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1940 - La France continue la guerre
 
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L'Espagne
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requesens



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MessagePosté le: Dim Avr 14, 2019 17:27    Sujet du message: Répondre en citant

Archibald a écrit:
Citation:
Sergent Garcia : Zorro


y a le chanteur aussi... "un poquito quemado"


C'est un groupe, non?
_________________
"- Tous les allemands ne sont pas nazis, monsieur !
- Oui, je connais cette théorie, oui."
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 08:50    Sujet du message: Répondre en citant

Nous avons laissé nos héros déjeuner sur une terrasse à Cerbère, en 1948…
Souvenirs, souvenirs…



Cerbère, dans l’après-midi
– L’émotion et le vin aidant, les quatre hommes entonnèrent mezzo-voce des chants de la République.

El Ejército del Ebro,
rumba la rumba la rumba la,
El Ejército del Ebro,
rumba la rumba la rumba la
¡Ay Carmela! ¡Ay Carmela!
una noche el río pasó.
¡Ay Carmela! ¡Ay Carmela!

L’Armée de l’Ebre, une nuit traversa le fleuve…

Y a las tropas invasoras,
rumba la rumba la rumba la,
Y a las tropas invasoras,
rumba la rumba la rumba la,
buena paliza les dio.
¡Ay Carmela! ¡Ay Carmela!


Comme si le chant pouvait prolonger cet instant de retrouvailles. Et elle donna une bonne raclée aux troupes des envahisseurs…

El furor de los traidores,
rumba la rumba la rumba la,
El furor de los traidores,
rumba la rumba la rumba la,
lo descarga su aviación,
¡Ay Carmela! ¡Ay Carmela!


En écoutant et en racontant les récits de leurs batailles, ils se plaignaient souvent du soleil qui faisait pleurer leurs yeux. L’aviation des traîtres déversa leur fureur…

Pero nada pueden bombas,
rumba la rumba la rumba la,
Pero nada pueden bombas,
rumba la rumba la rumba la,
donde sobra corazón,
¡Ay Carmela! ¡Ay Carmela!


Il se faisait tard, mais aucun d’entre eux ne voulait partir. Mais les bombes ne peuvent rien là où il y a du cœur…

Contra ataques muy rabiosos,
rumba la rumba la rumba la,
Contra ataques muy rabiosos,
rumba la rumba la rumba la,
deberemos resistir,
¡Ay Carmela! ¡Ay Carmela!


Que faire maintenant ? A des contre-attaques enragées nous devrons résister…

Pero igual que combatimos,
rumba la rumba la rumba la,
Pero igual que combatimos,
rumba la rumba la rumba la,
prometemos combatir,
¡Ay Carmela! ¡Ay Carmela!


Il faudrait penser au retour, non ? Mais nous promettons de combattre demain tout comme nous combattons aujourd’hui.
………
– Nous vous accompagnons à la gare, prenons le bus.
Ils parlaient pour occuper le temps, comme pour profiter jusqu’à l’ultime seconde de ce moment. Les aînés entouraient de leurs bras les épaules du cadet. Quelques petits kilomètres d’une route sinueuse qui longeait la Méditerranée et ce fut la frontière.
– Pourquoi ne rentrez-vous pas maintenant en Espagne ? On ne fusille plus, dit Ramon.
– On ne fusille plus ! C’est heureux, il y a neuf ans que la guerre est finie et ils ont exécuté jusqu’au début de 1945. Mais de toute façon, je suis parti citoyen d’une république, je ne reviendrai que quand ce sera de nouveau une république. Mais toi, pourquoi ne viens-tu pas ici, en France ?
Ramon secoua la tête et fit un geste d’impuissance. Maintenant silencieux, les quatre se rendirent jusqu’au poste de contrôle français. Un peu plus loin, les derniers rayons du soleil faisaient naître des reflets sur les tricornes des gardes civils. Salvador les indiqua d’un geste : « Croyez-vous qu’ils aient entendus parler du colonel Escobar ou du général Aranguren ? Probablement pas, ils ont disparu dans la fosse commune de l’oubli, mais nous, nous devons faire vivre leur souvenir. Le vrai tombeau des morts c’est le cœur des vivants. »
Ils marchèrent lentement jusqu’aux douaniers et gendarmes qui surveillaient les passages. Salvado et Ramon montrèrent leurs passeports, tandis que les deux autres restaient en arrière.
– Papiers… Pas de bagages ? Rien à déclarer ?
Un gendarme qui les avait entendu discuter en catalan s’était approché : « Vous ne partez pas, vous deux ? » Les deux frères avaient conservé en français un accent à couper au couteau, qui faisait plutôt couleur locale ici, en Catalogne nord, mais le gendarme, lui, n’était pas Catalan.
« Non ? Montrez-moi vos permis de séjour. »
Agusti le regarda par en-dessous et lui tendit sa carte d’identité.
– Ça, c’est la meilleure ! Regardez ces deux-là, ils ont des cartes d’identité presque neuves et ils parlent français comme une vache espagnole ! dit- le gendarme, ravi de son trait d’humour. Vous allez venir avec nous.
Son collègue regardait les documents avec attention : « Pff… Si c’est un faux c’est très bien fait ! »
Salvador, qui ne comprenait pas ce qui se passait, regrettait son Astra 6,35 et Ramon s’était approché de ses frères et regardait la scène, curieux et un peu anxieux.
Le premier militaire s’exclama, triomphant : « Des faux très bien faits ? Donc c’est une belle prise. Vous deux, vous venez avec nous. »
Agusti, bien plus petit que le gendarme, vint se planter sous son nez et articula, avec beaucoup moins d’accent espagnol, tout à coup : « Non, je ne crois pas, adjudant ! »
Il aurait giflé le pandore que celui-ci n’aurait pas rougi plus violemment : « Quoi, qu’est-ce que tu as dit ? »
– Vous m’avez bien entendu, et vous me dites “vous” ! On ne vous a pas appris le respect dû aux supérieurs, adjudant ? »

Tout en parlant, il porta la main à la poche de sa veste et en sortit son titre de démobilisation, qu’il mit sous les yeux du gendarme.
– Vous savez lire, au moins ?
A la ligne Corps était inscrit « 6e BMLE ».
A la colonne Grade, on lisait, calligraphié avec soin : « Capitaine ».

L’autre eut un hoquet et se figea au garde-à-vous : « Pardon mon capitaine, je ne pouvais pas savoir. Heu, mon capitaine, la 6e BMLE, c’est bien la Brunete ? »
Son camarade salua lui aussi, très raide.
Si Agusti riait intérieurement, les trois autres Espagnols (dont un autre Hispano-Français…) manifestaient un amusement plus visible.
– Ah, je vois que vous n’êtes pas complètement ignorant, adjudant. Et sachez que vous avez aussi devant vous un lieutenant et un sergents légionnaires, ajouta-t-il, fusionnant au passage sans hésiter les deux légions étrangères, la française et l’espagnole. Il précisa (à moitié…) : « De la 14e DBLE Ebro ! »
Le gendarme ouvrit de grands yeux : « Heu… Permission de remercier le lieutenant, mon capitaine. »
Agusti, curieux, sourit : « Permission accordée, adjudant ! »
– Merci, mon capitaine. Je voudrais vous remercier, mon lieutenant. Avec l’Ebro, vous nous avez sorti d’un foutu… d’une sale affaire, à Kumanovo.
– Vous étiez à Kumanovo ?
demanda Agusti, soudain radouci.
– Oui mon capitaine. Bataillon antichar de la 191e DIA.
– Alors ce n’est pas votre femme qui vous a fait cette balafre un jour où vous étiez rentré ivre ?
– Non mon capitaine, c’était un shrapnell boche.
– Ah. Eh bien vous voyez, adjudant, tout le monde peut se tromper… Souvenez-vous en !

Les douaniers et les autres voyageurs les regardaient avec ahurissement – qui était ce petit homme, sec comme un coup de trique, que les gendarmes saluaient ainsi ?
Marcel intervint : « Nous avons fait notre boulot, à Kumanovo. Et les gars de la 191e aussi, adjudant… Quel est votre nom ? »
– Le Floch, mon lieutenant. J’étais caporal, à l’époque.
– Repos Messieurs,
conclut Agusti. Reprenez votre service. La prochaine fois, nous vous raconterons comment nous avons gagné nos décorations.
Une fois que les représentants de la maréchaussée, honteux mais soulagés, se furent éloignés, un vrai et grand fou-rire secoua le petit groupe. La vision des deux gaillards au garde-à-vous, bafouillant des excuses devant un Agusti inquisiteur avait été un grand moment.
Mais Ramon remarqua que Marcel riait un peu moins fort : « C’était… dur, à Ko… Kumanovo ? Et, heu, où était-ce ? »
Son frère soupira : « En Grèce, Ramon. La campagne de 41. Je me doute que la Vanguardia et la RNE [Radio Nacional de España] n’ont pas dû en parler… Tu sais, contrairement à ce qu’ont l’air de penser certains camarades du PCF, on s’est battu ailleurs que sur le front russe, pendant cette guerre ! » Il resta un moment silencieux, les yeux baissés, comme en prière. « Nous avons perdu du monde là-bas… »

***-***-***

8 mai 1941
Première campagne de Grèce
Kumanovo
– L’homme, au bord des larmes, tenait dans ses mains les rares morceaux identifiables de ce qui avait été sa guitare, écrasée par la chute d’une poutre. Il regardait autour de lui comme si tout cela n’était qu’une erreur et que sa vieille amie allait réapparaître.
– Allez Fosforito, ce n‘est rien, au moins tu as gardé tes bras, tu pourras jouer de nouveau.
Il secoua la tête : « Elle est avec moi depuis… depuis… bien avant la guerre, la nôtre, pas celle-ci. »
Ses amis lui tapotaient l’épaule en signe de soutien et lui murmuraient des paroles de réconfort, mais il continuait à murmurer : « C’est comme si j’avais perdu quelqu’un de ma famille… »
“Fosforito” Ramirez était un Andalou de Cordoue. Fils de mineur, il avait commencé à travailler sur le carreau à 9 ans, à 16 il descendait au fond. Malin, travailleur et habile, il était au bout de quelques années devenu artificier.
Sachant à peine lire et écrire, il s’était perfectionné au contact de syndicalistes qui dispensaient le dimanche des cours d’alphabétisation. En 1936, il avait mis ses connaissances pyrotechniques au service de la République en confectionnant des bombes et des grenades artisanales, dont la mise à feu par mèche lui avait valu le surnom de “Fosforito” (petite allumette).
Après avoir passé la frontière française, puis avoir participé au Grand Déménagement pour arriver en Algérie, il était maintenant en Grèce, ou peut-être en Yougoslavie, dans une ville dont personne n’avait jamais entendu parler : Kumanovo. Par contre, comme tous ses camarades de la 14e DBLE, il savait que vers elle marchaient les troupes allemandes, les mêmes dont l’aviation avait rasé Guernica, mitraillé les colonnes de civils fuyant Malaga et achevé la Catalogne, et lui et ses camarades les attendaient. Entre eux et les Allemands – seuls les plus politisés disaient « les Nazis », c’était maintenant une « cosa de sangre ».
Si Fosforito pleurait sa guitare, les autres hommes regardaient ce qui restait de la maison, heureusement vide, où ils avaient laissé leurs paquetages, transformée en un amas de ruines par un obus. « C’était du lourd ! – Du 150 ? – Au moins ! – Alors ça veut dire que le gros de leurs troupes est à moins de 20 kilomètres et que ce ne sont plus uniquement des avant-gardes que nous avons en face de nous. – Il faut en parler au lieutenant et nous organiser. »
Des mouvements divers parcoururent le groupe. Le lieutenant Philibert de la Motte appartenait à une famille de militaires qui servait la France depuis les racines de son arbre généalogique. Il avait intégré Saint-Cyr en 1939 et terminé sa formation à Cherchell, avant de demander la Légion par romantisme et atavisme familial – son père en avait fait autant, suivant les traces de son propre père, qui avait fait partie des premiers officiers de la Légion sous Napoléon III. De la Motte avait une vision “byronienne” de la guerre. Les plus jeunes de ses hommes le trouvaient très courageux, les plus expérimentés le pensaient inconscient, mais tous l’aimaient bien et faisaient de leur mieux pour le protéger.
– Que faisons-nous, sergent ?
Marcel Muntaner, sergent dans l’armée de la République espagnole, était caporal dans la Légion étrangère. Vétéran de nombreuses batailles, ou plutôt de nombreuses défaites, il était écouté par ses camarades.
– Que celui qui parle le mieux français aille informer le lieutenant que dans la crainte d’une attaque surprise de l’ennemi, nous avons été recueillir des informations. Ajoute qu’il ne s’agit que d’une reconnaissance et que nous serons vite de retour… Pas la peine de tout lui dire, il risquerait de nous suivre pour chercher la bagarre !
La chute fit rire l’assemblée. « Trouvons une carte et allons voir sur place. »
………
Un peu plus tard, De la Motte, Muntaner et le sergent Martinez, étaient regroupés autour d’un croquis du secteur.
– Nous avons vu des blindés arriver de là. [Les mains remplaçaient les mots manquants.] La route est mauvaise, ils vont avoir besoin d’un jour pour se déployer. Demain ils nous fixeront et après-demain ils attaqueront. Mais comme ils sont aussi de l’autre côté de la ville, ils vont arriver de l’est et de l’ouest en même temps. Une attaque en… [Nouveau geste des mains.]
– En tenaille ou en pince, caporal. Qu’en pensez-vous, sergent ?
Le sergent Martinez, pied-noir d’Oran, était bien d’origine hispanique mais, en dépit de son nom (qui lui avait valu son affectation), il ne parlait pas un mot d’espagnol ! De plus, il était farouchement de droite. Il avait applaudi à la victoire des nationalistes et n’éprouvait qu’antipathie pour ces Rouges, ces partageux, ces violeurs de religieuses. Il fallait que la France soit tombée bien bas ! D’abord la défaite et maintenant devoir se battre au côté de ces… bandits bolcheviques !
– Sergent ?
– Pardon mon lieutenant. Je pensais que le caporal devrait plutôt s’occuper de ses affaires et de celles de ses hommes et laisser faire ceux dont c’est le vrai métier.
– Donc, vous n’êtes pas d’accord avec lui ?
– Mon lieutenant, le caporal et une partie de sa section sont partis en reconnaissance, du moins c’est ce qu’ils disent, sans aucune autorisation. C’est de l’abandon de poste !
– Oui, oui, mais les blindés sergent ?
– C’était peut-être des nôtres, ou bien ceux des Grecs ou des Yougos !
– Allons, sergent, des chars grecs ou yougoslaves ? Si seulement !

Muntaner, qui suivait plus ou moins les échanges, fouilla dans sa musette et posa sur la carte une pochette dont dépassaient des feuilles : « Je l’ai pris sur le corps d’un motoriste qui n’a pas voulu freiner. Ça dit, je crois, qu’il est de la 9e Panzer. »
– Motocycliste, caporal…

Le silence s’installa tandis que le lieutenant feuilletait les documents. Muntaner savait que si c’était une tête chaude, il avait d’autres qualités – par exemple, il parlait allemand, ce qui pouvait être utile…
– Sergent, préparez les hommes pour demain avec le plein de munitions. C’est bien la 9e Panzer. Caporal, venez avec moi.
Ils trouvèrent le capitaine en compagnie du commandant. De la Motte posa la pochette sur la table : « Mon commandant, mon capitaine… Hannibal ad portas ! Enfin, je veux dire la 9e Panzer. Le caporal Muntaner a saisi ces documents lors d’une mission de reconnaissance. »
Le commandant feuilleta les papiers et poussa un léger soupir : « Indiquez-moi sur la carte l’endroit où vous avez trouvé cette pochette, caporal. »
– Nous l’avons récupérée à peu près ici, mon commandant.
– Récupérée ?
– Oui, sur un moto… motocycliste allemand
[Un regard en biais vers le lieutenant.] qui n’avait pas voulu freiner. Il devait croire qu’il pouvait passer parce qu’il était à deux ou trois cents mètres de nous.
– Et vous l’avez arrêté comment ?
– En lui mettant une balle dans la poitrine.

Les trois officiers se regardèrent. « A trois cents mètres, sur un motard qui roulait ? Il faudra que vous nous racontiez cela. Merci caporal, vous pouvez disposer. »
Muntaner sorti, le commandant reprit la parole : « Demain, après-demain au plus tard, ils vont nous tomber dessus. Renforcez les positions, prévoyez des lignes de repli. Je vais chez Dentz. Comment cela se passe-t-il avec vos Espagnols, lieutenant ? »
– Ce n’est pas simple ! Au début, je les avais regroupés par région, les Castillans avec les Castillans, vous voyez ? Mais très vite, je me suis aperçu qu’un anarchiste catalan se sentait plus proche d’un anarchiste andalou que d’un communiste catalan. J’ai donc recomposé les groupes sur des critères politiques, mais mon problème est que personne ne souhaite être avec les communistes. Enfin, c’est la guerre et ce sont de bons soldats !
– Des soldats, je ne sais pas, mais de bons combattants, sûrement. Je les ai vus se battre en juillet l’an dernier et ils ont fait preuve d’un grand courage. Allez préparer vos hommes, lieutenant. Les prochains jours seront… difficiles.
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demolitiondan



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 09:19    Sujet du message: Répondre en citant

Il s'appellerait pas Nicolas, le gendarme Le Floch ?
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Quand la vérité n’ose pas aller toute nue, la robe qui l’habille le mieux est encore l’humour &
C’est en trichant pour le beau que l’on est artiste
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Anaxagore



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 09:24    Sujet du message: Répondre en citant

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requesens



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 09:41    Sujet du message: Répondre en citant

demolitiondan a écrit:
Il s'appellerait pas Nicolas, le gendarme Le Floch ?


J'ai trouvé que gendarme Le Floch sonnait mieux que gendarme Bourdieu. Quant à gendarme Sartine, vraiment non impossible... Laughing
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Anaxagore



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 10:03    Sujet du message: Répondre en citant

Tu risquerais de bloquer le vieux-port !
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requesens



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 10:11    Sujet du message: Répondre en citant

Anaxagore a écrit:
Tu risquerais de bloquer le vieux-port !

Tu ne penses pas si bien dire !.
De noblesse recente, il avait choisi pour ses armes " or à bande azur chargée de trois sardines d'argent". Belle ironie, non?
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Anaxagore



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 11:30    Sujet du message: Répondre en citant

Tu ne connais pas l'anecdote ?
Sartine avait un yacht..; mais pas l'habilité pour le barrer correctement. En voulant entrer dans le vieux port de Marseille, il s'immobilisa entre les deux môles bloquant pendant plusieurs heures toute activité.

Moqueur, les Marseillais se gaussèrent de Sartine en disant qu'une sardine avait bloqué le vieux-port... depuis c'est passé en proverbe.
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demolitiondan



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 12:05    Sujet du message: Répondre en citant

Au vu de son rôle sous Louis XVI, Sartine avait plutôt une frégate 3 mats dénommée 'La Furibonde', avec une figure féminine de votre choix en tête de proue. Moi c'est mon épouse.
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 12:12    Sujet du message: Répondre en citant

Selon mes sources, le navire en question était un bâtiment affrété par un riche commerçant de Marseille qui, soucieux de plaire au tout-puissant Sartine, l'avait baptisé le Sartine.
Manque de bol, échouage, rigolade des Marseillais et légère déformation : on est passé de "le Sartine a bloqué le port" à "la sardine a bloqué le port".
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Casus Frankie

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Archibald



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MessagePosté le: Mer Avr 17, 2019 18:09    Sujet du message: Répondre en citant

Casus Frankie a écrit:
Selon mes sources, le navire en question était un bâtiment affrété par un riche commerçant de Marseille qui, soucieux de plaire au tout-puissant Sartine, l'avait baptisé le Sartine.
Manque de bol, échouage, rigolade des Marseillais et légère déformation : on est passé de "le Sartine a bloqué le port" à "la sardine a bloqué le port".


In-croy-a-ble. Alors ça viens de là cette histoire ? bonne mère...

Citation:
Quant à gendarme Sartine


c'est un cousin de Dame Tartine ? Arrow
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Lun Avr 29, 2019 23:40    Sujet du message: Répondre en citant

Pendant l'entr'acte entre le 11-20 et le 21-31 janvier 44 dans les Balkans, replongeons avec Requesens dans les souvenirs de nos amis espagnols… en même temps que dans ceux des briscards de la FTL…



9 mai 1941
Première campagne de Grèce
Kumanovo
Comment vas-tu, suppôt du capitalisme ?
– Et toi, hyène policière ?

Les deux hommes se donnèrent un abrazo chaleureux. Velasco Pinti était un communiste madrilène, ancien instituteur qui avait rejoint dès juillet 36 le fameux Quinto Regimento, la première unité des milices à avoir adopté une organisation militaire. Elle avait été le creuset par lequel étaient passés la plupart des officiers supérieurs issus du PCE.
Marcel et lui s’étaient connus lors de la défense de Madrid et des combats de la cité universitaire. Ils s’étaient retrouvés par les hasards de l’existence en juin 1940, en luttant contre les Bochès, et faisaient maintenant partie de la même compagnie.
– J’ai une bouteille du poison local, la slivovitz, on appelle ça. Tu as deux verres à peu près propres ?
– Tu sais bien que je bois très peu.
– Très peu, c’est déjà quelque chose ! Alors, vous avez des verres chez les anarchistes, ou sont-ils une propriété populaire autogérée dont l’utilisation doit être décidée à la majorité suivant le mot d’ordre
« A chacun selon sa soif » ?
– Chez vous les communistes, les verres sont propriété de l’état qui décide qui les lave, qui les range et qui boit dedans. Alors au bout d’un moment plus personne ne fait attention à rien, les verres disparaissent et vous êtes obligés d’envoyer tout le monde en Sibérie. Mais ceux qui avaient soif n’ont toujours pas bu !

Un franc éclat de rire les secoua tous deux.
Quelques instants plus tard, ils trempaient leurs lèvres dans une boisson incolore.
– On dirait du vitriol !
– Il faut reconnaître que c'est du brutal !

Ils toussotèrent.
– Tu as des nouvelles d’Espagne ?
– Aucune, mais j’ai reçu une lettre de mon frère, il est aussi dans la Légion, dans les blindés. Il va bien, s’ennuie et râle contre les Français qui l’ont quand même promu chef de char !
– Crois-tu vraiment que si nous gagnons ici nous pourrons retourner en vainqueurs chez nous ?
– Sincèrement, maintenant je lutte par vengeance, au nom de tous nos morts, de nos espoirs déçus, et parce que c’est à cause des fascistes si je suis aujourd’hui dans ce trou perdu et pas chez moi, à Barcelone. Ce n’est plus un combat politique, c’est une lutte pour l’humanité et contre la barbarie. Après, je ne sais pas. Cet irrésistible mouvement des masses qui devait tout emporter, pas vrai… Il n’a pas eu lieu, les égoïsmes petit-bourgeois ont rapidement pris le dessus. Peut-être pourrons-nous rentrer la tête haute, mais je crains que même si nous battons les Allemands, la situation politique après cette guerre ne corresponde pas à une victoire du prolétariat.
– La lutte contre la barbarie est malgré tout un combat politique. Mais que croyais-tu ? Vous les anarchistes, vous fondiez vos espérances sur ce que Marx appelle le
lumpenproletariat, des individus qui n’ont aucune conscience de classe et qui sont incapables de mener une lutte politique organisée.
Rappelle-toi tous ces crétins porteurs d’un brassard ou d’un calot FAI, qui faisaient régner la terreur en exécutant des prétendus espions, membres de la Cinquième Colonne, factieux ou je ne sais quoi encore ! Pour eux, la révolution consistait à s’emparer des biens des bourgeois pour leur propre usage. A Madrid, nous avons viré à coups de pied un groupe qui, après avoir expulsé les propriétaires, s’était installé dans un hôtel particulier du Paseo de la Castellana – ce qui était incroyable, c’est qu’ils avaient gardé le personnel et se faisaient servir !
Le
lumpen n’a que peu d’intérêt objectif à participer à une révolution et à changer l’ordre établi, il est souvent au final l’idiot utile de la bourgeoisie. Qui a porté Mussolini au pouvoir, qui a voté pour Hitler, qui s’est battu pour Franco ? Pas les possédants, pas les capitalistes, non ! Mais une petite bourgeoisie angoissée et un sous-prolétariat sans éducation qui a cru que tout allait changer pour lui. Ceux sont les cocus de l’histoire. T’es-tu demandé pourquoi l’anarchisme était aussi important en Espagne alors qu’il est marginal ou inexistant ailleurs ? Et demande-toi également quelle est l’autre spécificité espagnole… avec les courses de taureaux.
Il sourit et continua sans laisser le temps à Marcel de répondre : « La religion ! En Espagne existe un catholicisme de combat qui rejette bien sûr les autres églises, mais aussi le libéralisme, le progrès et jusqu’au contenu social des Évangiles. Tout s’est figé au XVe siècle avec l’expulsion des juifs et la prise de Grenade.
Or l’église espagnole refuse de voir qu’il existe depuis le XIIe siècle des mouvements chrétiens puissants qui aspirent à un monde différent. La Réforme protestante n’a fait que développer ces courants pour qui l’Eglise est l’Antéchrist et Rome la Grande Putain. Mais certains ne font pas que rejeter les institutions ecclésiastiques, ils rejettent aussi l’état et toute forme d’autorité constituée. Pour accéder à ce qu’ils appellent l’âge d’or, il faut procéder à une distribution des richesses et si nécessaire s’opposer aux pouvoirs en place.
Tu retrouves tout cela chez les italiens Dolcino et Savonarole, mais aussi chez les hussites et les anabaptistes de Munster où, disaient-ils,
« il n’y avait plus riches ni pauvres ». Les clochers furent rasés car ils n’étaient que des monuments d’orgueil dressés par l’Eglise. Tout cela doit te rappeler quelque chose, non ? Hé oui, la force de l’anarchisme ne s’explique en Espagne que par l’existence d’une église retardataire, arc-boutée sur son passé, mais dans le fond, vous autres libertaires n’êtes qu’une secte chrétienne, une hérésie héritière des mouvements dont je t’ai parlé ! »
Marcel resta un court moment silencieux avant de répondre.
– Belle démonstration historique, camarade commissaire politique ! Mais à propos du christianisme, as-tu pensé aux points communs entre le marxisme et la religion ?
Le regard surpris de Velasco incita Marcel à poursuivre.
– Je vois que non ! Eh bien, ce sont des structures identiques ! Je veux dire que dans les deux cas, il existe un paradis : le Ciel d’un côté, le Communisme de l’autre, un stade intermédiaire appelé purgatoire ou socialisme, et une abomination : l’Enfer, ou Capitalisme. Dans les deux cas, la bonne parole est portée par des croyants et des prêtres, que vous appelez l’avant-garde du prolétariat et les membres du parti. Ceux qui prônent un autre discours, une autre approche, sont traités d’hérétiques ou de déviationnistes – ils finissent sur un bûcher ou avec un piolet dans la tête. Et tout s’achève dans la résurrection pour les uns, la fin de l’histoire pour les autres.
Vous croyez tous deux dans un Bien supérieur à un Mal, Dieu et le Diable, les Prolétaires contre les Bourgeois et le communisme comme forme ultime de la lutte des classes.
Et puis Moscou n’est-elle pas la nouvelle Rome ? Tu vois que vous aussi vous êtes les héritiers de siècles de christianisme. Hé oui, nous ne pouvons pas y échapper, nous Espagnols encore moins que les autres.

Pinti, une lueur amusée dans les yeux, leva son verre : « ¡ Salud, y a la victoria ! Tu aurais mérité d’être communiste, camarade ! »
– Surtout pas, l’humour est soluble dans le centralisme démocratique, je préfère notre désordre.

Ils burent une gorgée.
– Revenons au présent. Sais-tu pourquoi le lieutenant veut nous voir ?
– Ce matin j’ai abattu un motorista de la 9e Panzer. Ils vont sans doute se déployer en face de nous et attaquer. Nous devons organiser la défense.

Velasco regarda autour de lui et fit la moue : « Ça va nous rappeler Madrid… »
– Sauf qu’il paraît que les chars ennemis seront plus gros !
– Sergent Pinti !
– Mon lieutenant.

De la Motte s’approcha, suivi de Martinez : « Que buvez-vous là ? »
Muntaner tendit la bouteille.
– Ah, l’alcool local, la… slivovitz. 80 degrés quand même ! Faites attention avec ça, j’ai entendu dire que ça pouvait rendre aveugle. Mais vous pouvez l’utiliser sans problème comme désinfectant.
Les deux sous-officiers, horrifiés, vidèrent sur le sol le contenu de leurs verres.
– Bonne idée. Bien, venez avec moi.
Ils se dirigèrent vers la tente de De la Motte, où attendaient trois autres sous-officiers.
– Nos ordres sont de sécuriser ces deux rues en V qui descendent vers le centre de la ville. Les autres compagnies opéreront dans les rues parallèles. J’ajoute que nous aurons le support d’une batterie anti-char de la 191e DIA. Je vous écoute. Vos suggestions ?
Martinez prit la parole : « Nous pourrions constituer une ligne de tranchées ou de trous individuels en avant des bâtiments et installer les armes automatiques aux étages des premières maisons. »
Les Espagnols se regardèrent quand le lieutenant se tourna vers eux : « Vous êtes d’accord ? »
La gêne était palpable. Un ancien lieutenant qui possédait un français acceptable parla au nom de tous : « Pourriez-vous nous accorder quelques minutes pour que nous puissions vous proposer un plan, mon lieutenant ? »
– Vous voulez dire que vous n’êtes pas d’accord avec le sergent ?

La réponse vint après une légère hésitation : « Si, mais peut-être pouvons-nous un peu améliorer son plan. »
Les cinq sous-officiers se penchèrent sur la carte et imaginèrent rapidement un plan radicalement différent de celui proposé quelques minutes plus tôt. Il était l’œuvre de Marcel et de Velasco, les seuls qui avaient une expérience des combats d’infanterie et de chars en zone urbaine. Le catalan ayant une prononciation plus proche du français, c’est Marcel qui fut chargé de l’exposer.
– Les Bochès sont plus nombreux que nous et ont une puissance de feu que nous n’avons pas. Avec une défense en ligne, ils vont nous submerger. Nous devons les attirer dans un combat de rue, où leur artillerie sera inutile sous peine de toucher leurs propres hommes et où leurs chars seront vulnérables.
– Et comment pensez-vous faire pour les attirer ?
grinça Martinez
– Ça, je m’en charge. Mais le plus important est de piéger les deux rues, une fois que les premiers blindés engagés et immobilisés dans une rue, nous ferons tout sauter pour surprendre les fantassins et pouvoir les achever.
– Et comment vous les immobilisez, les chars ?
lâcha sèchement Martinez
– Avec des bouteilles d’essence enflammées au niveau du moteur. Pas un tankiste n’a envie de mourir grillé.
– Admettons. Continuez, s’il vous plait, caporal,
enchaîna de la Motte.
– Les Allemands reviendront mais cette fois par l’autre rue, la seule praticable, et là toute la compagnie sera prête à les accueillir. Bien sûr, nous aurons tout piégé aussi, et chaque fois que nous abandonnerons une maison nous la ferons sauter, ça gênera leurs renforts. Il faudra percer les murs pour pouvoir passer d’un immeuble à l’autre sans se risquer à découvert.
Autre chose, les Chevrolet avec leurs canons antichars seront peu utiles en combat urbain, mais nous pourrions les utiliser comme des batteries mobiles. Ils utiliseront les rues transversales pour se déplacer.
Voilà, mon lieutenant, nous sommes quelques-uns à nous être battus à Madrid contre des forces plus nombreuses et mieux équipées et comme vous le savez, la ville n’est jamais tombée. Si vous êtes d’accord, il faudra le plus possible d’explosifs, des grenades supplémentaires et si possible quelques FM de plus. Pour la mise en place des explosifs, nous avons la chance d’avoir avec nous un spécialiste : Fosforito…
– Fosforito ? Qui est-ce ?
– Pardon, je voulais dire le légionnaire Ramirez. Il a une très grande expérience des bombes et en général de tout ce qui explose. Quant aux bouteilles d’essence, je m’en charge.
– Une double embuscade avec des explosifs ! C’est grandiose !
rugit De la Motte. Non, votre idée est grandiose. Envoyez-moi ce légionnaire…
– Mon lieutenant, vous n’allez pas suivre ces élucubrations, ces hommes sont des fous dangereux. Ils vont tous nous faire tuer !
intervint Martinez
– Non sergent, ce qui serait dangereux serait de continuer avec les mêmes idées qu’au printemps 40 ! La débâcle de l’an dernier ne vous a pas suffi ? En 1918, nos pères ont battu les Allemands avec des techniques nouvelles et des tactiques adaptées, pas en se faisant tuer comme en 14 ! Alors faites comme eux : reprenez-vous et adaptez-vous. D’ailleurs, l’adaptation est une des forces de la Légion. Tout ceci est remarquablement romanesque, Messieurs, à la fois romanesque et dramatique, il y a là quelque chose de russe ou bien… d’espagnol, évidemment ! Allez, nous allons apprendre à ces Messieurs d’Outre-Rhin que la force mécanique n’est pas tout !
………
“Chino” Farias Gomez n’avait rien d’un Asiatique et ne connaissait de l’Orient que l’hôtel du même nom, situé près des Ramblas. Il était né dans le célèbre Barrio Chino de Barcelone, quartier des bordels de luxe comme de la prostitution la plus sordide, où tous les vices pouvaient être satisfaits. Dans sa jeunesse, il avait appris qu’un bon coup de couteau se donnait de bas en haut et développé un don certain pour la “récupération” des biens d’autrui. Il avait ainsi plus souvent fréquenté les cellules des commissariats que les bancs de l’école. Lors d’un de ces séjours derrière les barreaux, il avait découvert la fraternité des communistes libertaires et était devenu un solidario. A présent, c’était un bon soldat, mais il n’avait jamais perdu ses habitudes d’avant la guerre civile.
– Nous aurions besoin d’essence et de bouteilles, tu penses pouvoir nous aider ?
– Des bouteilles de quoi ?
répondit-il en souriant
– Juste des bouteilles vides.
– Tu m’envoies faire les poubelles ?
– Mais non Chino, nous avons besoin d’une cinquantaine de bouteilles, et de l’essence pour les remplir !
– Tu ne veux rien de plus ?
– Si, des briquets ou des boites d’allumettes !

Un peu déçu – c’était gâcher son talent, Chino les salua d’un laconique « A tout à l’heure » et s’en alla.
Marcel et Pinti une fois seuls, Pinti reconnut : « Ça peut marcher, mais pas longtemps, ils finiront par nous tourner, tu le sais ? »
– Oui, bien sûr.
– Nous devons imaginer un autre plan pour la suite. Bon, pour le moment, comment penses-tu les attirer ?
– Un
paco, c’est un multiplicateur de force. Je vais abattre tout ce qui bouge à 300 mètres au-delà des premières maisons. Ce seront des piqûres de moustique, mais très agaçantes, au bout d’un moment, ils auront envie d’écraser l’insecte et ils bougeront !
………
Trois heures plus tard, une centaine de bouteilles étaient remplies d’essence. Ils avaient dû les vider du vin qu’elles contenaient, car Chino avait trouvé plus simple de les “emprunter” pleines et de les transporter en voiture.
– Comment voulais-tu que je fasse, tu me demandes cinquante bouteilles, je t’en apporte cent et maintenant tu te plains car elles sont pleines ! Et en plus il fallait les porter, alors quand j’ai vu cette voiture sans personne au volant, j’ai su qu’elle n’attendait que moi. Nous pourrions peut-être la garder, non ?
A la demande de Marcel, il était reparti avec “sa” voiture, afin de voir si quelques étourdis n’avaient pas laissé traîner des mitrailleuses ou des lance-grenades. Pendant ce temps, les passages entre les maisons étaient presque terminés et la majorité des escaliers défoncés. Fosforito quant à lui vivait un rêve éveillé : piéger deux rues avec des détonateurs et des cordeaux Bickford ! En plus, c’était du vrai matériel d’artificier, made in USA, bien mieux que les explosifs artisanaux de la bataille de Madrid !
La petite ville vibrait d’activité, les légionnaires savaient que la lutte allait être rude. Le lieutenant était revenu de sa visite au capitaine Trécesson avec la promesse de disposer de deux Chevrolets antichars armés de canons de 47 mm. Il avait pu obtenir près de deux cents mines, que les hommes s’empressèrent de disposer aux limites du périmètre de défense, laissant deux zones moins denses dans l’axe des rues. Il restait à assigner à chacun son poste de combat et sa zone de repli, à distribuer les bouteilles d’essence et à nommer un responsable pour chaque détonateur. Ils étaient presque prêts.
Martinez, qui connaissait quand même son métier, avait envoyé un homme surveiller les agissements des Allemands. Des accrochages se produisaient entre troupes motorisées, on entendait le canon et des colonnes de fumée noire s’élevaient dans les collines. Quelques véhicules blindés français en mauvais état se trainèrent jusque dans la ville. Il était clair maintenant que les panzers arrivaient par la route de l’ouest comme par celle du nord-est, demain ils lanceraient une attaque en pince sur la ville.
Fosforito s’approcha de Marcel : « Caporal, j’ai terminé de piéger les rues et les maisons. Et j’ai une idée pour détruire les chars. Tu sais, cet explosif américain est très stable, tu peux le manipuler sans qu’il explose, pas comme celui qu’on avait chez nous ! Si nous arrivons à nous approcher d’un char, une musette pleine de ce truc au contact du moteur ou dans les chenilles, ça devrait lui faire mal ! »
– Et comment fais-tu pour le faire exploser ?
– Une mèche lente. Tu enflammes, tu as le temps de te mettre à l’abri et boum. Je couperai et j’installerai les mèches moi-même. A Madrid, j’ai vu une chenillette italienne retournée par le souffle d’une charge de dynamite. Les fascistes doivent être encore à l’intérieur.
– D’accord, cela me parait une bonne idée. Il t’en reste beaucoup ?
– Pas mal.
– Alors double la dose. Je crains que les chars allemands soient plus gros que les chenillettes italiennes !

Il donna une tape sur l’épaule de l’artificier et s’éloigna en direction des limites de la ville. Il fallait que les Allemands acceptent de passer là où ils les attendaient. Quelques instants plus tard, il revint sur ses pas et rechercha son officier.
– Mon lieutenant ?
De la Motte leva les yeux de son bureau : « Oui Muntaner, vous avez oublié quelque chose ? »
– Je voulais vous demander de… enfin… Laissez-moi vous raconter une histoire.
– Vite, alors.
– Je suis un bon tireur, un très bon tireur. En Espagne j’étais un tireur d’élite, un
paco.
– Un paco ?
– Oui, lors de la guerre du Rif, les Maures avaient souvent recours à des tireurs isolés qui harcelaient les troupes espagnoles. Comme le relief est montagneux là-bas, on entendait la détonation, pa ! Puis l’écho, qui transformait peu à peu le son en o, paco.
– Diable, quelle imagination vous avez, en Espagne !
– Tout seul, ou avec un autre tireur ou un observateur, le paco choisit une position avec un bon angle de tir et abat les soldats ennemis un à un, en préférant les officiers. C’est nerveusement très éprouvant pour les gars d’en face. A la fin de la guerre, je dirigeais un groupe de huit tireurs.
– Je sais ce qu’un bon tireur peut faire, mon père a fait l’Autre Guerre, et dans les tranchées, il y avait des tireurs qui attendaient toute la journée qu’un type d’en face sorte la tête… Mais où voulez-vous en venir, caporal ?
– Demain, laissez-moi opérer seul. J’ai trouvé une bonne position de tir. Si j’abats quelques chefs de char ou officiers trop confiants, que croyez-vous que feront leurs camarades ?
– Les Italiens reculeraient de cinq cents mètres, mais les Allemands voudront nous tomber dessus pour les venger et… ils fonceront dans notre piège. Muntaner, vous êtes diabolique, un ange exterminateur. Demain, ce sera grandiose !

Il s’était levé : « Vous êtes vraiment un si bon tireur ? »
– En 1936, je plaçais en moins d’une minute un chargeur complet dans une feuille de cahier à deux cents mètres. Après, j’ai cessé d’embêter les cahiers et je me suis contenté des fascistes. Peu de ceux que j’ai visés sont là pour dire que j’ai raté mon tir. En général, je vise la tête, mais si la distance est grande ou le tir difficile, la poitrine.
– Bien… Je comprends mieux maintenant pour le motoriste, comme vous dites. Parfait, finissez vos préparatifs, nous ferons un dernier point plus tard. Prévoyez des tours de garde par binômes pour cette nuit.

Le caporal salua. En s’éloignant, il ne put s’empêcher de penser : « Grandiose ! Grandiose, qu’il dit ! C’est un bon officier mais il est fou, complètement fou. »
A présent, il devait préparer son poste de tir, ses voies de repli, graisser son vieux Lebel et le Mas 36 sur lequel il avait adapté une lunette. Pas très réglementaire, mais il avait dû abandonner à la frontière franco-espagnole le Mosin-Nagant avec lequel il avait fait la plus grande partie de la guerre. Demain la journée serait longue.
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Etienne



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MessagePosté le: Mar Avr 30, 2019 09:14    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Ceux sont les cocus de l’histoire.


Ce ou ceux-là?
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raven 03



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MessagePosté le: Mar Avr 30, 2019 09:14    Sujet du message: Répondre en citant

joli , ça change de certaines derives

une petite coquiille ligne 32 " ceux" sont les cocus de l'histoire ... ("ce sont..".)

j'aime bien l'invention de la "gammon grenade " sans les boulons et autre farce metalique

ah oui ....je crois que c'est sliBovitz et non sliVovitz .....???? quoique...ça doit dependre de la prononciation en patois local...???

mais effectivement ça fait des trous dans un estomac non blindé et c'est nickel comme decapant/desinfectant ou pour decimer une panzer-division.....!!!!
je me demande quand meme si il y a de la pomme dedans ????

bonne semaine
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Casus Frankie
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MessagePosté le: Mar Avr 30, 2019 09:33    Sujet du message: Répondre en citant

Désolé pour la coquille.

Et pour Slibo ou Slivo, de toute façon, pour un Espagnol, ça se prononce pareil Wink

Ah, Dronne nous signale que c'est le Lebel qui porte une lunette, pas le MAS 36. Je le laisserai donner les précisions techniques s'il le souhaite.

PS - En écrivant ces lignes, j'écoute d'une oreille une émission de radio où intervient une dame qui s'appelle… De la Motte. Une parente, peut-être ! Wink
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Casus Frankie

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