenkine – passe devant pour progresser en direction de Tiszavasvári. Indésirables ici, ces unités pourraient bientôt repasser (retraverser ?) la Tisza… ou changer d’affectation.
Mais le plus important du côté d’Ivan Bagramian reste sans aucun doute la prise de Debrecen par la 38e Armée (Kyrill Moskalenko) – laquelle ne tarde pas à voir passer (défiler ?) au nord, sur sa droite, la tête de la 5e Armée de Chars (Andrei Kravchenko) – le 4e Corps Blindé (Mikhail Fomichkov) suivi du 9e Corps Mécanisé (M.I. Savelyev).
...
Bagramian, lui, doit seulement progresser selon les opportunités (il y en a !) jusqu’à la Tisza sans dépasser Szolnok, franchir le fleuve, se reconcentrer vers Hatvan et préparer une progression ( poussée ?) vers Prague – un autre précieux trophée pour enrichir ses épaulettes de maréchal.
...
Pologne désolée
Mauvaise ambiance
Environs de Łódź –
...
... – le major Bronisław Lewkowicz “Kurs” – tombé plus tard en combattant sur le sol allemand – ou le major Julian Słupik “Boruta” – condamné à mort en 1949, torturé et libéré en 1955 avec la moitié d’un pied amputée (amputé ? C'est le pied qui est amputé, pas la moitié, non ?) … pour ne citer qu’eux.
... _________________ Ne pas confondre facilité et simplicité |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Casus Frankie Administrateur - Site Admin
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 14422 Localisation: Paris
|
Posté le: Lun Jan 13, 2025 14:17 Sujet du message: |
|
|
3 juillet 1944 (fin)
Etat revenant
Contre-offensive sur Banská Bystrica – L’orgueil de l’insurgé
Slovaquie révoltée – Situation parfaitement calme et maîtrisée – d’aucun diraient même satisfaisante – pour la 1ère Armée tchécoslovaque de Ján Golian, qui achève de sécuriser la vallée du Hron jusqu’à Harmanec et Budča, lieux de rudes mais glorieux combats passés. Les soldats du général Vlassov seront là demain. Et les ennuis étant terminés, c’est l’heure de ranger les débris.
Anabase en Slovaquie – Opération Ferdinand
Au nord de Zvolen – « Vous, petits enfants, vous êtes de Dieu, et vous avez vaincu ces gens-là ; car Celui qui est en vous est plus grand que celui qui est dans le monde. » (1) Discourant une fois encore devant sa petite troupe désormais aussi soudée qu’éprouvée – et un peu plus nombreuse qu’au départ malgré les pertes : les hasards de la Vie ! – le Lt-colonel Henri Morel de Foucaucourt a tout naturellement ressorti son missel pour son homélie.
Tandis que ses hommes et les Slovaques – tous plus ou moins volontaires – continuent de déblayer la zone, le capitaine de Lannurien vient interrompre son supérieur : « Mon colonel, le bataillon fait mouvement vers le village de Sielnica pour la nuit. Les évacuations ne pourront avoir lieu que le matin, les avions arrivant à l’aube après un vol de nuit – la faute aux conditions atmosphériques. Ceci contraint le rythme des départs, et les médicalisés auront la priorité. »
– C’est normal, capitaine. Mais après tout, nous ne sommes plus si pressés que ça.
– Les Slovaques, certes, ne nous poussent pas. Par contre, les Soviets ne sont pas loin derrière. Ils auraient déjà rassemblé les Américains et les Anglais de Green et Bowery à Rohozná.
– Ah ! C’était attendu, de la part d’apostats.
Un grognement hispanique interrompt l’officier, qui rétorque aussitôt : « Ils le revendiquent, non, Miguel ! ».
– Bref, il faudra faire vite et les places sont comptées. Ce qui implique le strict respect des effectifs d’avant l’opération.
– Vous voulez dire… faire le tri dans nos rangs ?
– C’est cela.
Lourd silence, face à ce qui n’est que trop visiblement une entorse assez considérable aux règles de la Charité chrétienne – l’une des trois vertus théologales, n’est-ce pas ? Les ordres étant les ordres…
– Nous verrons ! répond simplement Foucaucourt.
Les deux autres vertus théologales sont la Foi… et l’Espoir.
Hongrie soumise
Festung Budapest – Résignation
Ambassade du Reich (Budapest) – Après les petits esclandres velléitaires de ce début du mois, et attendu que, partout dans la Festung, on prépare l’avenir de la Défense du Reich, Herr Veesenmayer siffle la fin de la récréation et convoque le représentant du gouvernement Croix-Fléchées. En l’espèce, le ministre des Affaires étrangères Gábor Kemény – lequel suffira bien pour ce qu’il a à lui dire.
Les faits sont sans appel : la préparation de la bataille pour Budapest se poursuit, l’Allemagne s’organise, elle va donner son sang pour défendre la cité et elle attend donc de son précieux partenaire collaboration et obéissance – les choses sont déjà assez compliquées à gérer comme ça, merci. Ferenc Szálasi et ses hommes sont priés de se contenter de la vague promesse – signée par Heinz Guderian en personne – que la Wehrmacht « luttera férocement pour maintenir l’ennemi hors de la capitale hongroise ». Hélas, dans un inquiétant accès de réalisme, le même document précise d’ores et déjà plus loin que, dans les districts intenables ou abandonnés, les ouvrages d’art et les bâtiments des services publics seront systématiquement détruits.
Budapest ne sera donc pas ville ouverte, évidemment. Cela étant, la population reste libre de partir vers l’ouest afin de se mettre en sécurité, par ses propres moyens. Informé de tout ceci, le Nemzetvezető donne finalement son accord – bien sûr. Et, en toute logique, il commence donc à envisager le déplacement de son propre gouvernement près de la frontière allemande.
………
Festung Budapest – Mort sur le Danube
Ambassade du Reich (Budapest) – Sitôt son minable petit visiteur parti, et à présent qu’il peut évoquer les sujets importants avec des adultes, Edmund Veesenmayer émet sa dernière suggestion – ou… proposition appuyée – à destination du commandement allemand, en ce qui concerne l’organisation de la Festung.
Il est clair qu’à cette heure, celle-ci est aussi pléthorique qu’inefficiente – la faute à la nature polycratique (d’aucuns diraient anarchique) du Troisième Reich. Pas moins de trois structures concurrentes sont occupées à la même tâche, sans limite de compétence définie et en ne comptant même pas les Hongrois ! La Wehrmacht, représentée par Georg-Hans Reinhardt (pour la 11. Armee), la Waffen-SS, représentée par Karl Pfeffer-Wildenbruch (pour la police et ses propres unités), et enfin le bras diplomatique de la même Schutzstaffel, représenté par l’Obergruppenführer Otto Winkelmann. Sur ordre personnel d’Hitler, ce dernier a théoriquement autorité sur les autres – mais en pratique, c’est une autre histoire, bien sûr.
On le comprend, tout ceci ne peut pas fonctionner. Et surtout pas avec un Winkelmann ouvertement défaitiste ! Cet organigramme embrouillé et cette débauche de responsables – qui n’est nullement suivie de l’attribution de moyens, en dépit des promesses du Guide – ne s’explique que par les ambitions personnelles des uns et la peur panique d’une insurrection hongroise qui hante les autres.
– Il faut donc rationnaliser ! dicte Veesenmayer à son secrétaire. « Et de préférence avec un chef apte à sa tâche, c’est-à-dire croyant en la victoire. »
Enfants soldats – Derniers jours dans le ghetto
Budapest, Akácfa utca – « Je rends visite l’unité de mon frère à Szerb Utca. Eugène est au piano avec ses camarades autour de lui, à chanter à des chansons grivoises. Jusqu’à présent, son bataillon est dirigé par quelques officiers de réserve, il n’y a pas de sergents ou autres sous-officiers. La section d’Eugène est commandée par un jeune architecte, l’enseigne Kálmán Füzy. Selon lui, les étudiants vont bientôt être envoyés vers Malacka (2), en Hongrie du Nord, pour entraînement.
Sur le chemin du retour, je passe devant la grande synagogue ornée, gardée par une équipe mixte de policiers et de Croix-Fléchées. Avant même d’entrer dans Dob Utca, mes papiers sont contrôlés. Je dois une fois encore prouver à une police incrédule que ma résidence principale se trouve dans ce quartier à dominante juive.
Dob Utca est pleine de juifs parlant yiddish dans leurs habits bizarres, chapeaux noirs, boucles d’oreille, barbes. Ils sont occupés à leurs affaires habituelles, à préparer du foie d’oie, à fabriquer des édredons. Une odeur de sucré-salé envahit l’atmosphère. Il y a de nombreuses charrettes pleines de caisses de marchandises. Mon grand manteau noir de cadet ressemble à l’uniforme du Parti. Du coup, les piétons changent de trottoir avec angoisse pour éviter de me frôler.
Dans une cour couverte d’une verrière, des douzaines de grosses femmes sont assises devant des machines à coudre, occupées à fabriquer des pourpoints sans manches en peau de mouton pour l’armée. Cette cour est surchauffée. Quelques-unes ont enlevé leur perruque, leurs têtes sont rasées de près, peut-être pour des raisons rituelles.
En haut de la Dob Utca, au niveau des mezzanines, il y a une rangée de mystérieux appartements éclairés d’une lumière rouge même durant la journée. Des femmes sont assises derrière les fenêtres. Une jolie fille avec des cheveux bouclés blond-roux ouvre la fenêtre et m’arrache ma casquette.
– Monte en haut si tu veux la revoir ! Seulement cinq couronnes pour un tour, et pour dix je te fais passer un bon moment.
Elle remonte brièvement sa chemise pour me montrer ses seins. Je suis outragé. D’abord, parce que je n’ai pas assez d’argent. Ensuite, parce que pareils lieux sont interdits aux cadets. Je menace d’appeler la Police. Elle me jette ma casquette à la figure : « Imbécile, abruti, va te faire f…tre ! »
Je m’en vais, tête basse, maudissant ma timidité. J’aurai dû prendre le risque. Selon le manuel de l’Armée : « Confronté à plusieurs options, l’officier doit toujours choisir la plus audacieuse ! ». J’aurai pu monter et voir de plus près cette petite [censuré] pour cinq couronnes. »
(Boy Soldier – Budapest 1944, par Ervin Iván Galántay, Militaria 2007)
Tchéco et Slovaquie
Enthousiasme
8 Porchester Gate (Londres) – Rires, sourires et même quelques verres de Slivovice soigneusement réservés pour l’occasion. La jonction avec la 1ère Armée tchécoslovaque étant désormais effective, l’ambassadeur Nichols revient avec de bonnes nouvelles de Moscou : le gouvernement réunifié va bel et bien rentrer au pays ! Enfin, plus exactement à Košice, mais en attendant Bratislava puis, un jour, Prague. Cela reste une excellente chose, après presque six années d’exil.
L’institution ne tarde donc pas à préparer ses cartons, en bonne intelligence avec les services britanniques – lesquels hébergent les Tchèques depuis quatre ans, en compensation pragmatique de quelques erreurs passées.
Pologne “libérée”
Joie
Lublin – A présent que Cracovie est libérée et qu’il est clair que l’amitié polono-soviétique est aussi victorieuse dans les esprits que triomphante sur le terrain, le gouvernement d’union nationale demande officiellement au gentil parrain soviétique d’organiser son transfert à Cracovie. Ledit parrain accepte « avec joie » !
De fait, le Kremlin n’a aucune raison de refuser – la dissolution des derniers éléments de l’AK a démontré, si besoin était, le caractère désormais inoffensif de l’institution. Rien ne sert d’humilier trop vite un ennemi à terre, surtout quand c’est censé être un ami – cela ferait mauvais genre, du moins tant que la guerre n’est pas finie. Et de toute façon, les Polonais n’ont plus aucune force autonome sur leur territoire national.
Notes
1- Évangile selon Jean, 4, 4.
2- Nom hongrois de Malacky, en Slovaquie, au nord de Bratislava. |
|
Revenir en haut de page |
|
|
John92
Inscrit le: 27 Nov 2021 Messages: 1254 Localisation: Ile de France
|
Posté le: Lun Jan 13, 2025 14:42 Sujet du message: |
|
|
…
3 juillet 1944 (fin)
...
Hongrie soumise
Festung Budapest – Résignation
Ambassade du Reich (Budapest) – Après les petits esclandres velléitaires de ce début du mois, et attendu que, partout dans la Festung, on prépare ( ) l’avenir de la Défense du Reich, Herr Veesenmayer siffle la fin de la récréation et convoque le représentant du gouvernement Croix-Fléchées. En l’espèce, le ministre des Affaires étrangères Gábor Kemény – lequel suffira bien pour ce qu’il a à lui dire.
Les faits sont sans appel : la préparation ( ) de la bataille pour Budapest se poursuit, l’Allemagne s’organise,...
...
Enfants soldats – Derniers jours dans le ghetto
Budapest, Akácfa utca – « Je rends visite à (à ajouter ?) l’unité de mon frère à Szerb Utca. Eugène est au piano avec ses camarades autour de lui, à chanter à (à supprimer) des chansons grivoises.
... »
... _________________ Ne pas confondre facilité et simplicité |
|
Revenir en haut de page |
|
|
Wings
Inscrit le: 11 Mar 2022 Messages: 659 Localisation: U.S.A
|
Posté le: Lun Jan 13, 2025 15:40 Sujet du message: |
|
|
Redite pour le passage sur la Pologne (déja présentée en partie 2, juste avant le passage sur Varsovie). _________________ "It takes the Navy three years to build a ship. It will take three hundred years to build a new tradition. The evacuation will continue." Sir Andrew Cunningham, Mai 1941
"Let me soar! [...] I need no great host, just [Tyene]" - Nymeria Sand, AFFC II |
|
Revenir en haut de page |
|
|
|
|
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum
|
|