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1940 - La France continue la guerre
 
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dak69



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MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 14:31    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour

La lecture de la prose de Manon-Marec est toujours un régal !

Pouraais-je proposer une note en bas de page pour la citation suivante :


Citation:
On notera vite, à la surprise générale, qu’il y a assez d’Alsaciens et de Lorrains en AFN pour que chaque édition soit intégralement vendue, si bien que le ministère des Finances finira par donner son accord pour porter l’allocation de papier à 2 500 exemplaires à partir de janvier 1941.


En fait, bon nombre d'Alsaciens et de Lorrains se trouvaient dans le Sud-Ouest au printemps 1940, où ils avaient été évacués en septembre 1939. C'est tout naturellement qu'une partie d'entre eux suivit le "Grand Démanagement" pour se retrouver en Afrique du Nord. Le supplément d'allocation papier fut utilisé par les Dernières Nouvelles d'Alsace pour produire une édition hebdomadaire, tous les dimanches, en langue allemande, que l'on se passait de famille en famille, car les plus anciens (et même beaucoup de jeunes...) ne lisaient que cette langue

Bien amicalement
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 14:34    Sujet du message: Répondre en citant

Judicieux !
_________________
Casus Frankie

"Si l'on n'était pas frivole, la plupart des gens se pendraient" (Voltaire)
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Menon-Marec



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MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 14:47    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour à tous.
1) J'approuve, bien évidemment, les suggestions de Martel et de Dak69 qui s'intègrent pile-poil au sujet.
2) Benoît XVII a fait du très bon travail. De quoi regretter que nous ne puissions pas avoir l'équivalent pour les Néerlandais, les Norvégiens, les Tchèques et les Polonais.
3) Quand Radio Alger fonctionnera à pleine puissance, sans doute faudra-t-il envisager - disons à l'été 41 - des émissions en tchèque (pour guérir le complexe de Munich) et en polonais (pour guérir le complexe de septembre 39), ne serait-ce que pour ne pas laisser aux Britanniques le monopole de la chose. Qu'en pense le forum?
Amts, ainsi que l'écrivait Jacques Moalic, déporté à Mathausen à 17 ans, lorsqu'il dirigeait le bureau de l'AFP à Alger entre 1960 et 1962.
M-M.
PS pour loïc: Pas d'inquiétude poue le prénom d'Arbellot (personnage tout ce qu'il y a d'aryen, au demeurant) puisque les Allemands sont persuadés qu'il s'agit de la variante welsche de Sigmund, héros tout tout ce qu'il y a de nordique.
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Intosh



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MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 14:49    Sujet du message: Répondre en citant

dak69 a écrit:
En fait, bon nombre d'Alsaciens et de Lorrains se trouvaient dans le Sud-Ouest au printemps 1940, où ils avaient été évacués en septembre 1939. C'est tout naturellement qu'une partie d'entre eux suivit le "Grand Démanagement" pour se retrouver en Afrique du Nord. Le supplément d'allocation papier fut utilisé par les Dernières Nouvelles d'Alsace pour produire une édition hebdomadaire, tous les dimanches, en langue allemande, que l'on se passait de famille en famille, car les plus anciens (et même beaucoup de jeunes...) ne lisaient que cette langue


Je dirai qu'il faudrait mieux écrire en langue alsacienne qu'en langue allemande.

Pour l'Alsacien, on peut même parler de dialecte et ce n'est pas péjoratif.

Dixit un Alsacien, cuisinier de son état sur la route de vin, avec qui j'ai partagé 10 mois de service militaire.

"L'alsacien est une langue qui se parle mais ne s'écrit pas."

L'alsacien était une langue surtout orale, et que les Alsaciens écrivaient en allemand, chose qui a changé jusqu'à ce qu'on adopte un alsacien écrit par réaction au rattachement de l'Alsace-Moselle à l'Allemagne.
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Intosh



Inscrit le: 24 Sep 2007
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MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 14:58    Sujet du message: Répondre en citant

Désolé de ressortir de vieux messages, mais quelques idées que j'avais donné il y a quelques mois.

Intosh a écrit:
Pourquoi ne pas donner à Radio Alger un nom plus national comme "Radio France" ou éventuellement "Radio France Libre".

Quitte à rajouter qu'il s'agit de "Radio France émettant d'Alger, capitale (provisoise) de la France Libre"...

Je ne sais pas si la notion de "France Libre" et de "France Occupée" sont des notions FTL...

Ce nom avant-garde de Radio France permettra d'éviter que la propagande lavaliste se déchaîne contre la "radio des Africains".

Sinon si les émissions radios d'Alger ne couvrent qu'une partie sud de la France, les émissions pourraient être relayés par la BBC pour la partie nord, et s'il est impossible de diffuser en direct de Londres en provenance d'Alger, pourquoi ne pas avoir une filiale de Radio France basée à Londres.

"Radio France émettant de Londres, capitale de l'Europe Libre"...

Ce qui laisse entrevoir une amusante rivalité entre le personnel de Londres et celui d'Alger, une fois venue la Libération.

Cette division de Radio France pourrait d'ailleurs se faire en clivage politique, les "européens" à Londres qui baignent dans un environnement qui laisse la place belle à une construction européenne née de la solidarité de la guerre, et les "moins européens" à Alger...

Radio France Londres pourrait d'ailleurs laisser une partie à son temps d'antenne aux européens francophones.

Imaginez un programme qui parle de l'histoire française avec un historien polonais francophone fan de Napoléon débattant avec un Belge (moins fan de Napoléon), ou un temps d'antenne laissé à des Allemands ou des Autrichiens anti-nazis ou des Italiens anti-fascistes pour expliquer que l'Allemagne ou l'Italie ne sont pas que des occupants en uniforme.


Je ne sais pas si les dernières décisions permettent d'avoir un émetteur sufisamment puissant pour couvrir toute l'Europe, ou si un deuxième émetteur emprunté aux Britanniques ne permettrait pas de couvrir l'Europe du Nord.

On pourrait ainsi avoir à partir de Radio France Alger, des émissions en italien menés par des anti-fascistes, en serbo-croate, en grec, en allemand à destination des Autrichiens, et parfois pas en roumain pour ce pays très francophile.

A partir de Radio France Londres, des émissions en flamand, en néerlandais, en allemand pour les allemands, en polonais et en tchèque et slovaque, et pourquoi pas du danois et du norvégien.

Par contre, il risque d'y avoir de la concurrence avec les émissions internationales de la BBC d'où certainement une division des programmes internationaux en fonction des amitiés d'avant et surtout d'après guerre.
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dak69



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MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 16:36    Sujet du message: alsacien Répondre en citant

Bonjour

En tant qu'Alsacien, je confirme que le support écrit de l'alsacien (langue essentiellement orale) était l'allemand plus ou moins littéraire à cette époque-là, et que tous les Alsaciens étaient capables de lire l'allemand écrit. Et çz ne venait pas du fait que la plupart n'avaient connu que l'école du Kaiser.

J'ai des dizaines de lettres écrites par ma famille "déplacée pour cause de menées anti-allemandes" en Saxe en 1943-1944 à ceux restés au pays, et c'est écrit en bon allemand, hormis le vocabulaire qui n'est pas toujours celui des Prussiens.

Personnellement, mais ça n'engage que moi, la tentative d'une normalisation de l'alsacien écrit est une vaste plaisanterie, car ce n'est qu'une formalisation moyenne des variations très importantes d'une langue. En d'autres termes, si deux Alsaciens habitant à 200 km de distance se comprennent oralement (à grand renfort de gestes si nécessaire), ils auraient beaucoup de mal à comprendre le texte écrit dans la "langue moyenne" telle qu'elle se parle à mi-chemin ! Inventer une orthographe plus ou moins phonétique et formaliser une grammaire très lâche ne s'invente pas.

Sinon, le pouvoir allemand du 3e reich avait beaucoup cherché à s'appuyer sur les milieux autonomistes alsaciens.

Bien amicalement
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Intosh



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MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 17:26    Sujet du message: Répondre en citant

Je suis désolé si je n'ai pas été clair, et Dark69 a confirmé ce que je supposais.

Pour de simples raisons psychologiques et/ou de propagande, il faudrait écrire que la version alsacienne des journaux français ou l'équivalent du "Petit Alsacien Libéré" en langue allemande est écrite en alsacien et non en allemand, même si ce n'est pas techniquement vrai.
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gaullien



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MessagePosté le: Dim Avr 25, 2010 22:38    Sujet du message: télévision français Répondre en citant

Est ce qui serait possible d'avoir une chronologie du développement de la télévision français dans la FTL?
J’ai juste trouvé quelque info:

24 décembre 1940

Mandel annoncer la poursuite des travaux sur la télévision commencés dans les années 30 sur la Radiodiffusion française (RDF).[1] Ces travaux continuent en effet sous la direction de René Barthélémy (qui créera en 1943 le standard français de diffusion télé en noir et blanc, soit 819 lignes, alors que les Anglo-Américains choisiront 625 lignes).
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Martel



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MessagePosté le: Lun Avr 26, 2010 09:58    Sujet du message: Après le micor le petit écran Répondre en citant

Bonjour,

Ayant commis les 3 mots sur le sujet, rien n'a été prévu en particulier. Le déroulement sauf erreur de ma part est identiquev à l'OTL. La présence de Mandel à l'inauguration de la RDF déménagée a été faite en faisant référence a son ancien poste de ministre de P&T (ou il avait révolutionné toutes une série de domaines et lancé/relancé le sujet de la TV).

On peut imaginer que son maintien en activité en FTL ait pour conséquence le suivi d'un dossier qu'il a contribué à faire naître en 1935 je crois. Mais je ne vois pas de "driver" qui pousserait à faire autrement.

Néanmoins, ce n'est bien sur pas figé...
_________________
"Enfin le cardinal a terminé son sort.
Français, que dirons nous de ce grand personnage ?
Il a fait la paix, il est mort :
Il ne pouvait pour nous rien faire davantage. "
Epithaphe anonyme du Cardinal de Mazarin.
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patzekiller



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MessagePosté le: Lun Avr 26, 2010 17:23    Sujet du message: Répondre en citant

de toute façon on a un cador de l'AFP parmi nous, je pense que c'est lui qui est le plus à meme de continuer à developper le sujet Smile
_________________
www.strategikon.info
www.frogofwar.org
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Menon-Marec



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MessagePosté le: Lun Avr 26, 2010 18:38    Sujet du message: Répondre en citant

Flatté, le cador vous salue bien.
Amts
M-M.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Jeu Fév 10, 2011 12:41    Sujet du message: Répondre en citant

Le cador Menon-Marec continue à évoquer "la bataille de l'Information".
Celle-ci est à cheval sur les "deux France", mais il fallait bien choisir où la mettre !


7 février 1941
Paris
– Apparition ce vendredi dans les kiosques d’un hebdomadaire, Au Pilori, qui s’affirme « français, national-socialiste et antisémite ». En partie financé en sous-main par des industriels qui se sont ralliés au NEF, Au Pilori bénéficie aussi des largesses d’Otto Abetz, d’un côté, et de l’autre, de fonds débloqués par la Propaganda Staffel, sur l’ordre exprès de Josef Goebbels. Le journal s’est logé à côté du parc Monceau, dans un hôtel particulier abandonné (contre son gré) par un célèbre antiquaire.
Ce premier numéro, tiré à 50 000 exemplaires, se signale par un article de l’écrivain Louis-Ferdinand Céline, qui démontre, sur cinq colonnes pleine page, que les Juifs sont les seuls responsables de l’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne en 1939, et les seuls coupables de sa défaite. « Mais jamais ils sont lassés, nos petits frisés-fripiers, affirme Céline, ils continuent leurs saloperies à Alger ! Leurs tripotages… leurs doigts crochus comme leur nez… Ah, ils ont intérêt à tirer les premiers… et à viser juste… parce que nous, garanti, on les ratera pas ! »
Au Pilori, peut-être parce que Céline, dans la vie, est également le Dr Destouches, se déchaîne aussi contre « l’envahissement de la médecine française par les métèques ». Et de citer, pour commencer, une listes de quarante-trois dermatologues et vénéréologues des hôpitaux de Paris aux noms, écrit-il, « à la consonance youpine » et « le plus souvent naturalisés par Blum et sa bande ». Le journal exige que la nationalité française leur soit retirée, outre l’interdiction définitive d’exercer que le ministre prononcera à leur encontre. Cette liste, accompagnée d’un commentaire moins politique d’apparence, d’un ton un peu plus professionnel, ou du moins plus corporatiste, sera reprise ne varietur par le Concours médical dans sa livraison de la semaine suivante.


22 mars 1941
Alger
– Un arrêté de Jean Zay, ministre de l’Information, suspend sine die la parution du quotidien d’inspiration communiste Alger républicain.
Cette mesure n’est pas motivée. Les directives de la censure interdisent même à Havas Libre, à la radio et aux journaux d’en parler. Le bureau de l’agence Reuters, qui tente d’y faire allusion dans une brève dépêche, est rappelé à l’ordre, voit sa copie caviardée, et paiera son audace d’un « incident technique » qui le privera de transmissions pendant huit heures.
Il semble, en fait, que Zay a dû céder à l’insistance de plusieurs de ses collègues du gouvernement. Ils n’ont jamais accepté que le Parti communiste, interdit depuis le décret Daladier de septembre 1939, bénéficie encore d’une tribune pour s’exprimer – serait-ce avec la prudence dont la rédaction d’Alger républicain ne s’est jamais départie.
Il est certain que le Pacte germano-soviétique suscite encore, autant dans les cercles dirigeants que dans l’opinion, des rancœurs qui ne sont pas près de s’éteindre. Officieusement (mais ce n’est sans doute qu’un prétexte), Jean Zay a fait savoir à la direction du journal que la couverture des évènements d’Irak a été considérée comme injurieuse pour la Grande-Bretagne. Il a notamment souligné qu’un jeune rédacteur, Henri Alleg, l’avait qualifiée au passage, dans un article de fond sur l’évolution du Moyen-Orient depuis le début de la guerre, de « puissance indécrottablement impérialiste, l’ennemie des peuples indigènes qu’elle méprise et opprime pour mieux les exploiter » – ce qui aurait dû passer pour anodin sous une plume progressiste.
Au plus profond, on peut voir dans la décision de Jean Zay le reflet de la lutte entre la tendance dure du gouvernement, désireuse de « liquider définitivement la question communiste », quitte à autoriser quelques-uns des adversaires du Pacte au sein du PCF à s’organiser en un “Parti ouvrier et paysan” relevant davantage d’une gauche extrême que de l’extrême-gauche, et les partisans de la conciliation. Ceux-ci, au nom de l’Union sacrée comme du réalisme, estiment qu’il faut, en tout état de cause, réintégrer les communistes, sinon le Parti lui-même, dans la communauté nationale. Ils croient aussi à la nécessité d’éviter tout ce qui peut pousser Staline à satisfaire davantage les demandes de Berlin: on ignore ses intentions en ce qui concerne le PCF et ses dirigeants, disent-ils, et il s’agit, après tout, de ne pas insulter l’avenir.
C’est d’ailleurs ce qu’a fait Jean Zay. En effet, il faut noter la nuance : le journal n’est pas interdit, comme il l’avait été de l’automne 1939 à l’automne 1940, mais sa parution est suspendue – ce qui signifie qu’elle pourra reprendre si…


15 avril 1941
Paris
– Louis-Ferdinand Céline, pourtant réputé radin – expression, disent ses ennemis, et il n’en manque pas, de sa volonté d’imposer à grands cris son personnage de miséreux des Lettres – invite l’éditeur Robert Denoël à déjeuner à la Tour d’Argent. Il s’agit, autour d’un canard au sang arrosé d’un Léoville - Las Cases 1898, de se faire pardonner d’avoir accordé à un concurrent, les Nouvelles Éditions Françaises (NEF, comme par hasard !), le manuscrit de son dernier pamphlet, Les beaux draps, dirigé tout autant contre les Juifs que contre la République et l’état-major.
La bonne chère et le grand cru aidant, Céline et Denoël se réconcilient – au point que l’éditeur, sous réserve de bénéficier d’une allocation de papier suffisante et d’obtenir l’aval de l’Occupant, prévoit de rééditer Bagatelles pour un massacre et L’École des cadavres à 50 000 exemplaires chacun, pas moins ! avant la fin de l’année. Au moment du vrai café, des cigares (des havanes authentiques qui continuent de parvenir à Paris via l’Espagne, au prix du lingot, il faut l’admettre, ou presque) et du cognac de plus de trente ans d’âge (un Delamain, ce qui fait grimacer Céline qui n’apprécie pas plus Jacques Chardonne que ses œuvres), les deux complices demandent du papier au maître d’hôtel et signent sur un coin de la table un accord de principe, prélude à un contrat en bonne et due forme.
L’affaire, il est vrai, s’annonce profitable pour les deux parties : l’à-valoir promis par Denoël à Céline lui assurera l’équivalent de deux années de revenu, tandis que l’éditeur table, à vue de nez, sur une marge bénéficiaire de 40% environ.


17 juin 1941
Los Angeles
– Le cinéaste Jean Renoir s’embarque à l’aérodrome de Burbank dans le DC-3 du vol bi-hebdomadaire T&WA à destination de New York via Phoenix, Albuquerque, Oklahoma City, Springfield, Saint-Louis et Cincinnati. Il doit y passer quelques jours chez Antoine de Saint-Exupéry avant de prendre le Stratoliner d’Air France pour Alger.
Promu colonel à titre aussi fictif que temporaire (il n’est que lieutenant de réserve) par le général de Gaulle sur la recommandation de Jean Zay, et malgré les réserves expresses du chef d’état-major des Armées (qui le juge trop « lie-de-vin » à son goût, et pacifiste par surcroît), Jean Renoir sera officiellement nommé le 10 juillet directeur du Service Cinématographique des Armées. À ce titre, il dirigera la couverture du défilé du 14 juillet, auquel le gouvernement entend conférer une audience internationale pour mettre en valeur « la France qui se bat ».
De Gaulle partageait les réticences de Noguès, quoiqu’il ait salué en son temps, en connaisseur, La grande illusion, qui évoquait si bien son séjour à Ingolstadt. Il s’est, en l’occurrence, fié au jugement du général de corps d’armée de Lattre de Tassigny – auquel, dans l’Armée, certains ne se privent pas d’attribuer davantage de faire-savoir que de savoir-faire – car Renoir avait tourné des reportages sur la 14e DI durant l’automne 39 et l’hiver 40. Quoique disciple du général Weygand et connu, naguère, pour ses liens avec l’Action Française (notamment avec Maxime Réal del Sarte), De Lattre a donné un avis positif, ce qui ne peut que confirmer dans leurs préjugés ceux qui raillent son côté “Théâtre de Marigny” et daubent ses extravagances.


14 juillet 1941
Paris
– Apparition dans la capitale du dernier numéro de Vérité, dirigé par Henri Frenay. Il a été tiré sur les presses du Démocrate, sans emploi depuis que Marc Sangnier, malgré certaines demandes de la part de l’Église, soucieuse de donner une expression à la tendance moderniste, a décidé de saborder son journal.
Il est prévu que Vérité et Liberté, issus de deux mouvements fort proches, fusionneront dès que possible pour donner naissance à un journal plus étoffé, Combat. Ce sera aussi le nom du nouveau mouvement.

Avignon – Comme Henri Frenay, mais, pour ainsi dire, en sens inverse, Emmanuel d’Astier de la Vigerie, ancien officier de marine à la réputation sulfureuse, et Raymond Aubrac, ingénieur et lieutenant du Génie d’origine juive, ont pris en compte la date symbolique de la Fête nationale pour la parution du premier numéro de Libération. Tiré à quelque 5 000 exemplaires sur les presses de l’éditeur Aubanel, Libération sera distribué dans tout le Midi. Une centaine d’exemplaires seulement de ce premier numéro parviendront à Paris, grâce au courage de deux cheminots qui les cacheront dans le tender de leur Pacific 231.


15 août 1941
Châteldon
– Pierre Laval, qui a pris un long week-end de repos dans sa propriété pour la fête de l’Assomption, ne se gêne pas pour tempêter devant ses proches contre la Presse de Métropole. « Ceux qui défendent ma politique sont tous des médiocres ! » s’écrie-t-il. « Ils ne survivent que par les fonds secrets que je leur alloue à pleines mains ! » Il se tourne vers son directeur de cabinet : « Jardin ! Combien, le mois dernier ? »
« Quelques millions, Président » répond Jean Jardin sans s’engager outre mesure.
Et Laval poursuit sa diatribe : « Entre les saligauds qui n’appuient les Boches que pour mieux me torpiller et les grands… tenez, La Montagne, par exemple… qui refusent, en réalité, de me soutenir, je me vois mal parti ! » Il conclut, menaçant : « Marion, et ce salopard de Doriot avec lui, croient qu’ils auront ma peau. Mais je leur réserve un chien de ma chienne, et ils ne perdent rien pour attendre. »
Il est vrai que le Président, de longtemps convaincu qu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même, ne se pardonne pas d’avoir abandonné le portefeuille de l’Information à un homme qu’il méprise – et qu’il a même de bonnes raisons de haïr.


22 septembre 1941
Paris
– Robert Denoël informe Louis-Ferdinand Céline qu’il éprouve quelques difficultés à obtenir des occupants l’autorisation de republier Bagatelles pour un massacre et L’École des cadavres – ce qui interdit le déblocage de l’allocation de papier, que le gouvernement a pourtant accordée sans difficulté. Il semble, indique l’éditeur en prenant des gants autant qu’il le peut, qu’à la Propaganda Staffel, certains, peu sensibles au style de l’écrivain et à sa renommée internationale, estiment son antisémitisme si outré, caricatural en un mot, qu’il en nuit à la cause antisémite : il pourrait pousser les gens peu avertis à penser que les adversaires des Juifs sont, au choix, des criminels ou des fous. « C’est à se demander aujourd’hui, aurait déclaré de son côté le Dr Karl Epting, un admirateur pourtant , si ses articles n’essaient pas de tourner en ridicule la politique du Führer. »
Ce rejet va pousser Céline, en fureur, à donner au Pilori un article où il parodie – chez lui, l’antimilitarisme n’est jamais loin – une phrase célèbre du colonel de Grandmaison (dans une conférence prononcée devant les officiers du CHEM en 1911) : « Soyons antisémites jusqu’à l’excès, et ce ne sera peut-être pas assez ! ».


17 novembre 1941
Alger
– René Clair, auteur de films à succès depuis les années 30, arrive en Afrique du Nord. En dépit de la réussite qu’il rencontrait à Hollywood où il s’était installé depuis l’été 1940, il a répondu à l’appel de Roger Leenhardt et de Marcel L’Herbier, qui souhaitaient le voir renforcer les équipes du C.C.C.
C’est aux studios de Rocher-Noir qu’il tournera deux de ses chefs-d’œuvre, Ma femme est une sorcière et C’est arrivé demain. Selon ses souvenirs, le scénario de son meilleur film d’après-guerre, Les grandes manœuvres, lui aurait été inspiré par les propos et le chahut d’un groupe de jeunes officiers du 11e Régiment de Dragons portés venus, au hasard d’une permission, faire la fête à l’hôtel Aletti.


1er décembre 1941
Orléans
– Les fondateurs du mouvement Franc-Tireur, Jean-Pierre Lévy (de tendance radicale-socialiste), Antoine Avinin (proche du christianisme social dans la tradition du Sillon) et Élie Péju (apolitique mais viscéralement antimunichois), co-signent l’éditorial du premier numéro de Franc-Tireur, qui prend la succession de France-Liberté. Ils ont choisi de mêler quelques-uns de leurs pseudonymes pour la circonstance: Robert Gilles (Lévy), Albert Arnaud (Avinin) et Jules Charbonnier (Péju).
Aussi artisanal que la plupart des journaux de la Résistance, puisqu’il est, comme eux, préparé et rédigé par des équipes de non-professionnels, Franc-Tireur s’en distingue par l’attention que ses créateurs ont apporté à la distribution. Avant d’en entamer la rédaction, ils se sont souciés de tisser une toile de militants, de sympathisants et d’amis qui se chargeront d’en assurer la diffusion sur tout le territoire.


15 décembre 1941
Lyon
– Georges Bruni, obscur journaliste au secrétariat de rédaction du Temps, qui continue de paraître entre Saône et Rhône, remet, autour d’un mâchon, un rapport sur la situation de la Presse française de Métropole à l’un de ses amis. Il le sait, comme il en plaisante lui-même, « en relations avec des gens qui ne sont pas sans rapports avec des personnes qui ont peut-être des connaissances qui ne seraient pas sans avoir, croit-on, quelques accointances avec Alger ». Ce rapport, confié le soir même à un “pigeon voyageur” du BCRAM désigné pour le prochain tube , sera sur le bureau de Jean Zay avant le Nouvel An.
Très bien placé pour suivre les journaux de province, Bruni souligne que l’on constate, depuis le début de l’automne, un infléchissement de la tonalité des articles politiques : « Je note que mes confrères, écrit-il, semblent s’affranchir, non pas des consignes du gouvernement de Paris – ils n’en ont pas la possibilité – mais du conformisme qui les engluait depuis l’été 1940. On les sent plus libres, moins soumis au pouvoir. À l’évidence, cette tendance s’est amplifiée et confirmée avec l’entrée des États-Unis dans la guerre il y a quelques jours. On commence à comprendre, même si les nouvelles ne paraissent pas bonnes a priori, que l’Axe ne gagnera pas, qu’il ne peut plus gagner, qu’il sera vaincu. En un mot, on a moins peur. »
Et Bruni ajoute des précisions d’ordre sémantique qui explicitent son propos : « Ainsi, je relève de plus en plus souvent la disparition des guillemets pour Alger (entendu au sens de l’entité gouvernementale) et, quelquefois, la substitution du mot dissidents au mot terroristes pour rendre compte des actions de la Résistance. J’ai même lu une expression significative par sa neutralité, les adversaires du gouvernement du président Laval et des occupants, sans nul guillemet, sous la plume de deux confrères pourtant réputés amis de l’ordre, qui ne s'étaient probablement pas concertés. »
Il conclut : « C’est peu, pensera-t-on sans doute, mais, qu’on me croie, c’est déjà énorme ».

Notes
La vénéréologie – médecine des maladies vénériennes, jadis « honteuses », aujourd’hui « sexuellement transmises » – avait été regroupée avec la dermatologie, en raison de l’existence de signes cutanés importants (et alors célèbres) dans la syphilis évoluée.
Lié par l’amitié à la famille Delamain, de Barbezieux comme lui, Jacques Chardonne (Jacques Boutelleau) était aussi administrateur de la société des Cognacs Delamain.
Transcontinental & Western Airlines, qui deviendra la TWA (Trans World Airlines).
Ami d’Otto Abetz, directeur de l’Institut Allemand de Paris à partir de l’automne 1940, Karl Epting, authentique universitaire, avait été le premier à faire connaître l’œuvre de Louis-Ferdinand Céline dans son pays. S’il admirait l’écrivain sans réserves, il paraît qu’il considérait avec davantage de circonspection le pamphlétaire et la violence effrénée de ses écrits, ainsi qu’en témoigne leur correspondance, récemment publiée (2008).
Mais sportif fort connu. Il fut l’un des dirigeants qui firent pénétrer dans le monde moderne le rugby français, longtemps aussi archaïque dans ses structures que dans son jeu.
C’est le nom qu’on donne à la liaison Métropole - AFN (exceptionnellement Métropole - Grande Bretagne) par sous-marin.
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folc



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MessagePosté le: Jeu Fév 10, 2011 22:55    Sujet du message: Répondre en citant

C'est de la belle ouvrage !
Mais, pour taquiner un peu Menon-Marec, en lisant "Pacific 231", il m'a semblé entendre mon défunt professeur d'histoire d'hypokhâgne et khâgne, nous disant d'éviter ce pléonasme (une Pacific étant forcément du type 2-3-1 et les 2-3-1 nous venant d'Amérique du Nord, de chez Pacific).
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Folc

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Menon-Marec



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MessagePosté le: Jeu Fév 10, 2011 23:02    Sujet du message: Répondre en citant

Cher Folc,
le pléonasme était voulu - en référence à Honegger, bien sûr.
Et puis je ne suis pas sûr que nos plus jeunes membres lecteurs (rayer la mention inutile) sachent combien d'essieux comptait une Atlantic, une Pacific, une Mountain, une Décapod - sans parler des "Big Boys" américaines, usw... à la réflexion, je ne suis même pas convaincu que 231 évoque quelque chose de précis pour eux, moins encore 030, si utile, pourtant, pour préparer Overlord...
Amts.
M-M.
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Fantasque



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MessagePosté le: Ven Fév 11, 2011 10:09    Sujet du message: Répondre en citant

poh poh poh....

Il y a encore des auteurs chez qui l'art de compter les essieux n'est pas tout à fait mort (ainsi que les nomenclatures des motriices electriques BB, CC etc...)

"C'est le piston, piston, qui fait tourner la machine..."

F
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